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mardi 24 décembre 2019

Livret A : Macron va-t-il bientôt le laisser tomber à 0,5% ?

La rémunération du livret d'épargne populaire risque de tomber à 0,5% dès février 2020

A partir du 1er février, la mise en oeuvre d'un nouveau mode de calcul de fixation du taux de rémunération pourrait chuter le Livret A à 0,5%.

55 millions, c’est le nombre de victimes annoncées parmi les détenteurs d'un Livret A, l’un des placements préférés des Français. Malgré les aléas, son succès ne se dément pas, avec une collecte nette de 13,63 milliards d’euros entre janvier et octobre 2019, selon les dernières données de la Caisse des dépôts : plus l'avenir est incertain, plus les Français mettent de côté. Au total, l’encours du Livret A s’élève à 297,4 milliards d’euros, c'est 6% de plus qu'il y a un an à la même époque, avant que n'éclate la crise sociale en novembre 2018.
Les encours gonflent à 408,2 milliards d'euros (+5,7% sur un an) si on ajoute le Livret de développement durable et solidaire (LDDS), un indicateur du niveau en hausse de l'anxiété sociale. Pourtant, ces produits d’épargne ne rémunèrent qu’à 0,75% actuellement, contre 1,83% en moyenne pour le fonds en euros de l’assurance vie, par exemple, mais les petits épargnants ne savent plus comment se protéger des jours mauvais. Les plus précaires n'ont plus les moyens de prévenir le malheur.

Et le temps "heureux" du taux du Livret A à 0,75% - gelé à ce niveau depuis août 2015 - sera bientôt révolue. A partir du 1er février 2020, en effet, une nouvelle formule sera appliquée pour fixer la rémunération de ce produit. Jusqu’ici, pour déterminer son rendement, on retenait la valeur la plus élevée entre, d’un côté, l’inflation des douze derniers mois et, de l’autre côté, la moyenne de l’inflation avec la moyenne mensuelle des taux interbancaires à court terme (Eonia) et Euribor 3 mois. Le tout étant ensuite majoré de 0,25 point. 

L'exécutif dégage sa responsabilité

Perte de la garantie d'un taux supérieur à l’inflation.
Bien que compliquée, la formule ancienne avait l’avantage d’assurer les épargnants d’une rémunération supérieure à l’inflation. A partir du 1er février 2020, le rendement du Livret A correspondra à la moyenne sur 6 mois du taux d’inflation et des taux interbancaires à court terme (Eonia), avec un arrondi au dixième de point le plus proche. Contrairement à l’ancienne formule, "il n’y a plus de garantie d’avoir un taux supérieur à l’inflation avec ce nouveau mode de calcul", analyse Philippe Crevel, directeur du Cercle de l’Epargne.
Au moment où Macron nous promet un système à points, équitable et sûr, de calcul du montant de nos pensions de retraite à venir, l'exemple du calcul du taux du Livret A nous appelle à la prudence en matière d'épargne. 

Par ailleurs, pour tout de même apporter une petite protection aux particuliers disposant d’un Livret A, Bercy a fixé souverainement le taux de rémunération plancher à 0,5%. Autrement dit, à partir du 1er février 2020, le rendement du Livret A ne pourra jamais être inférieur à 0,5%. Si Bercy peut jouer tranquillement avec les taux du Livret A, quelles garanties avons-nous alors que de futurs gouvernements ne vont pas mettre nos retraités au pain sec.

Le problème, c'est que les taux d’intérêt négatifs (-0,46% pour l’Eonia) vont plomber la rémunération du Livret A. 
Et puis, si dans les mois à venir, le ralentissement de l’inflation continue au rythme actuel (elle est passée de +1,6% en décembre 2018 à +1% en novembre 2019), "on risque d’avoisiner un taux de 0,6% ou 0,5% pour le Livret A début 2020", indique Philippe Crevel, spécialiste des questions macroéconomiques et directeur du Cercle de l'Epargne. La rémunération de ce produit d'épargne pourrait donc tomber au futur taux plancher de 0,5% dès les premiers jours de l’application de la nouvelle formule. 

Un taux annoncé par François Villeroy de Galhau, le gouverneur de la Banque de France, au micro de BFM Business ce mardi 17 décembre. 
"Cette formule, début février, pourrait donner un taux de 0,5%. Donc, il reste positif [sic], sauf s'il y a des circonstances exceptionnelles. (...) Aujourd'hui, il ne me semble pas qu'il y ait de raison d'invoquer des circonstances exceptionnelles" pour ne pas appliquer cette baisse, a-t-il lâché. Clairement et froidement, le gouverneur de la Banque de France juge inéluctable que la nouvelle formule de calcul conduise à une chute du taux à 0,5% dès le 1er février 2020. A un mois des municipales !

Rassurez-vous, vous ne perdrez d’un euro par mois : info ou intox ?
Lors d’un colloque organisé par la Caisse des Dépôts, le 2 octobre, Eric Lombard, son directeur général, est apparu cynique à souhait sur cette future baisse de taux : "en moyenne, sur un Livret A, les Français ont déposé 4.800 euros en 2018. Une baisse de 25 centimes de la rémunération leur coûterait environ 1 euro par mois." Pour 100 euros... Car pour 4.800, ce sera un manque à gagner de 12 euros par mois, soit 144 par an. Les "gens qui ne sont rien" ont-ils les moyens ?

Contrairement à l'assurance-vie, le Livret A ne faiblit pas en novembre : il va trinquer !

Cette année, comme chaque année, novembre sourit au Livret A.
Après la décollecte de 2,13 milliards d’euros du mois d’octobre dernier, le Livret A a renoué avec des résultats positifsen novembre : + 610 millions d’euros, soit une collecte voisine, mais inférieure à celle de 2018 (670 millions d’euros).

Pour le Livret A, novembre, ce sont les impôts locaux à acquitter, la proximité des dépenses de fin d’année et l’absence de versement de primes freinent logiquement les ardeurs des épargnants. Lors de ces dix dernières années, le Livret A a, ainsi, enregistré cinq décollectes au mois de novembre.

En 2019, le contexte social troublé a incité les ménages à épargner. 
Les gains de pouvoir d’achat engrangés en 2019, les plus importants constatés depuis 2007, ont été, en grande partie, mis de côté amenant le taux d’épargne à 15 % du revenu disponible brut. Ce constat est confirmé par la faible progression, depuis un an, de la consommation. Les Français estiment que l’amélioration économique - qui devrait se traduire notamment par une baisse du chômage -  demeure fragile. 
Le caractère plus précaire des emplois avec l’essor des CDD, du temps partiel ou de l’intérim, peut expliquer l’accès actuel de prudence. Le rendement faible du Livret n’influe guère sur le comportement des ménages saisi par l'angoisse du lendemain, mais sa baisse possible le 1er février prochain pourrait créer un réveil brutal du petit épargnant. Sur les onze premiers mois de l’année, la collecte nette a atteint 14,24 milliards d’euros contre 9,54 milliards d’euros, en 2018, sur la même période, mais c'était avant la flambée du prix des carburants et la mobilisation des Gilets Jaunes. Le Livret A est sur le point de réaliser sa meilleure année depuis 2012 (28,16 milliards d’euros), année qui avait été marquée par le relèvement de plafond et par la crise des dettes souveraines (le taux du Livret A était alors de 2,25 %).

La dernière année positive est derrière nous
Le Livret de développement durable et solidaire a enregistré de son côté une collecte nette nulle après deux mois de décollecte. Ce livret qui est l’antichambre des comptes courants des ménages suit plus finement que le Livret A les évolutions de leurs dépenses, d’où des résultats différents de ceux du Livret A qui est davantage un outil d’épargne.

Le 1er février prochain, baisse ou pas du taux, les paris sont ouverts ?

En application de la nouvelle formule de calcul et compte tenu du taux d’inflation constaté depuis un an et des taux d’intérêt à trois décimales des marchés interbancaires, comme celui des carburants, le rendement du Livet A pourrait passer au taux plancher de 0,5 % au 1er février prochain (le taux est logiquement égal à la moyenne des taux monétaires à trois mois et du taux de l’inflation sur 12 mois avec un plancher fixé à 0,5 point).
Le Gouverneur de la Banque de France pousse dans le sens d'un abaissement à 0,5%. Le taux actuel de 0,75 % est nettement supérieur aux taux pratiqués pour des produits de même nature. 
Le taux de rémunération des livrets bancaires avoisine 0,20 % et le Livret A coûte donc cher à la Caisse des dépôts et aux réseaux bancaires au regard du rendement des placements et des prêts issus du Livret A. 
Le taux de 0,75 % rend peu attractif les emprunts financés à partir des ressources collectées. Cette situation pénalise les bailleurs sociaux, les collectivités locales, les PME, les structures de l’économie sociale et solidaire qui peuvent se financer via le Livret A. S’il décidait de ne pas baisser le taux, le Gouvernement portrait un coup à la nouvelle formule.

La proximité des élections municipales, ainsi que les débats complexes sur la réforme des retraites, pourraient dissuader le Gouvernement de baisser le taux du Livret A. Un taux de 0,5 % serait le plus faible jamais appliqué aux petits épargnants. Symbole de l’épargne populaire, le Livret A rapporterait 0,5 à 0,7 point de moins que l’inflation. Au début des années 2000, les gouvernements avaient instauré une formule de fixation du taux visant à garantir le pouvoir d’achat des épargnants, mais cela, c’était avant les taux d’intérêt négatifs.


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