Le président se tient en retrait et se tait, mais est visé
La colère populaire s'étend : sera-t-il emporté ?
(Pour cet article, le compteur est bloqué: vous n'y pouvez rien, moi non plus. Alors qui ?)
Les conducteurs des lignes 5 et 7 du métro parisien, déterminés, ont déjà reconduit l'arrêt du travail jusqu'à jeudi inclus. Ils savent qu'ils n'ont rien à attendre des annonces du gouvernement mercredi 11, alors que les discussions sur le rapport Delevoye remis le 19 juillet ne cessent d'aggraver la situation, alimentant les angoisses des Français depuis six longs mois. Le Point et Capital insistent, maladroitement au final, sur "près de 50 réunions" que Jean-Paul Delevoye a eu avec les partenaires sociaux depuis juillet. Situation ubuesque provoquée par Macron, un apprenti stratège de la politique imbu de sa personne.
Dans cette assemblée générale de grévistes de la RATP, on commence par se compter. Pas besoin d'Occurrence, cabinet d'étude et de conseil en communication, ni d'aucun expert... "Un", crie un premier conducteur de métro au fond de la salle. "Deux", "trois", "quatre", enchaînent les autres, dans les coulisses de la station Porte de la Villette, sur la ligne 7… En quelques instants, on arrive au nombre significatif de 74 personnes : jeudi, il n’y avait que trente présents. Ce lundi, des chauffeurs des lignes 5 et 7 bis ont rejoint ceux de la 7 dans ce point fort de la contestation contre le projet de réforme des retraites qui menace le régime spécial des salariés de la régie des transports franciliens, sans proposition d'alternative acceptable.
La grève ne fait que commencer
Cette forme de convergence consacre l’unité des conducteurs dans le combat et l’élargissement du conflit. Un délégué UNSA (syndicat majoritaire à la RATP) de la 5, Bastien, est le premier à prendre la parole : "Le projet de réforme est toujours là. On continue la grève, on durcit le mouvement. On n’a pas le choix. C’est nous le terrain, c’est nous qui décidons ! Mercredi, après les annonces, il faudra refermer la porte tout de suite."
Le premier sinistre, Edouard Philippe, va enfin faire l'annonce du détail de son projet en milieu de semaine. L'exécutif a tardé à accoucher de ses mesures et il est peut-être trop tard. Les grévistes anticipent un "enfumage" et ne veulent pas de "miettes" qu’on leur jetterait. La position est unanime, formulée sous les applaudissements, par Kader : c’est "le retrait de la réforme ou la grève jusque-là". En fin de réunion, la grève sera reconduite jusqu’à jeudi inclus, par un vote à l’unanimité. Une nouvelle AG est programmée ce jour-là. Dans la salle, ils sont tous résolus à faire durer l’arrêt du travail toute la semaine.
"C’est l’une des premières fois qu’on est plus nombreux au quatrième jour qu’au premier, souligne Kader, qui explique : "Je suis content qu’il y ait autant de monde. Il faut rester soudés. C’est aujourd’hui que la vraie grève commence." Tous savent que, la semaine dernière, les rames étaient vides parce que les voyageurs avaient pris leurs dispositions. Ce lundi matin, c’était autre chose dans les stations, avec des métros saturés, des quais remplis jusqu’aux escaliers, des bousculades, parfois des disputes entre usagers, racontent les présents, relayés par la presse détenue par les hommes d'affaires proches du pouvoir.
Des grévistes de la RATP ont tenu des piquets de grève dès 6 heures en station, d’autres ont bloqué les tramways au départ de la ligne 1 à Bobigny (Seine-Saint-Denis).
Des directions syndicales suspectées
Des salariés prennent le micro pour dire tout le mal qu’ils pensent des leaders syndicaux, "les Martinez (CGT), Escure (UNSA, syndicat majoritaire) et compagnie", comme dit Youssef, un meneur : "Ils sont dans une logique de négociation, explique-t-il. On les laisse faire ou on s’organise nous-mêmes ? On doit faire remonter nos revendications au sommet." Elles tiennent en un mot, prononcé par la plupart : "retrait".
Walid, qui se présente comme "frondeur" au sein de la CGT, suggère la mise en place d’un "comité de grève" et de "représentants" du nord-est du réseau, pour se mettre en lien avec "les autres secteurs". La proposition n’est pas, pour l'heure, adoptée.
L’objectif est clair : déborder les directions syndicales. "Les hautes sphères ne nous représentent pas", argumente Walid. A voir cette réunion particulière, la base, encouragée par le succès national de la mobilisation de jeudi, est remontée comme un ressort. La dynamique est lancée, fait d'ailleurs valoir Manu, l’une des rares femmes de l’assemblée, représentante de Solidaires, c'est-à-dire révolutionnaire trotskiste de SUD: "On est sur la bonne voie, on va réussir à faire fermer cette putain de ligne à la fin." La 7 circule encore un peu aux heures de pointe, en effet. La direction de l’entreprise a concentré des ressources sur cet axe de trafic important. A la SNCF, Lla direction a "formé" en quelques heures des cadres volontaires pour occuper les postes des grévistes.
La presse citant Kaled, Youssef ou Walid suggère-t-elle que les employés issus de l'immigration sont les plus radicaux ?
Faut-il comprendre qu'ils seraient des bras armés de l'islamisme en France ?
Libération observe un certain Laurent, conducteur sur la ligne 7 bis, qui arbore à son pull, un badge "la Base", groupe RATP, qui évoque la Centrale des syndicats démocratiques (CSD), la plus petite des centrales syndicales québécoises et appartient aux travailleuses et travailleurs majoritaires de la base.
C'est un petit syndicat créé il y a un an en France dans la RATP sur des principes de démocratie participative. Il tient le même discours, appelant ses collègues à "prendre le contrôle de cette grève". "Macron, on va le mettre à genoux, promet-il. Vive la lutte !" Il s'oppose aux syndicats réformistes: outre la CFE-CGC (cadres) et la CFTC, en retrait dans l'entreprise, l'UNSA, dominante à la RATP et la CFDT de Laurent Berger, ex- secrétaire général de la JOC (1992 et 1994)
Ils dénoncent la désinformation par les media: les employers de la RATP s'élèvent contre leur discrimination, pointant leur stigmatisation des régimes spéciaux ou leur discrimination de leur métier, alors que la réforme des retraites "concerne tout le monde".
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