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samedi 1 décembre 2012

Florange: le compromis gouvernement-Mittal ne règle rien

Mittal paiera mais les incertitudes demeurent sur les haut-fourneaux

Le  patron d'Arcelor a trouvé samedi un  compromis avec le gouvernement

Le géant indien se dit satisfait, mais le gouvernement n'a pas dissipé le flou sur l'avenir des haut-fourneaux.
Arnaud Montebourg, qui s'est beaucoup impliqué dans ce dossier, confondant investissement et mise en scène, agression et négociation, a plaidé en vain pour une nationalisation temporaire du site mosellan.

Le président Hollande piégé par son ministre


"C'est le président de la République qui décidera" ou non en faveur de la nationalisation, avait déclaré Arnaud Montebourg à la sortie d'un café du quartier où il avait pris le petit déjeuner avec une dizaine de métallos qui lui mettaient la pression en campant sous les fenêtres de son ministère. Mais " ce n'est pas un faux espoir, c'est une solution. C'est une solution qui est sérieuse, crédible, durable ", a insisté le ministre, qui avait été le premier à vouloir imposer la nationalisation. Pour lui, une telle option n'était pas de nature à effrayer les investisseurs étrangers: " Je crois que Barack Obama a nationalisé, les Allemands nationalisent, tous les pays nationalisent... Je ne vois pas où est le problème, " avait maintenu le ministre illuminé pour qui "c'est très moderne de nationaliser !..."

Pour le président du
MoDem, François Bayrou, le projet de nationalisation "peut être envisagé (...), mais avant on est en droit de demander au gouvernement d'être un peu plus équilibré et d'agir un peu moins par foucades, par invectives".

Michel Delebarre
, sénateur-maire PS de Dunkerque
, où sont installés d'autres hauts-fourneaux d'ArcelorMittal, a regretté lundi soir des "déclarations à l'emporte-pièce" sur ce dossier, ciblant clairement  Montebourg.


Hollande repasse le mistigri à Ayrault

Le président de la République devait être l'arbitre. "J'imagine bien que François Hollande, s'il demande à rencontrer Lakshmi Mittal, c'est pour essayer de remporter le dernier bras de fer (...) et le convaincre à travers un accord négocié de céder le site de Florange", a déclaré sur France Inter Edouard Martin, délégué CFDT du site.

Le ministre du Redressement productif a d'ailleurs prétendu samedi soir ne pas se sentir désavoué par le jugement de Salomon du Premier ministre, Jean-Marc Ayrault.
"J'ai décidé de rester à mon poste de travail et de combat", a déclaré Montebourg sur TF1, réfutant toute idée de démission et confirmant ainsi que tout Premier ministre qu'il soit, Ayrault n'est pas le patron.

Le gouvernement recule sur la nationalisation

Le coprésident du Parti de Gauche, Jean-Luc Mélenchon, sur BFM TV et RMC, avait apporté son soutien à   Montebourg, rappelant que le premier à avoir demandé la nationalisation "c'est Bernard Thibault", le secrétaire général de la CGT.

Les syndicats ont donc  diversement apprécié l'arbitrage du président socialiste
Certes les 629 salariés menacés du site mosellan échappent transitoirement à un plan social, mais le compromis n'infléchit pas réellement la position d'ArcelorMittal, qui fait des concessions financières et non pas stratégiques.


En effet, toutes ces tractations n'ont pas fait varier d'un iota un des points essentiels de la stratégie de Lakshmi Mittal:
les hauts-fourneaux de Florange ne devraient plus cracher de brames d'acier brut. La négociation a abouti à des investissements sur "l'aval", c'est-à-dire la transformation de l'acier en produits industriels élaborés et non sur "l'amont", la production d'acier proprement dite.

Ayrault avoue rester sur le qui-vive
Évoquant"des interrogations qui se sont exprimées du côté des salariés" après l'annonce du compromis passé entre le gouvernement et ArcelorMittal, il indique qu'il "veillera scrupuleusement à la réalisation effective des engagements pris"

Jean-Marc Ayrault rappelle que ces engagements portent sur l'absence de plan social, "des investissements d'au moins 180 millions d'euros sur le site de Florange et sur le projet Ulcos".

En attendant Ulcos ?

Le gouvernement s'abrite derrière le projet européen Ulcos 
L'Union européenne n'a pourtant pas encore décidé de permettre -à terme- à un des haut-fourneaux de Florange de produire de l'acier en émettant beaucoup moins de CO2 pour faire meilleure figure, car il affirme qu'ArcelorMittal s'est engagé sur ce dossier.

Et c'est peut être dans ce flou que réside la supercherie
ArcelorMittal ne faisait samedi dans son communiqué aucun commentaire sur le projet Ulcos, contrairement au communiqué publié quelques minutes après par Jean-Marc Ayrault certifiant que "le projet Ulcos" - bien qu'il ne soit pas validé - est  inscrit dans les engagements pris par le groupe.

Montebourg affiche une défiance tous azimuts 
Interrogé, Montebourg admettait d'ailleurs que le projet n'était pas abouti, que Mittal s'est simplement "engagé à étudier le projet", et a  appelé Jean-Marc Ayrault à plus de radicalité.
"Je crois que le Premier ministre peut faire preuve d'encore plus de fermeté pour obtenir davantage d'ArcelorMittal".

Le ministre a également affirmé que le président François Hollande lui a assuré que l'option d'une nationalisation de Florange reste sur la table si le groupe ne respectait pas ses engagements.


Les réactions sont mitigées, mais évolutives

Arnaud Montebourg avait suscité l'espoir d'une nationalisation temporaire chez les syndicalistes et sur l'échiquier politique. Dans la journée du mardi 27 novembre, Arnaud Montebourg avait salué l'unité nationale qui se dessine selon lui sur une nationalisation temporaire du site de Florange.
Les syndicalistes CFDT et FO
appâtés au croissant

Mais la mergez partagée par Hollande et les croissants offerts par Montebourg à l'heure des poubelles leur sont restés en travers du gosier.



La CFDT a critiqué la "méthode" du ministre et du gouvernement, lui reprochant d'avoir "suscité énormément d'espoir, aujourd'hui déçu", mais tient l'arbitre élyséen en dehors de ses rancoeurs

FO
s'est déclaré "satisfait", mais redoute de la "poudre aux yeux".

"J’ai entièrement confiance en messieurs Hollande et Montebourg, avait pourtant cru pouvoir affirmer Walter Broccoli, délégué FO de Florange. J’ai entendu Arnaud Montebourg dire qu’il était prêt à aller jusqu’au bout, le président de la République aussi, on a vu les élus de droite, de gauche, nous soutenir jusqu’au bout, je vois mal aujourd’hui le gouvernement faire marche arrière. Pour nous, il n’y a aucun mystère : ou Mittal fait marche arrière, ou on nationalise ".

 
La CFE-CGC, elle est content qu'il n'y ait pas de nationalisation.

Comme Mélenchon, la CGT était en revanche plus soupçonneuse: " On a besoin de sérieux sur cette affaire. On va avoir aussi une visibilité sur ce qu’a annoncé à demi-mot Arnaud Montebourg à l’Assemblée nationale, le fait qu’il y aurait deux marques d’intérêt sur Florange. Nous, on veut savoir exactement ce que c’est, sur le fond."

Chez les politiques, Harlem Désir, premier secrétaire du PS, désigné par l'Elysée, a appelé tout le monde à se mobiliser "pour l'avenir de Florange", tandis que pour le député socialiste de Moselle, Michel Liebgott, l'accord "n'est pas la panacée mais il permet de préserver l'emploi".

La présidente du FN, Marine Le Pen, demande "un plan d'ensemble en faveur de la sidérurgie française".
Le président de l'UDI, Jean-Louis Borloo, veut "un grand débat" sur la filière.


L'UMP dénonce unanimement le gouvernement. 

Le secrétaire général sortant, Jean-François Copé, a critiqué vendredi
"une forme d'improvisation au sommet de l'Etat", et l'ex-Premier ministre François Fillon a stigmatisé samedi "l'incohérence" et "l'irréalisme" de l'exécutif.

A Florange, les habitants ont accueilli ces annonces avec méfiance, en ce jour de la Saint-Eloi, patron des métallos.
"Lakshmi Mittal a roulé tout le monde dans la farine", peste Serge Gremese, ouvrier de 40 ans qui, d'avoir trop écouté Aurélie Filippetti et les visiteurs socialistes parisiens en campagne, ne réalise pas que la sidérurgie se porte mal partout en Europe et que Mittal reste le seul maître des forges.

Le ministre du Travail Michel Sapin a dit "comprendre les réactions de scepticisme des salariés", "compte tenu des antécédents" de L. Mittal, qui a souvent  manqué à ses promesses en s'adaptant à la crise internationale.

Z-Ayrault-pointé a ajouté à la morosité en réaffirmant samedi la nécessité de "veiller scrupuleusement à la réalisation effective des engagements".

Pour conserver un minimum de crédit, le Premier ministre s'est cru obligé de saluer samedi le travail de Arnaud Montebourg qui,selon lui, "n'a pas ménagé sa peine pour  "créer un rapport de forces favorable" et chercher toutes les solutions possibles". Sans les trouver.

Montebourg a mené la représentation nationale en bateau  pédalo

Un repreneur de l'intégralité de Florange est prêt à investir "près de 400 millions d'euros" sur le site sidérurgique qu'ArcelorMittal souhaite en partie fermer, avait déclaré le ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg, devant les députés. "La décision est entre les mains de M. le président de la République et de M. le premier ministre, je ne doute pas qu'ils prendront les bonnes décisions après les réponses de Mittal", a-t-il conclu, avec le respect dû 
à Monsieur Mittal par un ministre à l'Assemblée.

VOIR et ENTENDRE le poker-menteur du ministre de Hollande le 28/11/2012 :



A noter que Michel Liebgott, député socialiste de Moselle, n'avait pas manqué d'abonder dans le sens de Montebourg, ajoutant sur BFM-TV qu'il s'agissait d'un "industriel crédible".


Politiquement, le dénouement devrait, à plus ou moins court terme, avoir des conséquences pour Montebourg, qui n'a pas su faire pencher en sa faveur l'arbitrage de Matignon et imposer la nationalisation promise de Florange.
Le secrétaire général réformiste de la CFDT, proche du PS,  François Chérèque, a estimé mercredi qu'Arnaud Montebourg a fait "un pas de trop" face à ArcelorMittal. "Quand on a 23.000 salariés (en cause) et qu'on n'a pas les moyens de reprendre toute la branche, c'est une erreur", a-t-il déclaré en marge d'une assemblée générale des cadres de la CFDT.

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