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jeudi 3 octobre 2019

Les policiers descendent dans la rue pour une "marche de la colère" inédite

Des milliers de policiers ont participé à une "marche de la colère" contre l'institution, la hausse des suicides et la réforme des retraites.

A l'appel d'une large intersyndicale inédite en vingt ans


La démonstration de force des syndicats a réuni 27.000 policiers, selon les organisateurs, soit près de 18% des quelque 150.000 fonctionnaires que compte la Police nationale. Un taux équivalent à celui des grévistes habituels du SNU-ipp dans les écoles. Parti de Bastille aux alentours de 13h30, le cortège a rejoint la place de République aux sons des pétards et des sirènes entrecoupés de chants de la "Marseillaise".  

"La manifestation est un succès et un signal fort de la profession. C'est un avertissement sévère au gouvernement et à la présidence. On attend maintenant des réponses et des actes concrets", a déclaré le secrétaire général d'Alliance, Fabien Vanhemelryck, qui marchait en tête du cortège aux côtés de ses homologues des autres organisations, une image d'unité rare dans un univers syndical marqué par les rivalités, mais aussi bridé par le devoir de réserve. 

"Il faut redonner du sens au métier de policier." Les instituteurs de l'école maternelle Méhul de Pantin ne disent pas autre chose, après le suicide de leur directrice, sur son lieu de travail, samedi 28. "52 suicides [de policiers] depuis le début de l'année; c'est dramatique et ça montre tout le malaise dans la profession. Il y en marre de la stigmatisation des policiers", a dit Philippe Capon, secrétaire général d'UNSA police.

De mémoire de syndicalistes policiers, on n'avait pas vu un tel appel unitaire, gardiens de la paix, officiers et commissaires, depuis 2001. 
A l'époque, la mobilisation avait été provoquée par le meurtre de deux policiers au Plessis-Trévise (Val-de-Marne) par un braqueur récidiviste.
Cette fois, pas d'élément déclencheur spécifique circonstanciel, mais une usure opérationnelle liée aux ordres de répliques systématiquement disproportionnées au mouvement social des Gilets jaunes, où des violences policières ont été dénoncées, et un bond des suicides dans la police nationale.
"Nous sommes venus ici pour nous battre pour nos conditions de travail, et surtout pour rendre hommage à nos collègues qui ont mis fin à leurs jours", déclare Damien, 24 ans, policier à la Brigade des réseaux transiliens, à Paris.
"Nous sommes là car c'est un ras-le bol", explique Yves, 54 ans, policier à Montpellier. "On remet en cause la réforme des retraites, les politiques, les media, le traitement des affaires. Pour nous il n'y a jamais de présomption d'innocence".

Quelques Gilets jaunes, dont Eric Drouet, étaient venus faire "acte de présence" non loin de la place de la Bastille, très encadrés par des gendarmes mobiles pour éviter tout incident avec les manifestants. "On est venu rappeler qu'il y a aussi eu des violences policières depuis dix mois", a déclaré cette figure du mouvement social né en novembre 2018. 

Cinq revendications principales mettent en cause plusieurs ministères

Ce sont la qualité de vie au travail (ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner), une véritable politique sociale pour les agents du ministère de l'Intérieur, une réponse pénale "réelle, efficace et dissuasive" (ministre de la Justice, Nicole Belloubet), la future loi d'orientation et de programmation (LOPSI, 2002) et la réforme des retraites (portée par le haut-commissaire aux retraites, Jean-Paul Delevoye, auprès de la ministre des Solidarités et de la Santé, Agnès Buzyn).

Les syndicats policiers craignent ainsi une remise en cause de leur avantageux système de bonifications. 
"On va construire cela tous ensemble. Il faut partager les contraintes, qu’il y ait une solidarité. Il y aura une grande négociation, un grand débat. Rien n’est décidé", a martelé le chef de l’Etat. Ce qui n'est pas de nature à rassurer les policiers. Seront-ils conviés aux débats voulus par le chef de l’Etat lors d'une série de déplacements pour recueillir les doléances et les questions des citoyens sur le futur projet de loi ?
Actuellement les policiers bénéficient d'une bonification spéciale dite "du cinquième" ou "quinquennale", qui leur offre une annuité (quatre trimestres) de cotisation tous les cinq ans. Elle est plafonnée à cinq annuités et, pour y être éligible, le fonctionnaire doit avoir exercé 27 ans.

Les propos du ministre de l'Intérieur n'ont pas dissipé non plus les inquiétudes.


"Il y aura une modification de leur régime comme pour tous les Français, mais il y aura la prise en compte de la dangerosité de leur métier de policier", a affirmé Christophe Castaner mercredi sur France 2."Il faut faire la différence entre ceux qui sont dans un métier dangereux et l'ensemble des fonctionnaires du ministère de l'Intérieur qui ne sont pas confrontés aux mêmes réalités", a aussi déclaré le ministre. "Ca ne nous rassure pas", a réagi Yves Lefèbvre, secrétaire général d'Unité-Force Ouvrière, premier syndicat de la Police nationale en France avec 40,38 % des voix. "Il faut qu'il joue cartes sur table. Il doit vouloir ce que nous voulons : la défense du régime particulier des policiers".
Or, face à cette nouvelle fronde, le ministère de l'Intérieur oppose les efforts budgétaires depuis l'arrivée du duo Castaner/Nuñez en octobre 2018.

"La police souffre d'un abandon budgétaire depuis de très longues années", a raconté le ministre fêtard, mercredi devant le Sénat, n'hésitant pas à relancer la polémique sur les 13.500 suppressions de postes sous le quinquennat Sarkozy, il y a plus de sept années, et bien que Macron soit au pouvoir depuis bientôt deux ans et demi. 

Ces accusations de suppressions remontent à Bernard Cazeneuve qui, en tant que ministre socialiste de l’Intérieur, assurait fin juin 2016, puis fin septembre et de nouveau le 12 octobre que l’ancien chef de l’Etat était responsable d’une baisse de 13.000 postes dans les effectifs de police et de gendarmerie pendant son mandat. Sur Europe 1, interrogé sur un bilan de 10.000 postes supprimés (et non pas 13.000, détail de taille), le candidat à la primaire de la droite avait assuré qu’il s’agissait d’un "mensonge", considérant la période 2002-2012 et englobant son passage au ministère de l’Intérieur (quand les effectifs avaient bien augmenté de 7.000) et son mandat présidentiel, sans compter les 2.700 adjoints de sécurité créés dans la police.
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Mettant en avant la promesse des 10.000 créations chez les forces de l'ordre d'ici 2022, il a aussi souligné l'augmentation du budget de la Police depuis le début du quinquennat, d'un milliard d'euros, pour répondre à la crise sociale portée par les Gilets Jaunes.

Des discussions autour d'un Livre blanc sur la sécurité intérieure doivent être lancées mi-octobre, prélude à une loi d'orientation et de programmation prévue en 2020.

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