Le gouvernement Cazeneuve fait se dresser les Guyanais les uns contre les autres
Après trois semaines de révolte contre l'insécurité en Guyane, le fossé semblait difficile à combler mercredi
Pro et anti-blocage sont descendus dans les rues de Guyane, mardi 11 avril 2017 |
Financièrement, "on n’a plus le moyen de suivre", a justifié Ysabel, propriétaire d'une boutique de prêt-à-porter qui vient de mettre "quatre salariés en chômage technique". Marie, fleuriste qui participait également au rassemblement, a assuré avoir "jeté pour 4.000 euros de fleurs". Preuve que Kourou génère des emplois et des retombées financières sur l'ensemble de la population locale.
Manifestants faisant la queue pour déposer des plaintes contres les blocages en Guyane, à Kourou le 11 avril 2017 |
L'entrave à la circulation étant établie dans une Guyane bloquée depuis trois semaines par de nombreux barrages, la justice doit désormais prendre une décision sur la réponse à apporter à ces plaintes. "Une enquête est en cours", a déclaré le procureur de Cayenne Eric Vaillant, sans plus de précisions.
"C’est une minorité contre une majorité", a estimé Olivier Goudet, un des porte-paroles des "500 frères contre la délinquance", groupe dont les membres marchent cagoulés et qui a pris l'ascendant sur le collectif "Pou La Gwiyann dékolé" pilotant le mouvement social depuis trois semaines.
La cour de la sous-préfecture de Saint-Laurent du Maroni est actuellement occupée par des membres du collectif des "Iguanes de l'Ouest" qui appellent à la poursuite du blocage.
La Guyane est agitée depuis trois semaines par un important mouvement de rejet de l'insécurité, sur fond de revendications et sociales. Alors que le gouvernement a validé la semaine dernière un plan d'urgence de plus d'un milliard d'euros pour ce territoire, "Pou La Gwiyann dékolé" réclame 2,1 milliards supplémentaires.
"On passe à une autre phase du combat", a promis Mikaël Mancée, co-fondateur et porte-parole des "500 frères" (ci-dessus au premier rang, à droite, devant la préfecture à Cayenne, le 7 avril 2017), sur la radio Péyi, très populaire depuis le début du conflit, évoquant l'annonce "dès demain" d'une "évolution du mouvement". "L'objectif n'est pas de pénaliser la population", a-t-il assuré.
François Hollande a estimé que "l'économie guyanaise ne doit pas être fragilisée plus longtemps", ajoutant aux appels à lever les barrages. "On ne peut pas multiplier les annonces, les promesses" intenables, à douze jours du premier tour de l'élection présidentielle, a encore reconnu le chef de l'Etat lundi.
Les barrages ne laissent plus passer les voitures depuis dimanche minuit, hors véhicules d'urgence ou production par les conducteurs d'un document démontrant l'urgence de leur voyage (rendez-vous médial, billet d'avion). Devant les critiques de la population, les piétons, les vélos et les scooters peuvent toutefois passer.
"Il n'est pas tolérable de se voir refuser le droit de circuler librement sur le territoire", selon les signataires d'une pétition en ligne qui avait recueilli mercredi plus de 2.800 paraphes. Plus de 4.300 internautes font aussi partie d'un groupe Facebook "Stop aux barrages en Guyane".
Mais une autre pétition, intitulée "Pour le maintien des barrages en Guyane", mise en ligne mardi, a recueilli en quelques heures plus de 4.500 signatures.
La "grève générale illimitée", décrétée le 25 mars et qui bloque le port de Cayenne, entraîne des pénuries, notamment de produits frais, tandis que les ordures ne sont plus ramassées depuis mardi dans Cayenne et ses environs.
A la mi-journée, 325 conteneurs étaient en train d’être déchargés, a indiqué Philippe Lemoine, directeur général du port. "On en sait pas si tous les containers seront livrés, mais certains ont été sortis car ils répondaient à des besoins urgents, comme du matériel médical", a-t-il expliqué.
Et les professions de foi des candidats à l'élection présidentielle ne seront pas distribuée dans les boîtes aux lettres en Guyane vu "l'impossibilité d'expédier les circulaires des candidats aux électeurs guyanais avant le premier tour du scrutin", a annoncé la préfecture mercredi.
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