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samedi 30 septembre 2006

Jacques Royal, père de huit enfants.
Raphaëlle Bacqué, dans Le Monde du 29.06.06 dresse un tableau saisissant de la famille Royal, dont est issue La Maréchale Me-Voilà-M'As-Tu-Bien-Vue.
Le père marche en tête en bottes d'équitation, tandis que la mère soumise suit. Les huit enfants, par ordre décroissant : Marie-Odette, Marie-Nicole, Gérard, Marie-Ségolène, Antoine, Paul, Henry et Sigisbert. Les garçons portent les cheveux ras : le lieutenant-colonel Jacques Royal oblige ses fils, à l'adolescence, à être enfants de troupe. Ils y sont presque tous passés. Antoine, lui, s'est franchement rebellé : "Si tu m'y obliges, tu ne me reverras plus jamais de ta vie", a-t-il lancé à son père.
Le journal Le Monde indique que la famille a des moyens financiers convenables, même pour entretenir huit enfants nés en neuf ans. Dans les années précédentes, en Afrique, aux Antilles, où les Royal ont vécu au gré des mutations du père, elle a goûté aux charmes de la vie d'expatriés, avec boys et maisons confortables. A Chamagne, ce village de 400 âmes au coeur de la Lorraine où il est revenu après avoir achevé sa carrière d'officier supérieur, ils font figure de notables. La maison est vaste. Trois étages, de belles pièces, un petit jardin. Les Royal ont été les premiers à avoir une télévision et une machine à laver. L'été, les enfants se succèdent dans les maisons de vacances de leurs grands-parents maternels à Villers-sur-Mer (Calvados) ou sur la Côte d'Azur.
Les enfants Royal gardent surtout le souvenir sombre d'une éducation à la dure. "Mon père, c'était un peu Folcoche, assure aujourd'hui Antoine, né seize mois après Ségolène. Nous n'avions pas droit au chauffage dans les chambres, la toilette se faisait à l'eau froide. Nous devions réciter la prière du matin, le bénédicité avant les repas. Tenue impeccable à table. Pas de dessert et, d'ailleurs, pas de sucreries." La morale familiale est rigide, fondée sur le sens de l'honneur et les commandements religieux. Le dimanche, les huit rejetons forment une belle chorale et entonnent des chants grégoriens.
Sur ce petit monde, Jacques Royal règne en autocrate. Sans jamais montrer la plus petite marque d'affection. C'est un homme cultivé, germanophone, amateur d'histoire et de latin. Il peut se montrer charmant à l'extérieur, il est d'une dureté implacable pour les siens. Lorsqu'il s'absente, la tension se relâche un peu, mais sa femme, Hélène, ne se risque pas à s'émanciper des règles du couple. Le lieutenant-colonel n'est pas un monstre, pourtant. Mais c'est un homme profondément blessé. Né en 1920, il est le septième d'une famille de huit enfants. Son père, Florian Royal, polytechnicien (promotion 1912), avait embrassé la carrière militaire et connu le feu en 1914, avant d'épouser une fille de gros propriétaires terriens et de terminer général. L'âge, la hiérarchie militaire l'ont irrémédiablement placé en maître de son fils. Il vit d'ailleurs à Chamagne, tout près de la maison de Jacques, auquel il impose sa vigilance de commandeur.
Jacques Royal, lui, est de cette génération de militaires qui a perdu toutes les guerres. Engagé volontaire en 1939, à 19 ans, il a été fait prisonnier près d'Epinal, au moment de l'avancée nazie. Par tradition familiale autant que par goût, il est resté dans l'armée, une fois la paix revenue. Dans l'artillerie, comme son général de père. Commence alors la grande série de défaites. L'Indochine, d'abord, dont il revient foncièrement anticommuniste et ébranlé dans ses certitudes sur la grandeur de la France. Puis l'Algérie, qui va achever de nourrir son désarroi. Jacques Royal est parti combattre dans le Sahara du Sud, laissant épouse et enfants. Il reviendra se sentant floué, angoissé d'avoir laissé les harkis qu'il sait voués à une mort inévitable. Antigaulliste absolu. Crachant sur l'hypocrisie des politiques. Marqué par une amertume profonde.
Un de ses frères, militaire comme lui, a démissionné en signe de désaccord. Jacques n'ira pas jusque-là, mais il obtient d'être mis à la retraite en 1964. Il n'a que 44 ans et ne portera plus jamais ses médailles. En 1965, première élection présidentielle au suffrage universel, Jacques Royal vote pour le candidat de l'Algérie française, Jean-Louis Tixier-Vignancour. Dans la famille, on pensera longtemps qu'il a choisi par la suite de donner sa voix à Jean-Marie Le Pen, qu'il appelle parfois "le gamin". En tout cas, puisque les valeurs auxquelles il croyait sont parties en fumée, il resserre son autorité sur son clan.
Seulement, l'époque est en train de changer sans lui. Ses fils et filles cherchent à lui échapper. Marie-Odile et Marie-Nicole se sont apparemment soumises aux diktats paternels. Mais, derrière, c'est la fuite généralisée. Gérard s'est engagé dans l'armée. Jusque-là, il a paru le plus introverti de tous. "Le plus soumis", disent ses frères. Il va bientôt rejoindre la DGSE. […] Pour l'heure, cependant, Marie-Ségolène, qui n'a pas encore renoncé à son premier prénom, a obtenu d'être interne à l'institut Notre-Dame d'Epinal. Antoine, lui, a devancé l'appel pour faire son service militaire. A l'officier qui lui exposait la vie de la caserne, il a lancé goguenard : "Ne vous en faites pas, j'ai déjà dix-sept ans d'armée derrière moi !" Plus tard, Antoine aura maille à partir avec la justice. Paul, Henry et Sigisbert sont en pension. (légèrement abrégé de Le Monde)

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