Sortie des six dossiers tenus sous le coude par l'Elysée et Matignon
Retraites, budget, transition écologique, politique pénale, fonctionnaires, école...
Revue de détail des dossiers chauds de la rentrée gouvernementale d'après Les Echos.
Une nouvelle réforme des retraites à finaliser
Les 26 et 27 août, Jean-Marc Ayrault recevra les partenaires sociaux pour leur présenter les grandes lignes de la réforme des retraites qu’il entend mettre en œuvre. Le gouvernement leur donne neuf jours avant de finaliser ses derniers arbitrages, le 4 septembre.
Mais la hausse de la CSG semble le moyen de financement le plus probable et elle est loin de faire l’unanimité, y compris dans les rangs socialistes et chez les écologistes. Vendredi, les députés PS, Jean-Marie Le Guen, et EELV, François de Rugy, ont critiqué cette solution.
L'ampleur de la hausse fait aussi débat. Certains au sein de l’exécutif plaident pour un relèvement qui irait au-delà de 0,5 point et permettrait de financer non seulement le déficit des régimes de retraite (20 milliards d’ici à 2020), mais aussi une partie de celui de l’assurance-maladie (10 milliards de déficit au moins cette année).
Pour ne pas faire peser l’effort du financement de la réforme sur les seuls ménages, via la CSG, le gouvernement est aussi tenté par une hausse de la taxe sur les dividendes versés par les entreprises. Cette taxe est aujourd’hui de 3%.
Mais c’est surtout sur le volet pénibilité que la contribution des entreprises devraient être le plus lourde, au détriment de leur compétitivité et donc de l'emploi. En instaurant un compte pénibilité qui permettrait aux salariés qui auraient accumulé un nombre de points suffisants pour financer des formations, des temps de travail aménagés, voire des départs anticipés en retraite via des rachats de trimestre, le gouvernement ouvre un chantier aussi vaste que coûteux. Suivant les facteurs de pénibilité retenus, le coût pourrait aller jusqu’à 2 milliards d’euros par an en régime de croisière, selon les estimations faites par le rapport de Yannick Moreau.
Pas de quoi rallier l'adhésion des salariés et apaiser les syndicats qui ont maintenu leur mot d’ordre de mobilisation pour le 10 septembre, veille de présentation du projet de loi en Conseil des ministres.
10 à 12 milliards d’euros à trouver pour boucler le budget 2014
Dans quelques jours, les Français découvriront la réalité des hausses d’impôts votées à l’automne dernier, lorsque 36,4 millions de foyers fiscaux recevront leur avis d’imposition pour l’année 2012.
Quelques semaines plus tard, ce sont encore les mêmes qui découvriront, une nouvelle salve de mesures dans le cadre des discussions budgétaires 2014. Ils devront financer les 10 à 12 milliards d’euros que recherche toujours le gouvernement pour boucler son budget au moyen de nouveaux prélèvements fiscaux. Ces derniers ne sont pas tous arbitrés, mais certains sont déjà connus, comme le coup de rabot sur le quotient familial.
Le gouvernement envisage par ailleurs de reconduire pour un an le gel du barème de l’impôt sur le revenu pour les tranches les plus élevées, mais n’a pas encore trouvé le courage de trancher.
L’exécutif a aussi programmé des mesures pour tenter une relance du marché immobilier, en jouant à la fois sur les cessions contraintes de terrains vierges et de résidences secondaires.
Les ménages seront enfin touchés par le relèvement des taux de TVA, notamment du taux normal, qui passera de 19,6% à 20% au 1er janvier 2014 et frappera jusqu'aux foyers les plus défavorisés.
Sans oublier les mesures de fiscalité écologique, non encore arrêtées.
L’épargne ne sera pas épargnée, ni la fiscalité des plus-values sur les valeurs mobilières, qui a suscité le mouvement des "pigeons", a été refondue au printemps dernier. Une simplification du régime entrera en vigueur l’an prochain, avec effet rétroactif.
Le chantier de la fiscalité de l’assurance-vie a en outre été ouvert, mais pourrait ne déboucher qu’en fin d’année, malgré le lancement du PEA (plan d'épargne en actions)-PME, qui pourrait intervenir plus tôt.
Les entreprises, qui devront s’acquitter de la nouvelle taxe à 75% sur les rémunérations de plus de 1 million d’euros, font elles aussi l’objet de réflexions. L’imposition forfaitaire annuelle (IFA), impôt assis sur le chiffre d’affaires qui devait s’éteindre en 2014, devrait ainsi être reconduite.
Des mesures durcissant l'utilisation des "prix de transfert" seront aussi soumises à consultation.
Une transition écologique à concrétiser
La fiscalité verte, levier de la transition écologique à l’accélération de laquelle ont exhorté quatre ministres – Cécile Duflot (Logement), Philippe Martin (Ecologie) Stéphane Le Foll (Agriculture) et Pascal Canfin (Développement) –, rebute autant le patronat qu’il fait piaffer d’impatience les écologistes. Selon ces derniers, les Français doivent consentir au "verdissement' des impôts, comme lors du dernier budget.
Techniquement, le gouvernement détient toutes les cartes pour commencer à s’attaquer, dans la loi de Finances 2014, aux niches fiscales nuisibles à l’environnement dont celle concernant le gazole des transporteurs routiers et le diesel des particuliers, si propre qu'il soit devenu, parce que moins taxé que l’essence. Le rapport de Perthuis, remis à Matignon en juillet, préconise d’instaurer dès l’an prochain une taxe carbone (avec un taux progressif jusqu’en 2020) et de réduire à petites doses (1 centime d’euro par an et par litre) l’écart entre les deux carburants. Ce scénario n’est pas à la hauteur de toutes les espérances écologistes. Mais son application sera ce premier "signal fort" voulu par les Verts radicaux d'EELV, également attendu par les députés PS, d’une France enfin lancée sur les rails de la transition énergétique. Le passage à l’acte s’annonce très difficile pour le gouvernement, d’autres hausses d’impôts étant en vue.
Beaucoup de militants écolos réclament une sortie de leurs ministres du gouvernement, avec la chute de popularité des altermondialistes liée à l'accroissement de la pression fiscale verte. Plusieurs leaders du parti tentent de se désolidariser en exigeant une correction de tir sur les moyens dévolus à l’environnement en 2014 qu’ils veulent voir augmenter.
Mais François Hollande, qui avait mouillé l’écologie dans sa "grande réforme fiscale", lors de la campagne présidentielle, se montre aujourd’hui encore moins déterminé qu'hier sur ce dossier. En même temps, l'approche des municipales oblige l’Elysée à donner des gages à ses alliés écologistes, refroidis par l’annonce d’une baisse pour 2014 des crédits du ministère de l’Ecologie et par l’éjection de sa titulaire contestatrice, Delphine Batho (PS), à sa tête. Philippe Martin, le successeur de Delphine Batho, table sur une ponction de 500 millions d’euros sur les Français. Pas sûr que cela suffise et qu'ils n'en tiennent pas rigueur aux écolos et aux socialos, le moment venu.
Une politique pénale qui divise la majorité présidentielle
Summum de l'hypocrisie des relations gouvernementales |
L’opposition n'aura pas besoin de forcer le trait pour dénoncer la "cacophonie" gouvernementale sur ce dossier, tant les conceptions de ces deux fortes têtes en matière de justice pénale sont - comme prévu - antithétiques. Sur fond de prisons surpeuplées, la ministre de la Justice entend vider les prisons en caricaturant le "tout carcéral" et met des entraves à la construction de nouvelles structures d'accueil pénitentiaire. Christiane Taubira prône entre autres la suppression des peines planchers instituées sous la précédente majorité et l’aménagement automatique de certaines peines, suscitant de vives réactions dans le milieu policier, mais avec le soutien du Syndicat de la Magistrature.
Impréparé à la fonction présidentielle et, comme son Premier ministre, sans aucune expérience gouvernementale, Hollande a mis en contact l'étincelle et l'amadou.
Dans cette cohabitation à couteaux tirés, Manuel Valls est confronté à une intensification de l'activité criminelle en France, encouragée par la promesse de laxisme de la ministre de la Justice. Son petit camarade n’a donc pas hésité à la frapper dans le dos, dénonçant l'action de Taubira au chef de l’Etat ...par courrier ! Il pointe secrètement sa politique et demande fin juillet à Hollande d’arbitrer. La tentative a eu lieu le 2 août, lors d'une confrontation à l'Elysée, avant le Conseil des ministres.
Son hyperactivité de "furet" sur le terrain et son omniprésence de caméléon dans les media ont construit la popularité du ministre de l’Intérieur qui jouit de la satisfaction de 61 % des Français dans le dernier sondage Ifop/JDD) et qui le conforte dans sa communication intrusive.
Au final, celle-ci n’est guère distincte de celle de l’opposition qui, régulièrement, dénonce le laxisme de la gauche en matière pénale.
Ce populisme pourrait devenir gênant pour le chef de l’Etat, accusé par le Syndicat de la magistrature (classé à gauche) de s’inscrire "dans la poursuite" de la politique menée par ses prédécesseurs. Mélenchon force le trait et dénonce même un positionnement "à l'extrême droite" !
Des fonctionnaires à ménager sur fond d’austérité salariale
Eviter de s'aliéner les fonctionnaires et de les agréger à la liste des mécontents, faisant enfler le mouvement social de cet automne contre la réforme des retraites.
La majorité présidentielle doit maintenant surveiller le front des fonctionnaires, d'autant que le gaspillage du gouvernement et l’austérité budgétaire consécutive ne lui laisse guère de marge de manoeuvre: la sémantique réussira-t-elle à endormir les profs ?
Le gouvernement a fait de 2013 une année blanche en matière salariale dans la fonction publique. Mais s’il a exclu toute augmentation générale, le gouvernement laisse des portes entre-baillées ! Si, les catégories C – le bas de la grille de la fonction publique – bénéficieront d’un petit coup de pouce salarial au 1er janvier, au-delà de la répercussion de la hausse du SMIC qui doit intervenir à cette date, le flou est maintenu sur 2014.
Le dossier le plus délicat est évidemment celui des retraites.
Le gouvernement s’est déjà attaché à enfumer la zone. Les fonctionnaires se sont vu promettre que la réforme ne les toucherait pas plus que les autres. Le mode de calcul de leur pension restera fondé sur les six derniers mois de salaire et non les 25 meilleures années comme dans le privé.
Reste que si la menace d’un mouvement d’ampleur paraît peu probable dans un contexte de poursuite de la croissance du chômage, le climat social n’en est pas moins miné, alors que la perspective des élections professionnelles dans la fonction publique se rapproche – elles auront lieu en 2014 – et va favoriser l'escalade entre organisations syndicales.
Tandis qu’ici ou là se multiplient les réorganisations territoriales et que se poursuivent des suppressions de postes dans la plupart des administrations, des mouvements de protestation catégoriels pourraient émerger et prendre de l’ampleur.
Le gouvernement s’est déjà attaché à enfumer la zone. Les fonctionnaires se sont vu promettre que la réforme ne les toucherait pas plus que les autres. Le mode de calcul de leur pension restera fondé sur les six derniers mois de salaire et non les 25 meilleures années comme dans le privé.
Reste que si la menace d’un mouvement d’ampleur paraît peu probable dans un contexte de poursuite de la croissance du chômage, le climat social n’en est pas moins miné, alors que la perspective des élections professionnelles dans la fonction publique se rapproche – elles auront lieu en 2014 – et va favoriser l'escalade entre organisations syndicales.
Tandis qu’ici ou là se multiplient les réorganisations territoriales et que se poursuivent des suppressions de postes dans la plupart des administrations, des mouvements de protestation catégoriels pourraient émerger et prendre de l’ampleur.
Un premier test à passer pour la refonte des rythmes scolaires
Ainsi, pour éviter une grogne étudiante, le pouvoir a-t-il été conduit à réformer les bourses universitaires en juillet. Mais la montée de leurs charges réduit à néant ses efforts de séduction.
VOIR et ENTENDRE i-tele sur l'augmentation de 2% des frais de rentrée 2013:
C’est la première "vraie" rentrée scolaire du gouvernement.
"L’an dernier, on avait fait une rentrée du changement dans l’urgence, avec les 1.000 postes [1.000 enseignants recrutés - et sous qualifiés- en urgence] et des petites mesures qui pouvaient donner le sentiment du changement, avoue rétrospectivement le ministre de l’Education, Vincent Peillon, peu fier, fin juin, de son action. Cette année, c’est la première rentrée de la refondation."
Le ministère de l’Education nationale promet en tout cas "une rentrée plus sereine" en termes de moyens. Au total, 40.000 personnes vont faire leur première rentrée dans deux semaines. "La rentrée, normalement, doit bien se dérouler ", espère-t-on dans l’entourage sous tension de Vincent Peillon.
Restent en effet plusieurs sujets chauds à surveiller
Un quart seulement des élèves du primaire basculeront en septembre vers la semaine de quatre jours et demi, mais ce changement est souvent mal accepté, car peu débattu. Les écoles et communes qui ont opté pour la réforme dès 2013 sont "plutôt bien préparées", mais c'est le ministère de l’Education nationale qui le certifie. "Il y aura forcément des couacs mais, en fin d’année, plus personne n’en parlera et on s’apercevra que les choses tournent", anticipe un proche de Vincent Peillon. A voir, au vu de l'expérience de cette première tranche.
La rentrée qui s’annonce est aussi celle des nouvelles Ecoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE). Début juillet, plusieurs d’entre elles n’étaient toujours pas prêtes. "Toutes les écoles vont pouvoir ouvrir au 1er septembre", affirme-t-on désormais au cabinet du ministre, sans préciser, ni savoir vraiment, dans quelles conditions: les premiers stagiaires et donc leurs futurs élèves, serviront de cobayes. Sur les 30 écoles accréditées, 8 – Grenoble, Toulouse, Paris, Versailles, Antilles-Guyane (trois écoles), Lyon – ont d'ores et déjà reçu pour instruction de s’améliorer. Elles feront l’objet d’un suivi particulier...
Vincent Peillon compte aussi ouvrir de nouveaux chantiers à l'occasion de la rentrée.
Le plus lourd est celui de la réforme du statut des enseignants du second degré et la révision du décret de 1950 qui le fonde. Un dossier récurrent. Et explosif.
Une rentrée sereine ?
Le plus lourd est celui de la réforme du statut des enseignants du second degré et la révision du décret de 1950 qui le fonde. Un dossier récurrent. Et explosif.
Une rentrée sereine ?
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