"L'équivalent de 2.600 euros de pension mensuelle sera maintenu" aux enseignants
Les enseignants grévistes écrivent une nouvelle page de l'Histoire du mouvement social.
Blanquer avait besoin de rassurer les enseignants qui estiment ĂȘtre les "perdants" de la rĂ©forme des retraites. "C'est un point majeur" et "une Ă©norme avancĂ©e," claironne Jean-Michel Blanquer en sonnant la retraite du gouvernement : aprĂšs les concessions aux militaires, l'enthousiasme de Blanquer masque une dĂ©route.
En premiÚre ligne face à la contestation de la réforme des retraites du gouvernement, le ministre de l'Education s'était invité sur France Culture vendredi 20 décembre pour publier cette promesse de nature à désamorcer la contestation des enseignants. Il promet que "l'équivalent de 2.600 euros de pensions mensuelles sera maintenu" pour les enseignants. Ce sera écrit dans la loi que nous garantissons un niveau de pension", a assuré Jean-Michel Blanquer.
"On est à la veille d'une revalorisation historique pour les professeurs en France", selon Blanquer. En fait, une annonce destinée à démobiliser les enseignants.
Que cache cette soudaine reculade historique ?
La promesse ministĂ©rielle inquiĂšte les enseignants : ils craignent d'ĂȘtre "les perdants" de la rĂ©forme et d'avoir Ă nĂ©gocier des contreparties. Une crainte que le ministre de l'Education nationale affirme avoir anticipĂ©e: "Le cĆur de la rĂ©forme des retraites, c'est le rĂ©gime Ă points. Le premier Ă avoir identifiĂ© que cela pouvait poser un problĂšme pour les enseignants, c'est moi, et je l'ai dit Ă Jean-Paul Delevoye. Aujourd'hui, la moyenne des retraites des enseignants, c'est 2.600 euros mensuels, c'est plutĂŽt une bonne moyenne. C'est cela que l'on veut prĂ©server."
Cette revalorisation "historique" ne concerne que les débuts de carriÚre.
Blanquer affirme que "pour la moitiĂ© la plus jeune des professeurs de France, cela va se traduire par plusieurs centaines d'euros d'augmentation mensuelles. C'est cela le schĂ©ma dans lequel nous entrons. C'est extrĂȘmement concret et aucune profession, aujourd'hui en France, ne connaĂźt une revalorisation pareille," Bonjour, donc, l'Ă©quitĂ© du rĂ©gime universel...
"J'ai toujours reconnu qu'il fallait que nous avancions vers une augmentation de la rémunération des professeurs. Nous devons maintenant réussir ce passage qui aura lieu le 1er janvier 2021", conclut le ministre de l'Education.
Revalorisation ou entourloupe ?
Les enseignants vont-ils prendre avant de contester les contreparties ?
Ils le savent, Macron et Blanquer lient revalorisation et redéfinition du métier. "La fonction professorale doit prendre un sens nouveau," a estimé le ministre, lors de la présentation de son budget devant la Commission de l'Education de l'Assemblée nationale, le 23 octobre 2019. Jean-Michel Blanquer a dû préciser ses intentions sur la revalorisation du métier enseignant. Il en ressort que? comme Macron, il ne conçoit pas de "revalorisation" sans une augmentation du travail enseignant.
Pour commencer, pas de revalorisation en 2020.
Si, pour la dĂ©putĂ©e LREM A-C. Lang, "les enseignants sont augmentĂ©s de 300 âŹ; c'est incontestable", la rĂ©alitĂ© budgĂ©taire pour 2020 est sensiblement diffĂ©rente et prĂ©sage mal d'une vĂ©ritable revalorisation. Selon BLanquer, le budget prĂ©voit 300 millions pour le GVT (hausses de salaire liĂ©es Ă l'anciennetĂ©), auxquels s'ajoutent 340 millions par application des accords PPCR signĂ©s en 2016 et retardĂ©s d'un an par le gouvernement Philippe. Il y a Ă©galement 60 millions en rĂšglement de la hausse de la prime de Rep+ (concernant les zones de renforcement de lâaction pĂ©dagogique et Ă©ducative dans les Ă©coles et Ă©tablissements des territoires qui rencontrent les plus grandes difficultĂ©s sociales). Cette augmentation est la seule Ă mettre au crĂ©dit du gouvernement et elle est loin de reprĂ©senter 300 ⏠par enseignant.
D'aprĂšs le ministre, il reste 30 millions "pour l'agenda social", c'est Ă dire Ă nĂ©gocier avec les syndicats. Ils seraient destinĂ©s Ă une amĂ©lioration du taux d'accĂšs Ă la hors classe pour les enseignants du 1er degrĂ© (le taux d'accĂšs des professeurs des Ă©coles est nettement infĂ©rieur Ă celui des enseignants du second degrĂ©, en collĂšge ou en lycĂ©e). Aucune revalorisation de la paie des enseignants ne peut donc ĂȘtre budgetĂ©e pour 2020.
Heures supplémentaires et personnalisation ?
"On va se revoir avec les syndicats sur l'articulation réforme des retraites, rémunération et définition du métier enseignant", annonce le ministre. Comme Macron, le 3 octobre, il lie ainsi toute revalorisation à une redéfinition du métier. Macron avait expliqué que ce serait lié à la hausse du temps de travail et à la réduction des congés.
Le ministre de Macron ouvre deux pistes.
D'abord, les heures supplĂ©mentaires qui permettent aux enseignants de gagner plus. Mais on sait que cela ne concerne pas les enseignants du premier degrĂ©, dont les salaires sont Ă©quivalents Ă ceux du second degrĂ©, depuis qu'ils ont obtenu d'ĂȘtre des 'professeurs' et non plus des 'instituteurs'. Ces heures ne sont pas disponibles dans toutes les disciplines. De plus, globalement, ce sont les hommes (minoritaires dans l'Ă©ducation) et les enseignants des catĂ©gories les plus diplĂŽmĂ©es (agrĂ©gĂ©s, CPGE) qui en font davantage. Autrement dit, les heures supplĂ©mentaires augmentent les inĂ©galitĂ©s dabs le corps enseignant.
Ensuite, "la fonction professorale doit prendre un sens nouveau. Cela passe par la capacité à personnaliser la carriÚre du professeur". Autrement dit, aux carriÚres ponctuées par un avancement statutaire, succéderait une "personnalisation" de la carriÚre, selon le "mérite", à la discrétion subjective du chef d'établissement qui définit seul ses critÚres. Cela sera rendu possible grùce à la loi de réforme de la fonction publique adoptée cet été qui donne de nouveaux pouvoirs à la hiérarchie immédiate. Au ministÚre, on parle de "gestion de proximité" des relations humaines...
La commission de l'éducation rejette les amendements.
Elle a adopté le budget 2020 en en rejetant les amendements déposés par l'opposition et quelques députés de la majorité. Ainsi, trois amendements PS demandaient le rétablissement des 440 postes supprimés dans le second degré ou la création de postes dans le 2e degré pour accueillir les 40.000 élÚves supplémentaires. Un autre amendement PS en faveur de la titularisation des contractuels a été pareillement repoussé du pied.
Frédéric Reiss (LR, ancien professeur de mathématiques) et MichÚle Victory (suppléante depuis 2007 d'Olivier Dussopt, PS, et professeur d'anglais) ont relevé la baisse de 3.5% des crédits de formation du 1er degré, en contradiction avec le discours ministériel, et demandé son annulation. Les deux amendements d'un montant de 30 millions ont été repoussés par la majorité. Un amendement PS prévoyant de doter chaque professeur d'un crédit formation de 100⏠a été aussi rejeté.
Des députés de la majorité sont intervenus pour défendre le service médical de l'éducation nationale en pleine déliquescence du fait des salaires insuffisants. M Isaac-Sébille et Mme Bannier, Mme Descamps et MM Bournazel et Zumkeller ont demandé un million pour revaloriser les salaires des médecins scolaires, en vain. Mme Temarelle Verhaeghe et les députés PS ne demandaient que 250.000 ⏠. Ils ne les ont pas obtenus.
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