POUR

LA &nbsp LIBERTE &nbsp D' EXPRESSION

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dimanche 30 mars 2008

Tribunal de Paris - La désinformation, privilège de la presse papier

Le site fuzz.fr est condamné, mais le Nouvel Obs et Airy Routier continuent de sévir
La fin du journalisme amateur sur le Web ? Les media y voient une vraie bonne nouvelle, alors que la liberté d’expression et les protections syndicales sont un privilège aristocratique refusé à la masse de l’Internet. La presse papier aurait-elle peur de ses lecteurs ?
Jeudi 27, fuzz.fr a été condamné pour atteinte à la vie privée, par le Tribunal de Commerce de Paris. Le Nouvel Observateur et Airy Routier ont-ils subi la même rigueur?

Comme théoriquement Rue89 (Libération), Bakchich ( dont un ancien du Canard Enchaîné est le rédacteur en chef) ou LePost (Le Monde), soutenus chaque jour, par exemple, par David Abiker sur France-Info, fuzz.fr est un site alimenté par les internautes. Il a été sanctionné pour avoir publié un lien vers un blog sur les célébrités qui évoquait une relation entre l’acteur Olivier Martinez et la chanteuse Kylie Minogue. Le Tribunal de grande instance de Paris a donc tranché : non, ce site ne peut pas s’abriter derrière sa position de simple hébergeur pour s’exonérer de toute responsabilité éditoriale. Oui, il y a bien violation de la vie privée comme il en irait de n’importe quelle publication papier. C’est peut-être une très mauvaise nouvelle pour les internautes amateurs de potins mais une très bonne nouvelle pour les médias.

Cette décision de justice fera-t-elle jurisprudence? Oui, si les sites hébergés en sous-main par la presse sont traités comme les autres; mais non, s'ils bénéficient de la protection légale et constitutionnelle dont abuse cette presse qui développerait, selon certains, des tendances mafieuses affirmées.

La liberté d’expression est menacée. Le responsable du site, Eric Dupin, un blogueur connu, a donc décidé de se soumettre et de fermer boutique non sans pointer les risques que fait courir ce type de décision sur l’Internet participatif, le fameux web 2.0. « C’est comme si on condamnait le kiosquier du coin parce qu’il expose les unes des magazines people au public » a fait valoir son avocat, maître Gérald Sadde. Mais la condamnation récente du site note2be, qui proposait de noter les profs, le montre, les juges semblent subir de plus en plus de pressions de la presse conventionnelle et être de moins en moins réceptifs aux arguments du participatif. Ils considèrent qu’il n’y a pas d’exception de responsabilité lié à un statut de 'simple aiguilleur de contenus' (mais sources de rentrées financières générées par la pub...) comme il ne saurait être question d’aller trop loin dans le déballage nominatif sur les profs d’un note2be, de médecins ou de journalistes et a fortiori de magistrats...
Les vrais bénéficiaires de cette émutation juridique sont à l’évidence les médias eux-mêmes, s’ils ne sont pas à l’origine de cette traque nouvelle. Car après tout, ne sont-ils pas, eux, de vieux privilégiés de la responsabilité éditoriale ? Ils se convainquent –et l’opinion avec eux-- d’une exposition intolérable à la concurrence ( qu’ils qualifient de déloyale) des millions de sites ou de blogs qui, malgré des moyens relativement faibles, sont moins lus, mais moins surveillés et moins attaqués. Ils sont accusés de tous les maux et de faire de l’audience en propageant rumeurs et commérages. Voyez si ce ne serait pas pourtant le cas du Nouvel Observateur...
En vérité, les attaques auxquelles l’information sur le Web est exposée sont suscitées par des besoins de puissance et de protectionnisme de la presse papier. Celle-ci riposte au nombre grandissant et à l’indépendance des sites et blogs d’information sur le Net, parce qu’elle se sent menacée sur son territoire exclusif. Elle entend donc conserver la maîtrise et le contrôle de l’information, sans partage. Une des premières offensives a été de noyauter la presse Web avec ses sites de journalistes maison et masqués. Pendant la campagne présidentielle, des avocats militants ont menacé des auteurs de blogs de poursuites judiciaires. Des articles ont été retirés, sous la pression. Nous assistons donc ici à une nouvelle vague d’intimidation, avec la complicité de magistrats, sans que le gouvernement soit concerné.
La presse en ligne n’échappe pourtant pas à la critique. Tout le monde a conservé en mémoire le du soi-disant SMS adressé à Cécilia Sarkozy dont le PDG du Nouvel Obs estime incidemment qu’il n’a jamais existé ‘effectivement’ (sic). Mais les commentateurs de la maison-presse serrent les coudes et considèrent que c’est peut-être pour attirer sur leur terrain une audience pas très citoyenne que le média a dérivé, comme d'autres, moins puissants. Belle preuve de professionnalisme et de maîtrise, donc. Il est pourtant clair pour tous, sauf pour eux, que l’intention de nuire s’est développée dans nombre de salles de rédaction et que d’insolence en impertinence, des journalistes particulièrement engagés et surmenés ont perdu le contrôle, au point de dépasser les limites de l'honnêteté et de la légalité. La déontologie a pourtant été brandie comme un talisman, ou plutôt comme un épouvantail à moineaux.


Comme à leur habitude, presse et partis politiques font maintenant diversion. Un petit site ferait la honte de la profession, comme si la presse écrite ne se suffisait pas dans cet exercice. Souhaitons qu’ils soient désormais moins enclins à confondre leur rôle d’éditeur de référence avec celui de moralisteurs : leur sphère serait celle du véniel, mais aux autres le mortel.
C’est la liberté d’opinion qui est menacée.

Or, soulignons que ce n’est pas le pouvoir politique qui se livre à cette chasse aux sorcières, mais bien les média et les partis politiques qui préservent leur chasse gardée du politiquement correct et de la désinformation.

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