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jeudi 4 avril 2019

Loi anticasseurs : le Conseil constitutionnel rejette l’article le plus critiqué

Les Sages censurent l'article permettant les interdictions administratives de manifester

L’article 3 aurait permis aux préfets d’interdire aux manifestants représentant "une menace d’une particulière gravité" de manifester pendant un mois.

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C’était un moyen pour les gouvernements d'empêcher les débordements et violences lors de certaines manifestations. Votée le 12 mars par le Parlement, la proposition de loi dite 'anticasseurs' a ainsi été partiellement censurée par le Conseil constitutionnel, jeudi 4 avril.
Le plus décrié de ce texte dont la base est issue de l’opposition sénatoriale, c'est l’article 3 que la majorité macronienne a fait sienne après amendement par les députés, qui est censuré par les gardiens de la Constitution. Ils estiment qu’il porte atteinte au "droit d’expression collective des idées et des opinions". Par cette disposition, le législateur permettait à l’autorité administrative, en l’occurrence les préfets, de prononcer des interdictions de manifester sur tout le territoire national pendant un mois à l’encontre d’individus représentant "une menace d’une particulière gravité pour l’ordre public", sous peine de six mois d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende en cas d’infraction.
Alors que de nombreuses voix s’étaient élevées contre cette disposition jugée liberticide, y compris jusque dans les rangs des députés de la majorité La République en marche (LRM), le ministre de l’intérieur, Christophe Castaner, et le gouvernement l’avaient maintenu au nom de la nécessité de moyens nouveaux de maintien de l’ordre. C’est donc un camouflet que leur inflige l’institution présidée par le socialiste Laurent Fabius.

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Pour juger cet article 3 contraire à l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 sur la liberté d’expression, le collège constitutionnel estime que les conditions permettant de justifier une interdiction de manifester sont beaucoup trop floues. L’article en question prévoit que l’interdiction peut résulter soit d’un "acte violent", soit d’"agissements" commis à l’occasion de manifestations au cours desquelles ont eu lieu des atteintes graves à l’intégrité physique des personnes ou des dommages importants aux biens.

"Ainsi, le législateur n’a pas imposé que le comportement en cause présente nécessairement un lien avec les atteintes graves à l’intégrité physique ou les dommages importants aux biens ayant eu lieu à l’occasion de cette manifestation", lit-on dans la décision. Finalement, "les dispositions contestées laissent à l’autorité administrative une latitude excessive dans l’appréciation des motifs susceptibles de justifier l’interdiction."
La censure du Conseil constitutionnel vient donner raison aux craintes exprimées par certains. Le risque d’inconstitutionnalité de l’article 3 avait été au cœur des arguments de la poignée de députés macroniens qui s’étaient abstenus sur ce texte. La décision de l’institution de la rue Montpensier vient donc donner raison aux critiques des défenseurs du droit de manifester quoi qu'il en coûte à l'ordre public et à la société.
Certains s’attendaient davantage à une censure de l’article 6, sur la dissimulation de visage, que de l'article 3 qu’ils avaient, par certains aspects, affaibli par rapport à la version originelle, mais par d’autres durci. Les députés LREM avaient notamment ajouté la disposition permettant au juge administratif de prononcer une interdiction de manifester sur l’ensemble du territoire et pour une durée d’un mois. Lors de la deuxième lecture, les sénateurs avaient voté "conforme" le texte, c’est-à-dire sans le modifier, tout en émettant de grandes réserves sur la constitutionnalité de cette dernière mesure.

En revanche, le Conseil constitutionnel a donné son feu vert aux trois autres articles qui étaient contestés :
l’article 2 permettant à la police judiciaire de procéder à des fouilles de bagages et de voitures en amont d’une manifestation est validé ;
l’article 6, qui punit d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende le fait de se dissimuler, même partiellement, le visage lors d’une manifestation réussit son examen de passage constitutionnel ;
l’article 8, qui introduisait dans le panel des mesures qu’un juge peut imposer à une personne placée sous contrôle judiciaire l’obligation de ne pas participer à des manifestations sur la voie publique, a été jugé suffisamment bien encadré pour ne pas violer le principe constitutionnel par les 'Sages'.

Ce texte de loi avait fait l’objet de trois saisines du Conseil constitutionnel par le président de la République, soixante députés et soixante sénateurs. Expurgée de son article 3, la loi devrait être promulguée dans les prochains jours. 

Les Sages donnent raison aux manifestants

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Parmi les députés LREM qui n’ont pas voté le texte, l'ex-socialiste Aurélien Taché, le premier à annoncer qu’il s’abstiendrait, confie au Monde être "soulagé " : "Nos craintes étaient fondées et heureusement que le président de la République était là pour les entendre."
"Les 50 abstentionnistes de la majorité avaient raison. Après les APL, la CSG, et avant les 80 km/h et l’ISF. La majorité doit plus écouter sa diversité et ses alertes", a prévenu sur Twitter le député LREM du Vaucluse Jean-François Cesarini. L’ancien député LREM Matthieu Orphelin, qui avait claqué la porte du groupe au lendemain du vote de la loi, a jugé cette décision du Conseil constitutionnel «"riche d’enseignements".



Dans l’opposition, le député UDI Charles de Courson, qui avait comparé cet article au régime de Vichy, se 3félicite que le Conseil constitutionnel, traditionnel défenseur des libertés publiques, ait censuré cet article contraire à tous les principes républicains".
Pour Eric Ciotti, député LR qui avait, lui, voté en faveur de cette loi, "en supprimant l’interdiction de manifester le Conseil constitutionnel vide de sa substance la loi anticasseurs qui se retrouve décapitée".

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