Formé au théâtre et en école de jésuites
Ebranlé par les mouvements sociaux, Macron adopte une nouvelle posture
L'individu a la présence d'un histrion de tournée Karsenty animée par Brigitte,
mais des intonations de jésuite en chaire et des attouchements appuyés de 'back street'
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Le G7 à Biarritz a marqué la rentrée de Macron après un été de travail et bronzette, de "discrétion" et sorties régulières médiatisées avec groupies sélectionnées, marquées d'un bracelet vert ou bleu: tout était mis en scène. Une manière de sécuriser un président de la République psychologiquement affaibli par les émeutes de Gilets Jaunes qui, en novembre et décembre, ont assiégé le palais présidentiel où ses locataires sont allés se réfugier dans les sous-sols bunkérisés. Ses services ont tout mis en oeuvre pour l'apaiser et lui permettre de poursuivre sa marche et construire la suite de son quinquennat sur un changement de méthode. "Il se met magnifiquement en scène, c'est un très bon acteur, il est très bon dans la mise en scène de soi-même", estime Eric Zemmour.
Pour le G7, il a sorti le grand jeu et produit un numéro habile et efficace.
Mais il n'a pas craint de faire tout à l'inverse de ce qu'il prônait depuis deux ans. Un retournement qui interpelle les experts de la politique, comme les psychologues, puisqu'il est capable de faire tout et son contraire: stratégie de la surprise, pour les uns, instabilité du bipolaire, aux limites de la schizophrénie, selon les autres. Ses centres d'intérêts étaient soudain devenus les violences faites aux femmes, aussitôt testés par le Brésilien Bolsonaro qui s'en est pris à sa femme âgée, en riposte à son insulte du Brésilien qu'il avait commencé par traiter de "menteur", ou l'écologie, au moment des départs de feux en Amazonie, tout sujet étant monté en épingle pour tenter de lui conférer la stature internationale qui sied à l'hôte des sept puissances les plus puissantes au monde, à l'heure du G7 de Biarritz et à la faveur du désordre politique en Europe, au Royaume-Uni (Brexit), en Italie (débarquements de migrants), et en Allemagne (inquiétudes sur la santé de la Chancelière). Par chance pour Manu, il ne restait plus que lui pour représenter l'Europe.
"Emmanuel Macron a marqué des points, applaudit Laurent Joffrin, directeur de la rédaction de Libération (détenu par les hommes d'affaires Bruno Ledoux et Patrick Drahi, lequel cumule la propriété de plusieurs organes de presse, dont BFM). Il a survécu à la crise des 'gilets jaunes'. Tout cela est plutôt réussi," estime le thuriféraire appointé, toute honte bue.
"Le changement de méthode qu'on nous explique, en gros, c'est Hollande. On va négocier avec les corps intermédiaires. On se rabiboche avec la CFDT pour la réforme des retraites. Laurent Berger devient l'allié incommode du gouvernement pour faire passer les réformes."
"C'est exactement ce que faisait Hollande, qui consiste à temporiser, à ne pas brusquer les Français de manière indue, et s'occuper de leurs représentants, analyse le socialiste Laurent Mouchard-Joffrin. La réforme des retraites va prendre du temps. Et on disait dans le quinquennat précédent que c'était trop lent, qu'on prenait trop de temps. Ils ont essayé d'aller vite, à la hussarde au début du quinquennat, ça a débouché sur les 'gilets jaunes' [L'analyse est réductrice: elle occulte en effet la grogne sociale et le combat pour la sauvegarde du pouvoir d'achat]. Il y avait un côté arrogant dans ce côté réformateur par le haut."
C'est donc le retour de la politique à l'ancienne.
Le "monde nouveau" annoncé peut attendre.