France Info nous annonce depuis trois jours qu’ « une femme » a témoigné à décharge. Outre qu’on est en droit de s’interroger sur sa qualité de « témoin libre », le nombre de témoignages spontanés qui surgissent de nulle part après plusieurs années, interpelle. Le tribunal est sans doute moins manipulé que l’opinion ( ?), mais le Français moyen aurait-il le droit de savoir si les trois femmes de France Info sont différentes et n’ont aucun lien ( ?) ou si c’est la seule et même personne qui ressert trois fois….
Comment croire Didier Vinolas
I
l est l’un de ces témoins surprise au procès du berger de Cargèse ? Si ses déclarations ont jeté le trouble, elles n'ont pas interrompu le cours des débats.
Pffft ! Pétard mouillé ?
Le témoignage, le 13 février devant la cour d'assises d'appel de Paris, de Didier Vinolas aurait pu apporter au procès. Or, il eut pour résultat d'empoisonner la suite des débats, de donner aux avocats d'Yvan Colonna l'occasion de demander un renvoi - refusé pour l'heure - de l'audience et au principal intéressé de dénoncer une justice «en mission pour (le) faire condamner au nom de la raison d'Etat». Méthode d’opposition bien dans l’air du temps puisque les battus de la présidentielles vitupèrent, bloquent et pourrissent tout ce qu’ils touchent, de près ou de loin, directement ou en deuxième main.
Témoignage à prendre avec des pincettes
Secrétaire général-adjoint de la préfecture d'Ajaccio jusqu'en juin 1998, Didier Vinolas prétend avoir informé dès 2002 le procureur de la République de Paris de l'époque, Yves Bot, le chef du Raid, Christian Lambert, puis l'ancien sous-préfet de Corte, Jacques Nodin, que deux personnes toujours libres avaient participé à l'attaque de la gendarmerie de Pietrosella, en septembre 1997, où fut volée l'arme qui allait servir à tuer le préfet Erignac, le 6 février 1998 à Ajaccio. Et Didier Vinolas d'ajouter à la barre de la cour d'assises : «Je me dis [au PS on dit "J'ai le sentiment..."] qu'il y a peut-être d'autres personnes ayant participé à l'assassinat (du préfet).»
Si les propos de Didier Vinolas méritent d'être très sérieusement vérifiés, ils n'en demeurent pas moins surprenants aujourd'hui, alors que ce témoin, déjà entendu au premier procès de Colonna en 2007, s'était gardé d'évoquer ces éléments. Pourquoi ? L'ancien collaborateur du préfet Erignac explique qu'il a entre-temps changé d'avis pour «aider les magistrats à forger leur intime conviction», qu'il est inquiet du «risque de laisser condamner un innocent». «Je ne vivrai pas jusqu'à la fin de ma vie, dit-il, avec cela sur la conscience.»
Peut-on croire Didier Vinolas et ses révélations lancées comme une bouée à Yvan Colonna ?
Pour certains, la réponse tient dans le parcours même de ce fonctionnaire atypique, ex-commissaire de police reconverti dans la préfectorale, qui quitte Ajaccio quatre mois après l'assassinat du préfet pour le ministère de l'Intérieur, puis la préfecture de police de Paris et les Renseignements généraux (RG)...
Un socialiste au parcours révélateur
Didier Vinolas, que l'on dit proche de Jean-Hugues Colonna, le père d'Yvan, ancien député PS des Alpes-Maritimes devenu, en 1991, conseiller technique du ministre de l'Intérieur Philippe Marchand. Didier Vinolas et Jean-Hugues Colonna : des hommes de mêmes ministères aux mêmes affinités politiques. Depuis le mois de décembre dernier, Didier Vinolas a d'ailleurs rejoint le maire du XVIIIe arrondissement de Paris, Daniel Vaillant, ancien ministre de l'Intérieur, auprès duquel il occupe le poste de directeur général des services de la mairie.
Les témoins sont-ils tous du même acabit ?
La défense d'Yvan Colonna n’attendait que ces déclarations bénies et voit dans les révélations de Vinolas un élément nouveau étayant sa théorie selon laquelle le berger de Cargèse est un «coupable officiel» condamné avant l'heure en raison de sa cavale de 1999 à 2003.
De là à parler d'un « petit service insulaire » rendu par Didier Vinolas au clan Colonna par son témoignage surprise devant la cour d'assises d'appel de Paris, il n'y a évidemment qu'un pas, qui fragilise sérieusement ses déclarations.
Entendus mardi par la Cour, Yves Bot, Christian Lambert et Jacques Nodin ont tous les trois nié l'ensemble des propos de Vinolas quand il prétend leur avoir fait part de l'existence d'autres suspects potentiels dans l'attaque de la gendarmerie de Pietrosella, puis dans l'assassinat du préfet Erignac.
Pour mémoire
Dans ses notes du 16 novembre et du 10 décembre 1998 remises par le préfet Bernard Bonnet à Yves Bot, alors procureur de la République de Paris, le successeur de Claude Erignac donnait les noms de plusieurs membres du commando ayant assassiné son prédécesseur, dont certains n'ont jamais été inquiétés par la justice. Parmi eux, un certain monsieur « L. » dont le frère habitait Mulhouse à l'époque... Mulhouse, la ville d'où fut postée la lettre de revendication de l'attaque contre la gendarmerie de Pietrosella.
Les deux tueurs encore masqués en liberté pourront être jugés par contumace et leur existence fût-elle démontrée n’innocente pas Colonna.
Et le respect dû à la justice ?
La Cour d'assises qui juge en appel Yvan Colonna a mis un terme mardi à l'incident Vinolas, en opposant une fin de non-recevoir à la défense qui demandait avec pugnacité de nouvelles investigations, sans pour autant mettre fin à la polémique suscitée par les déclarations chocs de ce témoin.
La Cour d'Assises spéciale de Paris rejugeant l'assassin présumé du préfet Claude Erignac a rejeté une demande de "complément au supplément d'information" dont elle a été saisie par la défense.
Les juges d'appel ont estimé à l'instar du parquet général que le supplément d'information dont les conclusions ont été rendues lundi n'apportait "pas d'élément nouveau": les deux possibles suspects cités de manière phonétique par Didier Vinolas, proche collaborateur du préfet assassiné, sont déjà apparus dans la procédure.
"Ces personnes ont été entendues, ont dû fournir aux enquêteurs des explications sur les faits", a déclaré l'avocat général Christophe Teissier.
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