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mardi 1 octobre 2013

La méthode Hollande à l’épreuve du pouvoir

Le double visage du socialisme français

Le double visage du socialisme français
François Hollande est imprégné de la méthode mitterrandienne vieille de trente ans et, malgré le passage  à l'ère du numérique et de la globalisation,  il croit toujours en la vertu du temps: pourtant, le changement s'opère jusqu'ici sans celui qui prétend l'incarner: le présent se rebelle et le bouscule. Comment Hollande pourrait-il donc préparer l'avenir?

Le poids  de l'impréparation

D'entrée, son amateurisme a déconsidéré le président par défaut.
Et il a confirmé le sentiment d'inadaptation à la tâche par la constitution d'un gouvernement chaotique d'apprentis, une ligne fluctuante et une accumulation de cbavures et de reculades.

La Syrie et le cafouillage sans précédent sur la "pause fiscale viennent de faire ressurgir l’image d’un président à deux visages. 
L’un dans la posture: déterminé, voire martial, dès qu’il s’agit de conduire les affaires extérieures du pays, voire de s'ingérer, notamment en Afrique, mais posture faussée par son suivisme en Syrie. L’autre dans l'ambiguïté: frileux et indécis sur la scène nationale. Le gouvernement était connu pour ses "couacs " de communication, François Hollande pour sa méthode de l’ajustement politique permanent. Or, le mal se révèle plus profond qu'il n'y paraissait dès lors qu'il aborde le dossier des impôts :  à défaut de boussole et de ligne politique ferme, le ­président navigue au gré des injonctions parlementaires et des pressions syndicales qu' il favorise par le "dialogue", au point que le gouvernement désorienté peine à montrer la direction. Chaque note vire au couac . La dissonance est devenue continue.

C
es deux visages trouvent-ils à s’accorder?
Les analystes du hollandisme balbutiant ont de belles bagarres de préau devant eux… Certains veulent voir en Hollande un joueur de poker qui cacherait habilement son jeu. D'autres discerneraient en lui la personnalité tourmentée du schizophrène aux visages contradictoires et irréconciliables dissimulés derrière une bonhomie rigolarde.

Les débats se sont déplacés

Pour qui cherche à voir au travers du brouillard de la rentrée politique, 2013 ne ressemble pas à celle de 2012. La majorité reste éruptive, mais les débats qui l’agitent se sont déplacés. Que reste-t-il des velléités de changement? Où sont les injonctions pour une "autre politique"? Que sont devenus les députés contestataires de l’objectif de réduction des déficits ?  Disparues, ou presque, les accusations sur l'héritage?  A la gauche du PS, Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann viennent de lancer un nouvel appel à la rebellion, mais ils sont seuls. Les ministres à fibre sociale, Arnaud Montebourg et Benoît Hamon, ont fini par se convertir à la realpolitik de l’offre, renonçant aux anathèmes sur la banque et les entrepreneurs. Idem de la majorité des parlementaires socialistes élus sur l'idéologie anti-libérale. Le sociétal avait redynamisé leurs restes soixante-huitards, mais les ors et la moquette les ont renvoyés à leur embourgeoisement douillet. 

Encroûtés dans des années d'opposition systématique, la gauche socialo-écolo au pouvoir depuis dix-huit mois cherche toujours la méthode. 
"Il y a eu un virage", admet Thierry Mandon, le porte-parole du groupe à l’Assemblée. "La question chez les députés n’est plus de savoir s’il faut ou pas prendre ce virage mais comment on amende cette trajectoire pour la rendre supportable". Répondre aux problèmes de chômage et de pouvoir d’achat des électeurs, plutôt que réorienter la politique économique, telle est la nouvelle ligne de débat.

Retour de la gauche à la réalité 

Ce virage doit beaucoup aux erreurs du président débutant.  
Dès sa campagne présidentielle, le chef de l’Etat affichait son ambition. "Je veux installer la gauche durablement au pouvoir", disait-il, mais l’aggiornamento idéologique, social-démocrate, s'est heurté aux épreuves du pouvoir. L'exécutif clame d'autant plus fort son attachement à la social-démocratie que la réalité l'en éloigne chaque jour davantage.

Histoire de France pour les Nuls
et Hollande, capitaine de pédalo,
(cours de rattrapage, Mougins 2007)
Sans rire, son conseiller Bernard Poignant parle de François Hollande comme d’un homme baigné d’histoire (de petites histoires?), notamment de la gauche. Ce prisme expliquerait sa détermination sur la Syrie : guerre d’Espagne, Munich, François Hollande ne voulant pas ajouter à la liste des renoncements socialistes. 
Mais à considérer son intervention militaire au Mali, il serait plutôt du genre Guy Mollet (SFIO) qui, en octobre 1956, engagea la France dans une opération militaire en Egypte avec le Royaume-Uni et Israël ("opération Mousquetaire"), pour la restitution de leurs droits aux actionnaires du canal de Suez nationalisé par Nasser. G. Mollet, président socialiste du Conseil mit aussi en place le rationnement de l'essence en novembre 1956 et toléra les procédés français discutables durant la "bataille d'Alger" e réaction aux atrocités commises par le FLN marxisant et autorisa la saisie l'édition du journal Le Monde qui publia un rapport accablant le 21 juillet 1957.

l’intérieur, l'Histoire guiderait aussi l’action du président
Pour l'installer au pouvoir, il était convaincu de la nécessité d’ancrer la gauche dans la réalité. Il a réussi à tracer sa route, malgré une duplicité qui ne trompa que la base, mais a retrouvé le bas-côté. Pour parvenir à ses fins, il se garde à gauche en accablant la finance et l'entreprise et se garde à droite en effaçant les rêves keynésiens. Pour se rallier des électeurs, il fait des promesses - toutes prioritaires - aux jeunes ou aux professeurs. Puis, après avoir gravement alourdi l'impôt et creusé la dette publique, il annonce la diminution de l'un, et la réduction de l'autre, dans un avenir incertain. Au tiers de son mandat, il se décide à donner des gages et promet une transition énergétique à effet retard. Aux coups de barre désordonnés, il ajoute un virement de bord en faveur de l'entreprise, d'abord, après l'avoir sévèrement taxée, et de l'environnement, ensuite, après avoir méprisé ses turbulents alliés Verts.

La versatilité de l'amateur désempare les acteurs économiques
Comme il y a dix jours sur TF1  : "L’avenir de la France passe par une économie forte. Il faut des entreprises." Mais il prend soin d'introduire un grossier distinguo qui vise à ménager tout le monde, au risque de fragiliser son souci de "cohérence". Qu'on ne se méprenne donc pas, aider les entreprises ne signifie pas aider les patrons, précise-t-il, à l’adresse de ces socialistes nostalgiques de la lutte des classes. "Nous n’aidons pas les entreprises pour aider les entreprises mais pour leur donner plus de marges et de capacités d’investir et de créer des emplois", se justifie-t-il. "Je ne suis pas le président des patrons, je suis le président des entreprises." La sémantique pour entourlouper,  la pédagogie pour convaincre: le changement est-il à ce point   contre-nature au PS qu'il faille user du verbe et du mensonge pour s'engager dans l'action ?

Vider le mot réforme de son caractère anxiogène

Pour se faire élire à gauche et mener une politique de droite, il lui faut placer un coin libéral dans l'idéologie de gauche. Les méandres de sa gouvernance l'obligent à convaincre qu’il y a quelqu'un aux commandes et à rassurer les Français en recherche d'emploi, de pouvoir d'achat et de sécurité qu'il matraque d'impôts. 
La réforme n’est pas synonyme de perte d’acquis sociaux, mais les niches qui sautent, pour plus d'équité promise, sont en vérité plus sensiblement sociales que fiscales, dans la réalité quotidienne des familles. Lien PaSiDupes 2011: "Niches fiscales et sociales, dans le même panier des critiques socialistes"

François Hollande peinera de plus en plus à faire croire que sa politique ne se fait pas contre les entreprises et leurs salariés. Il se fixe des objectifs comme autant de berceuses rassurantes sur la durée d'un quinquennat mais, il est déjà largement entamé et ils restent flous et à échéances sans cesse reculées. L’objectif d’inversion de la
courbe du chômage à la fin 2013 est là pour convaincre, mais personne n'y croit plus, à seulement trois mois désormais de la date fatidique. Pas plus qu'aux emplois d'avenir qui ont calé au démarrage et n'en sont qu'à 55.179 signés au 9 septembre, encore loin des 100.000 escomptés fin 2013.

Si peu fiable, est-il la meilleure personne pour vider le mot réforme de son caractère anxiogène? 
La réforme se veut synonyme d’avancées sociales, notamment avec celle de la retraite: or, elle n’est pas censée permettre des économies, même qu'elle coûte ! Alors, ses promoteurs vantent des avantages supposés: donner de nouveaux droits, en matière de pénibilité, notamment, mais aussi en faisant perdurer les avantages acquis des plus socialement virulents. Les routiers et les fonctionnaires des entreprises publiques, tels SNCF, RATP et nos grands ports, à 100%, La Poste (patron de O'Besancenot à 77%) ou EDF (84%), comme les journalistes, et pas seulement ceux du service public veillent donc, l'arme au pied (Radio France et France télévisions restent à 100% publics, pour plus d'indépendance?...). La presse menace déjà de retrouver insolence et pugnacité. 
La réforme oui, dans les mots et l'apparence, mais la réforme tellement pesée et sous-pesée, ajustée aux intérêts sectoriels, catégoriels et corporatistes qu’elle en devient incolore. Pour mener son dessein historique, François Hollande n’a d'ailleurs pas trouvé mieux que de sacrifier la réforme aux syndicats, dont la CGT ou le SNJ, associations et lobbies divers.

Une politique à double fond 

La duplicité du chef de l’Etat produit une politique à double fond. Celle que l’on voit, louvoyante et tâtonnante, ajustée en permanence en fonction des réactions des uns et des autres, dont au premier chef les co-gestionnaires de sa politique, les experts désignés et les interlocuteurs privilégiés qui, sous couvert de concertation, impriment leurs marques discordantes. Sorte de paravent entre l'opinion qui gronde et un exécutif aussi flexible que le roseau de la fable face au chêne que Hollande prétend incarner. Après un énième psychodrame, la constitution de la Ve République assure à Hollande la docilité des écologistes qui viennent de ranger leur ultimatum au composteur et de déclarer qu’ils étaient faits pour durer au pouvoir. Municipales obligent !

Pour des raisons de paresse, Hollande 
croit aux vertus du temps et rechigne à intervenir. Cette indécision du Gros tout mou est validée par les anciens de l’école mitterrandienne. Sauf que les temps ont changé en trente ans, que le laxisme de Lionel Jospin a marqué la génération montante et que le présent se rebelle. 

L'intermède Hollande s’inscrira-t-il dans la durée si le pays reste en crise ? 
François Hollande s'inquiète à juste titre du jugement de l'Histoire, mais le choix du présent que les événements lui imposent dans l'urgence ne lui laisse d'autre espoir de renouer avec la croissance qu'un redressement économique international  ou la chance, ce qui revient au même.
Le risque serait que le changement se fasse, mais sans Hollande.


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