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jeudi 31 janvier 2019

Loi "anticasseurs": les députés votent des interdictions administratives de manifester

L'Assemblée nationale a décidé mercredi de donner la possibilité aux préfets de prononcer des interdictions de manifester

Cette disposition "liberticide"  de la proposition de loi "anticasseurs"
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La mobilisation violente de l’extrême gauche radicale contre Emmanuel Macron a servi les projets du président
Les députés LREM votent un nouveau délit de dissimulation du visage lors des manifestations.
C'est l'une des mesures de la proposition de loi "anti-casseurs" voulue par la  majorité présidentielledans la nuit du mercredi 30 au jeudi 31 janvier 2019, suite aux saccages menés par les Black Bloc sur les Champs-Élysées, le 24 novembre 2018.
Ce nouveau délit de dissimulation volontaire (totalement ou partiellement) sera assorti d'une peine d'un an d'emprisonnement et 15.000 euros d'amende.

Dans la majorité présidentielle, les socialistes renégats se mordent les doigts, tandis que l'un des leurs, le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner prétend qu'"il ne faut pas caricaturer" cet article 2 et soutient qu'"en aucun cas, il ne s'agit d'autre chose que de garantir le droit de manifester"Ce texte de privation des libertés suscite la colère de l'opposition et agresse une partie la majorité présidentielle, notamment ses élus LREM venus du Parti socialiste. 
La gauche (PS, PRG, écologistes, DVG) est de loin la plus représentée des tendances avec 126 députés dont... 83 ont été élus (ou ont eu une activité partisane) sous la bannière socialiste !Et, au total, sept ministres sont issus de la gauche.
Macron renforce l'arsenal répressif français.
Ces interdictions administratives préalables s'ajouteront aux interdictions  qui peuvent déjà être prononcées par la justice lors de condamnations. Selon le gouvernement, l’objectif principal du texte est de "lutter contre les armes par destination", en facilitant la recherche des marteaux ou autres boules de pétanque, via l’inspection visuelle des bagages et des fouilles sur réquisition du procureur, représentant du ministère de la Justice. Alors que l’amendement LREM mentionnait des palpations, le gouvernement a supprimé cette mention, admettant qu’elle était superflue, parce que déjà permises.
Par un amendement, le gouvernement a durci la proposition de loi originelle en sorte d'apporter "des améliorations juridiques et opérationnelles", selon les termes du secrétaire d'Etat Laurent Nuñez.

Flou et subjectivité des termes de la loi.
Les préfets pourront prononcer des interdictions de manifester à l'encontre d'individus représentant "une menace d'une particulière gravité [?] pour l'ordre public", sous peine de six mois d'emprisonnement et 7.500 euros d'amende en cas d'infraction

Des "critères objectifs" ont toutefois été ajoutés: la personne devra avoir commis des "atteintes graves à l'intégrité physique des personnes, ainsi que des dommages importants aux biens" ou encore avoir commis "un acte violent" lors de manifestations précédentes. 

Le préfet pourra restreindre des libertés d'aller et venir : il sera en droit d'imposer une convocation à la personne concernée, afin qu'elle ne se rende pas à la manifestation.
En cas de risque de participation à d'autres rassemblements, a ajouté le gouvernement, le préfet pourra interdire durant un mois maximum - de prendre part à toute manifestation sur le territoire national.

Les personnes "interdites" de manifester pourront faire un recours en urgence devant la justice administrative, donc soumise au gouvernement par le truchement des préfets, a précisé un amendement de la rapporteure Alice Thourot (LREM), une avocate drômoise de 33 ans, fille de cardiologue mais spécialisée dans le droit de l'immobilier et de la construction.

Les personnes "interdites" seront fichées.
Un sous-fichier des personnes recherchées (FPR) est créé à leur intention. La proposition de loi prévoyait initialement un fichier dédié, mais Castaner a vanté le FPR, accessible depuis le terrain, sur les tablettes des forces de l'ordre. "La fiche tombe dès qu'elle est inactive", a-t-il aussi affirmé aux opposants au "fichage". "Inactiver" ne veut pourtant pas dire "effacer", "supprimer"...

Les réactions sont vives de toutes parts

Les Républicains sont débordés sur leur gauche.
Ils ont défendu une mesure plus modérée d'interdiction qui "va faire progresser la sécurité de nos concitoyens, des forces de l'ordre et des manifestations", mais ne s'exposait pas à la dénonciation d'atteinte aux libertés. Les sénateurs LREM avaient d'ailleurs voté contre l'adoption du projet Retailleau en octobre dernier. Aujourd'hui, la majorité présidentielle va plus loin dans la répression préventive.
Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat, a dénoncé un texte LREM qui "ne va ressembler à rien". "Des manifestants, quand ils battent le pavé, sont menacés. Ils ont droit de manifester paisiblement", a déclaré le sénateur à Sonia Mabrouk sur Europe 1, mardi soir.


Bruno Retailleau avait milité pour une définition stricte d’un délit de dissimulation du visage lors des manifestations. "Dans notre droit pénal, vous devez vous assurer qu’il y a un lien entre l’identité de la personne et l’acte commis. Mais quand vous vous dissimulez, quand vous portez une cagoule, vous n’arrivez plus à avoir ce lien. Il y a eu plusieurs milliers d’interpellations pour seulement une centaine de mandats de dépôt. Il y a un vrai problème. Si la personne vient dissimulée, ce n’est pas parce qu’elle a froid", a-t-il observé.
Ce délit de dissimulation volontaire du visage a été redéfini par les députés. Les parlementaires ont précisé que le port d’un casque ou d’une cagoule ne suffira pas pour entraîner une condamnation, mais qu’il faudra démontrer l’intention du manifestant de participer à des troubles. Cette loi "anti-casseurs" est étudiée jusqu’à mercredi par l’Assemblée, avant un vote solennel le 5 février.

La gauche est aussi montée au créneau contre la mesure sur les interdictionsElle dénonce des "lettres de cachet" (PS) ou une "loi de circonstance" (PCF) voulue par le président Macron instrumentalisant des violences en marge des mobilisations de "gilets jaunes" pour s'attaquer "aux libertés fondamentales de tout un peuple" et introduisant de l'arbitraire dans le droit communmesure permise dans le cadre de l'état d'urgence (LFI).Ces derniers ont épinglé une future "loi anti-cagoule" dans la lignée du "décret anti-cagoule" pris sous Nicolas Sarkozy, le 20 juin 2009.
Ce texte de 2009 punissait déjà d'une amende maximale de 1.500 euros (3.000, en cas de récidive) "le fait pour une personne, au sein ou aux abords immédiats d'une manifestation sur la voie publique, de dissimuler volontairement son visage afin de ne pas être identifiée dans des circonstances faisant craindre des atteintes à l'ordre public".
Au moment de son annonce,
plusieurs syndicats de police avaient émis des doutes sur l'application réelle de cette mesure. "Il sera quasiment impossible d'aller chercher les gens cagoulés au cœur d'une manifestation", estimait Fabrice Ribeiro, secrétaire général adjoint du syndicat d'officiers Synergie. Michel Tubiana, président d'honneur de la Ligue de droits de l'homme, dénonçait, pour sa part, "une mesure grotesque qui va créer plus de problèmes qu'elle n'en résoudra". Ce décret suggéré par le ministère de l'Intérieur. faisait suite aux violences et exactions commises par les Black Bloc et antifa de l'extrême gauche anarcho-révolutionnaire, à l'occasion du sommet de l'OTAN à Strasbourg, en avril.
La publication de ce décret intervenait alors que la proposition de loi du député UMP Christian Estrosi, pour créer notamment un
délit de "participation à une bande violente" aggravé en cas de dissimulation du visage, avait été adopté dix jours plus tôt, le 10 juin, par la Commission des lois. 
Le Rassemblement national s'y est également opposé, critiquant un calque des interdictions de stade pour les hooligans, alors que la liberté de manifester est d'un niveau supérieur.

"On se croit revenu sous le régime de Vichy", s'est exclamé Charles de Courson (Libertés et territoires, 16 députés), un brin ironique suscitant de vives protestations qui ont reconnu l'allusion à la "peste brune" évoquée dès novembre par Gérald Darmanin pour stigmatiser l'ensemble du phénomène Gilets jaunes, en écho au président Macron qui, le 1er novembre 2018, s'était autorisé un amalgame malencontreux avec "les années 30"... Mais une évocation prémonitoire de cette loi.

Dans les rangs LREM, quelques voix se sont également élevées faiblement pour réclamer la suppression de l'article.
Quelques députés qui ne marchent pas tout-à-fait droit ont défendu en vain des amendements pour un meilleur encadrement. 
Cette loi manque de "garde-fou", selon Delphine Bagarry, député des Alpes-de-Haute-Provence et médecin-urgentiste. Investie par le Parti socialiste en décembre 2016 pour les élections législatives de 2017elle a pratiqué la valse des étiquettes en sentant s'effondrer le PS et a décidé de monter En marche ! en mai 2017, comme elle a préféré s'établir en cabinet libéral.
Sans entrevoir la dérive actuelle, l'ex-socialiste et conseiller auprès des ministres du Logement Sylvia Pinel et Emmanuelle Cosse, Aurélien Taché s'est aussi inquiété de ce que pourrait en faire un pouvoir autoritaire. Ce trentenaire aux fortes convictions a pourtant mis son passé militant à l'UNEF dans sa poche pour déserter et rejoindre En Marche! 

De son côté, le MoDem a plaidé pour une condamnation pénale préalable de la personne.
Sur proposition de l’ex-magistrate Laurence Vichnievsky (MoDem), les députés ont modifié la définition qu'ils avaient trouvée en commission et que plusieurs, y compris à droite, trouvaient "inapplicable". Le juge devait en effet prouver l'intention de la personne portant un casque ou une cagoule de participer à des troubles. Dans la nouvelle rédaction,
la charge de la preuve est renversée et ce sera au manifestant d'apporter un "motif légitime" à la dissimulation de son visage. Tout en se disant "réservée" sur l’apport de l’article voté, Laurence Vichnievsky l'a voté.

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