La justice déclare l'infanticide responsable et la condamne à 18 ans de réclusion ferme
La maman avait assassiné sa fillette par abandon prémédité sur une plage de Berck (Nord) à marée montante
"L'accusée est condamnée à 20 ans de prison pour assassinat", a déclaré la présidente de la cour d'Assises de Saint-Omer (Pas-de-Calais), Claire Le Bonnois, affirmant que la cour a retenu l'altération du discernement. Dix-huit ans de prison ferme avaient été requis à son encontre par Luc Frémiot, l'avocat général, qui avait fustigé "une planification froide" de son crime par l'accusée. Fabienne Kabou encourait la réclusion criminelle à perpétuité.
La cour d'Assises a également ordonné "un suivi psycho-judiciaire avec injonction de soins" de la mère criminelle.
Selon ses aveux, Fabienne Kabou s'était rendue le 19 novembre 2013 de son domicile à Saint-Mandé, en région parisienne, à Berck dans le but de noyer Adélaïde, 15 mois, qui, durant sa courte vie, n'aura pas eu d'existence légale, faute d'avoir été inscrite à l'état civil.
Une fillette fantôme. En France...
La petite Adélaïde n'a jamais eu d'existence légale avant de mourir. Sa mère avait accouché seule, à son domicile de Saint-Mandé, pendant l'absence de son compagnon. Ni le père, ni la mère ne l'a pas déclarée à l'état civil, démarche obligatoire dans les trois jours suivant la naissance.
Les parents de Fabienne Kabou (Etienne Kabou, ci-contre, à droite) ne savaient pas qu'ils étaient grands-parents. La fille aînée de Michel Lafon (père, ci-dessus à gauche, d'Adélaïde), née d'un premier mariage, ne connaissait pas non plus l'existence de sa demi-soeur.
Le corps de la fillette avait été retrouvé le lendemain au petit matin par des pêcheurs.
Lors de son réquisitoire d'une durée de deux heures, l'avocat général Luc Frémiot a affirmé : "Les histoires tragiques se ressemblent, on nous a dit que c'était un cas historique, mais c'est faux".
Des avocats-médecins-psychiatres et psychanalistes,
comme les journalistes
comme les journalistes
Me Fabienne Roy-Nansion,
défenseur de Fabienne Kabou
et d'un des quatre d'Outreau
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Et Me Christian Saint-Palais - qui s'est retrouvé à la Une des media, parce que choisi par Nabilla, la star de la télé-réalité, pour assurer sa défense - de se targuer que ces sommités ont conclu que Fabienne Kabou présente une "pathologie psychiatrique de type paranoïa délirante".
Cette gamine "elle ne fut pas malheureuse" et Michel Lafon, le père, veut "que nous retenions de ce procès, que pendant ces 15 mois, cette petite fille n’a pas été maltraitée, mais a été heureuse d'être aimée", affirme l'avocat, sans soulever de murmures dans la salle d'audience médusée.
A Pau, Christian Saint-Palais est surtout connu pour avoir assuré la défense de Romain Dupuy, qui a commis le double-meurtre du centre hospitalier spécialisé des Pyrénées (CHP) il y a dix ans, et qui a in fine été reconnu irresponsable de ses actes.
A Paris, ce Béarnais a acquis sa notoriété comme avocat de Joey Starr ou de Karim Achoui, et comme associé de Jean-Yves Leborgne, un ténor du barreau parisien.
Sénégalaise d'origine, mouchoir en main, Fabienne Kabou pleure dans son box, essuie ses yeux, se mouche, se tient la tête de sa main gauche...
Bien que partie civile, la mère de Fabienne Kabou "ne veut pas accabler sa fille", rapporte son avocat, Me Raphaël Tachon.
Or, sans doute moins dans l'air du temps, d'autres experts ont contesté cette thèse, évoquant simplement "un trouble psychique".
Avec les explications des psychiatres "pour la première fois le dossier de Fabienne Kabou a eu un sens: 'psychose délirante chronique' ", dit Me Tachon, estimant que "la seule solution logique pour expliquer ces troubles, c’est la maladie".
Fabienne Kabou reste évidemment "une énigme", pour l'avocate du père de la mère infanticide, Me Marie-Hélène Calonne, car il y a "un décalage entre cette espèce de grâce, d’élégance, dans le box et ce qu’elle va mettre en place".
Présenté comme l'expert des "génies du mal", le psychiatre Daniel Zagury, chef de service au centre psychiatrique du Bois-de-Bondy (Seine-Saint-Denis),avait estimé dans la matinée que Fabienne Kabou est ..."un cas historique". Il avait pourtant été déjà consulté sur des cas aussi lourds que ceux de Guy Georges et Michel Fourniret.
Mais, pour l'avocat de l'association l'Enfant Bleu, Me Jean-Christophe Boyer, l'assassinat d'Adélaïde est "un infanticide comme un autre" qui "n'a rien d'historique". "La petite Ada, il y en aura d'autres, ça arrange tout le monde que ce soient des malades qui font ça, mais dire que ce sont des monstres, c’est dire que ce n’est pas un problème de société", lance-t-il. "J'aurais voulu une unanimité des experts: on est dans la psychose ou on ne l'est pas?" souligne-t-il.
Pour Me Boyer, l'essentiel, "c'est que notre société comprenne que les femmes qui tuent leur enfant sont des femmes comme les autres". "Si la marée avait emporté le corps, on ne l'aurait pas retrouvé. Pas de corps, pas de dossier", a-t-il encore dit, en haussant le ton.
"Soixante-quatorze centimètres, 10 kilos, un coeur de 45 grammes, ce petit bout de chou est découvert sur une plage à 6h30 par un pêcheur de crevettes (...) Cette enfant s'est ancrée sur l'une de nos magnifiques plages de Berck. Merci Adélaïde, parce qu’à défaut le crime était parfait", a lâché de son côté, Me Jean-Philippe Broyart, avocat de l'association l'Enfance et partage.
"Dans l'infanticide s'exprime la haine maternelle," assène Me Boyer.
"Adélaïde a été cachée depuis sa naissance pour mieux s'en débarrasser. On a déshumanisé cet enfant parce qu'il est plus facile de se débarrasser d'un objet que d'un être humain", a-t-il continué.
Me Sylvie Fenart, l'avocate de la troisième association, La Voix de l'enfant, est la seule à pointer le rôle du père d'Adélaïde, Michel Lafon, de 27 ans son aîné.
Il ne "s'implique jamais dans la vie d'Ada de manière significative". "Il ne voit rien, il n'entend rien et il ne dit rien", dit-elle. Et, affirme Me Fenart, au quatrième jour du procès, "on ne sait toujours pas pourquoi Ada est morte".
"Paranoïa délirante" avec un QI de 135
Lors de son réquisitoire d'une durée de deux heures, l'avocat général Luc Frémiot a affirmé : "Les histoires tragiques se ressemblent. On nous a dit que c'était un cas historique, mais c'est faux". Fabienne Kabou, 39 ans, est un cas "psychanalytique" et non pas "psychiatrique". Autrement dit, l'accusée n'est pas folle, elle est responsable de son acte.
L'avocat général a invité à arrêter avec "ce tout psychiatrique" systématique du fait de l'horreur que suscite tout crime. "La vie, ce n'est pas ça, on est dans l'humain, dans les sentiments", a-t-il dit.
"Le sujet, c'est cette petite dont on a si peu parlé, parce que Madame Kabou a pris toute la place en raison de sa personnalité… Vous donnez l'impression d'une reine offensée", a-t-il observé, s'adressant à l'accusée.
Mais "ce n'est pas parce que vous êtes belle et que vous avez un QI de 135, qu'on ne peut pas vous poser des questions qui font mal," a-t-il poursuivi.
"Vous aviez le masque de l'indifférence et de l'ironie et je ne peux pas le supporter", a-t-il aussi fait valoir, en regardant l'accusée, impassible dans son box, tête haute et bras croisés.
Fabienne Kabou |
Dès le premier jour, Fabienne Kabou, d'origine sénégalaise, avait dit à la Cour n'avoir "pas d'autre explication que la sorcellerie" à son geste criminel. D'ailleurs, elle avait dépensé 40.000 euros pour consulter "des marabouts et des guérisseurs" qui n'ont pas été appelés à comparaître.
La mère infanticide échappe à la perpétuité.
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