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lundi 15 avril 2019

L'abattement fiscal des journalistes est-il équitable ou discriminant ?

Faut-il supprimer l'avantage fiscal les journalistes ?


L'Assemblée a adopté un article limitant le bénéfice de l’abattement fiscal des journalistes à ceux gagnant moins de ...6.000 euros nets par mois !
 

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Août 1789-Avril 2019 : Macron peut faire de son allocution du 15 avril
une nouvelle "nuit d'abolition des privilèges"
Encore un petit effort, mesdames et messieurs les parlementaires ! Ce seuil reste extrêmement indécent, à la limite de la provocation: le fixer à 2.000 euros nets aurait été tout aussi insupportable. Quelle autre profession s'accommoderait sans honte d'un tel niveau de discrimination ? Pour beaucoup, pas seulement parmi les Gilets Jaunes, réclament sa suppression totale.

1. Très peu de professions en profitent

Cette mesure date de 1934, rappelle Le Parisien: les terribles "années 30", que Macron évoque volontiers pour faire peur aux Français. Les journalistes faisaient partie d'une liste de 110 professions à bénéficier d'un abattement sur leurs revenus, de 30% dans leur cas. Des métiers pour beaucoup disparus. C'était une déduction de 30 % des revenus bruts, pour les titulaires de la carte de presse.

En 1996, le premier ministre Alain Juppé choisit de supprimer cette exonération. Les journalistes contre-attaquent : une manifestation réunit 2.000 professionnels à Paris et une dizaine de titres de presse lancèrent une opération “homme invisible”, relata Libération. L'Association des journalistes parlementaires s'était enflammée, affirmant que cela "aboutirait à augmenter de façon importante, jusqu'à 35% l'impôt sur le revenu" des journalistes, selon les chiffres du ministère des Finances. "Il serait paradoxal qu'au moment où le gouvernement annonce son intention de réduire la pression fiscale sur les salariés, argumenta le communiqué, les journalistes soient les seuls à ne pas bénéficier de telles mesures". Il fallait déjà rappeler aux geignards qu'il s'agissait d'un privilège archaïque.
La véhémence corporatiste des journalistes suscita la sidération des honnêtes gens. Ainsi, Michel Péricard, président du groupe RPR à l'Assemblée nationale, ne supporta pas que des journalistes fassent pression sur les parlementaires pour s'opposer à la suppression de leur abattement fiscal professionnel de 30%. "C'est inadmissible, c'est une atteinte à la Constitution, qui interdit d'exercer des pressions sur les parlementaires", a dit Michel Péricard au cours d'un point de presse. Exprimant son "indignation devant les menaces" exercées, il a affirmé: "Des poursuites vont être engagées contre ceux - nous avons la liste et les noms - qui se sont crus autorisés à faire cela." Il évoqua ceux qui travaillent dans l'audiovisuel public et qui seraient tentés par des actions de représailles, qualifiant ces menaces "d'atteinte inadmissible et donc de faute professionnelle grave qui doit entraîner des licenciements". Le député des Yvelines avait le matin même demandé à Philippe Séguin "d'user de son autorité en la matière".
Pourquoi cette charge brutale contre les journalistes ? s'interrogea Libération. Après une première journée d'action le 18 septembre dernier, l'intersyndicale des journalistes SNJ, CFDT, CGT, CFTC, FO et CGC avait appelé à une grève nationale le 15 octobre, pour faire obstacle à une mesure de justice fiscale une mesure fiscale correspondant à une diminution du revenu annuel équivalent à un mois de salaire, un treizième mois que la pénibilité de la profession ne justifie nullement.
Certaines rédactions radicales, notamment dans la presse départementale comme dans l'Aude, l'Eure-et-Loir et la Dordogne, ont envisagé la mise en oeuvre d'une opération "homme invisible" contre les parlementaires qui voteraient cette mesure. Avec une dizaine de titres régionaux, la rédaction de Var-Matin avait choisi le boycottage photographique. Quant aux journalistes de La Montagne, ils avaient publié un éditorial intitulé "L'information sous contrôle fiscal" se livrant à un chantage sur la fragilisation des entreprises qui auraient été placées "en situation de dépendance par rapport au double pouvoir politique et financier".Le SNJ-CGT condamna comme "honteuses" et "scandaleuses" les dénonciations des détracteurs des nantis, appelant "la profession et les autres syndicats à y réagir immédiatement"...
Dans un courrier adressé mercredi au Premier ministre Alain Juppé, le député RPR du Rhône Marc Fraysse a proposé de compenser la suppression de l'abattement par une "hausse des salaires" financée par une réduction des charges sociales des entreprises de presse. Mardi, le ministre de la Culture Philippe Douste-Blazy avait pour sa part évoqué la nécessité d'une "table ronde sur les aides à la presse pour élaborer un véritable plan de sauvetage de la presse écrite". Quel rapport entre un abattement fiscal individuel et un sauvetage de la presse écrite ? 

L'Intersyndicale des journalistes (SNJ, CFDT, CGT, CFTC, FO, CGC) resta déterminée à ne pas céder tant que le gouvernement se limiterait à proposer des aides conjoncturelles à la presse. François Boissarie, premier secrétaire général du Syndicat national des journalistes (SNJ), précisa que ce genre d'initiative "constituerait un hold-up sur le mouvement, nierait les syndicats de journalistes et profiterait encore une fois aux organisations patronales, qui bénéficient déjà d'un régime fiscal privilégié"... Quant aux travailleurs, apprécièrent-ils la lutte insensée des syndicats pour leurs avantages acquis, si inéquitables soient-ils encore.
La gauche populiste rétablit finalement cet abattement en 1998.
Il fut rétabli sous une forme allégée - fixé à 7.650 euros pour tous. "Un avantage fiscal conséquent, selon l’association de critique des media, Acrimed. Prenons l'exemple d'un journaliste célibataire gagnant 2.500 euros par mois. Sans cet avantage fiscal, il payerait 2.534 euros d'impôt sur le revenu. Avec, il ne paye que 1.477 euros”. D’autant "qu’avec un revenu mensuel brut moyen de 3.200 euros, un journaliste ferait partie des 15 % de Français les mieux lotis, voire les plus riches".

2. Un abattement qui n’est plus vraiment justifié

Officiellement, cet abattement fiscal est censé financer les frais professionnels importants de cette profession. A l’époque de sa création, "la profession avait des frais professionnels très élevés, pour l'habillement, la location de bureaux... les rédactions étaient déjà bien structurées mais les journalistes fonctionnaient plus individuellement", explique François Boissarie, ancien secrétaire du Syndicat national des journalistes, cité par LCI
Difficile de justifier ce type d'avantage aujourd’hui, la plupart des journalistes étant sédentaires. Sans compter que ces frais "ne peuvent donner lieu à aucune vérification de la part de l'administration", précise le Syndicat National des Journalistes (SNJ). "Tout le monde admet que l’argument des frais professionnels ne tient plus”, soutient également Eric Brunet, essayiste et chroniqueur dans Valeurs Actuelles et pour BFM TV depuis rentrée 2018. Quand un journaliste fait une note de frais pour écrire un article, "il est remboursé par l’organe de presse qui l’emploie. Les titulaires de la carte de presse cumulent donc les remboursements effectués par leur entreprise et la ristourne fiscale octroyée par l’Etat", dénonce-t-il encore.

3. L'abattement fiscal ne bénéficie pas qu'aux bas revenus de la profession

Selon les données issues de la Commission nationale de la carte de presse, la profession connaît une forte précarité, surtout dans les premières années d’exercice, mais ni plus ni moins que dans la plupart des professions. 73,7% des journalistes sont en CDI, 18,7% sont pigistes et 3,2% sont en CDD. Chez les 26-34 ans, ils sont encore 33,7% de pigistes, mais seulement 8,5% en CDD. Les moins de 26 ans sont les plus précaires : 41,5% sont pigistes et 36,6% en CDD. Depuis que l'abattement a été fixé à 7.650 euros plutôt qu'à 30%, la niche profite mécaniquement beaucoup plus aux revenus les plus précaires de la profession : "Il s'agit des pigistes, des CDD, de tous ceux qui n’ont pas une rédaction derrière eux qui rembourse leurs frais, et qui représentent un quart de la profession", justifie François Boissarie, SNJ.
Ces odieux arguments corporatistes méprisent les réalités actuelles : selon les chiffres du deuxième trimestre publiés par l’Insee le 14 août 2018, le taux de chômage des 15-24 ans s’établit à 20,1%, son plus bas niveau pourtant depuis 2009. 

4. Ce privilège ne coûte "presque" rien à l'Etat...

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Ces dernières années, le coût de cette "allocation" pour frais d’emplois a été estimé "entre 50 et 70 millions d’euros par an". La prime Macron à deux millions de Français, mise en place pour répondre à la crise sociale incarnée par les Gilets jaunes, s'élève à 450 euros en moyenne, défiscalisés... 

Elle coûte plutôt "40 millions par an à l'Etat", minimisent certains. Par comparaison,  "la niche [sociale]  "Scellier outre-mer" (réductions d'impôt pour la construction ou la réhabilitation de logements dans les DOM), qui touche 43.700 ménages, a coûté, en 2012, 355 millions d'euros”, conclut ainsi Le Monde. 

Mais cette disposition peut aussi être considérée comme un doublon de la subvention de l'Etat avec une aide indirecte aux patrons de presse, leur permettant d’embaucher leurs salariés moins cher. Et si cette aide est préservée, c’est aussi "une forme de soutien au secteur de la presse écrite, de nature à encourager la pluralité et la liberté de la presse", admet le député LREM Joël Giraud, un ex-administrateur des PTT et rapporteur général du budget, sans le moindre embarras.

A la presse détenue par huit hommes d'affaires multi-millionnaires, l'Etat français a versé 1,8 milliard d'euros pris aux contribuables en 2010.

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