La barbarie quotidienne au camp dirigé par "Douch" décrite par les procureurs
"La politique était que personne ne pouvait sortir vivant de S-21", a déclaré le procureur canadien Robert Petit.
"Sous les ordres directs de l'accusé et parfois de ses propres mains, des personnes détenues à S-21 ont été soumises de manière intentionnelle à des souffrances physiques et mentales intenses dans le but de leur soutirer des aveux et parfois d'infliger une punition", a-t-il dit.
"Les victimes étaient battues avec des cannes en rotin et des fouets, électrocutées ou étouffées avec des sacs en plastique attachés de force autour de leurs têtes, déshabillées et leurs parties génitales soumises à des décharges électriques", a indiqué le procureur avant de préciser que "l'accusé a admis que les coups de canne étaient le plus souvent utilisés parce que d'autres formes de torture prenaient trop de temps".
L'acte d'accusation décrit des actes inhumains, tels des ongles de doigts et d'orteils arrachés, un prisonnier forcé de manger des excréments, des injections de solutions liquides par intraveineuse avec des détenus retrouvés morts le lendemain, ainsi que des prélèvements de sang, des tests de médicaments et "des autopsies pratiquées sur des vivants".
Des excuses au deuxième jour du procès
La défense a souhaité que "Douch" s'exprime après l'intervention des procureurs qui ont fourni d'horribles détails sur les tortures infligées à Tuol Sleng (S-21), camp qui jouait un rôle central dans la politique d'écrasement des "traîtres" à la Révolution communiste.
"Je voudrais exprimer mon regret et mon chagrin sincère pour les pertes et tous les crimes" commis sous les Khmers rouges, a déclaré Kaing Guek Eav, 66 ans, plus connu sous le nom de "Douch".
"En tant que membre (des Khmers rouges), je reconnais (ma) responsabilité pour ce qui s'est passé (au centre de détention de) Tuol Sleng", a dit l'accusé en langue khmère, ajoutant: "Permettez-moi de m'excuser auprès des survivants du régime et aussi des proches de ceux qui sont morts brutalement".
"Je ne vous demande pas de me pardonner maintenant, mais j'espère que vous le ferez plus tard", a-t-il lancé.
Plus de 15.000 personnes ont péri dans cette prison ou dans des champs d'exécution voisins.
Le tortionnaire relativise
Bien qu'il ait exprimé des regrets pour avoir commandé Tuol Sleng, "Douch" a souligné qu'il n'occupait pas de position dirigeante dans l'appareil d'Etat, autour du numéro un, Pol Pot.
"J'étais moi-même, avec ma famille, dans une situation de vie ou de mort", a-t-il affirmé, expliquant, au moyen d'un organigramme qu'il avait lui-même dessiné, la structure de direction des Khmers rouges, avec Pol Pot au sommet et Nuon Chea, au poste de numéro deux.
La défense passe à l’offensive
"Douch est poursuivi comme un bouc-émissaire, au nom des 195 chefs de prison (de l'époque). Prenez note de ce fait".
"Douch", ex-professeur de mathématiques qui s'est converti au christianisme en 1996, trois ans avant son arrestation, est poursuivi pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité, torture et meurtre avec préméditation.
Il risque la prison à vie, la Cour ayant exclu la peine de mort.
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