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dimanche 23 janvier 2011

L'absentéisme scolaire pourra induire la suspension des allocations

Le décret de Luc Chatel réactive une mesure de 1959
Le décret d'application permettant la suspension des allocations familiales en France pour absentéisme scolaire a été publié dimanche au Journal Officiel et entrera en vigueur lundi 24.
Le ministre de l'Education nationale, Luc Chatel, a souligné qu'il s'agit de la mise à jour d'une mesure datant de 1959 et que la politique contre l'absentéisme scolaire est "globale et équilibrée".

Devoir de mémoire: l’ordonnance du 6 janvier 1959

L’obligation scolaire est devenue incontournable par la loi du 28 mars 1882.
L'Ordonnance du 6 janvier 1959 a ensuite décidé que l'âge de fin de la scolarité obligatoire en France serait porté de 14 ans à 16 ans.

Le président Charles de Gaulle signa l’ordonnance prévoyant le retrait des allocations familiales en cas de non-respect de l'obligation scolaire par les familles. Or, cette disposition avait été préparée par le ministre de l’Education nationale du gouvernement Pierre Mendès France, Jean Berthoin, également à l'origine de la réforme des collèges uniques.

Mais il fallu attendre le Premier ministre Georges Pompidou et Christian Fouchet, le ministre de l'Éducation nationale, pour que soit pris le décret d’application, le 18 février 1966, cinq ans plus tard.

Les textes subordonnent le versement des prestations familiales d'un enfant soumis à l’obligation scolaire à son assiduité. Ce texte est inscrit dans le Code de la Sécurité sociale et la suspension s’opère lorsque l’Inspection académique saisit la CAF. Si la suspension des aides ne suffit pas à mettre les parents face à leurs responsabilités, la suppression, voire une sanction pénale, peut s'ensuivre.

Un besoin de mise à jour depuis les années 2000
Différents textes sont venus renforcer les procédures : circulaire de Luc Ferry en 2004 avec possibilité de convocation des parents devant une instance présidée par le préfet, et poursuites pénales ; loi sur l’égalité des chances du 31 mars 2006 qui prévoit la possibilité d’un contrat de responsabilité parentale.

Mais les situations restent très différentes d’un département à l’autre

Leur appréciation peut en effet dépendre des inspecteurs départementaux, comme des élus locaux. La mise en application de la procédure de suspension était d'ailleurs alourdie par la consultation de nombreux acteurs politiques, parfois militants, et donc par le zèle de présidents du Conseil généraux, d'inspecteurs d’académie, de chefs d’établissement, de maires, du directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales ou du préfet…). La procédure de suspension des aides devient un parcours du combattant. Dans la pratique, les obstacles du dialogue et de l’accompagnement sont difficilement insurmontables. Certains outils d’accompagnement proposés sont inopérants. Ainsi, en est-il de la « mallette des parents » de Martin Hirsch, ou des « médiateurs de la réussite scolaire » de Xavier Darcos et Fadela Amara.

Mission: ramener les absentéistes à l'école

La récente proposition de loi du député UMP des Alpes Maritimes, Eric Ciotti, adoptée le 29 juin par l'Assemblée nationale, puis votée dans les mêmes termes le 15 septembre par le Sénat, vise à rendre la procédure de suspension des aides plus souple et plus automatique, donc possible.

Elle est motivée par la lutte contre le décrochage et l’absentéisme scolaires

Le texte dispose qu’au-delà de quatre demies journées d’absence en un mois et sans justification, un élève reçoit un avertissement. Le Chef d’établissement en informe l’Inspecteur d’académie qui convoque alors la famille pour un avertissement, mais également une information sur les dispositifs d’accompagnement existants.
En cas de constat d'un absentéisme rebelle, "le directeur de l'organisme débiteur de prestations familiales est tenu de suspendre, sur demande de l'inspecteur d'académie, le versement de la part des allocations familiales dues au titre de l'enfant absentéiste".
Cette proposition de loi exclut le Conseil général de la procédure de suspension des allocations: depuis 2006, les présidents de conseils généraux ne s'en étaient pratiquement pas saisis dans les faits et faisaient ainsi obstruction. L’inspecteur d’académie peut cependant l'appeler à mettre en place un « contrat de responsabilité parentale ».

On imagine bien que cette mesure courrouce l'opposition


Pour certains, cette mesure sanctionne encore davantage des familles qui présentent déjà des difficultés sociales ou/et dans l’éducation de leurs enfants, l’autorité parentale étant aujourd’hui une valeur moins évidente que les allocations.
Ce décret est dénoncé par la gauche, les principaux syndicats d'enseignants et la fédération dominante de parents d'élèves, la FCPE, qui sont opposés à tout, jusqu'à la volonté de Pierre Mendès-France, Président du Conseil (1954-1955)sous la présidence de René Coty, le ministre de l'Intérieur étant François Mitterrand. " Les uns et les autres cherchent à caricaturer la politique du gouvernement ", a déploré le ministre dimanche sur Europe 1. "Oui, je suis favorable à la suspension des allocations familiales" en cas d'absentéisme scolaire, a répété Luc Chatel. Le ministre de l'Education nationale et la ministre des Solidarités, Roselyne Bachelot, soulignent que la publication du décret "montre l'engagement continu du gouvernement pour favoriser la responsabilisation des parents d'élèves et leur implication dans la scolarité de leur enfant". Sans cette implication familiale et des fédérations, "l'Ecole ne pourra à elle seule ramener les quelque 300 000 élèves absentéistes dans les établissements scolaires", ajoutent-ils. Selon eux, la suspension des allocations constitue "l'ultime recours" dans le dispositif de lutte contre l'absentéisme scolaire".

Pour les autres, elle doit permettre de responsabiliser les parents, être dissuasive du désengagement des parents et incitative à la demande d'un accompagnement, ou toute autre mesure sociale utile.

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