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jeudi 17 mai 2007

François Fillon: portrait

Qui est le nouveau Premier ministre?
Avec le Président Sarkozy, il devrait former un étonnant attelage. Difficile en effet de trouver des person- nalités aussi dissemblables et complémentaires. Des hommes qui se sont autant épiés, autant critiqués pendant dix ans. Jusqu'à récemment encore. Pendant la campagne, Fillon n'hésite pas à marquer ses distances avec certains points du programme Sarkozy : la proportionnelle, la TVA sociale et même l'ouverture politique. « Le mot me plaît moyennement. L'idée, c'est plus l'ouverture d'esprit qu'un appel du pied à des hommes de gauche », affirmait il y a peu celui qui va diriger un gouvernement composé de ministres socialistes, Bernard Kouchner en tête. Fillon plus à droite que Sarkozy ? Depuis deux ans, il a en tout cas accepté de faire confiance aux « intuitions » du futur président à condition qu'il mette en oeuvre la rupture promise. Une rupture dont il veut être le gardien exigeant.

Parcours de Fillon.
Né le 4 mars 1954, d'un père notaire et d'une mère professeur d'histoire, il passe sa jeunesse à Cérans-Foulletourte, village sarthois, à mi-chemin entre Le Mans et Sablé. Des racines sarthoises qui comptent encore beaucoup pour le nouveau premier ministre.

Collégien modèle, il fréquente les meilleures écoles privées du cru et décroche un bac philo. Jeune, il colle trois affiches du général de Gaulle dans sa chambre. Une exception familiale. « Dans la famille, on ne faisait pas de politique », se souvient son frère Pierre, quatre ans plus jeune, ophtalmologue au Mans.

François est l'aîné de quatre garçons. La mort dans un accident de voiture de son frère Arnaud, à l'âge de 18 ans, bouleverse cette famille très unie.

Son frère cadet Dominique, douze ans plus jeune, est pianiste. Après avoir travaillé avec Michel Fugain et Bernard Lavilliers, il produit aujourd'hui le chanteur en vogue Sanseverino.

À 20 ans, Fillon rêve de journalisme. Stagiaire à l'AFP, on l'envoie à Madrid où il chronique la mort de Franco. Mais ses parents l'incitent à poursuivre ses études. À 22 ans, après son DEA de droit public, il devient l'attaché parlementaire de Joël Le Theule, député gaulliste de la Sarthe, peu apprécié de Jacques Chirac. Ce ministre de Raymond Barre est un ami de ses parents. Il entre à son cabinet. En 1980, le notable de Sablé-sur-Sarthe meurt d'une crise cardiaque. Le destin de Fillon bascule. En six mois, il récupère tous les mandats de son premier mentor et devient à 27 ans le benjamin de l'Assemblée. Mieux que Sarkozy qui devra attendre ses 29 ans pour devenir maire de Neuilly. Le plus jeune, il le sera souvent par la suite : plus jeune président de la commission parlementaire de la Défense en 1986. Plus jeune président d'un conseil général, celui de la Sarthe, en 1992 à 38 ans. Un an plus tard, il devient ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche dans le gouvernement d'Édouard Balladur. Il enchaîne ensuite, sous la houlette d'Alain Juppé, avec le ministère de la Poste et des Télécommunications. Portefeuille qui permettra au séguiniste de réaliser une des plus belles réformes libérales avec l'ouverture du capital de France Télécom. Au total, une trajectoire presque insolente qui lui fait naturellement éviter les pièges et passer à travers les gouttes.

Entré en politique par une « succession de hasards et de rencontres », il cultive l'art d'être dans la minorité à l'intérieur du RPR. Séguiniste, gaulliste social (« Philippe Séguin m'a formaté sur le plan idéologique »), proche de Charles Pasqua, opposé à Maastricht, balladurien en 1995... Fillon n'est jamais à la bonne place pour espérer une belle carrière au RPR. Malgré tout, il poursuit sa route. En 1998, il enlève le conseil régional des Pays de la Loire, au nez et à la barbe d'Hervé de Charrette, mais avec le soutien décisif d'Olivier Guichard. Déjà Sarkozy lui dit qu'il « admire » cette prise de guerre feutrée, sans corps-à-corps ni effusion de sang, comme on sait le faire dans les Pays de la Loire. Ses deux parrains, Olivier Guichard, pour la Région Pays de la Loire, et Philippe Séguin, au RPR, n'auront jamais été premier ministre. Ce faux dilettante aura accompli ce qu'ils n'avaient pas réussi. Une « success story » sans ombre, jusqu'à la défaite des régionales en 2004, qu'il n'a pas vu venir et qu'il aura du mal à surmonter.
Ce vrai pro de la politique donne pourtant cette étrange impression de ne pas se plaire dans ce milieu. De fuir le plus souvent Paris pour se réfugier dans la Sarthe auprès de sa famille, de son
épouse galloise, Pénélope, de leurs cinq enfants installés au château de Beaucé, jolie gentilhommière, près de Solesmes, qu'il a rachetée il y a quinze ans. Dans cette belle demeure, il s'isole de la rumeur de la capitale. « Une posture calculée », raillent ses adversaires qui rappellent son « absence coupable » pendant la canicule meurtrière de l'été 2003.
Son amie et députée du Maine-et-Loire
Roselyne Bachelot le défend : « François n'intrigue pas. Il n'est pas du genre à être crispé sur son téléphone les veilles de remaniement. » La preuve ? En 1993, Édouard Balladur, qui n'arrivait pas à joindre Fillon, a dû envoyer les motards au péage de l'autoroute à Sablé, pour le prévenir qu'il le nommait ministre...

Contrairement à Sarkozy, Fillon collectionne les passions en dehors de la politique. Il aime la corrida, le VTT et la randonnée pédestre. « C'est un grand marcheur », confie son ami, l'ancien ministre Jean de Boishue. Qui se souvient qu'il n'a jamais pu le rattraper lors d'une balade dans les montagnes de Jordanie. Il pratique aussi l'alpinisme et surtout la course automobile. Régulièrement, il retrouve le pilote Henri Pescarolo sur le circuit des 24 Heures du Mans et s'installe dans le baquet d'une Formule 3000. Une passion qu'il a souvent évoquée pendant les Conseils des ministres avec Luc Ferry, autre fan des bolides. En 1999, Fillon a même embarqué Sarkozy pour quelques tours de circuit à plus de 230 km/h ! Le futur chef de l'État en parle encore comme d'« un moment de grande trouille ». Pendant la campagne, Sarkozy a pris sa revanche en infligeant à son nouvel ami un ou deux joggings d'une heure chaque semaine. Fillon, qui cache son jeu, ne lui a pas dit qu'il pratique la course à pied depuis une vingtaine d'années avec Denis Lambert, PDG de LDC, une entreprise de Sablé qui commercialise les poulets de Loué.
Ironie du sort : le poste de premier ministre transformé en secrétaire général bis, c'est François Fillon lui-même qui l'a théorisé dans son livre, publié en 2006, La France peut supporter la vérité. Il y développe la thèse d'une présidentialisation du régime... et d'une
suppression du poste de premier ministre.

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