Boutih/Halde: Raffarin comprend Longuet

L'ancien premier ministre ne se laisse pas prendre au piège de la caricature

Longuet conteste la pensée unique: sacrilège !

Le président du groupe UMP au Sénat, Gérard Longuet, a contesté mercredi le projet de promotion de l'ancien président de SOS-Racisme Malek Boutih, pressenti pour succéder à Louis Schweitzer à la tête de la Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité (Halde). Il estime qu'il n'est pas le «bon personnage» pour accéder à de telles fonctions, mais il n'a pas le droit de le dire. « Si vous voulez, les vieux Bretons et les vieux Lorrains - qui sont d'ailleurs en général Italiens ou Marocains - doivent faire l'effort sur eux-mêmes de s'ouvrir à l'extérieur », a-t-il fait valoir, lors de l'émission Questions d'info de LCP/AFP/France Info, mercredi.

Les Bretons sont d'ailleurs souvent autonomistes, mais ce n'est pas le moment de le rappeler... Nous pourrions être soupçonnés de suggérer l'autonomie des Français de la diversité, avec attribution d'un territoire communautaire confédéré et maintien de la solidarité nationale...

Gérard Longuet explicite son point de vue
«La Halde, cela veut dire que c'est la France qui s'ouvre aux populations nouvelles ». Le défi rédempteur doit être relevé par un vieil Auvergnat de souche, si toutefois les Vendéens ne se sentent pas lésés... Longuet est pourtant clair et sans ambigüité. «Schweitzer, c'est parfait ! Un vieux protestant, parfait ! La vieille bourgeoisie protestante, parfait ! », a-t-il insisté, au risque de froisser tous les bourgeois protestants de France et de Navarre, lesquels n'y voient aucun relent de quelque sorte que ce soit et auraient donc pris du recul depuis les Guerres de religions. Un exemple qui n'a pourtant que peu de chances de satisfaire l'impatiente diversité. Avant d'ajouter : «Si vous mettez quelqu'un de symbolique, extérieur, vous risquez de rater l'opération ». Le bon sens requiert parfois un surcroît d'intelligence.

C'est la manière de Longuet de faire de la prévention.
Mais la gauche est jalouse de ses images racornies et se sent spoliée, envahie sur son territoire. Elle réagit donc violemment: la violence la caractérise, en attaque comme en défense. Sur France Info, on parlerait d' "attaque violente", pour ne pas confondre avec des attaques bienveillantes (?) ou les "tendres assauts" de Martine sur Nicolas !... La droite la plus bête du monde est-elle tendre, de surcroît ?

Les réactions des vertueux et des pleutres

L'élu à rien, mais porte-parole du Parti socialiste, Benoît Hamon s'est aussitôt dit «consterné» sur France Info, jugeant globalement la «formation politique majoritaire (....) gangrénée aujourd'hui par une forme d'obsession dans sa relation à l'extrême droite, à cette question de l'identité nationale, à l'immigration». A l'abri de l'extrémisme de gauche, le député socialiste européen Harlem Désir a pour sa part demandé à l'UMP de «condamner ces propos immédiatement avec la plus grande fermeté et à M. Longuet de présenter des excuses publiques à Malek Boutih».

Rodé à la polémique permanente, le porte-parole de l'UMP Dominique Paillé s'est pourtant exécuté. Il a déclaré sur France Info mercredi soir que les déclarations de Gérard Longuet «n'engagent que lui-même», ce qui n'est certes pas inexact, mais superficiel, car il ne prend pas parti sur le fond...
Le ministre de l'Ecologie, Jean-Louis Borloo, un radical, a considéré jeudi matin que Malek Boutih a le «bon profil» pour prendre la tête de la Halde. Ci-contre à gauche, Boutih au côté de Sa Cynique Majesté Royal.
Il a fait mieux en trouvant «rassurant» que Gérard Longuet se soit excusé pour ses propos «malheureux» à l'égard de celui-ci. « Je connais bien Malek Boutih, je l'apprécie énormément », a affirmé le ministre sur France info.
Mais à ce point de sottise aggravée, craignez Borloo d'encourir le courroux de Désir: à juger du «profil » d'un beur, vous vous exposez à une interprétation-trahison de votre pensée: il n'y a pas loin d'un profil à un « faciès »! Vous apprendrez alors à vos dépens que votre liberté d'expression ne tien qu'à un fil et que la narine palpitante de Benoît Hamon frémit au moindre « relent raciste » ? A votre décharge, bien que décrit par la gauche comme alcoolique, vous n'êtes pas rancunier.
Sur le fond, si Malek Boutih serait l'homme de la situation, le prophète attendu à la Halde, il n'est sans doute ni le seul, ni le meilleur possible à cette responsabilité.
Enfin, puisque le risque de racisme anti-blanc existe, le comble pour un « cul-blanc » serait de considérer que tout Blanc est barré à ce poste par la couleur de sa peau et pour soupçon de racisme latent. Schweitzer a donc été une erreur; Borloo est un raciste anti-blanc.
Ainsi suffit-il que Désir Harlem juge un «discours intolérable, aux relents racistes et qui justifie et légitime les discriminations» pour que l'UMP s'aligne sur la pensée dominante, sans autre forme de procès des propos incriminés. Condamné !

Faire la tortue ou charger ?

Jean-Pierre Raffarin (UMP) a en revanche estimé que Gérard Longuet n'a pas tort, malgré la polémique lancée par l'opposition, cette fois comme à tout propos.
Faute de convictions et de courage, les plus pusillanimes des responsables UMP laissent passer les flèches de peur d'en prendre une.

Une riposte organisée s'imposerait, mais la droite décomplexée ne serait-elle pas en train de s'inhiber ? La frilosité qui la gagne, comme le froid annonce la mort, n'est pas seulement due au harcèlement permanent que lui fait subir l'opposition dédiée au mal: attaques des personnes et des idées, rumeurs de salles de presse et conspirations de couloirs. Faut-il que le courage et l'abnégation des militants, comme la fidélité et la patience des élus et des acteurs de la majorité, soient mis davantage à l'épreuve au sommet de l'Etat ?

L'ascenseur social est une chose, mais le retour d'ascenseur en est une autre, qui se fait attendre
Ceux qui ont mérité l'accès à l'antichambre du pouvoir sont en droit d'attendre plus qu'un regard, la gratitude des gens en place. La multitude au pied des marches, comme les plus en vue, réclame la solidarité des élus et la considération des grands. Qui, si humble soit-il dans la cohorte, apprécie d'être non seulement ignoré mais doublé par des inconnus venus de loin ou de la concurrence ?
Personne ne peut éternellement compter que tout est définitivement acquis: les sacrifiés à l'intérêt général voudraient que soit appréciés le désintéressement, la beauté du geste et la grandeur d'âme ?

La majorité sacrifiée à l'ouverture gronde

Selon l'ancien Premier ministre de Jacques Chirac, "l'ouverture", c'est "aussi une question de mesure". L'heure n'est pas à la fermeture, mais à la reconnaissance des talents.
Le boomerang de l'ouverture amorce son retour...

Est-on raciste pour peu que la gauche le décide ?

Interrogé sur RTL après les déclarations controversées de Gérard Longuet, Jean-Pierre Raffarin a assuré que le président du groupe UMP au Sénat n'était "évidemment pas raciste" et qu'il posait en réalité "deux questions utiles".

Les questions que la gauche ne se pose pas

Et que la droite doit résoudre:
- la première sur le fait de savoir si "une personne discriminée est la mieux placée pour réduire les discriminations",
- la deuxième sur l'ouverture
"L'ouverture, c'est aussi une question de mesure", a jugé le sénateur de la Vienne soulignant que "de temps en temps, il faut aussi mettre en avant les talents de la majorité parce qu'à un moment on finirait par se dire que les talents sont à gauche".

La coupe n'est-elle pas déjà assez pleine ?

Désormais, Raffarin est suspect, à gauche, mais à droite aussi !

La nomination de Malek Boutih à la Halde interviendrait après beaucoup d'autres. En dehors du gouvernement, celle du socialiste Didier Migaud à la tête de la Cour des comptes et de Michel Charasse (ex-PS) au Conseil Constitutionnel.

Frédéric Lefebvre sera bientôt accueilli au côté de Martine Aubry au Bureau national du PS, mais vous n'êtes pas si dupes et pas obligés de me croire...