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dimanche 3 avril 2011

Lybie: les djihadistes se montrent au grand jour

La Libye va-t-elle tomber des mains de Khadafi dans celles des islamistes ?


Le mollah Hanni Terra rend visite aux rebelles qui combattent près de Brega. (Julien Fouchet/JDD)


Les combattants islamistes sont de plus en plus présents aux avant-postes de la rébellion

Parmi les rebelles épuisés face aux forces de Kadhafi, un homme contemple le champ des opérations et des ressources pétrolières. Visage envahi par une longue barbe noire et kalachnikov en bandoulière sur une longue djellaba, il communique des ordres par téléphone satellite. La scène se passe aux abords de la ville pétrolière.

Des rebelles en treillis font cercle autour de cet homme et font barrage à quiconque veut l’approcher: "Vous ne pouvez pas lui parler. Lui, il ne combat pas pour la Libye. S’il se bat aujourd’hui, c’est pour Allah.
"
Ce combattant est l’un de ceux qui font hésiter l’Amérique à fournir des armes aux rebelles. Ils ont appris de leur désastreuse expérience en Afghanistan: ils avaient livré des armes aux Taliban, alors bien considérés, mais qui tuent aujourd'hui des soldats américains.

Al-Qaida, selon la CIA, serait en train d’infiltrer les rangs de la révolution libyenne. Cette réalité embarrasse le gouvernement provisoire de la rébellion, : "Nous avons vingt-cinq combattants sur le front qui ont été liés à Al-Qaida", admet, du bout des lèvres, Iman Bugaighis, la porte-parole du Conseil national de transition. Cette ancienne dentiste, habillée à l’occidentale, s’empresse d’ajouter: "Mais ils ont fait leur peine de prison, et ils combattent aujourd’hui uniquement pour la libération de la Libye."

En août dernier, Kadhafi a libéré trente-sept islamistes libyens des geôles de Tripoli. Parmi eux, des anciens détenus de Guantanamo, dont l’ancien chauffeur d’Oussama Ben Laden, qui seraient tous aujourd’hui sur le front. La plupart viennent de Darna, une ville côtière dans l’est de la Libye. Cette bourgade de 80.000 habitants est celle, de tout le monde musulman, qui aurait fourni le plus de djihadistes en Irak. C’est ce que rapporte une liste de 600 combattants étrangers prise à Al-Qaida par les Américains en 2007: cinquante-deux sont originaires de cette ville libyenne, contre un de moins pour Riyad, la capitale saoudienne et ses 4 millions d’habitants.

Technique Al-Qaida d'approche: la séduction

A Darna, c’est jour de grande prière aujourd’hui. "Souvenez-vous bien que le Qatar a été le premier pays à venir nous aider", prêche le cheikh Choukri el-Hasy devant plusieurs centaines de fidèles rassemblés sous le drapeau de la révolution. Cet ancien prisonnier dirige la grande mosquée de la ville depuis deux ans. L’édifice abrite un mausolée où reposeraient 70 compagnons du prophète Mahomet. Juste à côté, sont enterrés 17 rebelles tués sur le front. "Ceux qui suivaient le prophète étaient les premiers djihadistes. C’est normal qu’on enterre nos martyrs juste à côté d’eux…"

Quant à la présence d’Al-Qaida sur le front, le cheikh élude la question: "Kadhafi a bien enrôlé des mercenaires tchadiens pour tuer son peuple, donc nous, on peut ramener qui on veut." Cela, Al-Qaida l’a bien compris: le premier jour de la révolution, une vidéo de l’organisation terroriste montrait quatre Jeep chargées d’armes en route pour la Libye. Après les premières frappes de la coalition, Al-Qaida saluait les rebelles tout en critiquant l’intervention étrangère qualifiée de "croisade moderne".

Les accusations d'islamophobie couvrent l'action des islamistes
"Avant, je n’aimais pas l’OTAN: ils ont envoyé des missiles en Afghanistan. Maintenant, ils nous aident en Libye, c’est différent. Mais s’il y a des problèmes avec eux, s’ils commencent à occuper le pays, alors, on peut se retourner contre eux en un claquement de doigt", prévient Hakim al-Sadi, en partance sur le front pour coordonner les opérations.
Ce Libyen, marié à trois femmes dont une Afghane, a acquis son expérience militaire, à Khost, en Afghanistan, près de la frontière pakistanaise, au début des années 2000. " Je suis parti me réfugier chez les taliban parce que j’étais pourchassé par Kadhafi, qui n’aime pas les religieux comme moi. Je suis allé m’occuper d’une madrasa ", raconte-t-il. Les Américains l’ont arrêté au Pakistan en 2002, et l'ont remis à Kadhafi qui l’a emprisonné avec d’autres islamistes. Hakim al-Sadi, aujourd’hui libre, a revêtu son habit de djihadiste pour " égorger Kadhafi et construire un État islamique en Libye"
.
Les rebelles comptent sur l'OTAN

Sur le front, les rebelles attendent des armes et de nouveaux bombardements de l’Otan pour avancer sur Tripoli. Des imams passent dans leurs rangs au volant d’un pick-up équipé d’un haut-parleur pour diffuser des prêches. L’un d’eux s’enfonce dans le désert pour lire le Coran aux combattants terrés dans les dunes.
Son message est simple: "Si on remercie Allah, il nous aidera. La victoire viendra de lui uniquement ."

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