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samedi 22 décembre 2018

Le RIC s'est imposé aux 'Gilets jaunes' comme la revendication numéro 1

Est-ce le signe de la récupération du mouvement social par l'extrême gauche politique ?

Comment faire du neuf avec du vieux ?

Samedi, place de l’Opéra, à Paris, des gilets jaunes manifestent pour réclamer la création du référendum d’initiative citoyenne (RIC).

Comment cette notion a-t-elle pu germer sur les ronds-points des Gilets jaunes, des "gens qui ne sont rien"? Comment un mouvement informel et sans tête, ni cervelle, a-t-il pu faire resurgir une idée si technique ? Sont-ils "plus intelligents et plus subtils" que Gilles Le Gendre et sa bande de jeunes blancs-becs à l'Assemblée ? Y aurait-il donc derrière les gilets jaunes, comme  le prétend le complotiste Jean-Michel Aphatie, "une organisation souterraine cachée, des tireurs de ficelles, des gens beaucoup plus politisés qu’on ne le croit" qui expliquerait cette soudaine irruption du RIC ?
Vote à main levée des 'Nuit debout'
Avant lui, le mouvement 'Nuit debout' qui, à partir du 31 mars 2016, organisa, sans meneur ni porte-parole officiel, des manifestations sur des places publiques contre la loi Travail de Hollande était organisé en commissions et prenait des décisions par consensus lors d'assemblées générales, suivant les principes de la démocratie directe. Or, il était en effet noyauté. Ainsi, comme d’autres intervenants, François Ruffin, aujourd'hui LFI, insistait sur la nécessité d'ouvrir le mouvement à toutes les classes sociales et aux personnes non engagées politiquement, à décentraliser la Nuit debout en banlieue, pour éviter une radicalisation par l'entre-soi et l'emprise d'intellectuels. Et on pense notamment à l'économiste Frédéric Lordon. 
Si on avait écouté Leila Chaibi, fondatrice du collectif 'Jeudi noir' (comme Julien Bayou, désormais conseiller régional d’Ile-de-France et porte-parole d’Europe Ecologie-Les Verts, conseiller d'Eva Joly, candidate à la Présidentielle), spécialisé dans l’occupation de squats et accessoirement adhérente à la formation politique de Jean-Luc Mélenchon, le mouvement naissant à République - dont elle était une des chevilles ouvrières - se serait construit en totale indépendance des partis de la gauche de la gauche. En vérité, le mouvement aurait compté parmi ses visiteurs réguliers une petite centaine de militants du Front de gauche et autant du NPA. "Si t’arrives avec ta bannière, tu pourras pas entraîner le plus grand nombre", raconta néanmoins Fanny Gaillanne, conseillère de Paris communiste, arrivée à République le deuxième jour.
Pour Julien Dray, grand connaisseur socialiste des mouvements de jeunes, comme pour le premier secrétaire du PS, Jean-Christophe Cambadélis, un trotskiste, ces veilleurs de nuit uniques en leur genre sont loin d’être apolitiques : "J'ai vu l'extrême-gauche, des communistes.
Le NPA, on les reconnaît, ils sont là". Mais des députés socialistes frondeurs avaient aussi tenu à être vus, comme Pascal Cherki, Barbara Romagnan et Daniel Goldberg.
Certains activistes politiques étrangers étaient physiquement présents place de la République: l’espagnol Pablo Lapuente Tiana, membre de la section Podemos de Paris, est même devenu le référent "formation" de 'Nuit debout'. 
Aphatie n'est donc encore pas grand clerc à propos des Gilets.
Une vieille idée

D'abord, aucun des partis politiques traditionnels n’a réussi à récupérer le mouvement. La mauvaise réputation de la classe politique empêche le Rassemblement national et la France Insoumise de Mélenchon d’avoir une réelle influence sur lui. Mais si le socialisme avait une meilleure image, pourquoi le "revenu universel d'existence" de Hamon n'a-t-il pas en revanche refait surface?

La seule récupération politique qui a fonctionné, c’est celle des partisans du RIC. Le référendum d’initiative citoyenne est une vieille lune qui circule depuis longtemps, défendue par différentes entités, le Clic (Comité de liaison pour l’initiative citoyenne) d’Yvan Bachaud, l’association Article 3 ou Etienne Chouard et ses "gentils virus". Ce dernier, prof d’économie-gestion de lycée, s’était fait connaître en défendant le 'non', lors du vote sur le référendum européen de 2005. Il avait depuis disparu des radars médiatiques, ostracisé pour ses relations douteuses, notamment avec Alain Soral.
En 2017, le projet de référendum d’initiative citoyenne, soutenu par un Comité de Liaison pour l’Initiative Citoyenne, a été présenté au Parlement. Ce nouveau droit aurait promis de donner une voix aux citoyens pour proposer des lois, ou au contraire pour s’y opposer, en exerçant un contrôle préventif des décisions des élus. Le mécanisme se serait adossé à une plateforme publique de pétitions en ligne qui aurait permis de mettre à l’ordre du jour des discussions de l’Assemblée et du Sénat sur de nouveaux projets de loi. Ce droit d’initiative se serait accompagné d’un certain nombre de garanties, notamment en termes de protection des données personnelles des signataires et de pouvoir d’intervention dans le processus législatif.
D’après un sondage effectué en avril 2017 par l’IFOP, 83 % des Français interrogés seraient favorables au référendum d’initiative citoyenne. Ce résultat montre qu’un nombre important de citoyens est en attente d’une modification du système démocratique actuel.
Ce projet de loi porté par le Clic fut relayé par le site révolutionnaire trotskiste Mediapart...
Une "idée simple et révolutionnaire"


Très vite, les militants du RIC vont comprendre qu’il y a un coup à jouer avec les gilets jaunes - puisque apolitiques et naïfs - et vont pousser leur avantage. Changement de pied dès le 25 novembre, donc, au lendemain de l'"Acte 2" du mouvement ciyoyen des Gilets jaunes. Le Clic publie un communiqué : "Si les gilets jaunes avaient le RIC pour unique revendication, ils l’obtiendraient. Il en serait fini des taxes injustes !," assurent-ils, en sortant du bois. 

Le même jour, Etienne Chouard tweete : 


A partir de cette date, les militants du RIC vont faire preuve d’un prosélytisme très actif en faveur du référendum sur les groupes Facebook de gilets jaunes.
Exemple d’images qui circulent sur les groupes Facebook de gilets jaunes.
Le mot RIC va très vite s’imposer dans la conversation chez les gilets jaunes car il permettrait de passer dans les actes le "Macron démission". Si la révolution n’est pas possible et que Macron refuse de démissionner, il faut lui tordre le bras en lui imposant une cohabitation avec le peuple. 
L’idée d’un "référendum" circule chez les gilets jaunes depuis début novembre : "On désire tous ici un référendum national pour une destitution", lit-on alors sur les groupes Facebook. L’idée est encore embryonnaire et pas franchement aboutie. Les militants de la démocratie réelle vont arriver avec une solution clé en main, comme une formule magique capable de résoudre tous les problèmes : le RIC.

"Comment ils font pour nous dire non ?"

Dans la diffusion de cette idée, il faut souligner le rôle majeur joué par Maxime Nicolle, le gilet jaune le plus influent sur Facebook. Ruth Elkrief, moins fine qu'elle ne pense, l'invitera sur le plateau de BFMTV... Or, pour lui, dès le départ, il est évident qu’il ne faut pas négocier avec le gouvernement. La liste de revendications qui est présentée fin novembre à François de Rugy "ne sera applicable qu’après la destitution du gouvernement par référendum populaire", explique-t-il alors.

Le RIC, que lui font découvrir les militants de la démocratie réelle, lui apparaît comme une révélation. 
Le 8 décembre, alors que les gilets jaunes sont dans la rue pour l’acte IV, il participe à une conférence sur le RIC en direct sur Internet avec Etienne Chouard. Le référendum est pour Nicolle une option stratégique : "Si on a plein de revendications, l’Etat va nous en prendre une ou deux et on l’aura profond. Par contre, si on demande tous la même chose : que chacun puisse donner sa voix avec un référendum d’initiative citoyenne, comment ils font pour nous dire non ?Extrait du live Facebook de Maxime Nicolle du 4 décembre.

Horizontalisme radical

Résultat de recherche d'images pour "La Commune de Paris"L’idée pour Maxime Nicolle, intérimaire des Côtes d'Armor âgé de 31 ans et porte-parole des "gilets jaunes", est que si tout le monde a des revendications différentes, le seul moyen pour que chacun soit écouté est de passer par un outil de démocratie directe. «Plus de guerre d’ego, plus de guerre de pouvoir, avec le RIC, plus personne n’a le pouvoir, c’est la population entière qui a le pouvoir», explique-t-il. Cette idée de référendum citoyen s’inscrit dans la "démocratie Internet", cet horizontalisme radical qu’on retrouvait dans la mouvance Anonymous, chez les Indignés espagnols, Occupy Wall Street ou Nuit Debout. Sur Internet, toutes les paroles se valent, tout le monde peut donner son avis et être entendu. A contrario, la démocratie représentative fonctionne comme l’espace médiatique traditionnel, avec des représentants ou des journalistes, seuls habilités à parler, pendant que le peuple doit sagement se taire.

Image associée
Commune de Paris, 1871
La démocratie que souhaitent les gilets jaunes est celle des groupes Facebook, où tout le monde y va de son avis, où on signe des pétitions et où les grandes questions sont tranchées par sondage. Sauf que personne ne sait où mène cette pléthore d'avis contradictoires.
Qui peut imaginer qu’un politique – ou même un gilet jaune – les représente pour décider des grands choix de la nation ? Cela reviendrait à dire que quelqu’un a le droit d’écrire les commentaires Facebook à leur place. 
Le RIC, l’autre manière de faire la révolution.

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