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dimanche 20 octobre 2019

Municipales 2020 : les listes communautaristes sont-elles admissibles ?

Des voix s'élèvent pour demander leur interdiction

Faut-il les autoriser dès lors que la droite veut les barrer ?

C'était aux dernières législatives.
Et trois ans plus tard, les chercheurs ne voient toujours rien venir !
A six mois des municipales, la question est soulevée par au moins deux responsables politiques. Mais, à gauche, des "chercheurs" refusent de s'alarmer face à un "microphénomène". Le débat pose la question - pendant qu'il est encore temps - de l'obligation de vigilance et d'anticipation d'un risque grandissant.
Le président de la région Hauts-de-France Xavier Bertrand (ex-LR) a soulevé le problème à la mi-septembre, demandant au gouvernement de prendre les dispositions pour interdire "qu'il y ait aux prochaines élections municipales des 'listes communautaristes' ".

"L'islam politique est en train de vouloir s'implanter", a-t-il mis en garde
, alors que le sujet des flux migratoires incontrôlés agite peu la classe politique. Sous la pression de l'opinion, un débat doit néanmoins avoir lieu à l'Assemblée nationale lundi.
La porte-parole LREM Aurore Bergé s'est elle aussi dite récemment "très favorable à l'idée qu'on les interdise. Ce sont des listes qui sont dangereuses pour la République".

Quelles sont les listes démasquées par les deux responsables ? 
Une "chance pour la France"?
Xavier Bertrand cite notamment l'Union des démocrates musulmans français (UDMF) qui "se revendique anti-impérialiste, antisioniste, anticolonialiste," prévient-il.
Créée en 2012, l'UDMF revendique 900 adhérents. Elle a déjà recueilli 29.000 voix aux européennes, avec des pics dans certaines communes: 7,43% à Garges-lès-Gonesse (Val-d'Oise) où l''Association Musulmane Antillaise (AMA) a son siège depuis janvier 2013, 6,77% à Mantes-la-Jolie (Yvelines), une commune connue pour plusieurs épisodes d'émeutes, dont celles de 1991 ou de novembre 2017 au Val Fourré, une "zone urbaine sensible" qui "souffre plus que d’autres d’une insécurité quotidienne et d’une délinquance enracinée" et "connaît depuis quelques années une dégradation importante de ses conditions de sécurité," selon les termes du ministère de l'Intérieur du gouvernement Jean-Marc Ayrault (PS)... A Poissy (PCF de 1947 à 1983, Yvelines), dans un bureau de vote, l'UDMF avait attiré 29,81% des voix : parmi la population d'origine étrangère extra-européenne, la proportion des Maghrébins est de 6,8 %.
Pour les municipales de 2020, l'UDMF a "une cinquantaine de listes en préparation", se félicite son président et fondateur  - en 2012 , il y a  seulement sept ans -  Nagib Azergui, qui réfute vigoureusement les "amalgames sournois" avec le communautarisme.
Le parti se présente sur son site comme "non confessionnel, laïc et profondément républicain". Mais "le musulman est un épouvantail qu'on resort à l'approche de chaque élection", soupire-t-il, 
suggérant l'islamophobie dont il accuse les Européens critiques, notamment l''instauration d'une directive européenne qui permettrait de dissoudre tout groupe ou media raciste. Or, il anime lui-même plusieurs sites web. Le journaliste à La Croix, Laurent de Boissieu, décrit l'UDMF comme islamiste.
Autre parti, issu lui de la communauté franco-turque, le Parti Egalité Justice (PEJ), 
Pas de photo de la candidate voilée ?
Si c'est son choix et sa liberté de femme indépendante !...
créé en 2015 à Strasbourg et pro-Erdogan, il a déjà présenté 68 candidats aux dernières législatives et donne à nouveau "rendez-vous en 2020 pour les municipales!" sur son site internet. Mais le PEJ, qui réclame "un moratoire sur la laïcité" et combat "l'enseignement de la théorie du genre", avait plafonné à 10.000 voix aux législatives de 2017. La plupart des immigrés turcs - les derniers sont des clandestins - n'ont aucun lien fort avec la France et ce sont des ruraux conservateurs, attachés à Erdogan, et des musulmans, notamment de la branche sunnite de l'islam, majoritaire en Turquie. Les pics de demandes d'asile sont  2009, 2012 et 2017. Selon les données d'Eurostat, en 2017, la France est le troisième pays qui accueille le plus de demandeurs d'asile turcs avec 1 290.
Le "micro-phénomène" représente la population de l'agglomération de Marseille, deuxième de France
Selon l’INSEE, en 2013, le nombre de Turcs est de plus de 216.000 (dont environ 102.000 femmes), c’est-à-dire 5 % de l’ensemble des étrangers vivant en France. P
our leur part, les consulats turcs de France comptent un peu plus de 611.000 Turcs et Franco-Turcs en France, 800.000 en incluant une estimation du nombre de personnes en situation irrégulière venues de Turquie. Toujours selon ces consulats, la diaspora turque en France est essentiellement concentrée à Paris (environ 270.000), à Strasbourg (environ 135 000), à Lyon (environ 130.000) et à Marseille (environ 62.000). Lors de l'élection présidentielle turque de 2018, 330.000 ressortissants turcs étaient inscrits sur les listes de l'ambassade de Turquie en France.
Des vigilants qui ne regardent pas dans leur dos.
Le champs sémantique est miné. 

"Personne ne se revendique comme ayant une 'liste communautariste': le terme n'est utilisé que pour discréditer d'autres personnes", observe le sociologue des discriminations, singulièrement éthno-raciales (et à l'école), Fabrice Dhume-Sonzogni, auteur de "Communautarisme. Enquête sur une chimère du nationalisme français". Il en va d'ailleurs de même du qualificatif discriminant de "populiste". 

Pour Vincent Tiberj, professeur à Sciences-Po Bordeaux, il ne faut pourtant pas surestimer un "microphénomène".

Image associée"Depuis les européennes de 2004 de telles listes essayent d'exister. Les résultats sont encore très faibles, quand elles réussissent à avoir des candidats et se présenter", note-t-il, en rappelant que l'UDMF "a fait 0,13% des voix aux européennes pour une population de 4 millions  de musulmans [électeurs inscrits sur les listes électorales] en France".

Qu'il peine à se projeter dans un futur proche ou qu'il préfère se voiler la face, il se félicite dans la foulée qu'on soit loin du scénario de "Soumission", le roman de 2015 où Michel Houellebecq imaginait l'élection d'un président musulman en France. 

Pour V. Tiberj, sociologue éclairé du politique à la pointe de ses chaussures, docteur en science politique de l'Institut d'Etudes Politiques de Paris où il est chargé de recherche et chercheur au Centre Emile Durkheim à Bordeaux, "la notion de vote musulman est à relativiser". Ils "votent surtout à gauche" car, pour eux, "l'agenda religieux n'est pas premier", estime ce métis de 44 ans, sur la base de son idéologie propre.
Le chercheur n'a pas toutes les clés et son positionnement manque de fondements, puisqu'il observe qu'il est difficile de dénombrer précisément les listes en partance pour la conquête des communes de France. Pas de thermomètre - ce qui est embarrassant pour un expert -, donc pas de poussée de fièvre...

Reste qu'en cette période de pré-municipales et hors des bureaux de recherche et de statistiques, le poids de l'immigration n'est pas indifférent aux électeurs, singulièrement les contribuables parmi eux, ni le risque qu'une communauté exogène prenne l'ascendant sur les indigènes, malgré les mise en gardes renouvelées et pressantes d'Eric Zemmour, caricaturé en fasciste islamophobe et vilipendé par principe, par les idéologues de la gauche radicale, qui ne le lisent ni ne l'écoutent, forts de leurs certitudes humanistes et vertueuses.


La validation par le gouvernement, en la personne de l'ex-socialiste Castaner, de la liste de l'UDMF avait été critiquée par plusieurs figures LR, en mai déjà, avant les européennes. 

Le député des Alpes-Maritimes Eric Ciotti avait attiré l'attention des responsables politiques sur "la montée du communautarisme islamiste qui gangrène notre société".

L'actuel ministre des Comptes publics n'est pas cité parmi les veilleurs de la République. Gérald Darmanin avait pourtant estimé qu'il fallait "que la République se défende" face à ces listes. Difficile néanmoins de l'accuser de toutes les infamies contre les musulmans, puisque Moussa , son deuxième prénom, est petit-fils de Juif maltais par son père et de tirailleur algérien et harki par sa mère. Est-il en outre moins informé que Vincent Tiberj parce qu'il est homme de terrain, comme maire (2014-2017), puis premier-adjoint  de Tourcoing depuis qu'il est au gouvernement ? Sa commune est dotée de quatre mosquées pour 97.000 habitants? 38 % de la population étrangère de Tourcoing (45 % à Roubaix, à 3,5 kms) est d'origine maghrébine.

"S'il y avait eu la moindre virgule de travers, on nous aurait, à juste titre, interdits", se défend N. Azergui, lequel assure par ailleurs que l'UDMF est un mouvement "citoyen". 


Le droit permet de dissoudre un groupe incitant à la discrimination raciale.

Le défi de l'islam politique est clair : 
une musulmane voilée au Palais Bourbon...


Mais l'amalgame religion-race est osé ! Et manifester une appartenance à une religion "n'est pas un élément de nature à priver une personne de la possibilité d'être candidate", insiste Romain Rambaud, professeur de droit public à l'université de Grenoble et spécialiste du droit électoral. Un expert qui n'a pourtant pas l'expérience des listes communautaristes en droit français, puisque le phénomène est nouveau. Il s'appuie sur le "droit de suffrage" et "la liberté d'expression", lesquels atteignent ici leurs limites. Comme l'âge pénal, ils ont l'un et l'autre besoin d'une sérieuse mise à jour.

Le patron des sénateurs LR Bruno Retailleau va déposer une proposition de loi pour interdire les "listes communautaristes" aux élections
.
L'objectif  dans les jours qui viennent est de "contrer ce qui est une forme de sécession"puisque ces listes veulent privilégier une partie de la population alors que notre République est 'indivisible', rappelle-t-il dans le JDD, notamment aux chercheurs.. Lesénateur n'est pourtant pas un proche du président de la région Hauts-de-France Xavier Bertrand (ex-LR) qui a demandé au gouvernement de prendre les dispositions dans le même sens.

Il propose notamment d"interdire tout financement public d'un mouvement communautariste
, qui ne respecterait pas les principes de souveraineté nationale et de laïcité, et de prohiber, sous le contrôle du juge administratif, les candidatures et la propagande électorale communautaristes".

Ces mesures de sauvegarde impliqueront 
"l'interdiction de signes religieux comme le voile sur les affiches ou les professions de foi".
"Nous souhaitons aussi que les élus, dans l'exercice de leur mandat, soient désormais tenus à une stricte neutralité, comme c'est le cas pour les fonctionnaires, lorsqu'ils représentent la collectivité, notamment lors des cérémonies officielles ou des réunions des assemblées territoriales", précise B. Retailleau. En effet, aujourd'hui, la jurisprudence de la Cour de Cassation n'est pas adaptée : elle n'élargit pas aux conseillers municipaux le devoir de neutralité religieuse des agents publics. Le sénateur estime en outre que "si la révision constitutionnelle arrive à son terme, il faudra aussi préciser notre définition de la laïcité". 

Joignant cette semaine l'intérêt électoraliste à la défense de la laïcité républicaine,
le ministre chargé des Collectivités territoriales Sébastien Lecornu a appelé à "des fronts républicains locaux" pour faire barrage à d'éventuelles listes communautaires lors des municipales de mars 2020 : LREM n'a pas d'assise locale et se sent aussi isolé que démuni en candidat(e)s. 

Bruno Retailleau propose encore "d'inscrire dans la Constitution que
'nul ne peut se prévaloir de sa religion pour se soustraire à la règle commune' ", ce qui, selon lui, "réglera tous les débats sur les horaires différenciés de piscine, par exemple".

Ainsi Bruno Retailleau n'a-t-il ni une vision à courte vue,  ni le même problème d'implantation et de visibilité territoriales et sa crainte d'un "islam politique [qui] tente de construire une contre-société à visée séparatiste et antirépublicaine" est dégagée de tout souci immédiat. Ce qui le crédibilise lorsqu'il déplore que "face à cela, Emmanuel Macron est d'une formidable ambiguïté".

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