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mardi 10 décembre 2019

La Turquie se dit prête à envoyer des troupes aux côtés de la Libye

Erdogan entend faire mieux que l'OTAN 

Un accord bilatéral "de coopération militaire et sécuritaire" a été signé le 27 novembre entre la Libye et la Turquie

Alors que des opérations sont conduites en Libye par l'OTAN dans le cadre de l'opération 'Unified Protector', le président Recep Tayyip Erdogan et Fayez al-Sarraj ont signé un accord bilatéral "de coopération militaire et sécuritaire"le 27 novembre, lors d'une rencontre à Istanbul entre les deux hommes.
La résolution 1970 du 26 février 2011 de l'ONU, exécutée sous le nom de code américain Unified Protector, met en place un embargo sur les armes à destination de la Libye et bloque entre autres les avoirs du régime en place, tandis que la résolution 1973 instaure une zone d'exclusion aérienne au-dessus du territoire de la Jamahiriya arabe libyenne (ex-République arabe libyenne) et permet de "prendre toutes les mesures jugées nécessaires pour protéger les populations civiles".
Et Erdogan a affirmé ce mardi que la Turquie est prête à assumer ce rôle de protection des populations en envoyant des troupes en Libye pour soutenir le Gouvernement libyen d'union nationale (GNA) de al-Sarraj, aux termes d'un récent accord signé entre les deux parties. "Si la Libye formule une telle demande nous pourrons envoyer nos personnels (militaires), surtout que nous avons conclu un accord militaire", a déclaré Erdogan.

Selon Ankara, ce protocole "est une version plus large" d'un accord-cadre de coopération militaire existant" entre les deux parties et "renforce les liens entre" les deux armées. Fayez al-Sarraj, qui a accédé au pouvoir à la faveur des accords internationaux de paix de 2015, entre les représentants du Congrès général national et ceux de la Chambre des représentants, est notamment soutenu par la Turquie et le Qatar, mais aussi par les Etats-Unis, l'Allemagne, le Royaume-Uni et la France. L'Italie, ancienne puissance coloniale en Libye, semble aussi en sa faveur.
Le gouvernement al-Sarraj est actuellement basé à Tunis, mais le gouvernement de Tripoli rejette la déclaration d'entrée en fonction de ce gouvernement d'union. Deux gouvernements rivaux s'opposent donc: celui de la Chambre des représentants issu des élections législatives, à Tobrouk, puis Benghazi, présidé par Aguila Salah Issa, et celui du Congrès général national, présidé, à Tripoli, par Nouri Bousahmein jusqu'en 2016, car dominé par les islamistes et battus aux élections. Depuis avril 2016, avec Aguila Salah Issa, il est visé par des sanctions de l'Union européenne.
Une compagnie de sécurité russe assure un soutien potentiel.
Le rival d'al-Sarraj, Khalifa Haftar, militaire formé à Moscou et homme fort de l'est libyen, dont les forces ont lancé en avril une offensive contre la capitale Tripoli, bénéficie de son côté du soutien de l'Egypte et des Emirats arabes unis et d'un appui, au moins politique, notamment des Etats-Unis et de la Russie. La France a été accusée de le privilégier, ce dont elle se défend. Le 4 avril 2019, le maréchal Haftar, entouré de ses fils, a en effet lancé un appel à marcher sur Tripoli.

Erdogan a affirmé ce mardi que les forces de Haftar bénéficient aussi "du soutien d'une compagnie de sécurité russe dénommée Wagner. "Cette compagnie a envoyé des personnels sur place", a-t-il ajouté. Erdogan semble ainsi accorder du crédit à des informations de presse, démenties par Moscou, sur la présence de mercenaires russes en Libye.
Début novembre, le journal américain New York Times avait d'ailleurs fait état du déploiement en Libye de près de 200 mercenaires du groupe Wagner, entreprise russe de sécurité privée.

La Grèce appelle à condamner l'accord

Outre l'accord militaire, la Turquie et le GNA avaient conclu le 27 novembre un accord de délimitation maritime qui permet à Ankara de faire valoir des droits sur de vastes zones en Méditerranée orientale convoitées par d'autres pays, notamment par la Grèce.
Erdogan avait indiqué lundi soir qu'à la faveur de cet accord, la Turquie et la Libye pourraient mener des activités d'exploration conjointes au large de Chypre, dans une zone qui recèle d'importants gisements de gaz.

De son côté, la Grèce appelle les Nations unies à condamner cet accord maritime entre la Turquie et la Libye.
Elle le qualifie de "perturbateur" pour la paix et la stabilité en Méditerranée orientale, a déclaré le porte-parole du gouvernement. Athènes "veut que l'accord soit porté à l'attention du Conseil de sécurité de l'ONU afin qu'il puisse être condamné", a ajouté Stelios Petsas devant la presse.
Le gouvernement de Kyriakos Mitsotakis a envoyé des lettres séparées, soulevant la question auprès du secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres et du Conseil de sécurité de l'ONU, a précisé Stelios Petsas.

Cet accord, qui délimite des frontières maritimes entre les deux pays, "ignore la présence des îles grecques dans cette zone maritime, y compris l'île de Crète, et viole leur droit à créer des zones maritimes comme n'importe quel territoire terrestre", écrit l'ambassadrice grecque aux Nations unies, Maria Theofili, dans une lettre au secrétaire général de l'ONU.
"La Turquie et la Libye n'ont ni zones maritimes superposées, ni frontières communes et, par conséquent, il n'y a aucune base juridique pour conclure légalement un accord de délimitation maritime", peut-on encore lire dans ce courrier daté de lundi. Il a été conclu "de mauvaise foi", selon le porte-parole grec, et demeure "invalide car il n'a pas été approuvé par le Parlement libyen", contrôlé par une faction rivale du gouvernement de Tripoli.
Depuis sa signature, la Grèce condamne vivement cet accord, le qualifiant vendredi de "violation du droit maritime international et des droits souverains de la Grèce et d'autres pays". Elle a annoncé l'expulsion de l'ambassadeur libyen à Athènes. 

Le président turc Recep Tayyip Erdogan campe sur ses positions, annonçant lundi qu'il envisage "des activités d'exploration conjointes", avec la Libye, au large de Chypre, dans une zone qui recèle d'importants gisements de gaz. "Avec cet accord, nous avons augmenté au maximum le territoire sur lequel nous avons autorité. Nous pouvons mener des activités d'exploration conjointes", a déclaré Erdogan lors d'un entretien avec la télévision publique TRT. 

Le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis estime que l'accord "a déjà entraîné l'isolement diplomatique de la Turquie". Il a été "dénoncé par les Etats-Unis, l'Union européenne, l'Egypte et Israël", avait-il dit devant le Parlement grec. Le chef du gouvernement grec doit rencontrer ce mardi après-midi l'ambassadeur des Etats-Unis à Athènes, Geoffrey Pyatt, avant sa visite à la Maison Blanche, le 7 janvier.
La Turquie a fait du "chantage" à la Libye pour signer cet accord", assure son ministre des Affaires étrangères, Nikos Dendias, en contact avec ses partenaires européens et avec l'Egypte. Sur la chaîne de télévision privée grecque ANT1, il a jugé que l'entente turco-libyenne est "clairement" liée aux revers subis par le gouvernement de Tripoli face au maréchal Khalifa Haftar, l'homme fort de l'Est libyen.

Le président du Parlement libyen, Aguila Saleh Issa, allié du maréchal Haftar, qui s'est déclaré "contre cet accord", selon Athènes, est attendu cette semaine à Athènes. Porte d'entrée de milliers de demandeurs d'asile, la Grèce, membre de l'OTAN comme la Turquie, maintient des relations délicates avec sa voisine d'où les migrants arrivent de plus en plus nombreux sur les îles grecques depuis cet été.

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