POUR

LA &nbsp LIBERTE &nbsp D' EXPRESSION

Free speech offers latitude but not necessarily license

dimanche 29 juillet 2018

1er-Mai : 'Libération' sort une vidéo confirmant l'interventionnisme de Benalla et son acolyte

Feuilletonnage de l'affaire Benalla-Macron

Le journal Libération révèle une vidéo dans laquelle on voit la triade Benalla-Crase-Mizerski participer au service d'ordre trois heures avant les incidents de la place de la Contrescarpe. 

Alexandre Benalla et Vincent Crase, en intervention le 1er mai 2018 dans le Jardin des Plantes, à Paris.

Ce 1er-Mai, Benalla, Crase et Mizerski prennent part à une précédente interpellation, les deux premiers se comportant comme des policiers qu'ils ne sont pas, bien avant la scène désormais fatale de la place de la Contrescarpe.

De nouveaux témoignages, ainsi qu’une vidéo, que révèle ci-dessous Libération, permettent de découvrir que trois heures avant et à un autre endroit de la manifestation, au Jardin des Plantes (Paris Ve), Alexandre Benalla, alors adjoint au chef de cabinet d’Emmanuel Macron et Vincent Crase, salarié du parti présidentiel La République en marche, LREM, sont impliqués dans l’interpellation d’un autre manifestant, sous l'oeil de Philippe Mizerski, commissaire à la direction de l'ordre public et de la circulation. 
Résultat de recherche d'images pour "philippe mizerski"
Ce dernier était encore présent sur la place de la Contrescarpe, à Paris : il était chargé d'accompagner Alexandre Benalla au cours de son "observation". On voit Mizerski habillé en civil sur les vidéos. Il n'intervient pas lorsque Alexandre Benalla et Vincent Crase s'en prennent aux deux manifestants. D'après les conclusions de l'IGPN,
il "ne concevait pas de faire la moindre observation à celui qui était, à ses yeux, un personnage de première importance". Benalla, caïd de la bande, est porteur du macaron de l'Elysée. Sa victime, le manifestant appelé Romain, sera finalement arrêté et placé en garde à vue pour "violences contre personnes dépositaires de l’autorité publique avec arme", puis relâché après quarante-huit heures, sans poursuite judiciaire. Quant à la présence de Vincent Crase, elle n’a pour l’instant pas été "justifiée" autrement que par sa proximité avec Benalla.

Des images de cette scène, capturée par le téléphone d’une amie de l’interpellé, ont été supprimées au moment de l’arrestation par un fonctionnaire menaçant. La vidéo a été récupérée sur la carte mémoire du téléphone grâce à un logiciel dédié. Selon nos informations, deux nouvelles plaintes ont été adressées ce jeudi au parquet de Paris, pour «violences volontaires par personnes dépositaires de l’autorité publique en réunion», «usurpation de signes réservés à l’autorité publique aggravé par le fait qu’ils facilitent la commission d’un délit», «usurpation de fonctions», «atteinte à la liberté», «dégradation de biens», et «introduction frauduleuse dans un système de traitement de données». Déposées contre X, ces plaintes ciblent néanmoins Vincent Crase, Alexandre Benalla et le major de la préfecture, Philippe Mizerski, chargé théoriquement de les encadrer.

La séquence est extraite d’une vidéo de six minutes et se termine brusquement au moment de l’interpellation. Elle commence lorsqu'un petit groupe de manifestants est assemblé près de policiers en tenue dans le Jardin des plantes où ils contrôlent et relâchent l’un des manifestants. Une jeune femme de 24 ans, fonctionnaire au ministère de la Justice et militante communiste, dit alors avoir commencé à filmer "parce qu’un policier a bousculé un manifestant". Les forces de l’ordre sont nombreuses, se mettent en ligne et repoussent les quelques militants, contraints de suivre la direction indiquée.

"Les gens essayaient de partir par tous les moyens. Il y avait beaucoup de gaz lacrymogène, on voulait traverser le parc pour partir à l’opposé de la manifestation", raconte aujourd’hui un camarade de 23 ans, étudiant en sciences politiques à l’université Paris-1. Sur la vidéo, la femme dramatise sa prise de vue en déclarant : "Ils nous suivent encore [les policiers]; je n’ose pas éteindre ma caméra". Malgré ses craintes, elle continue de filmer, tandis que la ligne de forces de l’ordre avance dans leur dos. Un policier leur indique une nouvelle fois la direction à suivre pour sortir du Jardin.

C’est alors qu'au détour d'un petit chemin, les manifestants tombent une minute plus tard nez à nez avec Alexandre Benalla, Vincent Crase et le major Mizerski. Noémie filme toujours et commente aujourd’hui : «A ce moment-là, j’ai le téléphone dans la main au niveau de mon torse.»Au premier plan, Vincent Crase, arborant un brassard «police», ordonne aux militants de quitter le Jardin des plantes par une sortie. Juste derrière lui, figurent Benalla et le major Mizerski. La vidéo ne permet pas de voir si Benalla est lui aussi porteur d’un brassard à cet instant. "On vient de nous dire qu’il fallait qu’on sorte rue Buffon", "faut se mettre d’accord", leur lancent les manifestants, pensant être face à des "policiers de la BAC".

Autoritaire, Vincent Crase rétorque : "Vous allez là-bas!". Au même moment, à l’arrière-plan, on entend : "Elle filme, elle filme !" L’un des manifestants répond tout de suite : "Elle a le droit de filmer." Puis les images deviennent floues. La jeune femme hurle, la séquence se coupe. L'étudiant, qui commençait à s’éloigner, réagit : "Je vois que N. est ceinturée d’une façon très violente. Je ne sais pas quoi faire, je vais vers eux, je pose mes bras sur la personne qui ceinture N. et quelqu’un derrière moi me fait une balayette et me menotte." Sous le choc, l'étudiant ne se souvient plus qui le met au sol : "J’avais la face contre le sable, je n’ai pas vu la suite."

La vidéaste poursuit : "Je me suis fait plaquer contre l’arbre le plus proche avec le téléphone dans la main. J’ai les deux bras écartés et mon corps tape l’arbre." En état de choc à ce moment, elle n’est pas en mesure d’identifier la personne qui la plaque. Un peu en retrait, Elias, 22 ans, surveillant dans un lycée parisien et militant communiste lui aussi, assiste à la scène comme témoin. Il dit aujourd’hui se souvenir très bien que "la personne qui saute sur N. avait les cheveux rasés". Une description qui pourrait donc correspondre à Vincent Crase.

La scène se poursuit et, manifestement, l’existence de la vidéo inquiète leurs interlocuteurs. N. se souvient qu’on lui hurle alors distinctement : "Eteins [la vidéo] ! Eteins !" Quelqu’un lui demande ensuite sa carte d’identité, s’éloigne de 10 à 15 mètres, et la regarde longuement. "Je me souviens qu’à côté, un manifestant avait mal, il saignait, mais on m’a dit "regarde ailleurs", raconte N. , encore très choquée. Ce n’est d’ailleurs qu’à ce moment-là que je réalise que R. [son camarade étudiant] aussi est interpellé."

Un dialogue s'engage entre extrémistes de gauche et de droite. 

Celui qui est parti avec la carte d’identité est de retour. Un nouvel échange vif débute : "On n’a pas le droit de manifester en France le 1er mai ?" s’emporte la plaignante. Réponse de son interlocuteur, selon son récit : "Non, t’as qu’à aller au Venezuela ou à Cuba," lance le pseudo-policier. 

La jeune femme, "terrorisée", garde les mains en l’air depuis de longues minutes. Son interlocuteur la menace pour récupérer la vidéo, assure-t-elle : "Donne-moi ton téléphone, sinon on t’embarque." N., hors d’elle : "Vous n’avez pas le droit de faire ça." Selon la militante, l’homme examine alors les photos et les vidéos, et en supprime plusieurs. Puis lui rend l’appareil et ordonne aux jeunes gens de "dégager". "Est-ce que je peux savoir votre numéro de matricule", s’énerve la rebelle qui se fait passer pour craintive. Toujours selon la militante, l’homme répond "007". Le soir, la jeune femme saura comment récupérer la vidéo effacée.

Libération contacte les avocats (à moins que ce soit l'inverse) et les deux plaignants s’indignent. Nadja Diaz, conseil de l'étudiant, condamne "la garde à vue éprouvante de [son] client pour des faits particulièrement graves qu’il n’a pas commis. Il attend que la lumière soit faite sur le rôle joué par ceux, désormais bien connus, qui n’avaient manifestement pas autorité pour intervenir d’une quelconque manière dans son arrestation.

Quant à l’avocat de N.,  à la même adresse et également spécialisé en droit social, maître Grégory Saint Michel pointe la responsabilité directe des autorités : "La préfecture de police, le ministère de l’Intérieur, la présidence de la République savaient que ce jour-là, messieurs Benalla, Crase, et Mizerski avaient commis des exactions. Ont-ils poussé leurs investigations plus loin pour connaître leur folle journée ? Ont-ils préféré se cantonner aux faits dénoncés de la Contrescarpe pour se contenter d’une petite mise à pied, non appliquée au demeurant ?
A l'heure de la publication, Vincent Crase et l’avocat d’Alexandre Benalla, de leur côté, n’ont pas répondu aux sollicitations du journal.,


L'avocat de Benalla critique la nouvelle vidéo dévoilée par "Libération": "On ne voit rien" 

Maître Laurent-Franck Lienard est un avocat de flics : spécialiste du droit des armes et de la défense des forces de l'ordre, il a en effet toujours eu une "très forte vocation policière" depuis qu'il est devenu devenu avocat faute de réussir au concours de commissaire. "Ce n’est plus un avocat de flics, c’est un avocat de faux flics !", telle est la plaisanterie qui lui colle au train de Me Lienard, incontournable allié des poulets, depuis qu'il assure la défense d’Alexandre Benalla, ex-proche d’Emmanuel Macron qui conserve son estime au barbouze.
Comment l’un des meilleurs avocats de flics de France s’est-il retrouvé à représenter le "bodyguard", mis en examen notamment pour "port public et sans droit d’insignes réglementés" ? Avocat des gendarmes ayant interpellé Adama Traoré, avant qu’il ne décède, ou du brigadier-chef, dont un tir de grenade de désencerclement a touché gravement un photographe lors d’une manifestation contre la loi Travail, ce conseil de 52 ans ne voit aucune contradiction, à défendre un "faux flic", pas même un goût amer d’ironie. Et de ressortir les fondamentaux, pour sa défense : "Ce n’est pas parce qu’on défend quelqu’un qu’on endosse la responsabilité de ses actes." Ce n'est pas non plus parce que Benalla tombe, que Macron est entraîné dans sa chute.

Liénard n'est pas de ceux qui découvrent les méthodes de Benalla.
L’avocat établi à Pontoise connaît bien Alexandre Benalla, rencontré par le biais d’amis communs il y a quelques années. "Un mec bien", "un gars brillant", selon lui. La première apparition de Benalla lui avait fait forte impression : "un charisme exceptionnel" ou une "moralité" impressionnante?  : "C’était étonnant à son jeune âge d’être déjà à ce niveau-là." 
En 2016, c’est d’ailleurs Laurent-Franck Lienard qui avait assisté le jeune homme devant le tribunal correctionnel de Nanterre, alors que ce gendre idéal était accusé de violences volontaires datant du 30 août 2015. L'Express fait en effet état d'une plainte déposée à Boulogne-Billancourt, dans les Hauts-de-Seine. Or, Alexandre Benalla a été relaxé de ces poursuites, bien que sa victime ait eu droit à une incapacité totale de travail supérieure à huit jours". Ce franc-maçon conserve donc un casier vierge jusqu'à ce jour.  

Ce qui est aujourd'hui reproché à Benalla ? "Un acte vigoureux, mais pas violent. Alexandre Benalla a fait du tort aux forces de l’ordre, mais il a cru intervenir légitimement", estime le conseil. L’affaire ? "Un non-événement" prenant des proportions "délirantes", raconte Liénard sur tous les plateaux de radio et télévision.

Le positionnement de Liénard interpelle. Côté flic, on trouve "un peu déplacé et confus ce mélange des genres", chuchote un fonctionnaire en uniforme. D'ailleurs, sur sa page Facebook, Lienard a reçu des dizaines de commentaires d’agents mécontents. "Cette affaire a jeté le discrédit sur l’ensemble de la profession. Ce choix surprenant aura peut-être des conséquences sur l’image qu’il a dans nos rangs", convient David Le Bars, secrétaire général du syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN). Plus cash, Daniel Merchat, ex-commissaire aux RG et avocat de limiers au Barreau de Seine-Saint-Denis, dit : "Benalla est un personnage vilipendé par les forces de l’ordre. Si je prenais ce dossier, je perdrais 90% de mes clients !". D’habitude, Laurent-Franck Lienard plaide pour de vrais flics. "J’ai sauvé des centaines de carrières", se targue Lenard, annonçant fièrement '2.000 affaires' au compteur. 

Sa ligne jaune ? "Je ne défends pas de délinquants, ni de délinquants en uniforme." Pas de vols de portable, pas de passages à tabac. Il y a donc un début à tout... D'autant que, depuis plus de dix ans, Laurent-Franck Lienard est lui aussi réserviste dans la gendarmerie.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Vous pouvez ENTRER un COMMENTAIRE (il sera modéré):