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samedi 23 mars 2019

Jouanno pointe l'instrumentalisation du "grand débat" par Macron à des fins électorales

Le gouvernement confond "débat public et campagne électorale," dénonce la présidente de la Commission nationale du débat public 

L'ancienne karatéka ne lâche pas prise


L'ancienne auteure d'un rapport sur le travail frontalier pour le ministère du Travail et de l'Emploi de la socialiste Martine Aubry en 1992 avait dû se retirer de l'organisation du grand débat après que son salaire mirifique a filtré dans la presse.
En qualité de présidente de la Commission nationale du débat public (CNDP), ses attaques renouvelées contre le grand débat national font d'autant plus mouche que cette nomination "n'est probablement pas étrangère à son appel au rassemblement autour d'Emmanuel Macron après son élection," estime Capital, Bien qu'elle ait renoncé à piloter le grand débat, confié à deux membres du gouvernement, Emmanuelle Wargon et Sébastien Lecornu. 

Le premier clash remonte à janvier 2019.
Elle est alors l'objet d'une polémique sur le montant de son salaire de 176.000 euros bruts annuels qu'elle touchera en 2019 en tant que présidente de la CNDP, soit 14.666 euros bruts mensuels, une rémunération proche des 15.410 euros touchés chaque mois par le premier ministre et le chef de l'Etat, preuve qu'une femme puisse être employée à salaire égal à celui d'un homme... Or, si ce salaire a été augmenté de 13 % par rapport à celui de son prédécesseur, c'est probablement le prix à payer pour le soutien officiel de la dame au candidat à la présidence de la République.
Elle répond à l'indignation générale en déclarant : "Cela ne dépend pas de moi et ça n'est pas lié au grand débat national […]; c'est le salaire fixé par les autorités […] [pour] les présidents de la CNDP, quels qu'ils soient", assurant que "ses missions, en tant que présidente de la CNDP, sont "plus larges que le grand débat national", ajoutant qu'elle "comprend" que ce salaire puisse choquer et invitant "les gens [à dire] […] en quoi ça les choque" et "[à] faire une proposition pour réviser ce salaire"". Un voeu qui sera entendu, puisque le statut des hauts fonctionnaires sera réformé. Elle annonce finalement qu'elle se met en retrait du pilotage du grand débat national pour éviter de perturber les discussions, mais reste présidente de la CNGD et ...conserve son salaire.

La polémique sur le salaire était née au moment où la présidente de la CNGD commençait à émettre des doutes sur les conditions dans lesquelles allait se dérouler le grand débat national. "Je suis devenue le symbole de l'injustice sociale. Et ne pouvais donc plus rester la garante du grand débat national, dont le ferment était précisément l'injustice sociale", se justifie-t-elle auprès de l'hebdomadaire Challenges (groupe L'Obs).

Une nouvelle polémique éclatera le 10 janvier.
Dans ses propos tenus la veille ("j'ai pris acte de la démission de Mme Jouanno que je regrette"), Edouard Philippe vendait la peau de l'ourse avant de l'avoir tuée, car contrairement à ce qu'avait rêvé le premier ministre, l'exécutif regrette justement qu'elle n'ait pas "démissionné" à proprement parler, puisqu'elle se maintient à la tête de la CNGD - continuant à percevoir les mêmes émoluments, sans accomplir les missions qui incombent à sa fonction, le pilotage du "grand débat". Trois personnes sont-elles payées pour assumer cette responsabilité ! Si Wargon et Lecornu ne percevaient aucune rétribution, de quelque nature que ce soit, il resterait qu'ils n'accomplissent pas les tâches liées à leurs fonctions gouvernementales, l'une secrétaire d’Etat auprès du ministre de la transition écologique et solidaire, à qui il est reproché son inaction, et l'autre comme ministre chargé des Collectivités territoriales, domaine pourtant particulièrement sollicité actuellement. 
Aussi certains membres du gouvernement (et autres politiques) encouragent-ils Jouanno à renoncer à l'autorité administrative qu'elle dirige. Ainsi que l'a déploré le premier ministre lors de son intervention du 9 janvier, la nomination de Chantal Jouanno étant "irrévocable", seule sa démission pourrait provoquer une nouvelle nomination à la présidence de la CNGD. Le 10 janvier, Chantal Jouanno annonça qu'elle ne présenterait pas sa démission et dénonça des "attaques personnelles incompréhensibles", selon elle.
Quelques jours plus tard, Mediapart révéla qu'elle avait en réalité démissionné de l'organisation du grand débat national, avant même le déclenchement de la polémique sur son salaire, après que le gouvernement a refusé de se soumettre à la méthodologie de la CNGD pour son organisation, au risque, selon Chantal Jouanno, que le débat ne devienne une "campagne de communication".

La présidente de la Commission nationale du débat public vient, une nouvelle fois, de critiquer sèchement l'organisation de la grande consultation décidée par Macron. Dans un entretien à Challenges, l'ancienne sénatrice UDI ne mâche pas ses mots sur les intentions du gouvernement. "Ce qu'Emmanuel Macron et le gouvernement ont organisé, ce n'est pas un débat public, mais une opération de communication politique", dénonce-t-elle. En janvier, déjà, elle avait qualifié sur LCI les discussions d' "opération de communication" et estimé le débat "faussé". 

"On n'est pas dans un #GrandDebat, on est dans une consultation..." 


"Quand vous procédez uniquement par un questionnaire, en réalité, la réponse est déjà faite, le débat est faussé"  
A l'approche des élections européennes, le gouvernement, et plus particulièrement Emmanuel Macron, omniprésent avec d'interminables interventions, sont pointés  du doigt pour avoir voulu transformer le grand débat en une pré-campagne électorale. Un sentiment partagé par Chantal Jouanno : " Ils ont confondu débat public et campagne électorale. Ecouter, cela n'est pas convaincre. Ni faire de la pédagogie.
En pointant la mise en place d'un questionnaire où les "questions sont vite orientées", Chantal Jouanno dénonce en même temps les sondages

Vient ensuite la question de la restitution de toutes les contributions. 
Une tâche difficile que le gouvernement n'a pas exécutée en toute transparence souligne-t-elle. "L'exécutif voulait pouvoir relire et corriger le rapport final  !" prévient ainsi Chantal Jouanno. 

La collecte des doléances et des suggestions manque en outre de diversité : les profils qui participent aux différentes réunions publiques ne permettent pas d'avoir un maillage global des demandes des Français. "C'est le grand écueil d'une consultation sujette à caution : les participants ressemblent aux organisateurs du débat. Les opposants ou les personnes isolées ne s'y rendent pas. Or, c'était justement ces populations-là que le gouvernement devait entendre", déplore l'ancienne ministre.

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