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mardi 28 avril 2020

Pourquoi les Agences Régionales de Santé s'attirent-elles la critique ?

Les toutes-puissantes ARS dans le collimateur pour leur gestion de la crise du coronavirus

En matière de Santé publique, le gouvernement est pieds et mains lié à ses "intendants royaux de province"

Coronavirus : pourquoi les Agences Régionales de Santé sont-elles sous le feu des critiques ?
Bordeaux: siège de l'ARS de Nouvelle-Aquitaine 


Suspectées d'un avenir d'usines à gaz dès leur création, le 1er avril 2010, les toutes-puissantes ARS concentrent les rancoeurs pour leur gestion autoritaire - voire sectaire - et étriquée de l’épidémie de Covid-19, mais Macron aux abois c les soutient plus que jamais envers et contre tout car c’est son action qui est visée à travers elles.

Quelle est la fonction des ARS ?

Créées par la loi Bachelot du 21 juillet 2009 (dite 'Hôpital, patients, santé et territoire') pour "assurer un pilotage unifié de la santé en région, mieux répondre aux besoins de la population et accroître l’efficacité du système". les ARS ont remplacé les anciennes agences régionales de l’hospitalisation (ARH) en avril 2010, mais aussi les directions des affaires sanitaires et sociales (Drass, Ddass) et certaines caisses d’assurances maladie (Urcam, Cram). Leur vaste champ d’action englobe hôpitaux, cliniques, soins de ville, médico-social (personnes âgées et handicapées), prévention et environnement (qualité de l’eau et de l’air). Concrètement, un des rôles des ARS était de moderniser et rationaliser l'offre de soins et de veiller à la bonne gestion des dépenses hospitalières et médicales. Au-delà de ces aspects régaliens (tutelle financière, droit des autorisations), ces agences étaient plus largement chargées de transformer le système de santé en développant la coopération, la transversalité et les parcours de santé. Missions accomplies, mais avec une rigueur pointilleuse et une rigidité intransigeante telles que les ARS se reçoivent aujourd'hui une succession de violents "orages cévenoles". 


S’ils n’en ont pas le titre, leurs directeurs sont de véritables préfets sanitaires à l’échelle de leurs régions.
Les ARS "jouent en quelque sorte un rôle de chef d’orchestre", tout en traduisant "une volonté de reprise en main par l’Etat du pilotage des politiques de santé", résume Henri Bergeron, directeur de recherches au CNRS. Elles ont notamment le pouvoir administratif d’ouvrir ou de fermer des services (maternité, chirurgie, urgences) et d’autoriser certains équipements (scanner, IRM). 
Surtout, elles tiennent les cordons de la bourse, distribuant les crédits de fonctionnement des établissements, ainsi que des aides en tous genres à des projets locaux ou des soignants installés dans les déserts médicaux.

Cette tutelle omnipotente a nourri une décennie de frustration et de ressentiment du corps médical.

Il n'a jamais accepté d'être supplanté par une administration sans contre-pouvoir, sans contrôle, sans comptes à rendre. Des griefs renforcés par les restrictions budgétaires de l’époque : nées en temps de crise financière internationale, les ARS ont dès l’origine été accusées de mettre en œuvre une politique d’austérité.

Bras armé de l’Etat centralisateur, les ARS partagent avec lui les reproches: lourdeur bureaucratique, manque de réactivité, communication fluctuante. "On a probablement pris du retard dans la gestion de crise [sanitaire du coronavirus] parce que nous avions affaire plutôt à des acteurs budgétaires qu’à des logisticiens de crise", affirmait ainsi début avril le président de la région Grand Est, le docteur Jean Rottner. Fin mars, au plus fort de l’épidémie, un observateur en première ligne disait son effarement de voir l’armée évacuer des malades de Mulhouse, alors que des hôpitaux et cliniques pouvaient les accueillir à proximité. Décision ubuesque d'un directeur tout-puissant pris de panique et soucieux d'alléger sa charge.

"Les discussions au niveau des ARS sont une catastrophe", affirmait-il, dénonçant "des grosses guerres d’ego", avec des directeurs d’agence qui "règnent en maître sur leur territoire", à tel point que même "le directeur de cabinet du ministre de la Santé n’est pas au courant des décisions prises régionalement". Vindicatifs, les médecins ne les épargnent pas. Ainsi François Honorat, président du Syndicat des anesthésistes libéraux : "Les ARS n’ont pas été à la hauteur. Elles empêchent les gens de fonctionner, il va falloir réformer tout ça".

Colosses aux pieds d'argile, les directeurs d’agence se savent désormais sur un siège éjectable, notamment depuis le limogeage de Christophe Lannelongue, potentat du Grand Est. En pleine crise sanitaire, ce haut fonctionnaire avait exercé son pouvoir absolu en annonçant en pleine crise sanitaire - liée à l'imprévoyance: sous-effectifs, pénuries de lits, de masques et de respirateurs - le maintien du plan de restructuration du CHU de Nancy et ses 600 suppressions de postes, déclenchant l’indignation des élus locaux et des partis d’opposition.

Le gouvernement a pris conscience qu’à travers les ARS, c’est son incurie qui est visée
Sur les conseils d'Olivier Véran, politicien isérois - suppléant issu de la société civile de Geneviève Fioraso, PS, nommée ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche par Jean-Marc Ayrault et soutien du socialiste Jean-Jack Queyranne lors de la campagne des élections régionales de 2015 - , mais aussi urologue de terrain - ex-porte-parole de l'Intersyndicat national des internes des hôpitaux, et ex-conseiller titulaire à l'Ordre départemental des médecins de l'Isère - appelé de Grenoble à la rescousse pour remplacer la ministre "démissionnaire" de la Santé liée par son mari Yves Lévy impliqué avec l'INSERM au laboratoire P4 de Wuhan d'où s'est échappé le virus Covid-19, membre de la caste des mandarins parisiens qui mènent le monde de la médecine, Edouard Philippe a ainsi salué leur "travail remarquable pour permettre la montée en puissance des capacités de réanimation", passées  de 5.000 à plus de 10.000 lits, soulignant "en même temps" une pénurie de 50%. Et Olivier Véran ne perd jamais une occasion de rappeler leur "mobilisation" décisive dans la neutralisation du foyer épidémique de Haute-Savoie début février, ou dans les "644 évacuations sanitaires" réalisées "par train, avion et hélicoptère".
A Grenoble, le patron de l'ARS, qui compte près d'un millier d'agents, Aymeric BOGEY est un politique qui a débuté sa carrière en 2001 à la mairie PS de Paris où il était le collaborateur de Dominique Bertinotti, maire PS du 4e arrondissement, chargé notamment du suivi de l'Hôtel-Dieu et des relations avec l'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AH-HP).
Palmarès du député socialiste Olivier VéranDéputé de 2012 à 2015 dans les rangs du PS, il suit les dossiers relatifs à la santé à la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale. Il prend position en faveur de l’ouverture expérimentale de "salle de shoot" (site d'injection supervisée) à Paris, ainsi que l'ouverture du droit de vote des étrangers aux élections locales.En mars 2013, chargé par le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, d'une mission sur la filière sang, il s'engage pour le don du sang, anonyme, gratuit et volontaire et milite pour le don du sang par des homosexuels.En décembre 2013, il alerte sur l'impact sanitaire et financier du recours croissant aux médecins intérimaires par les ARS, dénonçant une attractivité hospitalière de très bas niveau.En 2014, en tant que rapporteur du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2015, volet assurance maladie, il défend notamment la création d'hôtels hospitaliers, ainsi que la suppression des franchises médicales pour les bénéficiaires de l'aide à la complémentaire santé (réservée aux personnes dont les ressources sont légèrement supérieures au plafond d'attribution de la CMU-C, elle donne droit, durant un an, à une aide financière pour payer un contrat de complémentaire santé).En 2015, il est rapporteur du volet prévention et promotion de la loi de modernisation de la santé, comprenant le plan anti-tabac, la lutte contre le binge drinking, les salles de consommation à moindres risques, mais il ne préconise pas l'ouverture de lits d'hôpitaux, ni la reconstitution des stocks de masques ou de gants anti-infectieux ou de kits de prélèvement: son orientation est uniquement sociale et sa priorité est l'anorexie, tant qu'elle est dans l'actualité...En 2016, la ministre socialiste de la Santé, Marisol Touraine, celle qui prétend toujours avoir bouché le trou de la Sécurité sociale avant de partir, le charge du pilotage du comité de réforme du mode de financement des établissements de santé. Ancien rapporteur du projet de "loi santé", il s'oppose alors à une suppression de la T2A - tarification à l’activité, un système de cotation des actes médicaux qui régit depuis les années 2000 le financement des hôpitaux, autrement dit l'indexation du budget des hôpitaux sur leur activité réelle qui cristallisait déjà pourtant le mécontentement des personnels hospitaliers et agite toujours le milieu hospitalier -, mais aussi à un retour à la "dotation financière globale".
Quelle que soit l’accusation, le ministre de la Santé protège son administration. 

Incurie dans les Ehpad ? 
Les ARS ont reçu "des instructions très claires pour dresser jour après jour l’état des lieux", mais les médecins sont actionnaires d'Ehpad... 

Pénurie de médicaments ?
 
Elles "établissent les priorités dans la répartition des stocks indispensables". Christophe Lannelongue ? "Un serviteur de l’État qui a cru bien faire". 
Dans un communiqué, le ministre Olivier Véran ajoute que, lors de la conférence de presse donnée vendredi 3 avril, les termes employés par Lannelongue "ont été mal interprétés"...

L’heure des comptes viendra-t-elle jamais ?
Pour le chercheur Henri Bergeron, un "bilan" de l'action des ARS devra bel et bien être mené. "On a pensé un peu naïvement qu’à partir du moment où on créait un organisme de coordination, la coopération entre les acteurs allait s’améliorer". Or, la crise "a révélé des problèmes majeurs de coordination, au niveau national comme au niveau local", souligne-t-il. Mais, si les problèmes de coordination sont réels, ils ne doivent pas masquer les autres et notamment la nécessité d'un contrôle par les élus régionaux de l'activité des agences, ce qui implique également l'introduction d'organismes paritaires dans la prise de décisions. 
Actuellement, les directeurs d'ARS sont des hauts-fonctionnaires ministériels recasés en régions lors des alternances politiques, parfois d'anciens directeurs des DRASS, de l'ARH et URCAM, IGAS, CPAM. D'autres proviennent du monde de la santé (Directeur d'hôpital), de la mutualité, mais certains arrivent du top management de... la grande distribution. 
En Midi-Pyrénées, l'intersyndicale critiqua à demi-mot les "méthodes de management d'un directeur général de l'ARS, DG issu du privé, arrivé tout droit de la grande distribution [Carrefour et Procter & Gamble France] et de la sidérurgie" (UNICEM, et IBM France, usine de Montpellier), Xavier Chastel.

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