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mardi 8 mars 2011

L'onde de choc arabe arrive à nos pompes

Le prix du pétrole pourrait freiner la reprise

Le cours du pétrole a atteint un sommet inégalé depuis 2008

Hier, le spectre qu'il n'entraîne le monde dans une nouvelle récession a resurgi. Bien des experts estiment cependant que la reprise économique est assez solide pour encaisser le choc, à condition que la crise qui secoue la Libye ne s'étende pas à d'autres pays producteurs.

En fin de semaine dernière, les prix de l'essence ont atteint un record historique à la pompe, toutes taxes comprises et en moyenne en France, à :

=> 1,5067 euro
par litre pour le super sans plomb 95, soit plus que son record de 1,4971 euro atteint en juin 2008
=> et 1,5417 euro par litre pour le sans-plomb 98, franchissant là aussi le plus haut de 1,5326 euro établi en juin 2008,
selon les relevés publiés lundi 7 mars par la Direction générale de l'énergie et du climat (DGEC).
=> Quant au gazole, son prix a progressé à 1,3513 euro TTC le litre, soit son plus haut niveau depuis la semaine terminée le 1er août 2008. Ce carburant, le plus vendu en France (78 % de la consommation), reste encore à 10 centimes de son record historique du 30 mai 2008 à 1,4541 euro par litre.

Aujourd'hui en France, le baril de brut est à 115$
Au Canada, il s'est brièvement échangé à près de 107$US, hier matin, avant de clore la séance à 105,44$US. On est certes encore loin du sommet historique de 147$US touché en juillet 2008, mais c'est beaucoup comparé aux 68$US que coûtait un baril en mai dernier.

Les révolutions arabes ont un coût pour

La poussée du prix du pétrole survient alors que les idéologues vertueux occidentaux soutiennent les opposants au régime de Mouammar Kadhafi
et que dégénèrent les affrontements armés en Libye.
Ce pays méditerranéen ne produit que 1,8% du pétrole au monde, mais alimente à lui seul 10% du marché européen.
Au cours des deux dernières semaines, les exportations de pétrole réalisées par la Libye se sont élevées à environ 770 millions de dollars (555 millions d'euros), estime le Financial Times.

«Le problème, ce n'est pas la Libye, minimise l'économiste Yanick Desnoyers, de la Banque Nationale. Le problème, c'est de savoir s'il y aura une escalade qui s'étendra à d'autres pays pour faire perdurer le choc et faire en sorte que le prix du pétrole augmente davantage.»

Le prix du baril plombera-t-il la reprise ?

Déjà, depuis quelques semaines, les automobilistes encaissent les conséquences de l'abandon des régimes en place et la flambée de l'or noir. Le prix de l'essence a augmenté du tiers depuis le temps des Fêtes. Hier, le litre de sans-plomb a bondi à 1,36$US dans certains secteurs.

«Ce qui entraîne un ralentissement économique, c'est une hausse brutale qui change complètement les conditions du marché en peu de temps, explique Martin Coiteux, professeur au service d'enseignement des affaires internationales à HEC Montréal. C'est un peu ce qu'on vit à l'heure actuelle. La question, c'est de savoir si ça va continuer de monter à une vitesse très grande et à un niveau très élevé.»

Si la flambée des prix se poursuit, les banques centrales, surtout en Europe, seront tentées de hausser leurs taux d'intérêt pour juguler l'inflation. Tout cela va freiner la fragile relance économique.

Le porte-monnaie européen se balance maintenant des libertés populaires
Si la crise politique qui a déjà balayé la Tunisie, l'Égypte et la Libye devait s'étendre à un producteur majeur comme l'Arabie Saoudite, le prix du pétrole pourrait atteindre des sommets, estiment les experts. Un scénario qui aurait des conséquences graves.

Les ménages américains sont déjà endettés jusqu'au cou et n'auraient pas les moyens d'absorber un choc majeur à la pompe. Les entreprises cesseraient d'embaucher. Le gouvernement Obama n'aurait plus les moyens de financer son onéreux plan de relance, lui qui a déjà injecté une masse sans précédent de dollars pour contrer la récession de 2008. Et l'économie canadienne suivrait de près les États-Unis dans la récession.

Pas de panique

Vendredi, la production de pétrole libyen avait chuté "d'environ 1 million de barils par jour", contre une production quotidienne de quelque 1,6 million de barils. La production a diminué de moitié depuis le début des violences, selon la compagnie gouvernementale NOC (Libyan National Oil Corporation).
Mais l'Arabie Saoudite est capable de compenser tout manque de pétrole sur le marché global relevant des troubles en Libye, a déclaré mercredi le chef de l'Agence internationale de l'énergie (AIE). Le gouvernement saoudien a dit lundi se tenir prêt à assurer la stabilité du marché après la baisse de production en Libye.

Les membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) mènent actuellement des consultations à propos de l'impact des troubles en Libye sur le marché pétrolier, a fait savoir mardi un ministre du Koweït, également exposé à la contestation.

En France, il n'y a pas encore de quoi s'alarmer, pour le moment.
Mais, considérant que le cours du pétrole devrait grimper encore pendant plusieurs jour et rester élevé sur une période prolongée, affectant de manière significative le pouvoir d'achat des ménages, la menace de restrictions pèse sur la distribution de l'essence.

Les conséquences d'une chute de Khadafi sur l'économie française

La commande aux chantiers navals STX de Saint-Nazaire d'un paquebot par la compagnie libyenne GNMTC (dont l'un des fils Kadhafi est le dirigeant) "est toujours en vigueur", selon la direction. Confirmée en juillet 2010, elle doit donner lieu à 5 millions d'heures de travail pour une livraison prévue fin décembre 2012 et avoir des retombées économiques sur tout le bassin industriel de la région et la ville socialiste de Nantes voisine.

Air France
a décidé de reporter l'ouverture de sa ligne Paris-Tripoli, initialement prévue en mars.

Total a rapatrié "la majeure partie" de ses employés français en Libye ainsi que leurs familles, "quelques effectifs" restant sur place "avec des mesures de sécurité renforcées".
Le groupe français de BTP Vinci a également annoncé rapatrier ses expatriés travaillant sur la construction de la tour de contrôle du nouvel aéroport international de Tripoli. De nombreuses entreprises étrangères ont également procédé à l'évacuation de leurs salariés.

L'envolée des prix du pétrole commence à pénaliser le commerce extérieur
L'activité continue sa progression, mais le commerce extérieur affiche pour le mois de janvier un déficit de près de 5,89 milliards d'euros (5,06 milliards en décembre) du fait principalement de la hausse de la facture pétrolière. « En janvier 2011, la facture s'alourdit de près de 600 millions d'euros », constatent en effet les Douanes françaises.
Du côté des exportations, la tendance est moins dynamique mais est encore bonne.
Souci ajouté : la valeur de l'euro.

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