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mercredi 7 novembre 2018

Macron justifie un hommage au général Pétain, "un grand soldat"

Une cérémonie est prévue aux Invalides, en mémoire de Pétain, parmi 8 maréchaux de la Grande Guerre 

Macron "assume" sa lecture de l'Histoire avec le recul du temps


Et il s'en prend de nouveau plein la tête, de la part de la droite comme de la gauche, ce mercredi 7 novembre, pour avoir déclaré qu'il est "légitime" de rendre hommage à Philippe Pétain samedi, à l’occasion des commémorations de la guerre de 1914-1918.

"Le maréchal Pétain a été aussi pendant la Première Guerre mondiale un grand soldat", même s'il a ensuite "conduit des choix funestes durant la deuxième", a nuancé le chef de l’Etat ce mercredi matin.

Une cérémonie est d'ailleurs prévue aux Invalides, samedi, à la veille du centenaire de l’Armistice du 11-Novembre, en mémoire des huit maréchaux de la Grande Guerre. Y compris Pétain, donc, mort en captivité le 23 juillet 1951 à Port-Joinville, sur l'île d'Yeu (Vendée), suite à sa volonté de collaborer avec l’Allemagne nazie pour éviter le pire à la tête du régime de Vichy.
Une semaine après l'offensive allemande, le président du Conseil (membre de l'"Alliance démocratique", parti de droite modérée),  Paul Reynaud avait appelé Pétain, ambassadeur à ...Madrid, alors âgé de 84 ansau gouvernement, le 17 mai 1940, comme vice-président du Conseil. Pour Reynaud, il s'agit de remonter le moral des Français, de resserrer les rangs et de renforcer sa propre image au parlement. Cette nomination fut bien accueillie dans le pays, au Parlement et dans la presse...
Une gerbe sera déposée devant les tombeaux des maréchaux Foch et Lyautey. Seront associés à l'hommage les trois autres maréchaux de la Grande Guerre inhumés aux Invalides: Maunoury, Fayolle et Franchet d'Espèrey. Invité par l'état-major, Emmanuel Macron a exclu d'y participer aux Invalides, mais sera représenté par son chef d'état-major particulier, l'amiral Bernard Rogel.  "C’est une cérémonie en hommage aux chefs militaires, du caporal au général", a déclaré mardi le porte-parole des armées Patrik Steiger soucieux de couper court aux polémiques sur le format de l’hommage, qui ne sera pas ouvert à la presse.

VOIR et ENTENDRE
la réaction du socialiste Bernard Kouchner, tout en nuances :

"Il est légitime que nous rendions hommage aux maréchaux qui ont conduit l'armée à la victoire
, comme chaque année.", a précisé Emmanuel Macron, qui n’assistera pas lui-même à la cérémonie.

"Il a été un grand soldat, c'est une réalité. La vie politique comme l'humaine nature sont parfois plus complexes que ce qu'on voudrait croire." 
"J'ai toujours regardé l'histoire de notre pays en face." "Je n'occulte aucune page de l'histoire", a insisté le chef de l'Etat, qui était interrogé lors de son arrivée à la préfecture des Ardennes pour un conseil des ministres délocalisé. Et coûteux en euros et en CO2...
"Je me suis toujours opposé au défaitisme français ou à la complaisance envers toute idéologie. Mais je reconnais la part que nos maréchaux et notre armée ont jouée. Nous lui devons la victoire, la victoire d'une nation combattante."

"Un traître et un antisémite" ou un "général victorieux" ?

De La France insoumise aux Républicains, ils sont pourtant nombreux à ne pas partager la position du chef de l’Etat.
"Pétain est un traître et un antisémite. Ses crimes et sa trahison sont imprescriptibles", écrit le trotskiste Jean-Luc Mélenchon sur Twitter. Le député LFI Alexis Corbière renchérit en condamnant des propos "affligeants".
"Honorer Simone Veil au Panthéon ET EN MÊME TEMPS le traître antisémite Pétain aux Invalides. Rien ne justifie une telle honte", commente le battu de la présidentielle et désormais leader de Génération.s, Benoît Hamon.
Chef de file du PCF pour les élections européennes, le communiste Ian Brossat,  38 ans, rappelle que Pétain a été frappé d’une peine d’indignité nationale en 1945, à la Libération: "Il est impensable que celui qui est garant des institutions ne respecte pas cette sentence et entreprenne de le réhabiliter", dénonce-t-il sur Twitter. Condamné à mort - à une voix de majorité - à l'issue de son procès (23 juillet-15 août 1945), le maréchal Pétain eut sa peine commuée en détention perpétuelle, le 23 août 1945, par de Gaulle.

"Pour Emmanuel Macron, Pétain était aussi un grand soldat... En deux guerres mondiales, combien de Françaises et de Français a-t-il envoyés à la mort ?" se demande le maire EELV de Grenoble, Eric Piolle, 45 ans.

Pour le député socialiste franco-grec Luc Carvounas, né en 1971, "la volonté d’Emmanuel Macron de célébrer Pétain aux Invalides est une insulte à la mémoire de nos héros français, citoyens, résistants et militaires, aux familles juives déportées de la Seconde Guerre mondiale".

Griveaux pointe une "mauvaise polémique"

A droite de l’échiquier politique, l' avocat de 30 ans étiqueté 'sioniste', secrétaire départemental adjoint LR de Seine-Maritime, Jonas Haddad, parle de "cauchemar" : "Rendre hommage pour son rôle ? L’homme de la capitulation et des lois racistes ?"

"Non", écrit le député UDI franco-israélien Meyer Habib, "jamais un grand soldat n'aurait livré résistants et Juifs, dont d'anciens combattants, à la barbarie nazie. [...] Son nom reste synonyme de trahison."

Le président du parti Les Patriotes, Florian Philippot, est tout aussi sévère : "Réhabiliter Pétain est une impossibilité morale et historique", écrit-il. "Une faute majeure de Macron."

Pour tenter d'éteindre ce début d'incendie, le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux fustige une "mauvaise polémique" avant de citer une phrase du général de Gaulle selon lequel la "gloire" de Philippe Pétain "à Verdun ne saurait être contestée ni méconnue par la Patrie". "Il ne faut pas faire de raccourcis douteux. Pétain a servi la patrie en 14 et l'a trahie en 40", a-t-il estimé, binaire, lors d'un point presse. Il a qualifié la controverse de "vaine" et "mauvaise" face aux critiques virulentes venant essentiellement de la gauche, mais aussi des instances représentatives juives.

En dehors de LREM, les soutiens au président de la République se montrent rares, mis à part l'ancien secrétaire d'Etat Jean-Vincent Placé qui souligne : "Sans le vainqueur de Verdun, où serait la France aujourd'hui ?", ajoutant que Charles de Gaulle et François Mitterrand ont régulièrement fleuri la tombe du maréchal. 

Le président socialiste a même servi Pétain dan le gouvernement de Vichy
En janvier 1942, François Mitterrand travailla en tant que contractuel du gouvernement de Vichy (Légion française des combattants et des volontaires de la révolution nationale), puis, à partir de juin, au Commissariat au reclassement des prisonniers de guerre, où il fut chargé des relations avec la presse.
Le 15 octobre 1942, François Mitterrand est reçu par le maréchal Pétain, avec plusieurs responsables du Comité d'entraide aux prisonniers rapatriés de l'Allier. 
Membres du Commissariat général au reclassement des prisonniers de guerre, François Mitterrand (à droite) et Marcel Barrois (au centre) sont reçus en audience par le maréchal Pétain le 15 octobre 1942
En janvier 1943, Mitterrand démissionne du Commissariat, mais conserve cependant un poste à la tête des centres d'entraides. Il se met également en relation avec les Chantiers de jeunesse, une organisation de service national créée par Vichy après l’armistice, et avec les Compagnons de France.
Au printemps 43, il commence à prendre Morland comme pseudonyme de résistant, nom emprunté à la station de métro Sully-Morland, technique utilisée par les cagoulards, clandestins de la droite radicale active dans les années 1930 en France, part de "lèpre nationaliste", selon Macron.

Griveaux n'apaise pas le CRIF (Conseil représentatif des institutions juives de France), qui se dit "choqué" par les propos d'Emmanuel Macron :
"La seule chose que nous retiendrons de Pétain, c'est qu'il a été, au nom du peuple français, frappé d'indignité nationale lors de son procès en juillet 1945", commente son président, Francis Kalifat, dans un communiqué.

Macron ne "pardonne rien"
Au cours de son "itinérance mémorielle" de cinq jours, Macron s'est de nouveau justifié en fin d'après-midi dans l'Aisne, expliquant qu'il ne pardonne rien des actes de Philippe Pétain, tout en accusant les journalistes de "créer des polémiques".


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