Benalla, petit chef de l'Elysée quand les patrons sont ailleurs
Le supérieur hiérarchique d’Alexandre Benalla, a exposé ce mercredi le rôle du chargé de mission.
FX. Lauch, 35 ans, chef de cabinet de Macron, après 2 ans directeur de cabinet du préfet des Alpes-Maritimes |
Auditionné ce mercredi par la commission d’enquête du Sénat, François-Xavier Lauch, qui l'a nommé à sa fonction, a expliqué avoir été " choqué" en voyant la vidéo d’Alexandre Benalla violentant un manifestant. mais également les détails de la sanction prononcée avant son licenciement. Capture LCP
"Chef d’orchestre des services de l’Elysée", comme il se plaît à se définir lui-même, François-Xavier Lauch a longuement répondu ce mercredi matin aux questions des sénateurs de la commission d’enquête sur l’ "affaire Benalla". Le supérieur hiérarchique du chargé de mission a d’une part assuré que la sanction prononcée à son encontre avait bien été appliquée et il a d’autre part détaillé les missions d’Alexandre Benalla auprès du président. L’une des nombreuses zones d’ombre qu’espéraient éclaircir les sénateurs.
Un "comportement individuel fautif", estime Lauch, tentant de s'exonérer de sa propre responsabilité individuelle
Commissaire Philippe Mizerski (de face à gauche) et Alexandre Benalla (casqué à droite) à Paris , le 1er mai 2018 |
Lauch se déclare solidaire, en revanche, de son supérieur hiérarchique.
"Je ne peux que souscrire" à la décision de Patrick Strzoda [le directeur de cabinet du président] de suspendre Alexandre Benalla pour 15 jours, a-t-il assuré. Et François-Xavier Lauch de préciser qu’il a en revanche ensuite géré la rétrogradation du chargé de mission de l’Elysée, à son retour de suspension, où il a été décidé d’une deuxième forme de sanction en réduisant largement son champ d'activité. Une sanction en deux temps.
Sur l’effectivité de ces sanctions, François-Xavier Lauch maintient
Il a répété que "M. Benalla n’a pas exercé ses fonctions de chargé de mission du 4 mai (où la sanction est entrée en application après lui avoir été notifiée le 3 mai) au 22 mai". Et de jurer : "Je ne l’ai pas vu pendant ces 15 jours. Je l’ai rappelé juste avant son retour en service. Je lui ai dit qu’il était attendu au service le 22 mai au matin et demandé à le voir le 24 mai." A ce moment-là, François-Xavier Lauch l’aurait de nouveau "sermonné" - après l’avoir fait une première fois à chaud - car la vidéo de son chargé de mission violentant un manifestant l’avait "choqué", a-t-il assuré.
Par ailleurs, c’est à cette occasion que son supérieur lui a "notifié oralement ses nouvelles missions", c’est-à-dire exclusivement concentrées sur les événements organisés à l’Elysée et non plus à l’extérieur. "Il était évident qu’il ne pouvait plus avoir les mêmes missions. Nous avons décidé de lui retirer ce qui fait le sel de la fonction, les missions préparatoires propres à un déplacement. Il n’a plus accompagné en tant que chef de cabinet le président. […] Il l’a très mal vécu connaissant l’attachement qu’il avait pour les missions qu’il perdait. […] Mes équipes sont petites et donc il y a eu une charge de travail plus importante", a-t-il même commenté. Pour autant, le chef de cabinet du président de la République n’a pas remplacé Alexandre Benalla.
Lauch distingue participation et organisation d’événements
Les sénateurs ont toutefois rappelé que, à plusieurs reprises après ces sanctions, le mis en cause avait été vu lors de visites privées du président. Et François-Xavier Lauch de justifier la présence d’Alexandre Benalla à "quatre moments".
Lors de l’entrée au Panthéon de Simone Veil d’abord : "c’est moi qui ai pris en charge les missions préparatoires, sans M. Benalla. Une seule mission lui a été confiée : synchroniser l’arrivée des cortèges."
Dans les jardins de Claude Monet à Giverny (Eure), "c’est moi qui ai réalisé les deux missions préparatoires. Mais la visite a été déclassée en déplacement non-officiel. Donc il a pu l’accompagner : lorsque c’est un déplacement privé ce n’est plus pareil." La question reste non élucidée sur le motif de ce déclassement...
Pour le 14 juillet, "M. Benalla était en charge de la question des invitations, environ 15.000, c’est vraiment quelque chose de masse... La vérification du placement etc. Mais pas en matière de coordination", a-t-il nuancé
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Enfin, l’accueil bâclé des Bleus de retour de leur victoire à la Coupe du monde, " c’était un événement exceptionnel, qui a mobilisé fortement les services de l’Elysée auprès de la préfecture. Il a été organisé sans M. Benalla mais il lui était demandé d’être le garant de l’arrivée du bus, en contact avec moi. » Là aussi, a-t-il précisé, « il ne s’agit pas d’un déplacement officiel du président. Donc je considère que nous avons appliqué la sanction."
Mais nul ne sait qui remplaçait Benalla à chaque fois que celui-ci était déchargé...
Lauch confirme une crainte de braquer l'intime du président
Interrogé sur la durée prévue de cette rétrogradation, François-Xavier Lauch a expliqué qu’il était avant tout question de "marquer le coup", "lui redire par cette sanction que son comportement était inacceptable".
Puis, " malheureusement, il y a eu ces faits nouveaux qui ont mené à son licenciement et donc je n’ai pas eu à me poser la question de la durée", a répondu son supérieur, en référence à sa garde à vue mi-juillet, la révélation d’une deuxième vidéo accablante du 1er mai et surtout la révélation de l’obtention illégale de preuves, qu’il n’aurait jamais dû avoir en main. Trois policiers, soupçonnés d’avoir transmis des images de vidéosurveillance à Alexandre Benalla, ont d’ailleurs été suspendus.
Ses missions et son rôle exact, avant son licenciement, sont globalement au cœur des auditions du Sénat.
Les sénateurs ont également relevé que Benalla avait alors été privé des missions pour lesquelles il avait a priori été recruté. François-Xavier Lauch a notamment confirmé qu’il n’avait "pas de mission de police" et ce, malgré la justification utilisée pour obtenir son permis de port d’armes. "Cette demande n’a pas transité par mes mains," s'est défendu Lauch et "je n’ai jamais vu M. Benalla avec son arme", a précisé François-Xavier Lauch, qui décidément ne voit jamais rien.
Mais Lauch aurait l'ouïe fine... "J'ai entendu parler de milice" à la présidence, "ce n'est absolument pas le cas", a certifié, sous serment, l'ex-supérieur hiérarchique de celui que certains ont qualifié de "Rambo" de l'Elysée.
Selon le chef de cabinet aveugle, ses fonctions étaient "extrêmement claires", "cadrées" : "l'organisation des déplacements nationaux du président de la République", "l'organisation des événements au palais de l'Elysée" et enfin "la coordination, sous l'autorité du directeur de cabinet [Strzoda], des deux services de sécurité de l'Elysée".
En l'occurrence "des choses très administratives", a-t-il minimisé - bien qu'elles aient été confiées à un simple garde du corps, en apparence - alors que la commission cherche à savoir si, en vérité, M. Benalla n'a pas rempli une fonction de protection personnelle du chef de l'Etat, tâche sensible qui incombe à des unités d'élite de la police et de la gendarmerie sous la responsabilité de généraux.
En l'occurrence "des choses très administratives", a-t-il minimisé - bien qu'elles aient été confiées à un simple garde du corps, en apparence - alors que la commission cherche à savoir si, en vérité, M. Benalla n'a pas rempli une fonction de protection personnelle du chef de l'Etat, tâche sensible qui incombe à des unités d'élite de la police et de la gendarmerie sous la responsabilité de généraux.
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