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samedi 23 mai 2015

Congrès du PS: les socialistes ont-ils peur de Manuel Valls?

"Valls a une stratégie de la terre brûlée"

La tectonique des plaques socialistes est en train de bouger


Qui sont les méchants ? La question se pose à l'Elysée de savoir si les braillards de l'aile gauche du PS (30% des militants) sont aussi redoutables que Valls, hystérique premier ministre socio-libéral sur son flanc droit.
Alors que Benoît Hamon, sous la férule d'Henri Emmanuelli, estime que la politique du gouvernement "menace la République" et que, présentée comme l'animatrice des "frondeurs" sur l'aile gauche du PS, Martine Aubry se rallie finalement à la motion pro-Hollande présentée par Cambadélis, le paysage socialiste se bouche, au moment où François Hollande s'approprie l'embellie de la conjoncture économique internationale et s'enhardit au point de mener campagne deux ans avant la présidentielle de 2017, un professeur de sciences politiques à Reims puis à... Lille-2, Rémi Lefebvre, spécialiste du PS, propose aux lecteurs de L'Obs son analyse  du résultat du vote des militants sur les motions présentées au congrès de Poitiers.

Les bons résultats de la motion A mettent-t-ils un point final aux dissensions internes du PS ?
Le bon score de la motion A, celle portée par Jean-Christophe Cambadélis, n’augure pas une sortie de crise pour autant. Les frondeurs vont veiller à lui rappeler les propositions contenues dans sa motion, par ailleurs très critique à l’égard du gouvernement. Par exemple, ils vont pousser le gouvernement à lancer la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, l’une des mesures phares de la motion A, signée par les membres du gouvernement. En un mot, les frondeurs, qui se veulent les gardiens du temple du discours du Bourget de 2012 où François Hollande avait tenu des propos très à gauche, ne vont pas se taire.
Est-ce un échec pour la motion B des frondeurs ?
Le Parti socialiste est un parti de cadres où 60% de ses membres sont des élus ou des collaborateurs d’élus. Dans leur grande majorité, ces derniers qui tiennent et animent les sections locales, ont préféré parier sur l’unité du parti en soutenant la motion A, plutôt que de jouer l’éclatement du PS. Cela explique en très grande partie les bons scores de la motion de Jean-Christophe Cambadélis. A l’inverse, la motion B de Christian Paul a pâti de la fuite du PS des adhérents les plus à gauche. En désaccord avec la ligne économique portée par le gouvernement, ils ont quitté le navire ou alors ils ne se sont pas déplacés.
Comment expliquer la faible participation au scrutin ?
Le véritable enseignement de ce congrès, c’est la faible participation des militants pour le vote des motions qui fixe l’orientation politique du PS. Seuls 70.000 adhérents [sur 130.000] se sont déplacés. [Le constat est rude : entre 2008 et 2015, le nombre de votants pour départager les motions au Parti socialiste a chuté de près... de la moitié. En 7 ans, il est ainsi passé de 128.000 au congrès de Reims à un petit 70.000 ce vendredi 22 mai] Pour un parti de gouvernement, au pouvoir depuis deux ans et demi, c’est ridicule. Cela confère au PS une légitimité extrêmement basse. Il est vrai que la base électorale du parti a subi une forte hémorragie. Le chiffre officiel de 140.000 totalise les adhérents, qui souvent ne militent pas. Mais seulement 60.000 militants sont à jour de cotisation. Le parti socialiste n’est plus du tout en phase avec la société française. Tout comme il n’est plus en prise avec les intellectuels, les associations, les syndicats… Il est aujourd’hui recroquevillé sur lui-même et vit dans un entre-soi.
Pour le Parti Socialiste, quel a été l’impact des défaites aux différents scrutins intermédiaires (municipales, européennes, départementales)?
Le PS est en train de se détruire. La défaite aux élections départementales va créer un délitement de l’organisation. C’est un parti d’élus locaux, basé notamment sur les maires. Et l’échec aux départementales survient après la saignée des municipales, où les socialistes avaient perdu un tiers des villes. Jamais un parti n’avait subi une telle défaite aux élections locales depuis 1945. Après les maires, qui avaient été souvent recasés dans les équipes parlementaires ou dans les cabinets ministériels, beaucoup de conseillers généraux vont se retrouver sur le carreau. Et ce sont eux, avec leurs collaborateurs, qui font vivre les sections locales du PS. Dans certains départements, le parti n’existe que parce qu’il détient le Conseil général.
Ce scénario va-t-il se répéter en décembre prochain aux régionales ?
Il ne va presque plus rien rester du parti ! Les conseils régionaux emploient aussi beaucoup de cadres du PS. Et la défaite probable sera accentuée par le mode de scrutin de listes, qui permet de se présenter au deuxième tour si l’on atteint 10% des suffrages. Souvent, les candidats socialistes seront derrière ceux du Front National. Et pour respecter leur engagement à faire échec au FN, ils se retireront et n’auront donc aucun élu.
Quelle est la tactique de Manuel Valls, représentant de l'aile droite du parti, pour aborder le congrès ?
Il a une stratégie de la terre brûlée. De fait, Manuel Valls a intérêt à détruire le vaisseau socialiste pour espérer le reconstruire après 2017. Sans frondeurs et vers le centre-gauche. Il est habile. Il va enjamber le prochain congrès du PS en évitant l’affrontement. Et il attend que le parti se délite pour pouvoir mieux l’assainir.

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