Tous comptes faits…
Dans la vaste zone commerciale de Plan-de-Campagne (400 commerces), située à mi-chemin de Marseille et d’Aix-en-Provence, l’exception est devenue la règle. Après trente-cinq ans de cache-cache avec la loi et d’arrangements à coups d’accords préfectoraux, la zone devait réintégrer le champ légal en 2002. Mais une dérogation supplémentaire de cinq années avait alors été accordée, à la condition, vite oubliée par les grandes enseignes, de préparer le retour à la normale: cinq années n'auront donc pas suffit, probablement avec la meilleure volonté du monde.
Début 2007, c’est en effet le retour au point de non-droit. Car, de nouveau, le préfet Frémont (maintenant directeur de cabinet de Jean-Louis Borloo) lâche un délai supplémentaire de six mois à vingt-six enseignes -But et Darty (filiales du britannique KESA), Castorama (du non moins britannique Kingfisher plc, comme Brico Dépôt), H&M (Suédois), Leroy-Merlin et Decathlon (groupe français Auchan de la famille Mulliez), Fly et Atlas (Groupe Rapp, premier franchiseur de l'ameublement et troisième distributeur de meubles français), etc… « La fermeture brutale serait extrêmement dommageable pour les entreprises et donc pour l’emploi », assure Christian Frémont. Le préfet prend, en toute conscience, un arrêté illégal. Il le sait puisqu’il ajoute : « Il ne fera effet que si personne ne demande son annulation. » Les syndicats portent alors l’affaire devant la justice.
En avril 2007, le tribunal administratif de Marseille annule les autorisations d’ouverture dominicale. Trois mois plus tard, le nouveau préfet, Michel Sappin, ressort la baguette magique des dérogations (au nombre de 45). « Toute autre décision serait catastrophique pour la zone », justifie-t-il, reprenant l’argumentaire du patronat local et du député UMP de la circonscription, Richard Mallié. Selon ces derniers, les commerces de Plan-de-Campagne réaliseraient le dimanche le tiers de leurs chiffres d’affaires et 70 % des achats sont exclusifs à cette journée. Il suffirait donc d’ouvrir tous les magasins de France et de Navarre le dimanche pour que les consommateurs retrouvent du pouvoir d’achat ! Et comme ce sont des biens de première nécessité qui sont les premiers concernés-les secteurs de l'ameublement et de l'électroménager!-, le surendettement est promis à un bel avenir, son envol est assuré…
Qu’en pensent les salariés ? Dans un grand magasin d’ameublement de la zone, les avis sont partagés. Un jeune caissier : « Moi, je n’ai pas de famille. Travailler le dimanche ne me dérange pas. Et comme ça nous fait du salaire supplémentaire… Il faut nous laisser cette possibilité. C’est un choix. » Un vendeur : « J’en ai plein le dos du dimanche. Je n’ai plus de vie de famille. Je ne travaille pas le lundi et le mardi matin, mais mes enfants sont à l’école. » Faudra-t-il fermer les écoles le mardi matin pour que les enfants rencontrent leurs parents? « Le volontariat, c’est du pipeau, bondit le vendeur. Quand on est embauché, le dimanche fait partie du contrat. Si on ne veut pas travailler ce jour-là, on n’est pas embauché. » Un peu plus loin, un magasin de chaussures. « Nous, on a le choix de travailler le dimanche. Notre priorité, c’est d’être payés plus », assure la responsable, tandis que les vendeuses regardent… le bout de leurs chaussures. Un magasin d’électroménager, maintenant. Un vendeur : « On n’a pas le choix mais, moi, je veux travailler le dimanche. Ça nous fait des primes. » Un collègue : « Ben oui, s’il n’y avait pas les primes, je ne vois pas pourquoi on viendrait le dimanche. Vous croyez que ça nous fait plaisir ? » Leur salaire : le SMIC.
Rappelons d'une part que les trois demi-journées du lundi et du mardi matin, la zone de Plan-de-Campagne est 'ville' morte. Les travailleurs en profitent pour compter les sous qu'ils vont pouvoir ré-insuffler dans le marché et dans l'achat de biens superflus. Leur vision d'un bonheur frelaté s'en trouve renforcée, avec les déceptions qu'il fait naître. Les vies de couples et de famille ne s'en trouvent pas consolidée et l'endettement des ménages risque fort de s'aggraver.
Si deux demi-journées le dimanche rapportent plus que trois la semaine, d'une part la logique du "travailler plus pour gagner plus" est contredite, et d'autre part, le problème des charges sociales mais aussi des salaires bas justifiés par des primes est soulevé. Admettre ainsi que le travail du dimanche contribue à l'augmentation des coûts supportés par les consommateurs par le biais des prix à la consommation, c'est aussi reconnaître que le pouvoir d'achat des consommateurs (le plus grand nombre) est sciemment sacrifié au pouvoir d'achat d'un petit nombre de travailleurs -par ailleurs consommateurs- et des marges bénéficiaires de quelques grandes enseignes.
Au total, qui gagnera en pouvoir d'achat et qui en perdra? C'est un marché de dupes qui est proposé, aux uns et aux autres.
Dans la vaste zone commerciale de Plan-de-Campagne (400 commerces), située à mi-chemin de Marseille et d’Aix-en-Provence, l’exception est devenue la règle. Après trente-cinq ans de cache-cache avec la loi et d’arrangements à coups d’accords préfectoraux, la zone devait réintégrer le champ légal en 2002. Mais une dérogation supplémentaire de cinq années avait alors été accordée, à la condition, vite oubliée par les grandes enseignes, de préparer le retour à la normale: cinq années n'auront donc pas suffit, probablement avec la meilleure volonté du monde.
Début 2007, c’est en effet le retour au point de non-droit. Car, de nouveau, le préfet Frémont (maintenant directeur de cabinet de Jean-Louis Borloo) lâche un délai supplémentaire de six mois à vingt-six enseignes -But et Darty (filiales du britannique KESA), Castorama (du non moins britannique Kingfisher plc, comme Brico Dépôt), H&M (Suédois), Leroy-Merlin et Decathlon (groupe français Auchan de la famille Mulliez), Fly et Atlas (Groupe Rapp, premier franchiseur de l'ameublement et troisième distributeur de meubles français), etc… « La fermeture brutale serait extrêmement dommageable pour les entreprises et donc pour l’emploi », assure Christian Frémont. Le préfet prend, en toute conscience, un arrêté illégal. Il le sait puisqu’il ajoute : « Il ne fera effet que si personne ne demande son annulation. » Les syndicats portent alors l’affaire devant la justice.
En avril 2007, le tribunal administratif de Marseille annule les autorisations d’ouverture dominicale. Trois mois plus tard, le nouveau préfet, Michel Sappin, ressort la baguette magique des dérogations (au nombre de 45). « Toute autre décision serait catastrophique pour la zone », justifie-t-il, reprenant l’argumentaire du patronat local et du député UMP de la circonscription, Richard Mallié. Selon ces derniers, les commerces de Plan-de-Campagne réaliseraient le dimanche le tiers de leurs chiffres d’affaires et 70 % des achats sont exclusifs à cette journée. Il suffirait donc d’ouvrir tous les magasins de France et de Navarre le dimanche pour que les consommateurs retrouvent du pouvoir d’achat ! Et comme ce sont des biens de première nécessité qui sont les premiers concernés-les secteurs de l'ameublement et de l'électroménager!-, le surendettement est promis à un bel avenir, son envol est assuré…
Qu’en pensent les salariés ? Dans un grand magasin d’ameublement de la zone, les avis sont partagés. Un jeune caissier : « Moi, je n’ai pas de famille. Travailler le dimanche ne me dérange pas. Et comme ça nous fait du salaire supplémentaire… Il faut nous laisser cette possibilité. C’est un choix. » Un vendeur : « J’en ai plein le dos du dimanche. Je n’ai plus de vie de famille. Je ne travaille pas le lundi et le mardi matin, mais mes enfants sont à l’école. » Faudra-t-il fermer les écoles le mardi matin pour que les enfants rencontrent leurs parents? « Le volontariat, c’est du pipeau, bondit le vendeur. Quand on est embauché, le dimanche fait partie du contrat. Si on ne veut pas travailler ce jour-là, on n’est pas embauché. » Un peu plus loin, un magasin de chaussures. « Nous, on a le choix de travailler le dimanche. Notre priorité, c’est d’être payés plus », assure la responsable, tandis que les vendeuses regardent… le bout de leurs chaussures. Un magasin d’électroménager, maintenant. Un vendeur : « On n’a pas le choix mais, moi, je veux travailler le dimanche. Ça nous fait des primes. » Un collègue : « Ben oui, s’il n’y avait pas les primes, je ne vois pas pourquoi on viendrait le dimanche. Vous croyez que ça nous fait plaisir ? » Leur salaire : le SMIC.
Rappelons d'une part que les trois demi-journées du lundi et du mardi matin, la zone de Plan-de-Campagne est 'ville' morte. Les travailleurs en profitent pour compter les sous qu'ils vont pouvoir ré-insuffler dans le marché et dans l'achat de biens superflus. Leur vision d'un bonheur frelaté s'en trouve renforcée, avec les déceptions qu'il fait naître. Les vies de couples et de famille ne s'en trouvent pas consolidée et l'endettement des ménages risque fort de s'aggraver.
Si deux demi-journées le dimanche rapportent plus que trois la semaine, d'une part la logique du "travailler plus pour gagner plus" est contredite, et d'autre part, le problème des charges sociales mais aussi des salaires bas justifiés par des primes est soulevé. Admettre ainsi que le travail du dimanche contribue à l'augmentation des coûts supportés par les consommateurs par le biais des prix à la consommation, c'est aussi reconnaître que le pouvoir d'achat des consommateurs (le plus grand nombre) est sciemment sacrifié au pouvoir d'achat d'un petit nombre de travailleurs -par ailleurs consommateurs- et des marges bénéficiaires de quelques grandes enseignes.
Au total, qui gagnera en pouvoir d'achat et qui en perdra? C'est un marché de dupes qui est proposé, aux uns et aux autres.
On sait effectivement qu'au bout de 2 ans, les avantages économiques, déjà très faibles, d'une ouverture des grandes surfaces le dimanche auront disparu.
RépondreSupprimerAlors, ce deviendra un drame social en plus d'être un non sens économique !