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mardi 19 avril 2016

"Tout le monde s’en fout de 'Nuit debout'", souligne Alain Finkielkraut

Alain Finkielkraut, Nuit debout et le fascisme des antifascistes

Le philosophe Alain Finkielkraut revient sur les insultes qu'il a reçues de la foule des abrutis anonymes de la 'Nuit debout'


"Le mouvement Nuit debout est-il vraiment démocratique ?"
s'interroge francetvinfo
Ces incultes l'ont traité de "facho" en crachant sur lui, le 16 avril, en pleine Place de la République, lieu symbolique s'il en est. A propos de sa tribune publiée par Le Figaro mardi 19 avril, Le Monde parle d'"écrivain" et de simple "altercation"... Pour francetvinfo.fr, service de la chaîne publique, écrit: "l'académicien a été prié [sic] de quitter la place de la République, samedi soir, et dénonce depuis les dérives du mouvement" et précise "le philosophe est parti sous les insultes et les huées, mais pas avant d'avoir perdu son sang froid." Match nul. Très nul.

Le Monde rapporte à sa façon -édulcorée, banalisante et irresponsable
  - que l''académicien explique y avoir écouté "deux réquisitoires de cinq minutes chacun", puis avoir "déambulé entre les stands", avec un arrêt devant un atelier consacré à la cause animale. Il raconte ensuite avoir été pris à partie par quelques individus, toujours selon l'organe officieux du PS, avant d’être exfiltré du rassemblement "citoyen" par le service d'ordre. Ce mouvement spontané et sans tête est donc visiblement plus organisé qu'il y paraît.

"On célèbre l’Autre, mais on proscrit l’altérité"

Puis vient l’analyse. L’académicien est catégorique : "On est entre soi à Nuit debout. Sur cette prétendue agora, on célèbre l’Autre, mais on proscrit l’altérité. Le Même discute fiévreusement avec le Même."

Sans concession, il termine par comparer la Nuit debout au mouvement des Veilleurs apparu en 2013 pour protester contre la loi Taubira sur le mariage homosexuel, pour qui il dit ne pas avoir de "sympathie particulière" :
« Tout le monde s’en fout, de Nuit debout. Tout le monde, sauf les médias qui cherchent éperdument dans ce rendez-vous quotidien un renouveau de la politique et lui accordent une importance démesurée. Quel contraste avec les Veilleurs, ces manifestants nocturnes contre la filiation pour tous et la gestation pour autrui !
 Ca, c'est la version du journal Le Monde.

"Ma réponse à ceux qui m'ont expulsé de Nuit debout": la version officielle

Le citoyen français de confession juive raconte l'agression verbale et les menaces dont il a été l'objet place de la République samedi soir et analyse ce qui se déroule là-bas.
"Intrigué par tout ce que je lisais dans la presse sur le mouvement Nuit debout, j'ai voulu juger par moi-même. Je suis donc allé samedi soir place de la République, à Paris. A peine arrivé, j'ai été interpellé par un homme qui semblait avoir mon âge: «On va voir le petit peuple, quelle décadence!» Mon épouse, interloquée, l'a fusillé du regard. En réponse, il nous a tiré la langue, puis nous a ostensiblement tourné le dos. Refusant de nous laisser décourager par cet accueil, nous avons poursuivi notre chemin jusqu'à l'assemblée générale. Au moment d'y accéder, un jeune homme m'a dit, le regard noir et le visage fermé: «On n'a pas besoin de vous ici.» J'ai répondu que c'était moi qui avais besoin de voir et de savoir. Nous avons écouté deux réquisitoires de cinq minutes chacun - car telle est la règle, plus draconienne encore que dans les talk-shows télévisés - contre la société de consommation, et contre le capitalisme. Puis nous avons déambulé entre ..."

Mais, sans aucune pudeur, ne serait-ce que déontologique, sur un sujet aussi grave, et pour le coup historique - à la différence de Nuit Debout - marquant un recul des libertés et des droits de l'Homme, Le Figaro réclame des sous contre une information aussi essentielle... Comme les petits pois et malgré les subventions d'Etat (quand moins de 50% des Français sont des contribuables solidaires) ou la pub que nous payons une première fois à la source de la grande distribution, cette information est aussi un produit soumis au buzz. Le lecteur devra se reporter au récit de PaSiDupes lien 1 et lien 2: le pluralisme de l'information a encore du chemin à parcourir, en fait, une course d'obstacles par-dessus les abonnements et les interdits du blocage de la pub mercantile, elle-aussi. Il n'est plus de produits nobles.


Cette expulsion infâmante est révélatrice de l'état d'esprit sectaire de la gauche radicale.


"Pour ceux qui ont regardé les vidéos sur internet, la scène était insoutenable" aux humanistes,
sauf donc pour Le Monde et Libération qui s'y prend à deux fois pour réviser son point de vue.

Le fils de Sophie Bouchet-Peterson, une bourgeoise passée par la LCR, conseillère spéciale de Ségolène Royal, la candidate de la gauche battue en 2007, et actuellement chargée de mission pour ses relations, le fils à sa maman se déclare juste un peu "mal à l'aise" face à cette "scène d’intolérance primaire", avant d'expliquer que Finkielkraut est un "polémiste réactionnaire", une "tête à clash" et accuse le penseur de naïveté, à la limite de la provocation pour s'être promené dans l'espace public squatté par des énergumènes.
Le jeune journaliste bobo dénonce l'usage qui "en est fait, à droite et à l’extrême droite", bien qu'elles n'aient rien demandé! Et de verser dans l'accusation franche et odieuse: "Finkielkraut lui-même affirmant quelques minutes après sa sortie chahutée [sic] : «On a voulu purifier la place de ma présence.» "Rien que ça, se gausse le petit bourgeois bien pensant. Jugeant ensuite qu’il se serait fait lyncher sans l’intervention de quelques personnes." La belle affaire, en effet !...
Et le réquisitoire à charge se poursuit. "Il n’a toutefois pas hésité, en retour, à balancer lui aussi des «fascistes» à ses contempteurs," note le journaleux par protection, indépendant et pas sectaire. Ni antisémite. Il concède enfin que Finkielkraut, "dont les idées ne sont évidemment pas [sic] celles des participants de Nuit debout, avait pleinement le droit de se pointer sans bristol [connotation classieuse de socialiste nanti] à République, en simple spectateur.
Jonathan Bouchet-Petersen justifie les réactions antisémites de l'extrême gauche rassemblée en dénonçant la liberté de mouvements du philosophe "suffisamment lucide pour anticiper les réactions que sa présence à Nuit debout ne pouvait que susciter"...
Alors, l'illustre Laurent Mouchard-Joffrin a dû sortir de sa réserve pour noyer le poisson. Le directeur de la publication de Libération s'en prend d'abord aux "quelques dizaines de béotiens excités qui ont insulté Alain Finkielkraut samedi soir sur la place de la République, ou qui lui ont craché dessus  [ça, c'est fait... pour se dédouaner de toute], au motif noble qu' "ils n’imaginent pas le service qu’ils ont rendu aux adversaires de Nuit debout."
Un éditorial qui s'engage d'emblée sur les rails de garage du parti-pris et de la polémique. Représentent-ils le mouvement, comme le clame une bonne partie de la droite ? s'interroge le chroniqueur de métier suggérant que les Nuit Debout, comme les jeunes contre la loi Valls de réforme du droit du Travail, ont aussi leurs "casseurs", "en marge"! "Sans doute non," hésite le manipulateur des faits. Le philosophe, pendant ce court mais symbolique incident [sic], a été accompagné [?] et protégé par un service d’ordre improvisé [le visiteur indésirable était-il ou non "accompagné"?]. Sur les réseaux sociaux, beaucoup de partisans du mouvement ont condamné l’expulsion honteuse de samedi. Tout partisan sensé de cette expérience nouvelle doit dire [le journaliste est-il moralisateur ou kapo ?] : «Je me désolidarise sans nuances de ce comportement.»
Mais dans la foulée, le fourbe partage l'intolérance ambiante: "C’est un fait que les idées constamment défendues dans ses livres et dans tous les studios par Alain Finkielkraut choquent une partie de l’opinion et, a fortiori, les militants de Nuit debout. Rien d’étonnant, au fond,
comme l’a indiqué notre journaliste ­Jonathan Bouchet-Petersen sur notre site.

Mais justement. Qu’est ce que la démocratie – que les militants de Nuit debout veulent rénover et porter plus loin – sinon la capacité à accepter le dissensus, à protéger l’expression des idées différentes, à tolérer, interroge le pédant professeur, dès lors qu’on reste dans le cadre des lois, les opinions adverses, seraient-elles provocantes ou bien outrageantes ? [...] Quand on passe aux insultes, aux crachats, c’est qu’on est à court [ou démuni] d’arguments. Ou bien c’est qu’on s’en remet aux rapports de force plus qu’à la force de l’intelligence. Aveu de faiblesse intel­lectuelle. Nous sommes d’autant plus à l’aise pour rappeler ces principes élémentaires [mais théoriques] que nous n’avons pas ménagé Alain Finkielkraut dans Libération…

Du coup, on entend d’ici le réquisitoire des anti-Nuit debout, servi sur un plateau par sa frange irresponsable, dénonce le donneur de leçons. Ainsi, sur la place de la République – la place des citoyens – [mais squattée et privatisée: zone de non droit], certains sont indésirables parce qu’ils pensent mal [selon l'idéologie dominante et totalitaire]. Ainsi, alors que les sectaires de tout poil s’efforcent en général d’édicter une interdiction de parole contre leurs adversaires, on [le 'citoyen' exemplaire] vient d’inventer une prohibition supplémentaire : l’interdiction d’écouter [mais aussi de circuler dans l'espace public: l'esprit "zadiste" des anti-aéroport de Notre-Dame-des-Landes !]. Ainsi, sous la devise «liberté-égalité-fraternité», on vient de restreindre la liberté, de proclamer que certains, pour cause de déviance [à expliciter], sont moins égaux que d’autres, et de
remplacer la fraternité par un crachat. Certains disent ou diront [mais Mouchard-Joffrin n'est pas de ceux-là] que le philosophe a tout loisir de disserter dans les médias et qu’il exerce de fait un magistère télévisuel qui devrait lui suffire. [restriction de la liberté d'expression: ghettoïsation des penseurs? C'est un journaliste qui fixe les limites aux libertés]
Mais, outre qu’il n’a pas demandé à parler ce soir-là, le mouvement Nuit debout n’a-t-il pas bénéficié d’une bienveillance médiatique qui va bien au-delà de son importance numérique ? Dans une majorité de médias – à commencer par Libération qui s’est efforcé encore ce week-end de rendre compte au long
des débats tenus dans ces assemblées – [faut-il se sentir à ce point "m*rdeux" pour tenter de se justifier encore une fois?], le mouvement a été présenté, à juste titre [auto-justification...], comme un signe positif de repolitisation civique.
S’il s’agit à l’inverse d’une repolitisation sectaire, elle ne fera pas long feu et s’effilochera, comme souvent, dans les invectives et la confusion [la haine aussi]. On aurait voulu discréditer un mouvement positif mais fragile qu’on ne s’y serait pas pris autrement.
Le Mouchard s'en frotte les mains, avec le pouvoir socialiste. 
Mathieu Bock-Côté  est moins ambigu

Alors qu'il se rendait place de la République pour observer directement, sans filtre médiatique, les manifestants rassemblés dans Nuit Debout,  écrit ce docteur en sociologie, chargé de cours aux HEC à Montréal et spécialiste du multiculturalisme et des mutations de la démocratie contemporaine), le philosophe Alain Finkielkraut a été agressé par des petites brutes se considérant probablement comme l'avant-garde de la révolution, les gardiens de la tolérance et les promoteurs admirables d'une démocratie enfin délivrée de sa pudeur libérale. Car, à ce qu'on dit, à Nuit Debout, on réinvente la citoyenneté.

On pourrait n'y voir qu'un fait divers [ce que font Le Figaro ou Libération]. Mais on aurait tort. Car cette expulsion est terriblement révélatrice d'un état d'esprit sectaire étrangement encensé par les médias qui aiment bien jouer à la révolution de la jeunesse. «Bien fait pour sa gueule». «Qui sème le vent récolte la tempête». Ces formules souvent reprises sur les médias sociaux nous rappelaient l'incroyable capacité de la gauche radicale à culpabiliser les victimes et à victimiser les coupables, pour ne jamais sortir de ses schèmes idéologiques confortables. Alain Finkielkraut est par nature un vilain, et il ne sera jamais autre chose.

En se présentant dans un espace public censé mettre en scène une démocratie améliorée, Alain Finkielkraut se serait livré à une odieuse provocation, pour créer le buzz médiatique autour de sa personne. C'est un stratège rusé qui se serait présenté Place de la République pour se faire cracher dessus, se faire traiter de fasciste et ainsi donner une mauvaise image au mouvement citoyen. Et puisque Finkielkraut, excédé, finira par répondre à une femme qui l'invectivait ardemment, on présentera finalement sa brutalisation comme une simple échauffourée entre excités idéologiques.


Finkielkraut a été chassé d'un espace public confisqué par une faction idéologique qui se prend pour le peuple en marche qui distingue ceux qui y sont les bienvenus et ceux qui ne le sont pas. [discrimination au faciès?]
Les militants les plus engagés de Nuit Debout n'acceptent pas dans leur vision de la démocratie la possibilité même du désaccord idéologique. Ils savent à l'avance quelles positions sont respectables et lesquelles ne le sont pas. Un des plus grands philosophes français n'était pas le bienvenu comme un simple témoin dans le peuple militant.

Nuit Debout veut réinventer la démocratie en renouvelant en profondeur le débat public, en le délivrant de ses entraves institutionnelles. Officiellement, la démocratie représentative serait souillée et corrompue, et étoufferait la véritable délibération. [Vive la Commune. Et pourquoi pas la Constituante et la Terreur 1793-2016.] Il faudrait désormais se connecter directement au peuple, en lui permettant de parler sans filtre. [Rassurant!] C'est le rêve éternel de la démocratie directe. Mais on constate que les militants de Nuit Debout sont prêts à injurier et calomnier certaines personnes associées à des idées qui ne sont manifestement pas les bienvenues dans la conversation démocratique telle qu'ils l'imaginent.

Comprenons bien la logique: la démocratie directe se pratiquera dans un éventail idéologique assez restreint. [Elle est exclusive] Et même si nous sommes devant un mouvement qui se dit citoyen, on constate qu'il se permet de distinguer sans complexe ceux qui sont dignes d'être citoyens et ceux qui ne le sont pas. Il a là une forme d'aristocratisme militant qui ne dit pas son nom. Entre les citoyens éclairés et les autres, il y a une différence de statut qui fonde la légitimité de l'action militante. Les premiers ont eu la révélation progressiste: les autres sont dans l'obscurité et sont au mieux à plaindre.

[C'est le retour de la dictature du prolétariat]

C'est le paradoxe de la démocratie directe
: elle prétend approfondir la démocratie alors qu'elle s'ouvre à la logique de la meute en se permettant de conspuer la dissidence trop ouvertement affichée. La démocratie directe ne se croit véritable que lorsqu'elle est fusionnelle et donne à ceux qui s'y investissent le sentiment de participer à une unanimité révolutionnaire. Ceux qui ne se joignent pas au mouvement sont alors présentés comme des ennemis du peuple et même, de l'humanité. Ils ne posent pas des questions légitimes: ils polluent le bel élan révolutionnaire par la mauvaise foi. Ils ne témoignent pas d'une autre conception du bien commun mais cherchent à mutiler ce dernier. Il faut en finir avec eux.

Dès lors, l'insulte suprême peut-être lancée: on accusera Finkielkraut de fascisme.
La fascisation de l'adversaire permet ainsi d'en finir avec lui [le four à gaz ou le goulag de nos primitifs]. Car on ne débat pas avec le fascisme: on le combat. [Tout déviant est un fasciste]
Contre le fasciste, la violence est permise et même encouragée. On le chasse de l'espace public, on l'empêche de se présenter dans une agora théoriquement ouverte à tous, on l'interdira même d'écouter ce qui s'y dit: c'est un intrus, un agent contre-révolutionnaire qui vient épier les militants du monde meilleur [et qu'il faut "accompagner", comme l'écrit le si candide Mouchard-Joffrin: l'heureux temps du "rideau de fer" soviétique].

Le mouvement Nuit Debout, en se transformant en théâtre d'un triste lynchage, a dévoilé sinon sa vraie nature, du moins celle de certains de ses militants, qui carburent à un fanatisme progressiste étranger aux règles élémentaires de la civilité démocratique.

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