Hollande dénonce le face-à-face que Macron installe avec le RN, ainsi que les errements du PS
"A vouloir tout bousculer, tout s'est arrêté," tacle Hollande
L'ancien président François Hollande n'accorde aucune excuse à son ancien ministre et successeur Emmanuel Macron.
"Diriger la France, je l'ai éprouvé, est un exercice difficile qui suppose de bien comprendre notre pays. Le résultat au bout de deux ans n'est bon ni pour la vitalité économique, ni pour la cohésion sociale", affirme F. Hollande dimanche, dans un entretien avec Le Parisien.
"A vouloir tout bousculer, tout s'est arrêté", poursuit-il. "Mais un mandat dure cinq ans; évitons de porter des jugements définitifs. Tout président peut toujours opérer des corrections. Moi-même, j'en ai fait. Pour ma part, si j'interviens, c'est pour alerter".
Pour l'ancien chef d'Etat, "les partis de gouvernement qui ont animé le débat démocratique pendant des décennies doivent prendre conscience de leur responsabilité".
Il les appelle, notamment le Parti socialiste, à "être de nouveau des alternatives crédibles et mobilisatrices, sinon le face-à-face entre le pouvoir actuel et l'extrême droite peut mal finir".
Ne "confond(ant) pas" l'extrême-droite et la France insoumise, Hollande met en garde. "La menace vient de l'extrême droite. Je l'affirme, un jour elle arrivera au pouvoir en France. En 2022 ou plus tard si l'on ne fait rien...". "C'est un danger, ça n'est pas une fatalité. Ca dépend de nous", a précisé Hollande.
Hollande rappelle qu''il a été confronté à une crise sociale semblable à celle des Gilets jaunes
François Hollande et Emmanuel Macron se renvoient mutuellement la responsabilité de la crise des Gilets jaunes depuis novembre.
En déplacement sur la tombe de Jean Ferrat en Ardèche, François Hollande avait rencontré des Gilets jaunes. "Il faut continuer à prendre la parole et faire que ça puisse déboucher", leur a-t-il dit, défendant notamment son bilan et rappelant avoir mis en place le CICE (Crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi), qui a permis de baisser les charges pesant sur les entreprises, et donné un coup de pouce au SMIC, au début de son quinquennat.
Macron avait répliqué depuis Buenos Aires. "J’entends comme vous les voix qui s’élèvent. J’entends aussi souvent les voix qui parfois n’avaient pas même réussi à bouger les choses, et qui sont sans doute plus à la racine de cette situation que nous vivons que le gouvernement qui n'est aux affaires que depuis 18 mois", avait-il commenté, bien qu'il fût au G20, visant François Hollande à mots couverts. Avant d'asséner : "Que voulez vous? Le cynisme fait partie de la vie politique."
A Montauban, François Hollande l'avait retoqué lors d'une rencontre avec une délégation de ...Gilets jaunes. "Ce qui s'est fait depuis dix-huit mois ne relève pas de ma responsabilité. C'est un gouvernement, un président, qui ont choisi et c'est leur droit de supprimer l'Impôt sur la fortune et d'augmenter des impôts sur tous les Français", a-t-il déclaré. "Aujourd'hui ils doivent réfléchir aux conséquences de cette politique", a conclu l'ancien chef de l'Etat.
Il évoque la fronde fiscale des bonnets rouges qu'il avait subie au mois d'octobre 2013.
Il fait une étude comparée qui n'est pas à l'avantage de Macron, qui fut son conseiller avant de devenir son ministre de l'Economie: "L'écotaxe dont j'avais hérité de mon prédécesseur n'était pas comprise, dans ses modalités comme dans sa gestion par un opérateur privé. J'ai donc pris la décision de la suspendre. Le recul est parfois préférable à l'entêtement. Ça m'a été reproché par certains à cette époque. Je constate que le gouvernement actuel a battu en retraite. Mais trois semaines trop tard."
Il faut toutefois rappeler que dès 1999, le gouvernement Lionel Jospin avait cherché à instaurer une écotaxe pour financer le passage aux 35 heures de Martine Aubry, mais que son projet avait été invalidé par le Conseil constitutionnel. Pour mémoire encore, en août 2007, une proposition d'aquataxe avait été faite par l'association de consommateurs UFC-Que Choisir, au début du Grenelle de l'environnement. Incluse dans le prix des pesticides, elle aurait pu servir à aider les agriculteurs à "changer leurs pratiques dans le domaine de l'eau".Quant à l'écotaxe, elle ambitionnait de passer dans les actes le principe vertueux du pollueur-payeur en cas de dommages environnementaux. Le système de "bonus-malus écologique" sanctionna les véhicules émetteurs de CO2 et cette fiscalité écologique punitive rapporta 1,1 Md € de recettes en 2011.Le 1er avril 2014, une taxe carbone fut incluse dans les taxes intérieures de consommation sous la forme d'une "composante carbone" proportionnelle aux émissions de CO2. D'un montant initial de 7 €/t de CO2, elle est passée à 14,50 € en 2015, 22 € en 2016 et 30,50 € en 2017. Elle devait atteindre 100 € en 2030. Or, en octobre 2018 sur RTL, Ségolène Royal a accusé le gouvernement de la hausse des prix des carburants qui a déclenché la colère des Gilets jaunes. Elle a dénoncé "un matraquage fiscal par l’écologie", mais plusieurs membres du gouvernement ont rafraîchi la mémoire de l’ancienne ministre de l’Environnement de Hollande. Ainsi Bruno Le Maire, ministre de l’Economie et des Finances de Macron a jugé que Ségolène Royal avait été "triplement malhonnête" et notamment "par rapport à ses engagements passés". "Elle devrait être fière d'avoir mis en place, une taxe sur le carbone dont dépend l'avenir de notre planète. Elle est malhonnête par rapport à cet engagement passé." Sur RTL, Le Maire a rappelé que Ségolène Royal est à l’origine de cet impôt sur les émissions de dioxyde de carbone. Comme le président Hollande qui donne aujourd'hui des leçons sur la base de sa gestion de la crise des Bonnets rouges...
"Un ancien président ne devrait pas dire ça", a réagi Marlène Schiappa, la secrétaire d'Etat à l'égalité des genres, sur BFMTV, évoquant le livre de Gérard Davet et Fabrice Lhomme, qui a mis Hollande à l'équerre dans l'opinion à la fin de son quinquennat. "Je crois que ce n'est pas à la hauteur de la fonction d'un ancien président de la République", a fustigé la garde chiourme de la politique.
Le livre du cynique sera publié mercredi en édition de poche, avec trois nouveaux chapitres, dont un aborde le mouvement des Gilets jaunes.
Dans son bouquin à rallonges comme un "grand débat" de Macron, Hollande croit encore à sa capacité à "contribuer à (la) renaissance" de la sociale-démocratie face au libéralisme "dans les mois et années à venir". Face à la liste de bric et de broc montée par LREM et intitulée "Renaissance", il critique la stratégie d'effacement devant 'Place publique' acceptée par le premier secrétaire du PS, Olivier Faure. "A chercher à tout prix le rassemblement avant de poser clairement la question de leur identité, les socialistes perdent un temps précieux pour formuler leur nouveau projet et réaffirmer leur volonté de gouverner un jour le pays en tirant les leçons des erreurs d'hier", cingle-t-il.
Hollande esquisse de nouvelles idées, proposant, notamment pour mettre en oeuvre la transition écologique, "un triptyque (...): planification, nationalisation et autogestion". De vieilles recettes pour un coup de barre à gauche !
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