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lundi 8 septembre 2014

Ségolène Royal face à un barrage dans le Tarn


Un nouveau Notre-Dame-des-Landes ?

Le projet de barrage est accueilli par cocktails Molotov et grève de la faim
 
Quatre-vingts cocktails Molotov lancés sur les forces de l'ordre. Trois personnes ont été interpellées aux abords du site où est prévue la construction du barrage de Sivens et où le gouvernement avait déployé cent gendarmes le mercredi 27 août 2014.

Deux collectifs gèrent la lutte contre le projet de barrage et la tension est remontée avec le retour mardi matin de plusieurs dizaines de manifestants sur le site du projet de barrage-réservoir d'1,5 million de m3 d'eau stockée qui doit être construit sur la zone humide du Testet, au pied de la forêt de Sivens, près de Lisle-sur-Tarn dans le nord-ouest du Tarn, par la Compagnie d'aménagement des coteaux de Gascogne (CACG)

Ils ont appelé leurs sympathisants à venir dans les jours prochains pour bloquer le chantier de déboisement. 
Le collectif "Tant qu'il y aura des bouilles" tente d'occuper le site à la façon des opposants au projet d'aéroport Ayrault à Notre-Dame-des-Landes près de Nantes. Les gendarmes ont expulsé ces militants du site qu'ils occupaient pour empêcher le début des travaux, mais ils ont immédiatement reconstruit à proximité un campement de fortune. "Dès 1969, ils voulaient déjà aménager une base de loisirs, ici, sans succès. Historiquement, c’est un coin rebelle, nous sommes à deux pas de Carmaux et de chez Jaurès !, expliquait déjà Erwan, punk écolo breton,  en novembre 2013.

Deux membres d'un autre collectif de riverains ont entamé une grève de la faim devant le siège du conseil général du Tarn à Albi depuis le 27 août 2014. 
"Un symbole pour nous, car nous sommes toujours sans réponse du Conseil général sur des questions concernant le projet de barrage de Sivens", a expliqué Ben Lefetey, porte-parole (ci-contre) du Collectif (2011) pour la sauvegarde de la zone humide du Testet (Tarn). "J'ai honte d'être Français en ce moment, lance cet altermondialiste internationaliste, car on n'écoute pas les citoyens. "Il faut qu'il y ait des violences pour être entendu. On se fout de notre gueule", a déploré Christian Pince, l'autre gréviste de la faim. Six autres membres du Collectif entrent en fait dans leur 11e jour de grève.



Ce projet de barrage hydraulique menacerait de disparition un réservoir de biodiversité de 13 hectares. 

B. Lefetey et Joseph Bové
Les partisans du barrage, parmi lesquels la FDSEA, le défendent comme une nécessité pour sécuriser l'approvisionnement en eau des agriculteurs. On aura donc compris que le projet est combattu par  la Confédération paysanne.

Ses adversaires dénoncent le modèle d'agriculture irriguée. Ils s'opposent à la disparition d'une zone humide boisée qui abrite 94 espèces protégées, et cela, bien que la préfecture du Tarn ait insisté à plusieurs reprises sur le caractère exemplaire du projet en matière environnementale.
En février, l'eurodéputé écologiste José Bové avait demandé un moratoire. "Je suis là pour apporter mon soutien très clair" aux opposants au projet de barrage à Lisle-sur-Tarn, a déclaré Joseph Bové devant le Conseil général, maître d'ouvrage du projet, où s'étaient rassemblés fin août une quarantaine d'opposants. 
"L'État doit mettre en place un médiateur", a-t-il ajouté, qualifiant le projet de barrage de "non sens écologique et agricole". "Il faut un moratoire" sur sa mise en oeuvre", a répété Bové. "On va saisir le ministère de l'Écologie", a annoncé le militant altermondialiste.

Du côté de la préfecture, 
 Hervé Tourmente le secrétaire généraldéfend un projet "d'utilité publique qui a suivi tout le cursus réglementaire. Les 13 hectares de zones humides qui seront noyés seront reconstitués sur 19 hectares et un strict suivi des espèces sera opéré". Alors qu'un parking et des travaux de terrassement ont déjà été entrepris, la préfecture estimait que "cette opposition ne remet pas en cause le projet". Elle défendait alors "une position de fermeté pour assurer la sécurité des personnes qui vont travailler sur place. Quand on nous jette des cocktails molotov la position n'est plus au dialogue". 

Ségolène Royal veut revoir la copie du barrage

Tandis qu'une importante manifestation se déroulait le 7 septembre contre le barrage de Sivens, pour la première fois, la ministre de l'Environnement a demandé au Conseil général de revoir un peu sa copie, cédant ainsi à 15 jours d'affrontements entre forces de l'ordre et opposants sur le site. 
"Je demande à ce  que le Conseil général du Tarn vérifie que les conditions que le ministère met sur les retenues de substitution soient remplies. Les instructions du ministère sont d'encourager les retenues de substitution à condition de ne pas encourager l'agriculture intensive, a-t-elle rappelé. L'eau est un bien précieux et rare qui doit faciliter l'agriculture, mais pas pour que certains pratiquent l'agriculture intensive dans des grandes exploitations en s'appropriant un investissement public.

Après cette déclaration marxisante hautement clivante, elle a néanmoins insisté pour que "le dialogue puisse se renouer avec les associations" (sic) et à voir si "on peut améliorer l'ouvrage et l'usage de l'ouvrage".
Cette intervention de la ministre de l'écologie était attendue des altermondialistes depuis plusieurs jours. Hier, dans la soirée, la préfecture n'avait reçu aucune consigne particulière et renvoyait vers le Conseil général. Or, jusqu'à présent, son président, Thierry Carcenac, avait répondu négativement à toute demande de moratoire. Mais les propos de la ministre demandant des vérifications et souhaitant l'amélioration de l'ouvrage et de son utilisation sonnent comme un appel à stopper les travaux.

Hier, près d'un millier de personnes réunies sur le site de la zone humide autour des collectifs anti-barrage et des élus opposés au projet,  ont pu juger de l'avancée du déboisement qui a déjà grandement impacté la zone humide. Nombre de participants à ce pique-nique étaient venus chercher des réponses à leurs interrogations sur la pertinence du projet. Au centre des questionnements, le débat sur la préservation des milieux naturels, certes, mais aussi sur deux modèles d'agriculture.
Le représentant national de la Confédération paysanne a tenu à marquer son soutien aux anti-barrage et son refus d'un projet «destiné à de l'agriculture intensive qui détruit les sols, l'eau, les forêts.»
Le député européen EELV, José Bové y est aussi allé de son attaque sur le modèle agricole dominant : "Aujourd'hui, cette région, avec le réchauffement climatique est rentrée dans les zones de climat méditerranéen. Cela veut dire que le maïs n'a pas d'avenir dans ce pays. S'obstiner à vouloir que le terrain se plie au modèle industriel plutôt que d'adapter l'agriculture à l'environnement, c'est le problème qui se pose ici."
L'écologiste radical a accueilli favorablement la prise de position de la ministre de l'Écologie. Ségolène Royal continue ainsi de pencher, comme en Poitou-Charentes, du côté de la Confédération paysanne (gauche écologiste). Il a vu dans les déclarations de Ségolène Royal une demande de "réévaluation du projet". En conséquence, le "démonteur" de McDo et faucheur de maïs estime que «ce lundi, les bulldozers ne peuvent pas entrer en action». Reste donc à attendre la décision du conseil général du Tarn.

Ce matin, le chantier de déboisement doit redémarrer après un week-end de pause. Les bûcherons sont censés revenir sur le site avec leurs engins pour le déboisement, escortés de gendarmes mobiles. 

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