Le président Macron suscite l’indignation avec une plaisanterie sur les Comoriens
Le président de la République a déclenché un scandale avec une "mauvaise plaisanterie" sur les "kwassa-kwassa"
Le sens de l'humain d'un banquier
Ces frêles embarcations ne servent pas à pêcher, selon lui, mais à "amener du Comorien" à Mayotte. Or, c'est à bord de ces frêles embarcations qu'ont péri de nombreux migrants. Parce ce qu'il n'y voit qu'"un trait d’humour", certes "malheureux qui a pu blesser", l’Elysée n'envisage pas d’excuses et raconte qu’Emmanuel Macron a "toujours eu une position très claire, faite de fermeté et d’humanité, sur le sujet des migrations dans l’Océan indien, qu’il connaît bien car il s’est rendu à la Réunion et à Mayotte avec des prises de position sur ce problème" - en passant - pendant sa campagne.
L'entourage du président polémique
"C’est un mauvais procès qui lui est fait quand on connaît ses positions", se défend l’Elysée. Sa visite jeudi au Centre régional de surveillance et de sauvetage atlantique (Cross) d’Étel (Morbihan) a été filmée par le "pool" (en français, l'équipe) de journalistes accrédités, et diffusée vendredi dans l’émission Quotidien de TMC, chaîne de télévision généraliste française d'origine monégasque du Groupe TF1.
La vidéo montre le chef de l’Etat échangeant avec des officiels, quand l’un d’entre eux évoque différents types d’embarcations: "Il y a des tapouilles et des kwassa-kwassa". "Ah non, c’est à Mayotte, le kwassa-kwassa", objecte alors le président Macron, avant de poursuivre, finement : "Mais le kwassa-kwassa pêche peu, il amène du Comorien, c’est différent".
Et d'insister : "Les tapouilles, c’est les crevettiers”. Les kwassa-kwassa sont régulièrement utilisés par des migrants de l’archipel indépendant des Comores pour gagner Mayotte, territoire situé à 70 km et devenu le 101e département français en 2011.
Et de poursuivre le cours : "Rapportée à la population du département, la pression migratoire (y) est sans commune mesure avec l’immigration que connaît la métropole", relevait le député PS Erwann Binet dans un rapport parlementaire mi-2015. La population mahoraise, estimée à 220.000 habitants (chiffres de 2012, que beaucoup, localement, estiment très en-dessous de la réalité), compterait en effet environ 40% d’étrangers. 
L'aide médicale d'Etat (AME) permet aux immigrés en situation irrégulière de bénéficier de soins médicaux gratuits pendant un an (renouvelable). Mais pour en bénéficier, il faut justifier d'une résidence stable en France (y être installé depuis au moins trois mois) et ne pas avoir gagné plus de 9.631 euros [sic] l'année précédente.
Les migrants empruntent ces “kwassa-kwassa”, des embarcations de fortune, pour rallier les côtes mahoraises illégalement. En 2015, il y a eu plus de 19.000 reconduites à la frontière à Mayotte contre environ 20.000 sur le territoire métropolitain. Mais ces traversées occasionnent "entre 7.000 et 10.000 morts depuis 1995" d’après un rapport sénatorial de 2012. Un détail sujet à plaisanterie de Macron.
Les humilié(e)s réclament des "excuses publiques"
"Ce n’est pas parce qu’on dit que c’était pour rire qu’on n’a rien dit", a déclaré en Corse le chef de file LR pour les législatives, François Baroin, pour qui ces propos sont "choquants, encore plus quand on est président". Et de nombreux autres responsables ont réagi par tweets.
"Si Sarkozy président avait prononcé cette phrase face caméra, le tollé aurait été gigantesque. 'Du' comorien [langage désobligeant d'un ..."lettré" passé par hypokhâgne et khâgne au lycée Henri-IV, certes en échec à deux reprises à l'écrit du concours d'entrée de l'École normale supérieure...]. 12.000 morts", s’est indignée l’ex-ministre écologiste Cécile Duflot.
"Président du groupe d’amitié France-Union des Comores de l’Assemblée nationale, j’invite Emmanuel Macron à régler les problèmes locaux plutôt qu’à en rire", a déclaré le député PS de Seine-Saint-Denis, Daniel Goldberg, membre de la Gauche socialiste (GS), un courant du PS fondé par Jean-Luc Mélenchon et Julien Dray en réaction à "l'ouverture" du gouvernement de Michel Rocard, rejoints par plusieurs personnalités de l'aile gauche du Parti socialiste, notamment Marie-Noëlle Lienemann ou de la LCR comme Gérard Filoche.
"Choquant, venant d’un président", a déploré Nicolas Dupont-Aignan, ex-candidat Debout la France à la présidentielle;
"indigne", selon le secrétaire national du PCF Pierre Laurent;
une "blague douteuse", selon la députée européenne LR Nadine Morano;
"il rabaisse la France", pour le vice-président du FN Florian Philippot.
Candidat de la France insoumise à la législative dans la 4e circonscription de Marseille, port ouvert sur l'Orient méditerranéen, Jean-Luc Mélenchon a jaugé l'homme, estimant qu’ "il y a quelque chose de conscient chez lui. C’est une sorte de mépris de la classe… [notion marxiste] après ses propos sur les illettré(e)s [de Gad, abattoirs de la filière porcine bretonne], et d’autres encore".
"Il a une manière extrêmement désinvolte de parler de la mort des gens", a-t-il insisté.
Plus tôt, au cours de son discours au Cours Julien, le leader de la FI a demandé au public d’observer une minute de silence.
Des acteurs associatifs ont aussi dénoncé les propos du président Macron, "condamnés avec la plus grande fermeté" et qualifiés de "racistes et déshumanisants" selon le Conseil représentatif des Français d’origine comorienne. “Nous demandons expressément des excuses publiques du président et qu’il prenne sa responsabilité sur cette tragédie", a demandé le président de cette association, Nassurdine Haidari, élu socialiste de Marseille où il est né en 1998. Selon lui, ces commentaires sont "dignes de la famille Le Pen. Et plus précisément de Jean-Marie Le Pen".
En 2011, excédé par la montée de l’islamophobie et la polémique des prières de rue, Haidari écrivit une tribune dans ...Le Monde, intitulée: "Et bien le musulman, il t’emmerde !". On dirait que Macron le lui rend bien...
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