Elle ambitionne d'être le clone de Sa Cynique Majesté Royal
Lancement d'Europe Ecologie
Cécile Duflot (ci-contre, cheveux longs et gras), présidente des Verts de la région Ile-de-France ?
«Je m’y prépare», confiait-elle, sibylline, début janvier, lors de ses vœux à la presse. Ah oui, et comment ?
Par exemple, en faisant comme si.
«Un jour, j’ai mis trois collaborateurs autour d’une table et je leur ai dit : "Voilà, on gagne les régionales, qu’est-ce qui se passe le 22 mars, le 23 ?" Depuis, je sais ce que je ferais, à qui je parlerais, qui je recevrais… Mais la vraie clé, c’est que j’ai constitué un maillage d’experts avec qui échanger et une équipe», raconte-t-elle. On la retrouve un soir au Tabac des ministères, en plein VIIe arrondissement et à deux pas de l’hôtel de région. «Pas encore chez moi !» plaisante-t-elle. Patronne rouée des Verts depuis 2006, Duflot «n’était pas programmée pour être candidate» aux régionales. Au début, la perspective de se retrouver, à 34 ans, à la tête de la première région de France - 4,5 milliards d’euros de budget, 11, 5 millions d’habitants - lui a paru incongrue. «Je sentais que je ne pouvais pas dire que je pourrais être présidente, sans en être moi-même convaincue», glisse-t-elle. «Si elle gagne l’Ile-de-France, Cécile sera la Ségolène de 2012», rêve un de ses proches.
Naïveté. Ces derniers mois, Cécile Duflot multiplie les rencontres. Des «prospectivistes qui pensent l’avenir à vingt ans, des spécialistes des transports, de l’énergie», explique-t-elle. Mais aussi des petits patrons ou des architectes jusqu’alors peu acquis à la cause verte, comme Jean Nouvel avec qui elle a déjeuné. Elle se frotte aux nouveaux candidats europe-écologistes, transfuges du PS et du PCF. Avec Robert Lion, 75 ans, tête de liste à Paris et ex-patron de la Caisse des dépôts, Duflot évoque les «40 millions de frais financiers annuels payés par la région» et la possibilité de «ne plus emprunter à des banques qui ont des filiales dans les paradis fiscaux». Elle parle gestion de l’eau avec son colistier Jacques Perreux, ex-PCF et vice-président du conseil général du Val-de-Marne. Discute avec Augustin Legrand des Enfants de Don Quichotte de leur projet de «foncière solidaire», qui «n’a rien à voir avec l’agence foncière régionale». Pour se préparer, elle a «travaillé», dit-elle. Et «sérieusement». Jean-Vincent Placé, son directeur de campagne, s’agace qu’on questionne les capacités de gestionnaire de sa candidate, qui «a fait l’Essec et bosse depuis quinze ans dans un organisme de logement social».
Duflot reporte chiffres et argumentaires dans un grand classeur et trois carnets, qu’elle extirpe de son sac besace. Un gris, un marron «recyclé» et un noir bourré de post-it et de cartes de visite : Sophie de Menton, la présidente d’Ethic (une association patronale), qui a claqué la porte du Medef, l’ambassadeur du Royaume-Uni… Les séminaires à répétition sur le projet, qu’elle présentera mardi, servent de formation accélérée. Un passe Navigo à prix unique sur toute l’agglomération ? «J’ai braillé pour obtenir un chiffrage précis», dit-elle. «Elle manque parfois d’épaisseur et reste trop souvent dans la formule», juge un proche. Sur le Grand Paris, Duflot désavoue un de ses proches qui veut reprendre la proposition d’Edouard Balladur de regrouper la capitale avec les trois départements les plus denses. Elle arbitre en faveur d’un participant qui s’exclame : «On ne va pas reprendre des propositions de droite pour se démarquer du PS.» [On en est là !] Parfois, sa volonté de mettre en œuvre la transformation écologique de la société frise la naïveté. «Quand elle nous dit qu’il faut créer 1 000 écoquartiers et agrandir les forêts, on se dit : "Aïe, aïe, aïe !" Si on est trop simples, on perdra autant en crédibilité que si on est trop compliqués», lâche un élu régional Verts. Qui concède :«Cécile est super bonne en écolo qui prend le RER A tous les jours.» [Convaincu(e) ?]
Pour la candidate, «le rôle d’une politique n’est pas d’être une super technicienne, mais de connaître les bons interlocuteurs et d’être capable de démêler les enjeux». Elle se dit «lucide» sur son statut de challenger dans les sondages, qui la donnent plus de dix points derrière Jean-Paul Huchon, le patron PS de la région, en lice pour un troisième mandat. Hier [27 janvier], Daniel Cohn-Bendit a jugé «improbable» qu’Europe Ecologie devance le Parti socialiste. «Je sais que la probabilité est loin d’être évidente. Mais j’ai vu les européennes. Les électeurs peuvent se dire non pas "Cécile Duflot est géniale" mais "on veut une présidence écolo". Du coup, si ça arrive, on sera prêts.» Et si cela rate, pas de regrets : «On sera armés pour parler projet dans la négociation d’entre deux tours», dit-elle. «Elle joue aussi pour garder le leadership d’Europe Ecologie dans le giron des Verts», note un «non-Vert».
Maldives. Cécile Duflot soigne son image, se pomponne de plus en plus, mais sait que ce n’est pas seulement devant les caméras que cela se joue. Le carton d’Europe Ecologie aux européennes (16,28%) l’a propulsé dans la cour des grands : deux rendez-vous à l’Elysée avec Nicolas Sarkozy, une journée avec Martine Aubry à La Rochelle. Mais aussi un baptême du feu médiatique, du 20 heures de TF1 à Europe 1, avec Jean-Pierre Elkabbach qui l’asticote sur ses vacances de Noël aux Maldives. «Je ne veux pas être la nouvelle Besancenot» [qui reverserait [une partie de] ses indemnités au NPA -c'est la règle- s'il était élu, mais vit aux crochets de sa femme], dit celle qui a été sacrée lundi «révélation politique 2009» par le jury du Trombinoscope. Dans un sondage Viavoice, que Libération s’est procuré, «sa notoriété progresse depuis le mois d’août : 40% de gens la connaissent. Elle a réussi à installer une crédibilité. Honnêteté et sincérité en positif. Manque de carrure et trop écologiste en négatif», résume François Miquet-Marty, directeur de Viavoice. «Il n’y a rien sur les Maldives», déclare l’intéressée, soulagée.
Depuis sa candidature, mûrie cet été, «Cécile prend de la densité, conclut Cohn-Bendit, mais elle n’a rien à gagner à brûler les étapes, son atout, c’est son équipe» (cf. photo ci-dessus). Bref, la star, ce n’est pas encore «Cécile».
Cécile Duflot (ci-contre, cheveux longs et gras), présidente des Verts de la région Ile-de-France ?
«Je m’y prépare», confiait-elle, sibylline, début janvier, lors de ses vœux à la presse. Ah oui, et comment ?
Par exemple, en faisant comme si.
«Un jour, j’ai mis trois collaborateurs autour d’une table et je leur ai dit : "Voilà, on gagne les régionales, qu’est-ce qui se passe le 22 mars, le 23 ?" Depuis, je sais ce que je ferais, à qui je parlerais, qui je recevrais… Mais la vraie clé, c’est que j’ai constitué un maillage d’experts avec qui échanger et une équipe», raconte-t-elle. On la retrouve un soir au Tabac des ministères, en plein VIIe arrondissement et à deux pas de l’hôtel de région. «Pas encore chez moi !» plaisante-t-elle. Patronne rouée des Verts depuis 2006, Duflot «n’était pas programmée pour être candidate» aux régionales. Au début, la perspective de se retrouver, à 34 ans, à la tête de la première région de France - 4,5 milliards d’euros de budget, 11, 5 millions d’habitants - lui a paru incongrue. «Je sentais que je ne pouvais pas dire que je pourrais être présidente, sans en être moi-même convaincue», glisse-t-elle. «Si elle gagne l’Ile-de-France, Cécile sera la Ségolène de 2012», rêve un de ses proches.
Naïveté. Ces derniers mois, Cécile Duflot multiplie les rencontres. Des «prospectivistes qui pensent l’avenir à vingt ans, des spécialistes des transports, de l’énergie», explique-t-elle. Mais aussi des petits patrons ou des architectes jusqu’alors peu acquis à la cause verte, comme Jean Nouvel avec qui elle a déjeuné. Elle se frotte aux nouveaux candidats europe-écologistes, transfuges du PS et du PCF. Avec Robert Lion, 75 ans, tête de liste à Paris et ex-patron de la Caisse des dépôts, Duflot évoque les «40 millions de frais financiers annuels payés par la région» et la possibilité de «ne plus emprunter à des banques qui ont des filiales dans les paradis fiscaux». Elle parle gestion de l’eau avec son colistier Jacques Perreux, ex-PCF et vice-président du conseil général du Val-de-Marne. Discute avec Augustin Legrand des Enfants de Don Quichotte de leur projet de «foncière solidaire», qui «n’a rien à voir avec l’agence foncière régionale». Pour se préparer, elle a «travaillé», dit-elle. Et «sérieusement». Jean-Vincent Placé, son directeur de campagne, s’agace qu’on questionne les capacités de gestionnaire de sa candidate, qui «a fait l’Essec et bosse depuis quinze ans dans un organisme de logement social».
Duflot reporte chiffres et argumentaires dans un grand classeur et trois carnets, qu’elle extirpe de son sac besace. Un gris, un marron «recyclé» et un noir bourré de post-it et de cartes de visite : Sophie de Menton, la présidente d’Ethic (une association patronale), qui a claqué la porte du Medef, l’ambassadeur du Royaume-Uni… Les séminaires à répétition sur le projet, qu’elle présentera mardi, servent de formation accélérée. Un passe Navigo à prix unique sur toute l’agglomération ? «J’ai braillé pour obtenir un chiffrage précis», dit-elle. «Elle manque parfois d’épaisseur et reste trop souvent dans la formule», juge un proche. Sur le Grand Paris, Duflot désavoue un de ses proches qui veut reprendre la proposition d’Edouard Balladur de regrouper la capitale avec les trois départements les plus denses. Elle arbitre en faveur d’un participant qui s’exclame : «On ne va pas reprendre des propositions de droite pour se démarquer du PS.» [On en est là !] Parfois, sa volonté de mettre en œuvre la transformation écologique de la société frise la naïveté. «Quand elle nous dit qu’il faut créer 1 000 écoquartiers et agrandir les forêts, on se dit : "Aïe, aïe, aïe !" Si on est trop simples, on perdra autant en crédibilité que si on est trop compliqués», lâche un élu régional Verts. Qui concède :«Cécile est super bonne en écolo qui prend le RER A tous les jours.» [Convaincu(e) ?]
Pour la candidate, «le rôle d’une politique n’est pas d’être une super technicienne, mais de connaître les bons interlocuteurs et d’être capable de démêler les enjeux». Elle se dit «lucide» sur son statut de challenger dans les sondages, qui la donnent plus de dix points derrière Jean-Paul Huchon, le patron PS de la région, en lice pour un troisième mandat. Hier [27 janvier], Daniel Cohn-Bendit a jugé «improbable» qu’Europe Ecologie devance le Parti socialiste. «Je sais que la probabilité est loin d’être évidente. Mais j’ai vu les européennes. Les électeurs peuvent se dire non pas "Cécile Duflot est géniale" mais "on veut une présidence écolo". Du coup, si ça arrive, on sera prêts.» Et si cela rate, pas de regrets : «On sera armés pour parler projet dans la négociation d’entre deux tours», dit-elle. «Elle joue aussi pour garder le leadership d’Europe Ecologie dans le giron des Verts», note un «non-Vert».
Maldives. Cécile Duflot soigne son image, se pomponne de plus en plus, mais sait que ce n’est pas seulement devant les caméras que cela se joue. Le carton d’Europe Ecologie aux européennes (16,28%) l’a propulsé dans la cour des grands : deux rendez-vous à l’Elysée avec Nicolas Sarkozy, une journée avec Martine Aubry à La Rochelle. Mais aussi un baptême du feu médiatique, du 20 heures de TF1 à Europe 1, avec Jean-Pierre Elkabbach qui l’asticote sur ses vacances de Noël aux Maldives. «Je ne veux pas être la nouvelle Besancenot» [qui reverserait [une partie de] ses indemnités au NPA -c'est la règle- s'il était élu, mais vit aux crochets de sa femme], dit celle qui a été sacrée lundi «révélation politique 2009» par le jury du Trombinoscope. Dans un sondage Viavoice, que Libération s’est procuré, «sa notoriété progresse depuis le mois d’août : 40% de gens la connaissent. Elle a réussi à installer une crédibilité. Honnêteté et sincérité en positif. Manque de carrure et trop écologiste en négatif», résume François Miquet-Marty, directeur de Viavoice. «Il n’y a rien sur les Maldives», déclare l’intéressée, soulagée.
Depuis sa candidature, mûrie cet été, «Cécile prend de la densité, conclut Cohn-Bendit, mais elle n’a rien à gagner à brûler les étapes, son atout, c’est son équipe» (cf. photo ci-dessus). Bref, la star, ce n’est pas encore «Cécile».
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