Hollande savait qu'une société du frère de Kader Arif travaillait pour lui
La crédibilité de "Moi, président" est ébranlée par une affaire de surfacturation
Le trésorier de campagne de François Hollande a surpayé des prestations de la société du frère de l’ancien secrétaire d’Etat Kader Arif pour la campagne des primaires du Parti Socialiste.
Or, le président Hollande savait depuis trois mois et a délibérément choisi de maintenir son secrétaire d'Etat aux Anciens Combattants jusqu'au 11 novembre, pour l'exfiltrer sans faire de vagues après les commémorations.
L'entourage trouble de François Hollande
Kader Arif, contraint de quitter le gouvernement suite à des soupçons de favoritisme pour l'attribution de marchés publics, aurait fait pression pour que les sociétés de son frères soient préférées, sans appels d'offres, de gré à gré, en dépit de la réglementation. Selon Mediapart, l’entreprise de communication d’Aissa Arif, qui a récemment travaillé pour le ministère de la Défense et la région socialiste Midi-Pyrénées, a également eu droit aux largesses de François Hollande en 2011 et 2012, alors candidat : l’actuel président aurait versé plus de 700 000 euros à AWF Music, l’entreprise du frère de Kader Arif.
Acte I des malversations de François Hollande: les primaire du PS
Entre juillet et octobre 2011, lors des primaires PS, une grosse dizaine de factures ont été réglées à AWF Music par… le micro-parti de François Hollande, "Répondre à gauche". En l'espèce, le montant avoisine les 160.000 euros, selon Mediapart.
Acte II : la campagne des présidentielles de 2012
Toujours selon le site trotskiste d’information, AWF Music a continué de travailler pour François Hollande en 2012, pour des montants allant jusqu’à 550 000 euros. Les prestations sont variées : organisation de meetings, connexions internet…
"Répondre à gauche" était la pompe à fric du candidat socialiste. Ce micro-parti de Hollandiens est un micro-parti, ou "parti de poche", dont les structures associatives de circonstance pouvent servir à contourner légalement la loi sur le financement des partis politiques. Le mardi 10 juillet 2012, Stéphane Le Foll, qui fut le bras droit de François Hollande au PS onze ans durant, continua à réunir les Hollandiens au ministère de l'Agriculture, 80 ministres et parlementaires affichant leurs appétits respectifs, dont Kader Arif. L'agitation ambiante est à la mesure des ambitions de chacun: "Kader Arif, aussi remonté que Stéphane le Foll, prépare la succession de Martin Malvy à la tête de la région Midi-Pyrénées. Il veut se renforcer face au député du Gers Philippe Martin, qui a les mêmes ambitions", raconte un ministre.
Acte III : rupture brutale de contrat, l’Elysée, dans l’embarras, ne fait aucun commentaire
Selon Mediapart, à un mois du premier tour en 2012, l’équipe de campagne de François Hollande décide de rompre ses contrats avec l’entreprise. Une rupture qui va coûter cher, en termes de dédommagement : environ 85.000 euros, non pas réglés par le candidat Hollande, mais … par le Parti Socialiste. Or, cette somme n’a pas été intégrée aux comptes de campagne de François Hollande.Une enquête judiciaire est toujours en cours. L’enquête se focalise également sur une société détenue par un autre membre de la famille de Kader Arif, dont aurait bénéficié la région socialiste de Toulouse. Coût des contrats ? Plus de deux millions d’euros.
Acte IV : Le Drian avait informé Hollande et Valls en ...août
Quand une enquête préliminaire visant les sociétés du frère de Kader Arif qui ont obtenu les marchés de 2011 et de 2012 sans appels d'offres entraîne la démission du secrétaire d'Etat, la collaboration a déjà cessé en pleine campagne, affirme Mediapart jeudi. La veille de sa démission, une source judiciaire avait révélé qu'une perquisition avait été menée, dans le cadre de cette enquête, le 6 novembre dans un service du ministère de la Défense.
"Cette entreprise spécialisée dans l'image et le son (...) aurait même dû gagner davantage pendant la campagne (...) Mais à un mois du premier tour, en mars 2012, l'équipe du candidat l'a remerciée en catastrophe après une trentaine de prestations marquées par une coupure d'électricité intempestive ou l'effondrement d'un pupitre", écrit le site d'information en ligne. Pourquoi avoir continué à travailler avec cette société si celle-ci n'avait pas donné satisfaction lors des primaires? "Ils travaillaient pour pas cher, le rapport qualité-prix nous a intéressés", a raconté à Mediapart le trésorier de la campagne présidentielle de Hollande, Jean-Jacques Augier.
Cette fin prématurée de collaboration avec AWF Musique, société créée par Aissa Arif, frère de Kader Arif, aurait donné lieu à un "dédommagement", réglé non pas par le candidat, mais par le PS, après l'élection de François Hollande, selon Mediapart. L'ancien trésorier du PS, le député Régis Juanico, a confirmé au site d'information "avoir décaissé 85.000 euros à ce titre".
L'entourage de François Hollande élude le problème, se bornant à déclarer que "les comptes de campagne du candidat Hollande (ont) été examinés et validés. Il n'y a donc aucun commentaire à faire".
La presse militante néglige cette affaire d'Etat
Pris dans la nasse, François Hollande et Manuel Valls ne sont pourtant pas inquiétés par la presse. L'affaire a coûté deux millions d’euros de contrats avec une collectivité territoriale, la région Midi-Pyrénées, celle de Martin Malvy et de Kader Arif, où une enquête pour favoritisme est en cours.
Selon le Point, le 6 novembre, les enquêteurs ont aussi découvert une facture de 50.000 euros hors taxe pour diverses prestations datant de 2013, dont une de media training au profit du secrétaire d'Etat de Ayrault, assurées par des entreprises gérées par le frère et les neveux de… Kader Arif.
Le Point confirme les dires de Mediapart: c'est le 22 août que des fonctionnaires du ministère ont retrouvé cette facture.
Le président de la République et le Premier ministre sont alors alertés.
Décision est alors prise de se séparer de Kader Arif. Le secrétaire d'État est convoqué. Il prend acte de cette décision le 29 août. Pour ne pas faire de "vagues", il est prévu qu'Arif quittera ses fonctions après les différentes commémorations liées à la Première Guerre mondiale. Après le 11 novembre dans l'Hexagone, le souvenir de 14-18 est aussi commémoré en Australie. Kader Arif a quitté ses fonctions vendredi 21 novembre, rejoignant la longue liste des ministres salissants écartés - Jérôme Cahuzac et Thomas Thévenoud, en passant par Yamina Benguigui et aussi le conseiller Aquilino Morelle - en seulement deux ans.
Une situation d’autant plus gênante que le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, ministre de tutelle de Kader Arif, a été alerté dès le 22 août 2014 par ses services de l’existence du contrat. Manuel Valls et François Hollande ont été informés dans la foulée.
Mais Kader Arif a démissionné trois mois plus tard, sous l'effet des révélations de la presse.
Pour Mathieu Magnaudeix, journaliste à Mediapart et co-auteur des révélations sur Kader Arif, le cas de Kader Arif n’a pas été aussi bien et aussi vite géré que le prétendent des responsables socialistes :
Ce jeudi, Mediapart souligne que François Hollande a accepté d'avoir recours à une société gérée par des proches de Kader Arif, alors que lui-même est un ami intime de François Hollande. Mathieu Magnaudeix pose la question : " Est-ce que Kader Arif a beaucoup insisté pour que ses proches travaillent pendant la campagne ?"
La rupture du contrat entre François Hollande et AWF Music par François Hollande en pleine campagne présidentielle, à un mois du premier tour, soulève aussi la question du paiement du dédommagement de 85.000 euros non pas par l’association de financement de la campagne de François Hollande "Réponse à gauche" gérée par un autre ministre, Stéphane Le Foll, mais par le Parti socialiste.
Le journaliste de Mediapart se refuse à toute analogie avec l'affaire Bygmalion
Sept mises en examen dans l'affaire Bygmalion; aucune dans l'affaire Arif...
Acte V : La question de l'indépendance de la justice va-t-elle à nouveau se poser ?
Outre les conflits d'intérêts présumés frappant le membre des gouvernements Ayrault et Valls, peut-on parler de surfacturation dans le cas présent de prestations de faible qualité ?
Y a-t-il eu tromperie de la Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques (CNCCFP) par le candidat Hollande ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Vous pouvez ENTRER un COMMENTAIRE (il sera modéré):