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vendredi 19 avril 2013

Les Femen suscitent des homo-logues masculins

“HomMen”: qui sont ces hommes qui manifestent torse nu contre le mariage pour tous, s'interrogent Les InRocks

Groupuscule informel, HomMen n’a ni visage ni figure de proue mais orchestre des actions d’hommes torses nus contre le projet de loi sur le mariage pour tous. Explications.

Depuis la naissance des HomMen il y a un peu plus de trois semaines, un certain mystère demeure : si leurs actions sont relayées ici et là, on ne sait pas grand chose d’eux et la chasse aux informations prend parfois des allures de puzzle géant. [Les journalistes de salon des InRocks ne sont pas des spécialistes de l'investigation !] Un flou qui semble plus ou moins entretenu par les organisateurs du mouvement eux-mêmes, qui ne divulguent aucun contact sur leur site Web et n’acceptent de répondre à une interview par téléphone qu’au bout d’un certain nombre de mails adressés à leur page Facebook. Ultime précaution: ce n’est pas vous qui appelez les HomMen mais les HomMen qui vous appelle[ent], et en numéro masqué de surcroît.

Un moyen de préserver leurs identités respectives mais aussi et surtout de véhiculer une image de masse informelle et tentaculaire dans la veine des Anonymous. C’est dans cette optique qu’à chacune de leurs actions les Hommen cachent leurs visages derrière des masques blancs. “On porte un masque pour représenter la majorité silencieuse” explique le porte-parole avec qui l’on s’est entretenu au téléphone. Lors de leur dernière action, le 15 avril rue de Rivoli à Paris, les HomMen ont donc débarqué masqués, les torses nus barrés d’inscriptions au feutre noir, vêtus de leurs éternels pantalons colorés. La référence au Femen est assumée: “évidemment que c’est un clin d’œil. Mais leurs propos, leurs actions sont très violents alors que les nôtres sont pacifiques”. La comparaison ne peut de toutes façons pas aller bien loin puisque, contrairement aux activistes féministes, les HomMen militent contre le projet de loi sur le mariage pour tous.

Le mouvement s’est créé au lendemain du rassemblement du 24 mars de La Manif pour Tous, dans un élan de colère suite au gaz lacrymogènes tirés par les forces de l’ordre contre les manifestants qui tentaient de gagner les Champs Élysées. Le 26 mars, les HomMen ont orchestré leur première action devant la Préfecture de police de Paris, réclamant les excuses du préfet et caricaturant une scène d’intervention policière.


Au même moment, la Manif pour Tous s’est scindé en deux. 
Une partie de ses partisans, rejoints notamment par des Identitaires, prônant la radicalisation du mouvement d’opposition au projet de loi sur le mariage [et la filiation !] pour tous, a créé le Printemps français, que porte Béatrice Bourges, ancienne figure de proue (alors au côté de Frigide Barjot) de La Manif pour Tous (MPT pour les intimes). Ajoutez à cela le fait que le Printemps français invite sur son site à liker la page Facebook des HomMen et que ces derniers parlent justement de “printemps” dans la vidéo de leur première action (voir ci-dessus) et il n’en faut pas plus pour relier les deux mouvements. Mais le porte-parole des HomMen nous arrête tout de suite: s’ils communiquent avec certains responsables du Printemps français, ils n’y sont pas affiliés. “On est libres et on ne prévient pas les autres quand on fait des actions”.
De même, il assure que les HomMen n’ont pas participé à l’action du 7 avril au cours de laquelle des militants du Printemps français ont recouvert d’affiches l’espace des Blancs-Manteaux (Paris, IVe) où se tenait “le Printemps des assoces LGBT”. Pas de lien non plus avec les groupuscules identitaires type Jeunesses nationalistes dont on vous parlait ici: les HomMen se veulent les représentants de “la majorité silencieuse qui sort de son silence“. D’où le fait que tout un chacun puisse organiser son action labellisée “HomMen”. Pour ce faire, il suffit, selon le porte-parole contacté [il existe donc...], de “respecter la charte pacifique des HomMen” et de n’utiliser aucun autre message que ceux approuvés par les organisateurs du mouvement.

Homen ou HoMmen ?

Au Capitole de Toulouse, France
Autre point de confusion: l’existence d’un blog et d’une page Facebook baptisés “Homen” avec un seul “M” et sans majuscule, qui représente un "collectif détendu qui ne revendique rien". Son fondateur est Gilles de la Clause, chef d’entreprise quarantenaire, qui prône “un retour aux sources de la bonne et franche camaraderie, de la filiation et de la paternité". Partisan de La Manif pour Tous, Gilles de la Clause est farouchement opposé au projet de loi sur le mariage pour tous. Quant aux “Homen” et aux “HomMen”, il l’assure: “c’est la même chose”. S’il n’a jamais participé à leurs actions, il les soutient, avec, tout de même, un petit bémol concernant les deux affiches (très violentes) du mouvement. Sur l’une, la silhouette d’un enfant dessinée à la craie sur le bitume avec la légende “Julie, 14 ans, gazée le 24 mars”. Sur l’autre, l’image bien connue de Jean Moulin accompagnée de la croix de lorraine et du slogan “non au mariage gay”.

Image "violente" ?
Respect des enfants
ou radicalité ?

A leurs sorties, les affiches ont d’ailleurs déclenché une vive polémique, conduisant Giuseppe Di Bella, co-responsable de Stop Homophobie, à signer une tribune sur le site du Le Nouvel Obs. Il y écrit: “Utiliser Jean Moulin et la croix de Lorraine comme propagande sur leurs affiches contre le mariage pour tous, c’est comparer les gays et les lesbiennes aux occupants allemands”. [Quant à l'tilisation d'un enfant en homme sandwich?]

Le porte-parole des HomMen ne tient, lui, pas le même discours que Gilles de la Clause, et nie tout lien entre les Homen et les HomMen, assurant que la ressemblance des deux noms est une pure coïncidence: ”Son blog [Homen, ndlr] a été créé bien avant nous. Nous, on s’est créés suite aux bavures policières. On a essayé de contacter Gilles de la Clause, il ne veut pas nous répondre”. Contrairement aux Homen avec un seul “M”, le mouvement des HomMen ne survivra pas, selon lui, au débat autour du mariage pour tous, tout simplement parce qu’il ne porte pas d’autre revendication. 

Derrière ces deux mouvements semble pourtant se dessiner l’idéologie masculiniste, qui avait été remise sous les projecteurs à l’occasion du mouvement des pères sur les grues. La notion de “masculinisme” – dont on attribue communément la paternité-maternité à la féministe Michèle Le Doeuff- désigne le mouvement de revendications porté par des hommes, mais aussi le combat de certains d’entre eux contre les féministes dont ils se posent généralement en victimes [jugement du magazine]. C’est l’argumentaire que l’on retrouve dans la bouche de Gilles de la Clause: “certes il y a les minorités, les violences faites aux femmes dans certains pays (sic), mais n’oublions pas le mec normal qui fait bien son boulot"

Les HomMen, eux, disent rejeter en bloc la notion de masculinisme. Et quand on demande au porte-parole les raisons pour lesquelles son mouvement se bat contre le mariage pour tous, il répond: “le débat a déjà été fait et n’a maintenant plus lieu d’être. La France doit dire non"

Le projet de loi passe actuellement en deuxième lecture à l’Assemblée nationale (qui l’a accepté, comme le Sénat, une première fois). Le vote devrait avoir lieu le 23 avril [, à marche forcée et au pas de l'oie  cadencé].

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