Le ministre de l'Education adopte-il des procédés totalitaires?
Hamon a la rigidité et l'autoritarisme des êtres faibles et limités
Un air de Kremlin |
Le jour où un rapport annonce une nouvelle baisse du niveau à l'école, le ministre s'occupe du mobilier scolaire. Est-il déphasé ou d'un autre temps, celui des blouses grises? Un rapport de la Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (oui, de la performance !) du ministère de l'Éducation nationale annonce une baisse sensible des acquis en début de CE2 entre 1999 et 2013. Il sort ainsi du déni et annonce non seulement que le vocabulaire, l'orthographe et la plupart des problèmes mathématiques sont moins bien maîtrisés que par le passé, mais que le nombre d'élèves en situation de faiblesse s'est accru de 25 % et que fait le ministre de l'Éducation nationale à bac +3 ? Benoît Hamon prend la parole au colloque "Refondation de l'école : une question pour le design" organisé par ses services. Ce télescopage des priorités entre le niveau des acquis et la forme des tables et des chaises ressemble à un mauvais gag hollandien.
Conclure que Hamon se cantonne aux sujets qui ne fâchent pas serait mésestimer sa capacité à tromper son monde. Au moment même où les signaux d'alarme se multiplient, certes il a assoupli la réforme des rythmes scolaires, le 8 mai, pour ne contrarier, et finalement ne satisfaire, personne et il a reporté d'une journée -sous la contrainte- la rentrée scolaire, pour câliner la FSU, le syndicat dominant d'enseignants de gauche qui refusaient de travailler un jour en août. Mais ce qui n'est pas médiatisé révèle sa duplicité toute soviétique.
La méthode coercitive prévaut sur le dialogue annoncé
Dès son arrivée à Matignon, Manuel Valls annonce une remise à plat de la réforme dans son discours de politique générale et Benoît Hamon s'empresse alors de communiquer sur sa capacité "d'écoute", son "habileté" à résoudre ce dossier sur lequel son prédécesseur est allé s'empaler.
Le décret du 8 mai a en fait ouvert une brèche dans laquelle certains élus UMP se sont immédiatement engouffrés pour réclamer un report, voire un abandon de la réforme. Le 2 mai, une trentaine de maires du Rhône ont ainsi déposé auprès des services du Premier ministre un recours en illégalité contre la réforme des rythmes. Quatre recours en illégalité sont toujours examinés par le Conseil d'Etat.
Mais les procédés du ministres ne sont pas aussi consensuels qu'ils paraissent, mais totalitaires. Ainsi, le préfet des Hauts-de-Seine attaque-t-il deux communes pour leur refus d'appliquer la réforme des rythmes scolaires. Du jamais vu à l'Ouest de l'Oural. Pour ce dossier serpent de mer pendant près de deux ans, Hamon a décidé de passer en force, en pesant, dans la pénombre, sur les leviers discrets de la préfectorale. La publication d'un nouveau décret autorisant l'enseignement sur huit demi-journées au lieu de neuf et la reconduction du fond de péréquation sont donc les limites à ne pas dépasser. Or, certains maires, dans le Rhône et en région parisienne, résistent encore et se disent décidés à ne pas appliquer la réforme. Ni on dialogue, ni on transige, on frappe.
En région parisienne, le préfet des Hauts-de-Seine a déposé lundi deux référés devant le tribunal administratif contre les communes d'Asnières et de Levallois-Perret. Dans ces deux communes de droite, les délibérations des conseils municipaux dénoncent la réforme. Alors Hamon a chargé son directeur de cabinet, Bertrand Gaume, d'inciter les préfets à déclarer illégale toute délibération d'un conseil municipal refusant d'appliquer la réforme qu'ils devaient financer. Les communes ont jusqu'au 6 juin pour remettre leur projet aux Directeurs académique des services de l'Education nationale (Dasen).
Retour au stalinisme
Interrogé par La Gazette des communes (groupe Moniteur) sur la résistance des maires, Benoît Hamon a jugé qu'"un maire ne peut pas plus faire obstacle à ce qui ne relève pas de sa compétence, de ses prérogatives et de son pouvoir (le temps scolaire) qu'un ministre ne peut obliger les communes à organiser le temps périscolaire".
Un sondage sur mesures affiche un retournement suspect de l'opinion
La méthode Hamon n'est pas frontale mais insidieuse et le ministère sort la cavalerie légère. Le ministère de l'Education nationale a aussi sec commandé un sondage et l'entreprise CSA assure tout-à-coup ce vendredi que 69% des Français seraient favorables à la réforme. Les sondés sélectionnés par CSA estiment que la concentration des enseignements le matin est devenue bénéfique pour l'apprentissage. 83% des Français restent toutefois persuadés que la réforme posera des problèmes d'organisation dans certaines familles, mais la presse aux ordres se chargera d'accuser les municipalités. Il y a seulement six mois, un précédent sondage CSA indiquait à la mi-novembre 2013, que 65% des parents d'enfants scolarisés en primaire souhaitaient un abandon de la réforme. Ainsi suffisait-il d'y mettre le prix.
Ces enquêtes ne jurent d'ailleurs pas que les mesures prises par Benoît Hamon ont aidé à faire accepter la réforme par une plus large partie de l'opinion. Elles font aussi l'impasse sur la proportion d'enseignants opposés à cette nouvelle organisation du temps scolaire. Les sondages servent clairement à travailler les esprits et ne laissant entrevoir qu'une partie de l'iceberg. La comparaison de ces deux enquêtes visent à montrer qu'en matière d'acceptation d'une réforme le temps et l'argent travaillent plus efficacement que le dialogue et la concertation politiques.
Le gouvernement s'est pris au piège d'une communication à double fond
Il a commis l'erreur de penser qu'il pouvait lâcher du leste sur les modalités d'application de la réforme et tenir un discours volontariste sur l'absence de "recul" sur ce dossier. Les élus l'ont bien compris, mais Hamon est prêt à tout: pour lui, tous les moyens sont bons.
Le sondage CSA auquel vous faites allusion a été mis à la sauce ministérielle. La cible de cette enquête est mal définie et les chiffres repris par les médias sont détournés. Nous sommes en pleine campagne d'intoxication médiatique pour pouvoir passer la réforme en force.
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