L'ultime renoncement du quinquennat, le seul qui serait positif
François Hollande se prépare malgré son bilan calamiteux, regrette Philippe Bilger.
Pour le magistrat honoraire, le président n'a pas les moyens de réunir jusqu'à son propre camp et se défausse en critiques virulentes contre l'opposition.
Chaque semaine, Philippe Bilger prend la parole, en toute liberté, dans FigaroVox. Il est magistrat honoraire et président de l'Institut de la parole. Il tient le blog Justice au singulier et est l'auteur de Ordre et désordres paru aux Éditions Le Passeur en avril 2015.
François Hollande distille ses confidences pour 2017.
Sont-elles bien nécessaires alors que plus personne ne doute du fait qu'il sera à nouveau candidat et qu'il y a une forme d'ironie, voire de cynisme de sa part à feindre des hésitations qu'il n'a plus depuis longtemps?
Ce qui me semble surréaliste est la manière dont on nous présente déjà sa future argumentation et dont lui-même se pourlèche l'esprit devant ce qu'il élabore et qui sera d'abord caractérisé par une critique virulente des projets de l'Opposition.
Car en dehors de cette charge qui a déjà commencé - le candidat pointe depuis des mois sous le président -, on perçoit l'extrême difficulté qui sera la sienne. Sur quelles réussites pourrait-il s'appuyer, quelles actions pourrait-il invoquer, de quelle adhésion pourrait-il se réclamer? Le bilan économique et financier est médiocre. Aucun des résultats promis en 2012 n'est à l'ordre du jour. A peine s'est-on vanté d'une baisse mensuelle du chômage que celui-ci reprend. La croissance, quand on l'a annoncée et qu'elle a paru répondre aux vœux du gouvernement, tourne court. La politique de François Hollande ressemble dramatiquement à une Sœur Anne qui désespérément ne verrait jamais rien venir.
Je ne mentionne même pas l'essentiel qui depuis 2015 aurait pu représenter, à cause des tragédies terroristes que la France a subies, pour le président de la République, un actif indéniable. Mais les sondages - le dernier en date sur Atlantico - ne cessent de mesurer le discrédit du gouvernement même dans sa lutte contre l'islamisme meurtrier. L'opposition est jugée largement plus crédible et la police qui est le bras armé d'une démocratie est plébiscitée ce qui manifeste bien que la cible n'est que le pouvoir socialiste. A cause de son impuissance sur ce plan capital comme sur les autres registres.
La conséquence de ces fiascos concrets, de ces carences trop réelles est qu'on tombe dans une sorte de simulacre où le président de la République regarde son pays comme s'il était au théâtre. De haut. Mettre la main à la pâte n'est plus de saison. La pâte a trahi.
Faute de pouvoir proposer aux citoyens une évaluation qui mettrait en balance le positif et le négatif, une approche lucide pour une démocratie responsable, François Hollande joue au rassembleur alors qu'il n'a cessé de diviser depuis 2012, aspire à diffuser sérénité et tranquillité parce que la nation, sans lui, serait orpheline alors qu'elle n'a jamais été plus clivée, y compris dans son propre camp, se pique de célébrer un état [Etat] de droit inaltérable, intangible et momifié, ce qui est dévastateur en ces temps, cherche à nous persuader qu'on aura besoin de lui.
Au fond, on n'est pas un père de la patrie sur commande. Cela survient rarement comme une merveilleuse cerise républicaine qui n'a de sens que sur un gâteau infiniment substantiel. Il faut être un père, et ce n'est pas rien, et avoir maintenu une patrie.
François Hollande va de plus en plus nous rebattre les oreilles avec des abstractions, des commentaires, des analyses, une distanciation ironique et le ressassement d'un discours moral qui pallie tout ce qui aurait dû être accompli et ne l'a pas été.
Quand l'éthique sert de thème essentiel, voire exclusif, c'est que le réel a été mis entre parenthèses, vous a échappé ou bien qu'à chaque seconde il s'oppose douloureusement au président quand le candidat de 2012 imaginait pouvoir le maîtriser.
Je le répète, François Hollande pourrait finir en beauté, avec un courage inouï. Il lui suffirait de tirer les conclusions accablantes de son mandat quasiment terminé et de laisser d'autres destinées aspirer à gauche à l'Elysée. Peut-être Nicolas Sarkozy pourrait-il aussi nous priver de sa présence ?
Le citoyen a le droit de rêver.
Philippe Bilger
Bilger, président !
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