Benoît Hamon, candidat officiel du PS, dénonce la candidature attrape-tout de Macron : du libéral Alain Madelin au communiste Robert Hue
Le prétendant PS à la présidentielle a modifié son projet, renonçant au serpent de mer d’un revenu universel pour tous les 18-25 ans
Le candidat "frondeur" des socialistes et des écologistes radicaux à l’élection présidentielle a reculé sur son projet, notamment sur l'utopique et coûteux "revenu universel d'existence", proposition qui lui a permis d'émerger du lot et de remporter la primaire avec plus de 36% des sympathisants. Au lendemain de 'L’Emission politique' du jeudi 9 février qui offrait à Hamon l'opportunité de clarifier sa ligne et ses thématiques sur France 2 (raréfaction du travail du fait des technologies nouvelles, taxation des robots, interdiction des pesticides, légalisation de l’euthanasie, etc...), ce matin sur France Info, chaîne d'Etat également, version radio de France 2 pour la télévision, l'un de ses soutiens, Vincent Peillon, avait effacé le mot "universel" et ne parlait plus que de "revenu d'existence", soulignant le côté discriminatoire de la mesure qui écarte désormais les jeunes les plus diplômés, quelle que soit leur origine sociale...
"Pour éradiquer la grande précarité et contribuer à définir un nouveau rapport au travail et au temps libre", Benoît Hamon prévoyait une "révolution" en trois étapes.A partir de 2017, le RSA serait augmenté de 10% à hauteur de 600 euros par mois pour tous les ayant-droits et tous les jeunes de 18 à 25 ans. Ce revenu serait ensuite étendu au reste de la population pour atteindre 750 euros par mois.A terme, cela représenterait une somme de 450 milliards d'euros par an s'il est limité aux Français de plus de 18 ans, près de 600 milliards si même les enfants sont concernés. Soit entre 20 et 27% du PIB français, et plus que le budget actuel de l'Etat (374 milliards dans le projet de loi de finance 2016).
Le candidat socialiste qui ne décolle pas dans les sondages est contraint au rétro-pédalage
Sur plusieurs points, le député des Yvelines a apporté de profondes retouches à son programme, énonçant ainsi ses nouvelles propositions sur l’Europe, bien que déjà présentées dans un entretien au Monde, jeudi. A quarante-cinq jours du premier tour, il est revenu sur le fond de sa proposition phare : la mise en place du revenu universel, plus si "universel" qu'au départ. D'abord séduite, l'opinion a réalisé que cette proposition populiste leur serait au bout du compte néfaste, sans attendre les cinq années nécessaires à sa mise en place progressive, pour le quinquennat 2022.
Populiste encore, le candidat socialiste s’est notamment présenté comme le candidat de "la feuille de paie", promettant un complément de revenus versé sur la fiche de paie à "tout travailleur qui perçoit un salaire net jusqu’à 1,9 smic mensuel". Prime qui serait de l’ordre de 200 euros par mois au niveau du SMIC: promesse de gagner en dormant.
L'idée du "revenu universel" vient du livre "Utopia" (1516)
Egalement appelé revenu de base, c'est l'idée radicale que certains érigent en seule issue face au chômage de masse (notamment à cause de la robotisation) qui ne cesse de grimper. Plus qu'un classique SMIC ou RSA, c'est une allocation qui serait versée à tout individu sans aucune condition, à part celle d'exister. Travailleur ou chômeur, jeune ou moins jeune, riche ou pauvre, le revenu universel exclut les plus de 25 ans. Enfin, comme toute élucubration populiste susceptible de faire illusion dans les débats politiques en continu des media et des réseaux survoltés, le concept a connu bien des avatars, modifié, précisé, élagué à l'envi.L'idée est ancienne et bien qu'utopique, resurgit à chaque traversée politique du désert idéologique. Hamon et son équipe d'archaïques ne cite pas leur source, et our cause: le premier à avoir théorisé cette solution miracle à la pauvreté est Thomas More, théologien du XVIe siècle (canonisé par l'Eglise ...universelle !), l'a fait dans un livre intitulé... Utopia. C'est dire si l'idée des progressistes socialistes n'est pas nouvelle.De la Finlande à la Silicon Valley, l'idée passe et repasse ces dernières années, singulièrement depuis la crise économique et financière internationale de 2008. A tel point qu'en janvier 2016, le Conseil national du numérique a proposé au gouvernement d'étudier cette piste, dans un rapport sur l'économie à l'ère du numérique. De même que son rival Jean-Luc Bennahmias, le candidat à la primaire de la gauche Benoît Hamon défend également, à terme, un véritable revenu universel pour tous. Innovant !...
A peine énoncée, aussitôt retirée: Hamon a revu et corrigé son idée d’un revenu universel de 600 euros par mois pour tous les 18-25 ans, engagement qu’il avait pourtant défendu pendant la primaire socialiste et qui lui avait permis de l'emporter: une arnaque des six autres candidats auprès des votants à la primaire de janvier ! Le candidat entend désormais restreindre cette aide sous conditions de ressources, avec un montant qui serait dégressif jusqu’à devenir nul pour toute personne percevant plus de 1,9 SMIC. Ainsi, un étudiant qui travaillerait un jour sur cinq se verrait attribuer une aide d’environ 500 euros nets, a-t-il expliqué.
Cet emballement n'est pas que français. En 2013, le prix Nobel d'économie Paul Krugman se prononçait en faveur d'un revenu de base. La Finlande a commencé cette année à tester un revenu universel à l'échelle du pays, sur 2.000 personnes qui n'ont pas tardé à faire remonter au sommet de l'Etat les effets pervers de l'idée. Au Pays-Bas, la ville d'Utrecht envisage elle aussi de tester le revenu de base. Enfin, la Silicon Valley s'est elle aussi intéressée au revenu universel. Mais pourquoi une idée aussi rebattue (et même déjà repoussée dans les années 60, voir plus bas) a-t-elle refait surface ?
La peur des nouvelles technologies serait à l'origine de ce regain d'intérêt, expliquent les crânes d'oeufs de la high-tech. Selon le Forum économique mondial, 5 millions d'emplois seraient détruits dans le monde d'ici à 2020. La faute, notamment, à l'automatisation. Un cabinet d'étude évoquait de son côté 3 millions de postes supprimés d'ici 2025, rien que pour la France... Le Chemin de fer aussi devait nous passer sur le corps...
Les moins alarmistes rétorquent que la destruction créatrice en économie existe depuis la première révolution industrielle et les révoltes des Luddites contre les métiers à tisser et connus comme des "casseurs de machines", donc de l'outil de travail, en 1811-12 : des libertaires.
Mais cette fois-ci, les robots et l'intelligence artificielle ne touchent pas que les métiers peu qualifiés, mais aussi les fameuses professions intermédiaires. Bref, la classe moyenne. L'équipe Hamon développe donc une psychose parmi les socialo-bobos. Mais derrière ce possible chômage de masse à venir, la croissance (?], elle, continuera de se répandre. Alors plutôt que de s'opposer à la révolution technique à venir, les partisans du revenu universel se disent que si la machine finit, à terme, par remplacer l'homme au travail, il serait peut-être temps de faire taire l'adage selon lequel toute peine mérite salaire.
Le truqueur socialiste est entré dans le dur de l’affrontement.
Dans son duel politique socialo-socialiste, Hamon est aussi entré en conflit ouvert avec Emmanuel Macron, le candidat de l'Elysée.
Hamon a en effet violemment taclé son rival Emmanuel Macron, "marchepied de l’extrême droite" qui prépare "une France ingouvernable". Isolé dans une campagne que la presse a déviée sur Fillon, et distancé dans les sondages par Emmanuel Macron et le candidat de la droite, le socialiste a réservé ses coups les plus durs à l’ancien ministre de François Hollande. Il a fustigé le candidat d’une "aventure personnelle" qui "prépare une France ingouvernable". Ce qui ne manque pas de sel, sachant que ses amis de l'extrême gauche animée par Mélenchon et activistes de rue défilent derrière une banderole proclamant "Soyons ingouvernables"...
Le candidat socialiste (21%) n’arrive qu’en troisième position des postulants de gauche, ce 10 mars 2017. Le classement est identique si on ne s'intéresse qu'aux sympathisants de gauche : Macron récolte 37% des voix, devant Mélenchon (32%) et Hamon (30%).
"Allez-vous me dire comment Macron gouvernera de Robert Hue [PCF, secrétaire national (1994-2001), puis président (2001-2003) du Parti communiste français] à Alain Madelin [libéral], avec des majorités différentes ?", a-t-il interrogé, estimant que "ce qui n’est pas raisonnable, c’est d’aller à la présidentielle sans savoir avec qui on gouvernera".
"Nous avons besoin d’un chef d’Etat qui fasse confiance à sa majorité parlementaire, ce sera mon cas", a-t-il assuré, craignant à l’inverse que l’arrivée de l’ancien conseiller du président Hollande à l’Elysée ne constitue "un marchepied pour le FN".
"En tant que socialiste, je pense son [Macron] projet dangereux, et en tant que démocrate je me mets à distance de ceux qui, dans une position messianique et christique, pensent détenir la solution. Je trouve cela très immature de sa part."
Le quinqua Benoît Hamon s’est toutefois bien gardé de critiquer ceux qui viennent de décider de rejoindre le candidat trentenaire d’En marche !, à l’instar de Bertrand Delanoë [67 ans, ancien maire de Paris, contrairement à l'actuelle, l'Andalouse Anne Hidalgo, 58 ans, qui votera Hamon] ou de Claude Bartolone [66 ans, président de l'Assemblée, bien que battu en 2015 comme tête de liste socialiste à l'élection au Conseil régional d'Ile-de-France, avec 25,2 % des voix contre 43,8 % à Valérie Pécresse, LR], qui n’hésitent plus à dire qu’ils pourraient voter pour lui.
Quant à Hamon, marionnette d'Henri Emmanuelli (ci-contre, 72 ans), il n'a jamais été maire, seulement élu eurodéputé ou conseiller régional, à la faveur du scrutin de liste, et député tardif des Yvelines, en 2012, à 45 ans. Et pourtant ministre, pendant quatre mois (avril à fin août 2014), pendant les vacances scolaires...
"Moi je suis candidat à l’élection présidentielle, je ne suis là pour couper des têtes", a-t-il affirmé en début d’émission, préférant se féliciter des personnalités qui l’entourent et des élus qui le soutiennent. "De là où je viens, j’ai appris à me battre pour le bon et le mauvais, y compris quand le vent est mauvais", a-t-il poursuivi, estimant que sa "responsabilité est d’abord vis-à-vis du peuple de gauche". Comment ferait-il ensuite pour être le "président de tous les Français", comme le veut la Constitution ? "J’ai le devoir d’être au second tour de l’élection présidentielle et de l’emporter", a raconté cet apparatchik socialiste qui n'a jamais eu d'autre expérience qu'assistant parlementaire et président du Mouvement des jeunes socialistes (MJS).
Jugé "sympathique" par 59% des Français
(10 mars2017)
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Dans le face-à-face qui l’a opposé au président Les Républicains de la région Auvergne-Rhône-Alpes appelé sur le plateau en fin d’émission, Hamon s'est montré particulièrement agressif sur la laïcité. "Vous êtes l’hologramme de Marine Le Pen, en masculin !"
Cette volonté de Benoît Hamon d'agresser Laurent Wauquiez illustre la tension qui a rapidement gagné le débat entre les deux hommes. Le vice-président du parti Les Républicains et président de la région Auvergne-Rhône-Alpes a pointé chez le candidat socialiste "des accommodements sur le sujet du communautarisme", appuyant là où ça fait mal en rappelant notamment que Hamon s’était opposé à la loi sur l’interdiction du voile intégral en 2010. Le candidat socialiste a nié et assuré ne plus vouloir revenir sur cette loi.
Il chercha surtout à éluder son rétro-pédalage en accusant la droite d’avoir, "avec Nicolas Sarkozy, mis sous tension la société française". Il chercha ensuite à globaliser le problème. "Il fallait répondre au péril du terrorisme et de l’islam radical en évitant de faire des amalgames.
Vous avez choisi de vous attaquer non pas à l’islam radical mais à l’islam. Vous vous trompez de cible. Vous avez fait de l’attaque contre l’islam un fond de commerce électoral," a-t-il accusé, sans nuance. Dans un moment où "des groupes religieux testent la République", Benoît Hamon a assuré que, s’il était élu, il serait "intransigeant à l’égard de ceux voulant remettre en cause la liberté de conscience mais également d’opinion, même religieuse". Laïc mais pourtant pro-musulman, Hamon - qui fut maire de Trappes où, en 2016, 70 %, de ses administrés sont de confession musulmane (et où, pour 32.000 habitants, il existe, outre quatre lieux de culte musulmans, une mosquée proche des Frères musulmans)
- est allé jusqu'à demander à son contradicteur - ancien député maire du Puy-en-Velay- de préciser quelle religion il pratique...
A propos, en 2000, le pape Jean-Paul II a fait Saint Thomas More patron des responsables de gouvernement et des hommes politiques.
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