POUR

LA &nbsp LIBERTE &nbsp D' EXPRESSION

Free speech offers latitude but not necessarily license

jeudi 19 décembre 2019

Retraites : le simulateur du gouvernement, un foutage de gueule

Le simulateur des pensions promis par Macron  est enfin sorti, mais ne répond pas aux besoins

Ce simulateur vanté par la clique au pouvoir n'est pas fiable


Le gouvernement a mis en ligne une première version du simulateur du calcul de la retraite, jeudi 19 décembre, mais l'annonce est une intox et le machin, une supercherie renvoyant aux micro-ordinateurs des années 80...

Sitôt nommé, sitôt déconsidéré ! Pour défendre le futur système universel, Pietraszewski est venu présenter ce nouvel outil miracle censé permettre aux Français de voir plus clair dans le flou du projet et surtout dans ce que pourrait être le montant de sa retraite. Par a+b, il allait les convaincre que ce projet allait les convaincre qu'ils seraient gagnants, comme promis par Macron, expert en carabistouilles

Sur son site internet, l'exécutif ne fait en vérité que proposer une trentaine de cas types. Or, pour Dominique Prévert, expert des retraites, ces exemples  - au nombre de 36, moins que les régimes spéciaux (42) - ne valent pas grand-chose, car un seul paramètre suffit pour changer la totalité d'un résultat.

Le gouvernement reconnaît des approximations...

Le gouvernement a mis en ligne, jeudi 19 décembre, un \"simulateur\" pour défendre sa réforme des retraites.Ces estimations officielles ne prennent pas en compte certains critères pourtant essentiels. Pourtant, Dominique Prévert, expert Optimaretraite, assure que ces cas ont été bien choisis par le gouvernement. 

L'exécutif promet que de nouveaux cas types seront publiés en janvier prochain. Mais, "en même temps", le gouvernement reconnaît que, pour l'heure, ces simulations sont une première approche : il s'entête ainsi à présenter des outils inutiles. "Un cas type, ça reste un profil; on ne compte pas toute la carrière", admet Laurent Pietraszewski, nouveau secrétaire d'Etat chargé des retraites.
Résultat de recherche d'images pour "simulateur de retraites"100 autres cas en ligne fin janvier : que faut-il en attendre ?
Élaborés dans l'urgence, 36 cas-types fournis et calculés par le gouvernement font apparaître que 26 cas seraient gagnants, six perdants et quatre situations ne changeraient pas. 
L'arnaque de cette opération de com', c'est que certains critères ne sont pas pris en compte, comme le nombre d'enfants, la pénibilité, les interruptions de carrière ou l'âge pivot à 64 ans
Une centaine d'autres cas types devraient être mis en ligne d'ici la fin du mois de janvier. Sachant qu'il est déjà compliqué de se situer parmi les 36 premiers cas, nous y retrouverons-nous mieux au milieu de 136 ?

La macronie, l'exécutif, ses députés et sa presse, avaient dénigré les simulateurs en ligne
 

Pouvait-on parler d'une plus grande infox des syndicats?
Alors que l'anxiété populaire monté face au projet de réforme des retraites du gouvernement, plusieurs simulateurs en ligne ont vu le jour à l’initiative notamment de l’Ugict-CGT et du SNES-FSU (syndicat national des enseignements de second degré). Aux salariés des secteurs concernés et dont ils connaissent bien les évolutions de carrières,  ils proposent de calculer par anticipation leurs futures pensions si le contenu du rapport Delevoye vient à passer. Sur la base de données gouvernementales floues, les résultats prêtaient le flanc à la critique - tout en donnant un aperçu de l'extrême incertitude de l'issue vers laquelle l'Elysée entraîne la populationLa bouteille à l'encre dans laquelle le petit génie de la rhétorique l'a plongée a évidemment suscité la peur du noir, mais aussi la colère à l'affichage de pensions de retraites en baisse, quand Macron les promettait plus belles et équitables. 

La réplique est d’abord venue dès le 1er juillet 2019 avec le lancement d’un calculateur en ligne disponible sur le site reforme-retraite.info par l’Ugict-CGT (représentant les cadres, ingénieurs et techniciens). Son ambition : proposer un comparatif aux salariés concernés entre les niveaux de salaire et de pension moyens d’aujourd’hui et ceux qui découleraient prochainement si la réforme Delevoye s’imposait comme le nouveau cadre de référence. Co-secrétaire du dit syndicat, Sophie Binet est claire, sans rhétorique, sur la démarche adoptée : "Pour nous, le débat aujourd’hui est occulté. Le gouvernement refuse de donner des éléments concrets sur la réforme. Comme il sait que le sujet est inflammable, il donne le moins d’informations possibles pour éviter toute mobilisation. Il refuse de répondre aux questions que se posent tous les salariés : à quel âge pourrai-je partir ? Avec quel niveau de pension ? Il martèle qu’un euro cotisé doit apporter les mêmes droits à la retraite mais encore faut-il savoir quels sont ces droits ! ".

On retrouve un son de cloche similaire chez les syndicalistes enseignants du SNES-FSU. En novembre, ces co-gestionnaires de l'Education nationale ont à leur tour mis en ligne un simulateur pour sensibiliser le corps enseignant sur les menaces sournoises dissimulées dans le rapport Delevoye. L’algorithme du site calcule ensuite ce qu'est la retraite dans le système actuel et ce qu’elle pourrait devenir si le système à points évoqué par le gouvernement est adopté. Le montant final est un cauchemar. Pour un professeur ayant débuté sa carrière en 1990 et qui effectuerait 42 ans de carrière, la pension serait de 2.677 euros avant la réforme, et de 1.831 euros ensuite, soit une perte mensuelle de 846 euros. L'info s’est viralisée sur les réseaux sociaux. Secrétaire général adjoint du syndicat, Xavier Marand le note : "Nos utilisateurs ont été abasourdis par la faiblesse des pensions".

Nul ne peut dire si Macron a délibérément mené une tactique de désinformation ou si l'apprenti-sorcier a voulu réformer coûte que coûte, sans considération des dégâts occasionnés, en agitant le leurre d'un régime universel qu'il a déjà consacré en cédant aux militaires et policiers, à charge pour ses successeurs de redresser la situation qu'il laissera.

Clique ta retraite et prend une claque ! 
Les élus d’opposition n'ont pas pris le danger à la légère. Le 3 décembre, le député de la France Insoumise, François Ruffin exhume avec à propos une déclaration de François Fillon en mars 2016: "Le système par point, en réalité, ça permet une chose, qu’aucun homme politique n’avoue. Ça permet de baisser chaque année le montant des points, la valeur des points, et donc de diminuer le niveau des pensions." Autant d’arguments qui s’échangent à la vitesse de l’éclair sur les réseaux sociaux et tendent à faire progressivement glisser l’opinion publique dans le rejet, particulièrement les indécis et/ou ceux qui ont du mal à comprendre la finalité exacte du projet ou qui se sentent déjà fragilisés.

Démasqué par ces comparateurs en ligne convergents, le gouvernement morigène. 
Le ministre de l’Education nationale, Jean-Michel Blanquer s’indigne : "C’est totalement faux. Ces simulateurs n’ont aucun fondement: ils simulent des choses qui ne sont pas encore décidées" !. Du côté de Matignon, c’est le même embarras: "Ces simulateurs, c’est n’importe quoi, tous les paramètres ne sont pas connus. Or, il y a un engagement politique ferme. Il y aura des revalorisations de salaires. Nous devons combattre les 'fake news' ". Quand on est piégé, on lance des 'ce n'est pas le sujet', "vous ne savez pas de quoi vous parlez" ou des 'pas d'amalgames!'.  

Les simulateurs des syndicaux étaient taxés de partialité. Sophie Binet réplique: "Nous nous basons sur le simulateur du Conseil d’orientation des retraites qui est loin d’être une institution partisane. Et puis, si le gouvernement n’est pas d’accord avec nos simulations, qu’il nous propose les siennes. Nous n’attendons que cela ! En fait, aujourd’hui tout le monde reconnaît que sans financement supplémentaire, les pensions vont baisser. Simplement le gouvernement refuse d’en débattre". 

Thomas Piketty démonte le projet Macron, mais fait des propositions 
Cet économiste explique ainsi que le principe "un euro cotisé donne droit à un euro de retraite" n’est en rien équitable, et pointe le faible taux de cotisation des hauts salaires. "Ce sujet des retraites illustre le fait qu’il y a toujours des alternatives. Il y a en effet plein de façons de faire un régime universel, car une fois qu’on a dit qu’on veut faire les mêmes règles pour tout le monde, en fait on n’a rien dit. Quelles sont ces règles communes ? Au départ, le gouvernement actuel s’est abrité derrière un principe de justice qu’il voulait infaillible : c’était le "un euro cotisé donne droit à un euro de retraite", quel que soit le régime et quel que soit le niveau de salaire. Sauf que ce soi-disant principe de justice revient à sacraliser les inégalités salariales telles qu’elles existent dans la vie active et à les reproduire à l’identique pendant toute la période de retraite et jusqu’à l’âge de la grande dépendance, où chacun doit essayer de trouver une solution pour finir sa vie. 
Résultat de recherche d'images pour "simulateur de retraites""Si on appliquait de manière absolue ce "un euro de retraite pour un euro cotisé", quelles que soient les disparités salariales entre quelqu’un qui a une carrière émiettée et les rémunérations les plus hautes, ce serait vraiment marche ou crève à la retraite jusqu’à la mort. Le gouvernement prétend y rajouter de la solidarité en y consacrant un quart du budget, comme dans le régime précédent. Sauf que ce chiffre magique, comme tous les chiffres, est une construction qui, en l’occurrence, est particulièrement bancale. Ce chiffre ne prend pas en compte les inégalités sociales d’espérance de vie. C’est-à-dire que pour un salarié modeste qui ne pourra profiter que dix ans de sa retraite, une bonne part de ses cotisations vont servir à payer la super-retraite d’un cadre pendant vingt ans. Ce transfert de solidarité n’est pas comptabilisé comme tel. Alors oui, il y a des bonifications pour les interruptions de carrière et un petit geste sur la retraite minimale à 85 % du smic, mais ce n’est pas à la hauteur. 

"Dans cette réforme, on a par ailleurs très peu parlé du système de financement qui est derrière. Un truc énorme, c’est que le gouvernement propose un taux global de cotisation de 28 % jusqu’à 120.000 euros de salaire annuel, mais ensuite ça plonge d’un seul coup à 2,8 % ! Par rapport au système actuel, c’est une énorme baisse de cotisation pour les salaires entre 120.000 et 250.000 euros. C’est le nouveau "super Macron des riches". On en a très peu parlé pour l’instant mais je pense que lorsqu’on va entrer dans les détails de la réforme et que le truc va sortir, ça va être ingérable. Il faut vraiment que le gouvernement trouve quelque chose pour faire contribuer davantage les salaires les plus élevés.

"A mon sens, le débat public s’est pour l’instant trop focalisé sur : universel ou pas universel. Or, on voit bien que derrière, il y a de vrais sujets politiques à côté desquels il ne faut pas passer. Un système universel, pour des gens qui auront cotisé dans le privé, dans le public et comme auto-entrepreneur, en France et à l’étranger, c’est évidemment une bonne chose. Mais au-delà du slogan, ça mérite un grand débat citoyen. D’autant qu’on a un gouvernement qui a un sérieux problème avec les notions de justice sociale et de répartition, et qui a quand même un lourd passif en termes de fric dépensé en début de mandat pour servir les 1 % les plus riches. Entre la suppression de l’ISF et l’instauration de la flat tax sur les dividendes et les intérêts, ça fait quand même six milliards par an de perdus, trente milliards sur le quinquennat ! Difficile après d’être crédible quand on parle de justice sociale."


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Vous pouvez ENTRER un COMMENTAIRE (il sera modéré):