Et piquer les retraités, ça coûterait trop cher ?
Le Comité consultatif d'éthique (CCNE) rendra enfin public, lundi, son avis sur la fin de vie.
Ce sujet englobe l'insuffisance des soins palliatifs en France et la délicate question de l'euthanasie.
"Malgré les apports indéniables de la loi Leonetti, la législation en vigueur ne permet pas de répondre à l'ensemble des préoccupations légitimes exprimées par des personnes atteintes de maladies graves et incurables", soulignait l'Elysée dans un communiqué après la remise du rapport du Pr Didier Sicard, en décembre 2012.
Le projet de loi sur la fin de vie, promis par le candidat Hollande, était initialement annoncé pour avril 2013 après la remise du rapport Sicard -- rédigé après cinq mois de réflexion et une dizaine de "débats citoyens" -- qui maintenait le rejet d'inscrire l'euthanasie dans la loi.
Devoir de mémoire
Jacques Attali, à l’époque conseiller particulier de Mitterrand, écrivait en 1981 dans son ouvrage L’avenir de la vie (Seghers 1981) les considérations suivantes: " …l’allongement de la durée de la vie n’est plus l’objectif souhaité par la logique du pouvoir. Dès qu’il atteint 60-65 ans l’homme vit plus longtemps qu’il ne produit et il coûte cher à la société. En effet du point de vue de la société, il est bien préférable que la machine humaine s’arrête brutalement plutôt qu’elle ne se détériore progressivement."
En 2010, J. Attali a 67 ans et présente sa nouvelle vison du futur système de santé lors des Journées de la Fédération de l’hospitalisation privée. Il fait alors cette déclaration surprenante sur le déficit de la Sécurité Sociale : "Le fait que les dépenses de santé augmentent n’est pas une mauvaise nouvelle. Ce sont de bonnes dépenses car l’espérance de vie augmente et parce que c’est un secteur qui crée des emplois… Il ne faut pas que la santé accepte de tomber dans le piège de la maîtrise de ses dépenses." (Inf. Q.du M. 24 novembre) .
François Hollande a saisi le Comité d'éthique de trois questions.
Il s'agit tout d'abord de savoir "comment et dans quelles conditions recueillir et appliquer des directives anticipées émises par une personne en pleine santé ou à l'annonce d'une maladie grave, concernant la fin de sa vie".
Aussi peu connues et appliquées que celles plus anciennes relatives aux dons d'organes, les "directives anticipées", introduites par la loi Leonetti de 2005, sont des instructions données par une personne sur sa fin de vie, au cas où elle serait ensuite dans l'incapacité de le faire. Toutefois les médecins ne sont pas tenus actuellement de respecter ces souhaits des patients.
Le CCNE doit suggérer "comment rendre plus dignes les derniers moments d'un patient dont les traitements ont été interrompus à la suite d'une décision prise à la demande de la personne ou de sa famille ou par les soignants" et "selon quelles modalités et conditions strictes permettre à un malade conscient et autonome, atteint d'une maladie grave et incurable, d'être accompagné et assisté dans sa volonté de mettre lui-même un terme à sa vie".
Le Comité d'éthique s'est exprimé à plusieurs reprises ces vingt dernières années sur ces questions d'euthanasie et de fin de vie.
En 1991, il s'était déclaré contre l'idée d'une loi qui légitime l'acte de donner la mort à un malade. Mais pour la première fois en 2000, il proposait la notion d'une "exception d'euthanasie".
Fin avril, les députés de la majorité socialo-écolo avaient rejeté une proposition de loi de Jean Leonetti (UMP) visant à compléter sa propre loi de 2005 sur la fin de vie et qui visait notamment, en reprenant le rapport Sicard, à créer "un droit à la sédation" pour les malades conscients en phase terminale dont les souffrances physiques et morales ne sont plus soulagées par les traitements.
Marisol Touraine, ministre de la Santé, avait estimé qu'il "fallait aller plus loin" que la loi de 2005, mais qu'il convenait, avant de légiférer, d'attendre l'avis du CCNE !