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mercredi 21 novembre 2018

Macron établit un rapport de forces avec les maires

Le Congrès des maires se tient à Paris dans un climat de fortes tensions entre les élus locaux et Macron

Macron n'affrontera pas les maires :
ce soir l'Elysée, aux maires qui se rendront à son invitation, il fera un de ses longs discours d'hommage.


Promesse non tenue : Macron ne se rendra pas au Congrès des maires de France, le 22 novembre, bien qu'il en ait pris l'engagement en 2017. Il a préféré s'exprimer la veille à l'Elysée devant le seul bureau de l'AMF et quelques centaines de maires qui acceptent de partager les petits-fours et le champagne de l'Elysée, en pleine période de tension entre Etat et collectivités, mais aussi et surtout de révolte citoyenne des automobilistes pour leur pouvoir d'achat.

Alors que le chef de l'Etat avait promis l'an dernier de venir chaque année "rendre compte des engagements" du gouvernement devant le Congrès de l'Association des Maires de France, c'est le premier ministre Edouard Philippe qui ira prononcer le discours de clôture sous de probables huées et sifflets. Il dira qu'il a "entendu" et compris" le mécontentement des maires, mais, voilà, dans l'intérêt des "gens" qui ne comprennent rien, quant à eux, il tiendra le cap...

Lors de l'édition 2017, devant des milliers de maires dont une partie l'avait hué et sifflé à son arrivée, Macron avait lancé : "Je m'engage à une chose, si vous l'acceptez, c'est venir chaque année rendre compte des engagements que je viens de prendre parce que c'est cela l'esprit de responsabilité dans la République", avait-il lancé.
Esprit de la République où es-tu ?

Le locataire de l'Elysée a préféré recevoir à l'Elysée le bureau de l'AMF et plusieurs centaines de maires

C'est devant des groupies qu'il prononcera son discours, a expliqué la présidence. L'an dernier, il avait déjà invité plus de 1.000 maires pour une soirée au Palais. Soit une note salée, que les républicains devraient alléger cette année en boudant le raout et l'épouse, ne serait que par respect des Gilets jaunes qui passeront la nuit dans le froid.

Les relations restent tendues entre Etat et collectivités, qu'il s'agisse des communes, des départements ou des régions, qui reprochent à l'exécutif des décisions trop autoritaires tombées de l'Olympe macronien et l'inéquité de la contribution de l'Etat à la décentralisation du fait de ses réformes des aides sociales et des impôts locaux.

L'AMF a même lancé le 26 septembre un "appel de Marseille" pour les libertés locales et contre l'ultra-centralisation.

Les maires sont dans "une logique de revendication et de négociation", a confirmé la semaine dernière François Baroin, évoquant des "tensions assez fortes", sur les pactes financiers Etat/collectivités pour réduire les dépenses ou la compensation pour les communes de la suppression de la taxe d'habitation.

Lors de son "itinérance mémorielle" de cinq jours à l'occasion de cérémonies du 11-Novembre, dans l'Est et le Nord de la France, Macron a mené la campagne d'En Marche! aux Européennes 2019, multipliant les caresses aux petits comme aux grands et les rencontres avec les élus locaux, avec le sentiment d'une urgence à tenter de renouer le dialogue. Le 16 octobre, il avait rendu un hommage appuyé aux maires, "premiers porteurs de la République au quotidien", ce qui ne coûte rien.

Ses simagrées avaient été diversement reçues
Lors de sa tournée des popotes, censée amorcer une reconquête de l'opinion, Macron avait pris plusieurs camouflets et les échanges avaient été souvent houleux. "Un vrai bonheur," avait-il commenté, méprisant et provocateur. 

Une part des ratés tenait à la surtaxation des carburants et à la baisse du pouvoir d'achat, sans l'excuse de la crise économique internationale de 2008, et à son manque d'écoute sur le maintien d'un haut niveau de chômage, la baisse du niveau de vie, la réforme des retraites et aussi l'immigration qui draine les aides sociales et abaisse le niveau scolaire. L'arrogant président je-sais-tout s'est même autorisé une controverse inutile déclenchée d'abord par son intention de panthéoniser le général Pétain, puis par son parallèle hasardeux entre la montée de la "lèpre nationaliste" des années 30 et la progression actuelle du populisme dans une Europe apaisée, mais incapable de remettre en cause ses choix impopulaires.
Emmanuel Macron lors de sa courte allocution aux Éparges, dans la Meuse, le 6 novembre 2018.
Macron lors de sa courte allocution aux Eparges, 
dans la Meuse, le 6 novembre 2018

Le jour même, dans sa lancée, le quadra sentit le souffle de la balle : "Votre politique, elle est en train de nous détruire. On subit vos réformes injustes", lui décocha à bout portant un passant à Verdun lors d'un bain de foule. 
Plus loin, Emmanuel Macron s'en est pris à un autre, qui se revendiquait militant gaulliste depuis 1976, de "raconter des carabistouilles" sur sa politique. "Vous ne sentez pas le malaise en France, qui monte ?", lui a retourné ce retraité.



Macron préfère aller au devant des "gens qui ne sont rien" et ne sont pas formés au débat, plutôt que des élus, maires ou syndicalistes, qui connaissent leur sujet, mais l'ex-banquier s'en prend plein la tête face aux gens simples mais remontés contre lui et les blancs-becs de sa majorité. Sur Europe 1, dans un entretien diffusé durant la matinale, il n'hésita pas à dire qu'il inciterait les régions à compenser une partie du prix à la pompe
"La hausse des carburants, c'est pas bibi", a-t-il tenté de se justifier, en termes censés "faire  peuple", comme si les maires influaient sur les taxes ou le cours du pétrole, et avant d'expliquer que la hausse des prix du carburant découle "aux trois-quarts des cours mondiaux". Or, le sachant prononçait une "fake news", car le cours du Brent n'a cessé de baisser en octobre...

Mieux, les taxes de l'Etat sur les carburants ne sont presque pas affectées à la transition énergétique
Un tiers de la contribution obtenue avec le TIPCE, taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (32,6% en 2019), sera reversé aux collectivités locales, 12,3 milliards d'eurosen financement de dépenses sociales comme le RSA, assumé par les départements. 
Mais c'est le budget général de l'Etat qui est le grand gagnant de la TICPE, avec 17 milliards d'euros, soit 45,1% en 2019) qui lui seront reversés l'année prochaine.

Et Macron se paie aussi la tête des Français avec lesquels il prétend renouer.
En effet, la TVA porte à la fois sur le prix du carburant et sur le montant de TICPE, si bien que les taxes et surtaxes sur les produits pétroliers sont une manne pour les coffres de l'Etat, pour les ministères indistinctement ou objectif particulier, voire personnel à la la présidence.
A une dame dont il caresse les mains - comme Tron, les pieds de quelques autre - et qui lui faisait observer que "30 euros" de hausse du minimum vieillesse, "ça fait pas beaucoup" quand la facture de gaz augmente de "250 euros", il a fait mine de déplorer que "les choses ne se font pas comme ça tout d'un coup". "Tout le monde est pressé, je l'entends [!], mais il faut faire les choses sérieusement et sans mentir", a raconté le bonimenteur.

Au bonneteau, jeu d'argent, jeu de dupes de l'ordre de l'escroquerie, il ne faut pas se démonter... Or, le lendemain, dans les Ardennes et l'Aisne, à Rozoy-sur-Serre, Macron se fait alpaguer lors de la visite d'un Ehpad. "Je suis aide-soignante dans un foyer. La hausse du carburant fait que je me demande si je ne vais pas être obligée de démissionner", lui a innocemment expliqué une dame au bord des larmes. "Ceux qui sont obligés de se déplacer chaque jour pour travailler" seront "mieux aidés", a répliqué le débagouleur, ajoutant que le gouvernement planche sur le mécanisme...  

Un homme interpelle Emmanuel Macron devant la préfecture de Charleville-Mézières, le 7 novembre 2018
Un homme interpelle Macron à  Charleville-Mézières, le 7 novembre 2018 
Il se fait entortiller : toucher, c'est tromper...
"Le problème avec tous les présidents, c'est que vous ne savez pas ce que ça veut dire de vivre avec 1.000 ou 2.000 euros par mois. Avec mon mari, on a 2.000. J'ai 880", lui a expliqué une retraitée. "Je ne dis pas que c'est facile", lui répond l'ex-banquier, avant de défendre son choix d'augmenter la CSG pour réduire les charges des salariés. Suite à quoi la dame, qui sait ce que sont un budget familial et les fins de mois difficiles, soupçonne à haute voix le gouvernement de faire un tour de passe-passe, "Vous le [compensez par une hausse] sur les carburants !", réplique cette femme de bon sens. Il suffit à l'autre de poursuivre sa déambulation vers de plus crédules, sous bonne escorte.

Harponné chez Renault
La visite présidentielle à l'usine Renault de Maubeuge (2.200 salariés) n'a pas été une promenade de santé. Bien que le PDG de la marque automobile, Carlos Ghosn, ait accueilli Macron avec l'annonce d'un investissement de 450 millions d'euros sur le site (ajouté à celui d'un milliard d'euros dans les véhicules électriques sur cinq ans, annoncé par le groupe en juin), le fauteur de troubles tomba sur un mauvais coucheur, un syndicaliste de SUD, qui mit le bololo: "M. Macron, vous n'êtes pas le bienvenu ici !", lui a crié Samuel Beauvois. 


S'adressant au personnel de l'usine, le prêcheur réplique : "On est là tous ensemble pour réussir", a répliqué le président. "On réussit sans vous...", a souligné le salarié du premier groupe automobile mondial, devant Toyota et Volkswagen. Alors que le travailleur le lançait sur la hausse de l'essence, le président perd alors ses nerfs et lâche un jugement de valeur méprisant : "Là vous êtes ridicule, pardon de vous le dire"...

Macron, patron paternaliste du 20e siècle.
Dans une autre tentative malheureuse pour aller "au contact" dans un bar PMU près de Lens, à Bully-les-Mines, l'ex-banquier Rothschild lança à la cantonade : "Salut, les gars! C'est ma tournée...", avant de retrouver la première ministre britannique Theresa May dans la Somme sur un lieu symbolique de la Première Guerre mondiale. 
Emmanuel Macron a rencontré des habitants dans un bar PMU de Bully-les-Mines, dans le nord de la France le 9 novembre 2018
"Bibi" prenant un canon avec des prolétaires,
 à l'insu de mamie qui lui avait donné un cache-col contre le froid
"Il faut aller au contact de la colère. Il ne faut pas chercher à l'éviter, il ne faut pas chercher de réponse démagogique. Je sais contre qui j'étais au second tour", a déclaré le président par défaut - 24% au premier tour - (28,6 à Hollande en 2012) aux clients du Café de la Place, où il s'était déjà rendu pendant la dernière campagne présidentielle. 
Une "itinérance" qui fut son Chemin des Dames, théâtre de plusieurs batailles meurtrières de la Première Guerre mondiale....
"J'ai creusé le lit où je coule en me ramifiant en mille petits fleuves qui vont partout" (Apollinaire)
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