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dimanche 24 mai 2020

Favoritisme et cumul: pour Darmanin, Macron fait une exception

Elu maire, Darmanin conserve pourtant son poste de ministre

Manu garde son petit favori auprès de lui: Gérald ne prendra pas son poste à Tourcoing

Henri III et ses Mignons | Blog de Liliane

Le ministre de l’Action et des comptes publics dit avoir reçu l'onction de la paire Macron-Philippe pour cumuler
, au moins un temps, ses deux fonctions. 

La règle ne s'applique pas à Darmanin.
En novembre 2012, Lionel Jospin a remis au président François Hollande le rapport de la commission de rénovation et de déontologie de la vie publique. Outre une part de proportionnelle aux législatives et la possibilités de poursuites contre le chef de l'Etat pendant son quinquennat (pour des délits détachables de sa fonction et qui auraient été commis tant avant qu'après son élection), parmi les nombreuses préconisations formulées par l'ancien premier ministre socialiste  se trouvait l'interdiction du cumul d'un mandat parlementaire et d'une fonction exécutive locale (maire, maire adjoint, président ou vice-président de conseil général, président ou vice-président de conseil régional). Un mandat local restait toutefois autorisé à un député ou un sénateur, mais  à la condition que ce mandat local soit bénévole et non exécutif (conseiller municipal, conseiller général, conseiller régional). 
Le cas d'un ministre cumulard paraissait impensable, si on est cohérent avec l'affirmation sans cesse assénée que la charge ministérielle est si lourde qu'elle ne permet l'exercice d'aucun autre mandat. 
Mais, au détour du "grand" débat, en février 2019, Macron sembla déjà disposé à détricoter l'interdiction de la loi de 2014 sur le non-cumul des mandats de parlementaire et de maire,voulue par Hollande.

Darmanin est ainsi le premier de ses ministres à obtenir les faveurs de Macron. 
Même Jean-Yves Le Drian, une fois élu en 2015 à la présidence de la région Bretagne, fut contraint d'en démissionner le mois qui suiviT sa nomination au ministère de l'Europe et des Affaires étrangères dans le gouvernement Edouard Philippe, en mai 2017, suite aux pressions des oppositions.
On notera que le PS qui est opposé au cumul des mandats ne fit pas de difficultés pour conserver à Le Drian la carte du parti quand il le trahit pour rallier Macron, puis quand il entra au gouvernement, alors qu'il exclut Olivier Dussopt à sa nomination au gouvernement...

Elu samedi maire de Tourcoing, dans le Nord, Darmanin va bien cumuler ce mandat avec sa fonction ministérielle, si lourde soit-elle, puisqu'il va devoir arbitrer le prochain budget rectificatif 2020, pour répondre (après la première loi de finances rectificative du 23 mars 2020 et la deuxième, du 25 avril) à la crise économique consécutive à l'épidémie du Covid-19, et les choix budgétaires de 2021 : tout cela, "pendant un temps", car telle est la volonté du prince qui nous gouverne, assure-t-il.

Mieux, à part cela, Darmanin entend désormais "peser davantage sur les choix" pour le pays, indique-t-il dans un entretien avec le JDD: son nom est-il donc celui qu'on ne prononce pas mais qui pourrait se substituer à Edouard Philippe? 
Maire et ministre, Darmanin «autorisé» par Macron et Philippe à ...
Après tout, de même que l'Edouard a prévenu qu'il n'est pas candidat à la mairie du Havre pour en occuper le siège, de même Darmanin est bien du genre à se conserver un point de chute à Tourcoing, tout en poursuivant, 37 ans, ses ambitions nationales. 

En effet, le cumulard est aussi un récidiviste. Le politicien a réussi une ascension  aussi fulgurante que flexible. Elu député RPR en 2012, puis maire de Tourcoing en 2014, il devient vice-président du Conseil régional des Hauts-de-France en 2016, et démissionne de l'Assemblée nationale pour cause de cumul des mandats. 
Il accepte de Macron le ministère de l'Action et des Comptes publics dans le gouvernement Edouard Philippe le 17 mai 2017. Petit-fils de harki, il passe à l'ennemi En Marche!, en adhérant à La République en marche (LREM) quelques mois plus tard, après avoir été exclu de LR. En 2014, il abandonne son mandat de maire de Tourcoing, place un homme de paille dans son fauteuil et continue de gérer la ville en sous main. Et il rejoue le même film en 2020, cette fois au grand jour, maire et ministre ! Tel est le "monde nouveau" promis par Macron...

"Le président de la République et le premier ministre m’avaient autorisé à être ministre et candidat. Ils m’ont autorisé, pendant un temps et vu les circonstances exceptionnelles" liées à l’épidémie de Covid-19, "à exercer ces deux fonctions", a clamé le ministre de l’Action et des comptes publics. "Mais sans cumuler les rémunérations : je ne toucherai pas l’indemnité de maire", reversée à la Société protectrice des animaux (SPA). Qui lui ouvrira une cagnotte en ligne ?

Macron fait ainsi un chiffon de papier de la jurisprudence instaurée par Lionel Jospin en 1997. 

Pour la première fois, un premier ministre imposa à ses ministres de renoncer à la direction d’un exécutif local. L'usage veut depuis qu’un ministre ne peut pas diriger un exécutif local. Certes, il s’agit d’une règle non-écrite qui a souffert des exceptions, à gauche comme à droite, mais le premier ministre de cohabitation l’avait mise en application.
Le ministre de l’Action et des comptes publics a sans surprise été élu samedi matin maire par le conseil municipal de la deuxième plus grande ville du Nord (100 000 habitants) derrière Lille. Sans doute la manne de Bercy a-t-elle abondamment fructifié localement... Sa liste l’avait emporté dès le premier tour, le 15 mars, avec 60,9 % des voix, mais sur fond d’abstention record (74,6 %). 

Promesse de premier tour: "Si je suis tête de liste, c’est pour être maire " 
Gérald Darmanin retrouve le siège qu'il a occupé entre mars 2014, quand le jeune élu alors estampillé UMP avait ravi la ville au PS
A son entrée au gouvernement, en 2017, le ministre désormais LREM avait attendu quatre mois avant de céder son fauteuil à un fidèle et de devenir premier adjoint apparent et maire réel.

Darmanin a trompé son électorat.
Deux autres renégats issus de la droite républicaine, son collègue Franck Riester (ministre de la Culture) et Edouard Philippe, ont annoncé la couleur en se lançant dans la bataille: ils ne seraient pas maires. Mais, fin janvier dans La Voix du Nordlors de l'annonce de sa candidature, Darmanin avait pris un engagement : "Si je suis tête de liste, c’est pour être maire"!

Il ne pourra toutefois pas cumuler indéfiniment : "il a eu le feu vert jusqu’au remaniement", qui pourrait intervenir en juillet ou en septembre, selon "une source gouvernementale". "Il n’est pas sain de cumuler les deux dans la durée", admet d’ailleurs l’intéressé. 

Il "fera ce que le président [lui] dira de faire", avoue le ministre-godillot, dans le JDD, 
Gérald Darmanin, un ministre chargé de convaincre un président ...
" Baisse les yeux ! "
suggérant qu'il n'est pas maître de ses décisions... Mais son amour de  Tourcoing l’emportera-t-il sur son ego et ses ambitions nationales ? Pour l'heure, il finaude et élude le sujet du changement de portefeuille, tandis que Macron entend bien instrumentaliser l'image que Darmanin entretient lui-même localement, dans cette ville ouvrière (prise au PS) et à forte densité maghrébine, celle associée à ses origines - "petit-fils d’immigré" et "fils de femme de ménage". Darmanin profite de la stratégie de son mentor pour développer son projet de "peser davantage" sur les choix politiques et "continuer à travailler" avec Emmanuel Macron "pour réparer notre pays". "Mon engagement auprès du président de la République reste et restera entier, quelles que soient mes fonctions au sein du gouvernement ou en dehors", proclame-t-il.  Leurs intérêts objectifs se rejoignent.

Gérald Darmanin «Défendre ce projet, ce n'est pas trahir mes ...
S’il ne "croit pas un mot" des éventuelles tensions entre Macron et Philippe, il préfère parer à toute éventualité en restant à Paris, plutôt qu'en gaspillant ses chances à Tourcoing. Il est peu disert sur le chef du gouvernement, mais la place de calife à la place du calife ne lui déplairait pas. "C’est une chance de travailler en confiance avec Edouard Philippe, qui est un grand premier ministre", dit-il sobrement, soulignant au passage à deux reprises avoir été "élu au premier tour" des municipales là où le premier ministre doit affronter un second tour délicat, le 28 juin au Havre. 

Cet exemple de 'mignon' du roi fait jaser

Localement, le passe-droit de Darmanin crée des tensions
Son adversaire du Rassemblement national, Rémi Meurin lui a mis le marché en mains: "maire ou ministre, il faut choisir Monsieur Darmanin", a-t-il lancé lors du conseil municipal de Tourcoing. 
"Pendant cette campagne, vous avez menti consciemment aux électeurs parce que vous restez ministre... Maire à temps partiel, ministre à temps partiel"..

L'arrivisme de Darmanin choque aussi bien à l'échelon national

Ce dimanche, Christian Jacob, a dénoncé  "la République des copains" et  le président du parti Les Républicains a demandé une révision de la loi qui n'encadre que les parlementaires.
"Il ne peut pas y avoir deux poids, deux mesures", affirme Ch. Jacob pour qui, "soit le président de la République est dans un tel état d'affaiblissement qu'il est, on l'a vu d'ailleurs, incapable de tenir son groupe parlementaire et qu'il est incapable également de tenir ses ministres, soit il assume effectivement la République des copains", explique-t-il.
"Selon qu'on est copain avec le président de la République ou pas, les règles sont différentes (...) selon que vous êtes puissant ou misérable. Je veux dire, c'est vraiment la République des copains", déplore-t-il.
Dans ces conditions, "je demande clairement qu'on revienne sur le cumul des mandats" et "que notamment tous les parlementaires qui sont aujourd'hui candidats aux municipales aient l'autorisation de pouvoir cumuler leur mandat de parlementaire et des fonctions exécutives dans les municipalités", ajoute-t-il.
"On ne peut pas être maire d'une commune de 10.000 ou 50.000 habitants et député. En revanche, on peut tout à fait être ministre des Comptes publics et maire d'une ville de plus de 100.000 habitants", ironise encore Jacob.

Darmanin n'est ni le ministre, ni le maire de tous.
Le ministre a laissé libre cours à sa haine:  "Malheureusement, je crois, Monsieur Meurin, que le parti que vous représentez, pour mon pays, pour ma ville, sera toujours un ennemi", a-t-il lâché, visant ainsi 8,39% des Tourquennois qui ont exprimé leur opposition dans ce scrutin.

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