POUR

LA &nbsp LIBERTE &nbsp D' EXPRESSION

Free speech offers latitude but not necessarily license

mardi 7 août 2012

Proche orient: le conflit syrien est avant tout religieux

Le "printemps arabe" n'est pas social comme on nous le fait croire


Le site atlantico.fr a interrogé Karim Sader, un politologue et consultant, spécialiste du Moyen-Orient et du Golfe arabo-persique qui intervient régulièrement auprès de nombreux médias en France et à l’étranger.

Atlantico : L’armée syrienne aurait [re]pris le contrôle de la capitale du pays, Damas. Dans la ville d’Alep, la situation est figée et les rebelles sont dans l’attente d’une contre-offensive de l’armée régulière. Quelles seraient les conséquences d’une reprise d’Alep par le régime ?

Karim Sader : Alep est la deuxième ville de Syrie. C’est aussi la capitale économique du pays. Il y a donc un enjeu très important à la fois sur les plans stratégique, économique et symbolique. Pour rappel, on est dans le nord-ouest du pays avec une base arrière turque qui ravitaille les insurgés [également en armes].

Pour le clan Assad, ce serait aussi un message ferme en direction du camp occidental hostile à son maintien, ainsi qu’à la Turquie qui soutient l’insurrection sunnite. A la frontière nord, le voisin turc tient en effet une position complexe. Pendant longtemps, le gouvernement de ce pays avait annoncé avoir fermé les frontières avec la Syrie pour éviter le pillage commercial des camions entre Alep et la Turquie.

De source turque [et donc saoudienne], il s’agit également d’un moyen d’isoler Alep et de l’étouffer sur le plan économique en coupant les ravitaillements et ainsi faciliter sa chute aux mains des rebelles. L’engagement de la Turquie est donc très fort. A titre personnel, j’ai toujours douté de la facilité avec laquelle on a annoncé la prise de la ville par les rebelles. En réalité, il est techniquement difficile par l’Armée syrienne libre de prendre une ville et de la maintenir durablement dans son giron. Il est clair que les capacités de l’armée syrienne libre sont surestimées, cette dernière disposant de matériels militaires rudimentaires en comparaison de ceux de l’armée régulière, en dépit du soutien discret des pays du Golfe, de la Turquie et des Occidentaux.[Cette déclaration est un appel]
En réalité, L’insurrection joue une sorte de jeu " du chat de la souris " avec l’armée régulière poussant cette dernière à intervenir systématiquement, faisant des forces pro-Assad une véritable armée d’occupation contrainte de maintenir ses chars dans une ville afin d’y asseoir sa légitimité par la seule force coercitive. On est clairement rentré dans une logique de guérilla ou bien de guerre d’usure.  

A vous écouter, la situation telle qu'elle est retranscrite par les media  français semble inexacte...
Je dirais plutôt qu’en parallèle du conflit militaire, nous sommes en pleine guerre de l’information. On a tous les jours des informations contradictoires concernant la crise syrienne. Le régime comme les rebelles essayent de marquer des points au niveau médiatique.
Comme la communication internationale est plus favorable aux insurgés car ils sont soutenus par les pays occidentaux et les pétro-monarchies du Golfe, on a tendance à retrouver des données inexactes voire manquant d’impartialité. De nombreux journalistes s’efforçant de couvrir le conflit  depuis la Syrie, se retrouvent coincés à la frontière turque d’où leur parviennent des informations forcement biaisées.
La couverture de certains media dénote une forme "d’effet libyen ", alors que la comparaison ne tient pas la route. A lire les journaux, on a l’impression que les rebelles prennent les villes les unes après les autres or selon moi, on se dirige vers une " libanisation " du conflit, sous-entendu une guerre civile qui pourrait durer plusieurs années, en l’absence d’une intervention extérieure. Il faut avoir à l’esprit qu’avant la réhabilitation hâtive d’Assad par les Occidentaux en 2008, le régime syrien avait longtemps vécu l’isolement international et peut se maintenir beaucoup plus longtemps qu’on le pense, malheureusement au prix de nombreuses victimes.
J’ajouterai enfin que cette guerre de l’information autour de la crise syrienne a tendance à s’élargir sur le plan régional. Par exemple, voilà une semaine que des media annoncent  la mort de Bendar Ben Sultan qui est le chef des renseignements saoudiens, sans que son " assassinat ", n’ait été démenti ou bien confirmé. Selon de nombreuses sources médiatiques, le Prince saoudien aurait été victime d’un attentat imputé aux services syriens, et ce, dans le but de se venger de l’attaque contre l’appareil sécuritaire du 18 juillet 2012 à laquelle Bandar aurait joué un rôle déterminant…

Le régime syrien a connu une nouvelle défection de son Premier ministre Riad Hijah. Alors que le régime semble avoir repris le contrôle de Damas, comment expliquer l’acte du Premier ministre ?
Là encore, le départ du Premier ministre a fait l’objet d’une guerre médiatique entre la télévision du régime qui l’a présenté comme un limogeage, alors qu’il s’agirait clairement d’une défection côté rebelle. Pour ma part, j’aurais tendance à interpréter l’acte de Riad Hijah - qui est un sunnite - comme le résultat d’une confessionnalisation évidente du conflit syrien.  
La stratégie actuelle du régime vise à créer les conditions d’une guerre sectaire rendant impossible la cohabitation entre la minorité alaouite et la majorité sunnite qui ambitionne de prendre le pouvoir à Damas. Je reste persuadé que le régime cherche à se replier près de Lattaquié et créer un Etat Alaouite. C’est selon moi, le scénario le plus envisageable, d’où l’intérêt pour le régime d’arriver à un point de non-retour dans une possible cohabitation entre les minorités.
Les plus grands massacres de sunnites ont d’ailleurs été perpétrés à la frontière du "pays alaouite " comme si le clan Assad cherchait à en délimiter  les frontières. Le père de Bachar el-Assad, Hafez,  avait lui-même dessiné les contours de cet état alaouite en cas de graves crises dans le pays.

Avec la possible création d’un état alaouite, la Syrie retournerait en arrière comme au temps du mandant français. Quel serait le sort des minorités ?
Concernant la viabilité d’un état alaouite, il est possible à la condition que la Russie et l’Iran maintienne leur soutien à Assad. La Russie grâce à la création de cet Etat va préserver son ouverture vers la Méditerranée par le port de Tartous ; et l’Iran pourrait assurer la continuité de son " croissant chiite " reliant Téhéran au Hezbollah libanais.
On pourrait assister à une recomposition de la carte du Moyen Orient sur une base confessionnelle avec les kurdes au nord de l’Irak, les alaouites au nord de la Syrie, les sunnites au sud….
Quant au sort des autres minorités, je pense particulièrement à celui des chrétiens, ces derniers peinent à se positionner.  Les chrétiens veulent un régime qui les protège. Ils ont peur de l’arrivée des islamistes car parmi les insurgés, il ne faut pas se le cacher, il y a clairement des hommes d'Al-Qaïda. Dans le même temps l’aspiration des chrétiens d’Orient reste liée aux valeurs de démocratie et de liberté contraire aux dictatures d’un autre temps. Cette " troisième voie ", celle d’un Etat de droit demeure à l’heure actuelle une grande utopie dans cette région.
Propos recueillis par Charles Rassaert

ENTENDRE aussi  Pierre Piccinin, historien-politologue



3 commentaires:

  1. Militante ?

    http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2012/08/07/97001-20120807FILWWW00283-un-controle-de-femme-voilee-tourne-mal.php

    RépondreSupprimer
  2. Dans ces pays les religions sont justes bonnes pour avoir des raisons de s'entretuer, pas de respect pour l'autre est finalement leur vrai religion. Et cela ne date pas d'hier non plus, de plus c'est comme toujours des histoires de religieux plus fanatiques les uns que les autres.
    Surtout qu'ils restent chez eux, entre eux.
    Intervenir : de la pure folie.

    RépondreSupprimer
  3. http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2012/08/09/97001-20120809FILWWW00354-mali-des-islamistes-amputent-un-voleur.php

    RépondreSupprimer

Vous pouvez ENTRER un COMMENTAIRE (il sera modéré):