La France et le Royaume-Uni interviennent en Syrie sans l'autorisation de Damas
Les frappes françaises et britanniques sont une "agression contre la souveraineté" de la Syrie, dénonce Damas
"Les actions militaires conduites par le Royaume-Uni et la France sur le territoire syrien constituent "une flagrante violation du droit international et une agression contre la souveraineté syrienne," a déclaré devant le Conseil de sécurité Walid Mouallem, le chef de la diplomatie syrienne, dans le texte de son intervention fourni par la mission syrienne à l'ONU, le mercredi 30 septembre.
"Ceux qui veulent vraiment combattre le terrorisme sur le territoire syrien doivent se coordonner et coopérer avec le gouvernement syrien, dont l'armée mène seule la bataille contre le terrorisme", a insisté M. Mouallem.
Le dimanche 27 septembre 2015, après trois semaines de vols de reconnaissance, Paris a mené des frappes aériennes contre ce camp de djihadistes de l'Etat islamique, où les troupes de Bachar el-Assad sont assiégées depuis un an: Hollande a-t-il ainsi voulu venir en aide à Bachar el-Assad, "l'assassin de son peuple", aux dires de Claude Bartolone ? "Ces frappes sont bienvenues et nous saluons l'entrée en action de la France dans la lutte contre Daech", applaudit Alexandre Orlov, ambassadeur de Russie en France. "Nous pensons qu'il faut soutenir toutes les forces qui se mobilisent contre Daech" au sein d'une nouvelle coalition. "L'armée régulière syrienne a toute légitimité, elle est chez elle, il faut la renforcer" et "la France est invitée dans cette coalition"... L'essentiel, résume l'ambassadeur, est que "si on continue les querelles autour du dirigeant du pays, on va perdre le pays".
Les spécialistes de l'État islamique rappellent que l'un de ces centres de formation avait été créé à Deir ez-Zor par un djihadiste français, Abou Omar, un ancien militaire. Une katiba - 'la Brigade des Français' - avait même été signalée en mars par un reportage de France 2 à Deir ez-Zor. Elle était composée d'au moins 40 ressortissants français habitant le quartier de Rouaich Saqar dans cette ville de 300.000 ...
Deir Ez-Zor en 2014, quand le camp bombardé par la France fut détruit...
Maître Gilbert Collard (FN) moque le côté "comique" du raid des sept avions militaires français : "Le camp qu'on a bombardé était déserté", affirme l'avocat et député du Gard sur France 2.
La France renoue avec une histoire commune d'une trentaine d’années avec la Syrie, puisqu'à partir de 1918, notre pays a eu mandat au Levant pour protéger les minorités chrétiennes et créer le Liban et la Syrie. Ces deux États aux frontières artificielles ont vu le fragile équilibre politico-religieux entre les communautés se rompre et sont aujourd'hui menacés de disparition par les offensives de l’État islamique.
En 1915, Alep, Deir ez-Zor, Raqqa, Ras-al-Aïn et Mossoul sont choisis par les autorités de l’Empire ottoman pour recevoir les déportés arméniens. Les femmes et les enfants entament des marches de la mort dans le désert sous la surveillance des militaires turcs de la 3e armée, de certaines tribus kurdes, d’émigrés du Caucase et de criminels libérés des prisons.Les survivants sont détenus dans des camps. Si Ali Suat, lieutenant-gouverneur de Deir ez-Zor, obéit aux ordres d’exterminer les Arméniens, Celal Bey, le gouverneur d’Alep, refuse d’obéir aux ordres et est destitué.De juillet à décembre 1916, Salih Zeki, nouveau préfet de Deir ez-Zor, est chargé d’exterminer les survivants. 2.000 orphelins sont emmenés dans cette ville avant d’être attachés deux par deux et jetés dans l’Euphrate. La ville de Deir ez-Zor est donc un lieu historique du génocide arménien.Après les accords franco-britanniques de Mark Sykes et Georges Picot en 1916, la France envoie des troupes dont une Légion d’Orient composée d’Arméniens, occuper la Syrie et le Liban en novembre 1918 et libérer des camps des milliers d’Arméniens rescapés du génocide. En 1928, l’église des Saints-Martyrs de Deir ez-Zor est construite pour commémorer les marches de la mort. Elle sera détruite, en septembre 2014, par l’État islamique qui souhaite effacer toute trace religieuse non musulmane de son territoire.
Eglise des Saints-Martyrs de Deir ez-Zor En août 2014, les 70.000 membres de la tribu des Al Cheitaat s'étaient révoltés contre l'État islamique. Elle s'opposait à la prise de gisements de pétrole par les djihadistes en juillet. Les forces de l'EI réagirent brutalement et massacrent 700 Al Cheitaat en deux semaines, dont 100 combattants et 600 civils. 300 personnes notamment furent massacrées en un journée à Ghraneidj.
Londres avait effectué une opération en août dans la région de Raqqa (nord) pour éliminer un djihadiste britannique accusé de préparer des attentats en Europe.
La Russie se coordonne et coopère en revanche avec les autorités souveraines de Syrie
Damas se félicite donc du projet de résolution antiterroriste russe.
M. Mouallem a approuvé l'initiative russe visant à la création d'une coalition régionale et internationale pour combattre le terrorisme.
La Russie a effectivement présenté un projet de résolution antiterroriste, mercredi devant le Conseil de sécurité de l'ONU. Le ministre des Affaires étrangères russes, Sergueï Lavrov, a souligné qu'il vise à "coordonner toutes les forces qui font face à l'Etat islamique et aux autres structures terroristes".
Moscou a mené mercredi ses premières frappes aériennes contre l'EI en Syrie.
Le front français anti-Assad bientôt minoritaire
Parmi Les Républicains, Bruno Le Maire "regrette les atermoiements de la France et de l'Union européenne face à Bachar al-Assad." Sur RMC et BFM TV, il affirme que "François Hollande ne fait pas de choix stratégique, il ne tranche pas plus en matière internationale qu'il ne le fait sur des questions nationales". Le député LR de l'Eure et candidat à la primaire à droite, même s'il refuse de l'officialiser, réaffirme la nécessité de s'appuyer sur "les troupes d'Assad" pour " éliminer Daech", "en finir avec la menace terroriste dont la France est la première victime". "Ça ne veut pas dire que j'aie la moindre amitié ou considération pour Bachar", nuance-t-il. Mais "je regrette que ce soit Vladimir Poutine qui ait fait cette proposition, qui se soit remis au centre du jeu. C'est la France qui devrait être face à Obama avec l'Union européenne derrière elle. Nous aurions pu peser politiquement si nous avions voulu. Ce qui a manqué, c'est la volonté".
Au parti socialiste, Jacques Attali, ancien conseiller de François Mitterrand, admet sur i-télé que "on a besoin de la Syrie pour éviter qu'un État effrayant prenne le pouvoir. Et de déplorer: "on n'a pas encore tiré les leçons de la faute qu'on a commise en détruisant le régime de Saddam Hussein et son armée, (…) on n'a pas non tiré les leçons en faisant tomber Kadhafi". Bref, résume Attali, pour qui la France et l'Europe ont eu "tort d'isoler la Russie", "la seule chose qu'on peut empêcher, est que surgissent des dictateurs ayant pour objectif la conquête du monde".
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