Les dirigeants de l'UE entament une semaine de consultations capitales pour savoir si le traité de Lisbonne censé rendre l'Union Européenne plus efficace peut être sauvé après le "non" irlandais, qui culminera avec un sommet transformé en réunion de crise jeudi et vendredi.
Les ministres des Affaires étrangères de l'UE auront lundi à Luxembourg le premier tour de table à 27 après la prétendue surprise qu'a représentée le vote irlandais.
Un brin assisté, le Premier ministre irlandais Brian Cowen a avoué dimanche qu'il ne voyait "pas de solution évidente". Conscient des avantages que son pays en a retirés, il a exclu que l’Irlande puisse à terme ne plus être un membre à part entière de l'UE. "Je veux que l'Europe essaye de fournir une partie de la solution aussi", a souligné Brian Cowen. Les responsables irlandais comptent donc une nouvelle fois mettre l’Europe à contribution après l’échec du nouveau gouvernement à mener une campagne convaincante d’information et de sensibilisation en direction de sa population.
Le ministre irlandais des Affaires étrangères, Michael Martin, a souligné lundi que le "non" irlandais créait une incertitude pour l'avenir de l'Union Européenne mais a considéré que ce "non" devait être respecté par les 26 autres partenaires européens de Dublin. Mieux encore, Michael Martin a mis en garde (!) contre toute précipitation pour trouver une solution rapide pour sauver le traité de Lisbonne. Cowen et Martin, à eux deux, ne risquent pas de trouver une solution dans la nuit ! D'ailleurs, malgré ses carences en matière de sensibilisation de son opinion, l'âne Martin a eu l'intelligence de considérer qu'il était encore trop tôt pour "commencer à proposer des solutions". Nous avons tout notre temps ?
S'exprimant en marge d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de l'UE, Michael Martin a rappelé que le "non" irlandais était "une décision démocratique du peuple irlandais"... Mais s'impose-t-elle à l'Europe entière? Les Irlandais ont rejeté à 53,4% le traité de Lisbonne jeudi lors d'un référendum. C'est la troisième fois en trois ans qu'un texte institutionnel négocié par les dirigeants de l'UE est rejeté par un de leurs peuples, après les "non" français et néerlandais à la Constitution européenne en 2005. Les eurosceptiques omettent toutefois de rappeler que 17 pays (67%) ont ratifié le traité de Lisbonne et que huit doivent encore se prononcer, sans négliger que les réfractaires peuvent éventuellement envisager un scrutin de rattrapage.
Pour pouvoir entrer en vigueur le traité doit être ratifié par l'ensemble des 27 pays de l'UE. La réunion de Luxembourg fournira une première occasion au chef de la diplomatie irlandaise Michael Martin de faire le point avec ses collègues sur les solutions possibles. Le grand rendez-vous pour l'Europe sera toutefois le sommet de Bruxelles trois jours plus tard, où Brian Cowen sera en première ligne. Les partenaires de l'Irlande attendent de savoir si un nouveau vote est envisageable dans son pays moyennant certains aménagements.
Dans l'immédiat "ce qu'il nous faut, c'est un accord politique au Conseil" pour maintenir les priorités de la présidence française de l'UE, de la lutte contre le changement climatique à la politique de l'immigration, a estimé le secrétaire d'Etat français aux Affaires européennes Jean-Pierre Jouyet, dans un entretien publié dimanche par le Journal du Dimanche. "Nous allons perdre quelques mois sur le plan institutionnel, mais nous ne perdrons pas de temps en ce qui concerne les projets attendus", a poursuivi Jean-Pierre Jouyet, le représentant de la France qui assurera la présidence de l'UE à partir de juillet.
Les consultations bilatérales vont s'intensifier entre quelques pays-clés.
Ainsi, le chef de l'Etat français Nicolas Sarkozy rencontrera lundi les dirigeants tchèques pour vérifier si, malgré les affirmations contraires du président Vaclav Klaus vendredi, "ils s'engagent bien à poursuivre leur processus de ratification", explique un diplomate européen de haut rang. Or, le moment n’est guère propice, puisque l’équipe de football de la République Tchèque vient de se faire battre par la Turquie à l’Euro 2008 …
La chancelière allemande Angela Merkel rencontrera pour sa part le Premier ministre polonais Donald Tusk, qui veut "à tout prix éviter un scénario d'une Union européenne à deux vitesses".
La quasi-totalité des dirigeants européens - Sarkozy et Merkel en tête - ont affirmé que le processus de ratification du traité devait continuer dans les huit pays qui ne l'ont pas encore approuvé. Le prochain à le faire sera le Royaume Uni, qui fait de la résistance depuis qu’il a été admis dans l’UE, en 1973.
Une ratification rapide par la Grande-Bretagne, où la chambre des Lords doit voter mercredi 18 le traité en dernière lecture, leur "redonnerait un peu le moral", assure Andrew Duff.
Les dirigeants européens font le pari risqué d'isoler le "non" irlandais en poursuivant le processus de ratification, ce qui ne laisserait guère d'autre choix aux Irlandais que de revoter. "Tant que les Irlandais ne disent pas eux-mêmes qu'un nouveau vote est exclu, on peut considérer que le traité a encore un avenir", souligne le diplomate.
Mais les eurodéputés, qui tiennent une session plénière cette semaine à Strasbourg, pourraient presser les dirigeants de "cesser leurs voeux pieux" et renoncer à ce traité, selon M. Duff, convaincu quant à lui que le non irlandais est définitif.
Iles Britanniques : Ne pas s’impliquer en Europe, mais exiger d’elle…
Le Royaume-Uni est certes membre de l'Union Européenne depuis 25 ans, mais l'attitude de ses gouvernements successifs à l’égard d’une intégration plus forte à l'Union est pour le moins ambiguë. Le Parti conservateur plaide pour un retour à la nation britannique de sa souveraineté, alors que les démocrates libéraux préconisent davantage d'engagements.
Les peuples, nostalgiques de leur puissance ancienne, hésitent à abandonner leurs certitudes passées et à se mêler au continent. Le Royaume-Uni est membre de l'OTAN, du G8 et du Conseil de sécurité des Nations unies (ONU), mais si elle est également membre de l'Union Européenne, à la différence de l’Irlande qui a abandonné sa monnaie nationale, la livre irlandaise, pour adopter l'euro le 1er janvier 1999 (les pièces et billets ayant été introduits le 1er janvier 2002, le Royaume Uni ne veut pas renoncer à la livre sterling (£) lien
Le Royaume-Uni a préféré ne pas adopter l'euro lors du lancement de cette monnaie en 1999, bien que le gouvernement ait prévu de tenir un référendum pour décider de l'adoption de la monnaie si « cinq tests économiques » se révèlent concluants. L'opinion britannique est contre.
Mais seule la République d’Irlande devait soumettre le Traité de Lisbonne à référendum. Le Royaume Uni n’a pas cette contrainte, pas plus que les dix-huit pays (67%) qui l'ont ratifié à la date du 11 juin 2008 : Hongrie, Malte, Slovénie, Roumanie, France, Bulgarie, Pologne Slovaquie, Portugal, Autriche, Danemark, Lettonie, Lituanie, Allemagne, Luxembourg, Estonie, Finlande, Grèce. Le 18 juin, les parlementaires britanniques ne pourront pas brandir l’alibi des craintes de sa population en l’avenir.
Le portail de l'Union Européenne
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