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jeudi 12 décembre 2019

La réforme Macron des retraites, dénoncée comme injuste par les oppositions

Hormis les Français pris au piège de leur engagement auprès de Macron, les Français sont unanimement contre 

"Injuste". Un "enfumage". "Des perdants à tous les étages"
L'opposition s'est dressée comme un seul homme contre le projet de réforme des retraites présenté par le premier ministre Edouard Philippe, mercredi.
Voilà qu'en dépit de dix-huit mois de discussions et deux années de promesses floues, le premier ministre annonce que la réforme ne s’appliquera qu’à celles et ceux nés à partir de 1975, qui prendront leur retraite à partir de 2037 (en réalité en 2039 pour échapper au malus entre 62 et 64 ans). Un fardeau intolérable pour nos enfants, mais qui peut perdurer pendant une vingtaine d’années... En somme, la simplicité attendra encore une génération, pendant laquelle un 43ème régime coexistera avec les 42 régimes vilipendés jusqu’à hier.
Plus juste ?
Car "un euro cotisé donnera les mêmes droits à tous", selon le mantra de l’exécutif. Edouard Philippe a même annoncé sur TF1 que "tout le monde sera gagnant" grâce à la réforme. Pourquoi donc priver des millions de gens, nés avant 1975, des bénéfices d’une réforme juste et qui ne ferait que des gagnants ? Les Macron et Philippe sont vraiment de grand timides, ils n’osent pas faire plaisir à tout le monde ! grince Mediapart.
De grands malades, en fait.
Il nous parlent d'équité, car le nouveau régime sera u-ni-ver-sel ! Plus de spécificités héritées d’un autre âge et surtout plus de privilèges pour certaines catégories. Une sorte de nouvelle nuit du 4 août, en quelque sorte. Rassurez-vous, ce n'est pas le retour de l'ISF pour les premiers de cordée, mais la promesse d'une baisse de la pension des horribles cheminots et des affreux conducteurs de bus de la RATP. Faut dire qu'un départ à... 52 ans, ça en laisse plus d'un rêveur. Donc, tout le monde à la même enseigne. Oui, mais exception faite des militaires, des gendarmes et des policiers, qui savent pourtant, à la différence des enseignants, à quoi ils s'exposent : mais pourquoi donc les priver d’une réforme si avantageuse ?


En concertation avec Emmanuel Macron, le premier sinistre a franchi les "lignes rouges" de la CFDT et de l'UNSA, prévoyant d'imposer à tous un "âge pivot" de 64 ans pour partir à la retraite avec une pension pleine, après 2027. Le brave homme offre généreusement la possibilité d'un départ à 62 ans, mais avec malus : un cadeau à ceux qui ont eu les moyens de cotiser copieusement; un coup dans les reins aux classes moyennes aux carrières en dents de scie.

Philippe devait éteindre l'incendie allumé par le flou entretenu par Macron pendant deux ans, il l'a avivé. Il a engagé la macronie dans un bras de fer risqué avec tous les syndicats.

La majorité présidentielle peine à dissimuler son malaise.

 © Fred Sochard
Vivement la sanction des municipales !
Les députés LREM s'avouent partagés entre "soutien" et inquiétudes". Fin novembre, ils se disaient encore prêts à défendre en bloc une refonte des 42 régimes en un système universel où les trimestres seront remplacés par des "points". "C’est une réforme inscrite au programme présidentiel, ça fait partie des sujets sur lesquels on a été élus", martèle Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des lois. "Les retraites, c’était un sujet plébiscité dans la campagne ! martelait un des marcheurs de la première heure, le godillot lyonnais Bruno Bonnell. "Mais, par des arguties techno, le débat a été pourri… On l’a enfermé dans des sujets techniques au lieu de rester sur un débat de société," accusaient, comme lui, nombre de députés LREM, estimant que leur camp "joue beaucoup trop défensif" sur ce thème. 

Puis, certains députés laissèrent affleurer leur désarroi. Si beaucoup d’entre eux ont organisé dans leur circonscription des rencontres sur le thème des retraites, ces dernières semaines, d’autres n’ont pas pris ce risque. "Je renvoie les gens vers le site de la concertation, mais je ne vais pas faire une réunion publique pour dire : "voilà les trois piliers et c’est tout", gronde une députée francilienne. Je sais que les gens viennent avec leur dossier et vous demandent de combien sera leur pension. Or, pour l’instant je ne peux rien leur répondre.C'était avant la mobilisation massive de la rue, le 5 décembre.

Livrée à elle-même, comme la population, la majorité parlementaire est alors flottante. "L’élément de langage qu’on nous fournit, c’est qu’on ne peut pas s’opposer mordicus à une réforme qu’on ne connaît pas encore. Mais notez qu’on ne peut pas non plus défendre mordicus une réforme qu’on ne connaît pas encore", objecta logiquement un député LREM.  

Pour serrer les rangs, l’exécutif avait dû organiser une veillée d’armes : dîner puis déjeuner à l’Elysée, réunion de groupe spécial retraites mardi soir avec le premier ministre Edouard Philippe et le Haut-commissaire chargé de la réforme des retraites, Jean-Paul Delevoye, et séminaire-dînatoire du gouvernement dimanche… Du côté des parlementaires comme de celui du gouvernement, la tension était palpable : on se jaugea pour s’assurer de la solidité de tous en cas de grève durable. "Le premier ministre mène la réforme loyalement, selon un cadre du parti, et répète à longueur de journée qu’il est très motivé, s'agaçait-il. Mais Matignon a peur d’un soutien de l’opinion après quinze jours de grève, ce qui engendrerait la démobilisation d’une partie des parlementaires."
Mercredi 11, l'Edouard a pris la parole, mais l'effet produit est catastrophique.

D
epuis mercredi,
en privé, leurs certitudes chancelantes ont basculé.
Mardi, aux députés LREM, Edouard Philippe a commencé par déclarer qu'il n'y aura "pas d'annonces magiques" qui puissent faire "cesser les manifestations" et "les questions" des Français sur la réforme des retraites, ont rapporté plusieurs participants au dîner de cons de Matignon. A huis clos, à la veille de dévoiler le projet jusque là flou du gouvernement sur cette réforme très anxiogène, telle qu'elle est menée. "Ce n'est pas parce que je fais un discours (mercredi midi) que les manifestations vont cesser. Ce discours va même susciter de nouvelles questions. Et c'est normal. Il y aura des questions et il y aura des débats dans l'hémicycle sur des sujets légitimes", a lancé le chef du gouvernement. 

L'exécutif n'a que des questions. Les réponses, c'est aux partenaires sociaux de les apporter : Macron fixe des objectifs, sans savoir comment les atteindre...C'est le réformisme macronien !

Les critiques les plus vives sont venues de la gauche

En évoquant Juppé qui, le 6 juillet 1995 sur TF1, se dit victime d'une opération de déstabilisation et déclara "Je suis droit dans mes bottes", à propos de son appartement au loyer défiant toute concurrence et de la baisse de loyer qu'il avait demandée pour l'appartement de son fils, "Le gouvernement est resté un gouvernement droit dans ses bottes qui n'a pas évolué et aujourd'hui, c'est un gouvernement minoritaire qui n'a plus le soutien que de l'unique Medef" et des députés LREM, a souligné Olivier Faure, Premier secrétaire du Parti socialiste, qui appelle "à de nouvelles mobilisations".

En pointe dans les manifestations ces derniers jours, certaines composantes se sont retrouvées en meeting commun dès mercredi soir. 
"Les retraites des grands patrons et les privilèges des assurances privées sont maintenus. Injuste et inéquitable," dénonce le chef de file de La France insoumise, Jean-Luc Mélenchon"Je dis aux gens: il faut se bouger! Si vous faites les moutons, vous serez tondus", a ajouté sur BFMTV M. Mélenchon qui ira "bien sûr" manifester jeudi.
"C'est bien une grande régression civilisationnelle qui nous est proposée", "ils cassent le système par répartition", a complété le député LFI Eric Coquerel.

Le chef de file d'EELV Yannick Jadot s'est montré tout aussi cinglant: "Le gouvernement a donc choisi de fracturer un peu plus le pays. D'attaquer sa cohésion sociale". Pour l'eurodéputé, en principe favorable à un système par points, "reculer les échéances ne masque en rien l'injustice flagrante de la réforme proposée".

"Le président de la République et son gouvernement sont restés sourds aux revendications des Français", a estimé dans un communiqué Martine Aubry, maire PS de Lille, dénonçant "l'injustice et l'inéquité" de cette réforme.

Pour le secrétaire national du PCF Fabien Roussel, "le PM confirme le pire".

La droite ne cache pas sa déception

Le parti Les Républicains est opposé à un système par points et prône un allongement de la durée de cotisations qui entraînerait un report de l'âge de départ à la retraite de 62 à 64 ans. 

"Donc, si on comprend bien, nous avons eu [dix-huit mois de] débats et blocages pour rien," a tweeté le numéro 2 du parti LR, Guillaume Peltier.
"C'est la grande reculade! Le Président de la République n'a plus l'audace réformatrice qu'il avait promise aux Français. Au déficit qui va exploser, s'est ajoutée la complexité des exceptions, a souligné sur Europe 1 le chef des députés LR, Damien Abad.

"L'âge pivot à 64 ans n'est "ni plus ni moins le rééquilibrage financier par la baisse des pensions", a dénoncé le président de la Commission des Finances et député LR de l'Oise, Eric Woerth, ironisant par ailleurs sur l'invention par le gouvernement d'un "nouveau concept: la transition à rallonge".

"Jamais probablement un gouvernement n'aura présenté avec des mots aussi enjolivés une réforme aussi terrible", a réagi pour sa part la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, réclamant une nouvelle fois un référendum sur la question. En marge d'un déplacement à Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais), fief du de la présidente du RN, elle a prédit "un possible durcissement" du mouvement de grève.

"C'est très inquiétant. Il y a des perdants à tous les étages, les enseignants et demain peut être les policiers ou les personnels hospitaliers", a ajouté Sébastien Chenu, porte-parole du parti qui plaide pour la retraite à 60 ans.

Ancien allié de Marine Le Pen lors du second tour de la présidentielle 2017, Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout la France, a pour sa part jugé que la réforme est "une usine à gaz". Mais "heureusement, elle ne s'appliquera qu'à partir de 2025". Et d'ajouter que, par conséquent, "un des enjeux de la présidentielle de 2022 sera d'annuler cette réforme injuste".

Voir l'image sur TwitterLa presse et ses chroniqueurs ont perdu leur demi-dieu.
Pour le quotidien Libération, "Philippe mobilise Berger" (leader de la CFDT, syndicat réformiste humilié mercredi). Laurent Joffrin y salue un "tour de force. Edouard Philippe fait un discours pour tenter d'apaiser le mouvement: il [Philippe ou Macron ?] réussit à monter tout le monde contre lui." "Il a changé un drapeau blanc en chiffon rouge", ironise le directeur de la rédaction du quotidien de gauche.

Sans la confiance, au-delà de cette réforme, l'acte II du quinquennat est d'ores et déjà perdu.

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